Rencontre avec Joe Black


Rencontre avec Joe Black
1998
Martin Brest

Conspué au moment de sa sortie, au point de recevoir le Razzie Award du pire remake (pour un obscur film des années 30), le film a également été un énorme échec financier, ne récoltant que la moitié de son budget colossal (85-90 M$, soit dans les 150 M$ actuels avec l’inflation) sur le sol américain. Un budget astronomique dû à un tournage aberrant de près de six mois, dont quasiment deux rien que pour les quelques scènes de la fête à la fin, pour une durée de métrage très conséquence de trois heures, de quoi en refroidir plus d’un. Pourtant, avec les années la vision sur le film a radicalement changé, au point de le hisser au rang d’œuvre culte et adoré par beaucoup.

Imaginez que la mort en personne frappe à votre porte. C’est exactement ce qu’il va arriver à William Parrish (Anthony Hopkins) à quelques jours de ses 65 ans, alors que justement sa vie est à un tournant entre la volonté du conseil d’administration de son entreprise de se faire englober par des investisseurs, et sa plus jeune fille Susan (Claire Forlani) qui a perdu fois en l’amour, prête à se ranger aux côtés d’un arriviste peu scrupuleux. La mort va bousculer plus d’une vie, puisqu’en plus d’apprendre à William que sa vie touche à sa fin et qu’il va bientôt l’emmener avec lui, il va choisir de prendre le corps de Joe Black (Brad Pitt), nom imaginé par William pour expliqué ce visiteur incongru, mais familier pour Susan, puisqu’il s’agit de l’homme pour lequel elle venait d’avoir un coup de foudre dans un café le matin même, sans se douter une seconde que ce dernier avait connu un destin tragique et abritait désormais l’esprit de la mort en personne.

L’idée du film est assez forte, avec la mort venant en personne, mais y ajouter un quiproquo sur son apparence, et des sentiments qui y sont liés, voilà qui épice les choses. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que juste ce postulat de départ marche très très fort : Brad Pitt est à son prime de beauté insolente, et son jeu mi enfant attardé qui n’a jamais prit le temps de vivre sur Terre, mi robot usé par les millions d’années de son existence, est aussi déroutant qu’efficace ; l’alchimie avec sa partenaire fonctionne très bien tant l’actrice est d’une beauté saisissante entre sa fragilité, son sourire ravageur, mais surtout son regard à se damner, et on comprend de fait que même une entité divine y perde la raison ; et enfin Anthony Hopkins est comme à son habitude un monument de classe et de charisme, et on sent toute la gravité d’aborder sa fin de vie, ce sentiment d’injustice face à une vie de travail acharné, qui ne connaîtra de repos que celui du cimetière.

Reste alors tous les à côté, car il faut bien remplir trois heures de film. On aura la fille aînée (Marcia Gay Harden), délaissée et qui essaiera de compenser par une implication plus forte, avec son bon à rien de mari, conscient de son statut de larbin, mais déjà tellement comblé de sa place inespérée et attendrissant de par sa simplicité dans un monde d’opulence indécente. Puis on suivra surtout toutes les mesquineries du bras droit, le petit jeune arriviste pour sa part dénué de gratitude et en voulant toujours plus, pendant plus classique de l’histoire, pour ne pas dire ennuyeuse, d’autant que sa résolution a de quoi laisser perplexe quant à sa crédibilité légale. Petit mot au passage sur l’habitude des personnages de s’embrasser sur la bouche, même au sein d’une même famille, ce qui a de quoi choquer voir rebuter. Si globalement pour un film aussi long, le temps passe assez vite, il faut bien reconnaître que certaines scènes semblent trop longues, comme celle dans le lit ou la danse avec une déduction sortie de nulle part, bien pratique pour lier la fin. Et en parlant de la fin, sans rien en révéler, j’avais peur de certaines facilités ou clichés, mais plus encore de déception, et la conclusion reste assez satisfaisante. Ouf. Sans être une révolution ou un chef d’œuvre, le film est néanmoins très réussi, avec une idée forte et originale, ce qui est déjà énorme.

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