The Boys – Saison 1


The Boys – Saison 1
2019
Eric Kripke

Si Amazon ne pèse globalement pas bien lourd face à Netflix et que nombre d’abonnements le sont avant tout pour la livraison gratuite, rapide et l’accès aux offres spéciales, ou encore de par sa présence dans les offres de nombreux fournisseurs d’accès comme Free, s’il y a bien une création originale que tout le monde connaît, au moins de nom, c’est bien celle-ci. Si la poule aux œufs d’or n’est pas prête de s’arrêter avec déjà un premier spin-off, Gen V, et un second au Mexique prévu pour 2025, la série initiale s’approche en revanche de sa fin puisque la cinquième, qui pourrait sortir fin 2025 ou 2026, sera la dernière. Et comme à mon habitude, j’aime attendre qu’une fin soit établie avant de me lancer dans l’aventure, de peur que soit le projet ne connaisse jamais de fin faute de succès, ou qu’au contraire le tout s’éternise au point qu’on soit obligé de tout se revoir à un moment donné faute de pouvoir se rappeler du début au moment de la fin.

Des années avant que le terme de « super-héros fatigue » ne soit une réalité, la série avait déjà senti non seulement le besoin de renouveler la formule, mais également de la détourner, et pas qu’à moitié. La série se déroule dans un univers où les supers pouvoirs ne sont pas uniquement une réalité, mais aussi célébrer par tous, notamment aux Etats-Unis où une élite rayonne à travers le monde : les Sept. D’un côté, on suivra Annie (Erin Moriarty), fraîchement honorée d’intégrer cette élite en tant que Starlight, loin de se douter que non seulement elle ne sauverait personne à n’être qu’apparat et marchandising, mais qu’en plus ses collègues sont tous des tarés cyniques et pervers, pour ne pas dire bien plus grave / dangereux. De l’autre, on suivra Hughie (Jack Quaid), qui va justement faire les frais de ces soi-disant modèles de vertu quand l’un des Sept, A-Train (Jessie T. Usher) va justement par « inadvertance » exploser sa petite amie. Il va alors entrer en contact avec le Butcher (Karl Urban), un homme qui a décidé de vouer sa vie à exposer la supercherie des superhéros, de les traquer, les démasquer, et si possible les tuer.

Cette première saison est une claque assez colossale : à contre-pied total de la déification habituelle des superhéros, on les montre ici comme des salops ayant perdu toute notion des réalités, une version exacerbée des ultras riches ne se sentant plus pisser, profitant abondamment et abusivement de leurs positions, avec à chaque fois tellement de nuances que c’en est fascinant. On a d’un côté des connards comme A-Train, le sportif tellement effrayé de ne plus être le plus rapide du monde qu’il ne reculera devant aucun méfait pour rester au sommet, tel un Icare fonçant à pleine allure vers le soleil ; l’homme poisson (Chace Crawford) qui imagine un peu trop le monde a ses pieds et qui va continuellement se manger des retours de bâton très jouissifs (le running des sauvetages est excellent) ; et bien sûr le fameux Homelander (Antony Starr), chef des Sept, censé incarner une sorte de Superman à la vertu absolue, mais qui est en fait de loin le plus gros psychopathe. Côté femmes héroïques, outre Annie qui va tomber de haut en confrontant son rêve de célébrité sauveuse de l’humanité à la réalité purement mercantile, on aura aussi une sorte de Wonder Woman, Queen Maeve (Dominique McElligott), dans le game depuis trop longtemps pour avoir encore la force de lutter contre le système. Un tableau de personnages hauts en couleurs, truculents et clairement intéressants à suivre, auquel s’ajouteront La Crème « Mother Milk » (Laz Alonso) et le French (Tomer Capon) dont la rivalité est amusante, et la rescapée Kimiko (Karen Fukuhara), aussi effrayante que touchante. Cette première saison sera aussi l’occasion de croiser quelques personnages atypiques, comme la machiavélique Madelyn (Elisabeth Shue), n’hésitant pas à jouer à un jeu malsain mère / amante avec Homelander, Giancarlo Esposito en dirigeant de l’ombre, ou encore Haley Joel Osment génial en autodérision totale dans un rôle d’enfant star devenu le pire des loosers.

Globalement l’histoire est très prenante entre tous les personnages très bien traités, les complots politiques / commerciaux, et surtout ce parti-pris de faire des superhéros les pires ordures possibles, avec bien sûr quelques nuances voir arcs de rédemption possibles, car c’est dans la nuance que la pertinence est la plus probante. La quasi intégralité du casting étant des acteurs peu connus (hormis le Butcher), leur découverte n’en est que plus rafraîchissante, et ils s’en sortent de manière spectaculaire. Mention spéciale au terrifiant Homelander dont l’hypocrisie est formidable, capable de jouer une émotion totalement opposée à son ressenti l’air de rien, et dont les soubresauts dans le regard accentuent son instabilité mentale. La narration est aussi d’une immense richesse, car en plus de la trame principale d’exposer l’immense imposture des Sept, tous les personnages ont leurs propres histoires et enjeux capitaux et captivants, et de nouvelles intrigues de fond se dévoilent au fur et à mesure, rendant l’univers vraiment très riche. Côté violence physique et psychologique ça reste gentillet, rien de rédhibitoire à moins d’être vraiment d’une grande sensibilité. Niveau effets spéciaux, la série se donne clairement les moyens, comptant plus d’une scène épique et ambitieuse, et il n’y a définitivement aucun point sur lequel la série va être en défaut, si ce n’est quelques rebondissements prévisibles. De toute évidence, le public a eu raison de faire preuve d’un tel engouement.

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