Flow
2024
Gints Zilbalodis
Co production franco / belge / lettone, le film a su se bâtir une sacrée réputation au fil des semaines, au point d’attirer l’œil des critiques du monde entier, glaner des nominations de partout, et notamment repartir avec carrément le Golden Globes du meilleur film d’animation, et il fera probablement le grand chelem jusqu’aux Oscars. Le plus fou dans tout ça c’est que le film a été fait sous le logiciel gratuit blender, et qu’on parle d’une œuvre expérimentale muette.
Dans un monde postapocalyptique où l’humanité a disparu, la nature a repris ses droits et les animaux tentent tant bien que mal de retrouver leur place, y compris ceux qu’on qualifiait autrefois de domestiques. On y suivra un chat tentant de faire face à une terrible montée des eaux, engloutissant les derniers restes des vestiges humains.
Qu’il est difficile de décrire pareille expérience. Tous les sentiments se mélangent d’emblée, entre stupeur, ravissement et inquiétudes. Ce qui frappe de prime à bord, c’est cette patine visuelle, mi réalisme mi désuète, comme si une couche de peinture recouvrait un vieux film tourné en pellicule, rendant les environnements absolument superbes, une esthétique qui rappellera pour beaucoup les prouesses poétiques d’un Last Guardian. Les effets de profondeur sont saisissants, les textures comme enrobées dans une vive lumière crépusculaire. Malheureusement, cette claque visuelle est à relativiser de part la laideur folle de certains animaux, aux animations primaires, l’absence de projections d’eau (une sacrée tare vu qu’on suit une épopée maritime), et au rendu souvent immonde de simplicité, comme le chien notamment. Et pourtant, en face le héron déborde de détails ahurissants, créant un écart de traitement injustifiable. De la grandeur, parfois au delà de tout ce qui n’a jamais été fait, mais pas de chaque instant.
Côté histoire, c’est là la preuve que les mots sont parfois de trop, car en faisant le choix du muet, le film nous parle droit au cœur. Le travail de comportementalisme animal est juste sidérant, rendant cet univers d’une justesse inouïe avec cette famille recomposée d’une tendresse folle. Bref, c’est beau, c’est touchant, d’une poésie magnifique, au style unique et percutant. L’expérience vaut clairement le détour.