Le Garçon au pyjama rayé
2008
Mark Herman
Quelques mois après avoir conspué le pédant et ennuyeux La Zone d’intérêt, voici un film qui reprend pour ainsi dire les mêmes prémices, à savoir le quotidien d’une famille militaire habitant à côté d’un camp durant la Seconde Guerre Mondiale, mais dans une version qui donnerait des sueurs froides à Hannah Arendt : et si les nazis étaient à la base des êtres humains ?
On suivra ainsi un colonel SS (David Thewlis) qui va se voir confier la charge d’un camp, et sa famille (la femme étant jouée par Vera Farmiga et le fils par Asa Butterfield) va l’y suivre sans se douter de ce qui se passe derrière les murs de leur nouvelle maison. Leur jeune fils va découvrir fasciné de drôles de fermiers, et notamment un jeune garçon de son âge, portant tous de singuliers pyjamas rayés.
La construction du film est une grande réussite. Si bien sûr la subtilité n’est pas toujours au rendez-vous et que des personnages réprobateurs vont immédiatement intervenir pour nuancer le propos, sur le fond le film est une sorte de La Gloire de mon père, mais se passant sous le Troisième Reich. On sent vraiment l’amour d’un fils pour son père, et son regard naïf et ignare sur le monde apporte une vraie fraîcheur sur ce sujet bien trop présent dans le paysage cinématographique. Sur le fond, ça reste une histoire d’amitié interdite et la grande histoire plane au dessus de tout, et la réalité historique est sujette à débat, mais au moins on évite le vulgaire bête poncif haineux. Bien sûr, il y a cette fin d’une radicalité folle, dont beaucoup ne s’en sont jamais remis, mais la réflexion derrière est intéressante : on paye toujours pour les erreurs des générations passées. On pourrait même dire qu’il n’y a pas de coupables, que des victimes. Victimes de la guerre, de la propagande, de la pression sociale et professionnelle. Peut-on parler de choix face à une morale imposée et interdite de remise en question ? S’il n’y avait pas tant de provocation gratuite et cette réalisation plus proche d’un téléfilm que d’une production ambitieuse, on pourrait même parler de grand film.