En voilà un voyage pour le moins attendu. Il y a neuf ans sortait le dernier volet de la trilogie du Seigneur des Anneaux, qui avait marqué son monde entre ses critiques flatteuses et ses 2,9 milliards de dollars dans le monde. L’univers de J.R.R. Tolkien est vaste et c’est tout naturellement que l’idée d’adapter Le Hobbit est apparue, et ce dès la sortie du Retour du roi. Un projet bien ancré même puisque Sam Raimi devait le sortir à l’horizon 2006, avant de finalement jeter l’éponge face à l’ampleur de la tâche. Longtemps resté en stand-by, le projet tomba ensuite entre les mains en 2008 de Guillermo del Toro, particulièrement excité à l’idée de recréer pour de vrai le dragon du film. Mais entre les problèmes financiers de la MGM et la folie des grandeurs de son réalisateur, la production du film fut stoppée deux années durant, avant de trouver son repreneur définitif en la personne de Peter Jackson, déjà aux commandes de la trilogie originale. Un développement donc laborieux, et qui faisait déjà polémique avant même sa sortie à cause du choix d’en faire une nouvelle trilogie. En effet, le support d’origine passe de 1000 pages à tout juste 300, d’autant que Le Hobbit est avant tout un conte pour enfant. Et quand on se rappelle les longueurs des précédents films, certains y craignaient l’ennui.
Première partie du prologue au Seigneur des Anneaux, le film nous propose donc de revivre cette aventure qu’a vécu Bilbon (Martin Freeman) et qui le mènera à sa fameuse rencontre avec Gollum (Andy Serkis). Le film prend place 60 ans auparavant, alors que Bilbon profitait tranquillement du calme et de la sérénité de la Contée, et qu’il s’est vu dérangé par Gandalf (Ian McKellen). Sans crier gare, le voilà festoyant chez lui avec 13 de ses amis nains, dont le prince Thorïn (Richard Armitage). Désespérés, il ont passé des décennies privés de royaume par le dragon Smaug, désormais domicilié chez eux, et demandent de l’aide à la personne la moins à même de leur en fournir : un Hobbit. Mais les oiseaux s’en retournent au royaume, et l’existence d’une entrée secrète leur redonne espoir. Armé de son seul courage, Bilbon les accompagnera pour l’aventure de sa vie.
Mes yeux me jouent-ils un tour ? Mais que se passe t-il ? Tourné avec la caméra Epic, permettant de passer de 24 à 48 images par secondes, le film est donc diffusé en HFR (High Frame Rate) pour « plus de réalisme ». Mais est-ce qu’ils le testent au moins avant la projection ? Non parce que là c’est une infamie : vidéo en accélérée, mouvements abrupts et doublage pas raccord. Si dans les scènes d’action le problème n’est pas flagrant, la plupart des scènes sont bizarrement rapides, dégueulassant carrément la réalisation. Tout bonnement indigne et incompréhensible, et on en ressort avec un sacré mal de crâne. C’est d’autant plus stupide que le film est très bon. Si certains appréhendaient la valeur de son contenu, qu’ils se rassurent : si le film n’est pas exempt de temps morts et autres scènes un peu trop longues, son rythme n’est pas moins bon que ses prédécesseurs, et son histoire n’est pas moins solide. Pour mieux coller au public adulte et étoffer le contenu, les scénaristes ont notamment incorporé le chef des orcs, personnage simplement évoqué. Ces derniers sont d’ailleurs beaucoup plus réussis graphiquement grâce à l’évolution de la technique et au rehaussement de budget, qui passe de 94 à 270M$, et permet au passage une 3D propre et pas trop encombrante. Côté acteurs, cette nouvelle cuvée est excellente puisque les deux principaux nouveaux Martin Freeman et Richard Armitage sont des révélations : deux exemples de charisme. À noter aussi les retours clin d’œil de Elijah Wood, Cate Blanchett, Ian Holm, Christopher Lee ou encore Hugo Weaving. Toute aussi intéressante et en très bonne compagnie, cette histoire arrive à se hisser au niveau de son modèle et nous rappelant à la douce féerie de la terre du milieu. Par contre, le problème de vitesse d’image doit être réglé au plus vite pour ne pas être reproduit dans ses deux prochaines suites, malheureusement elles-aussi tournées en HFR…