Arès
2016
Jean-Patrick Benes
On se plaint tout le temps en France du manque ahurissant de diversité de nos salles de cinéma, mais c’est pourtant les choix des spectateurs qui contribuent à ce déplorable constat. Quand on voit de piètres comédies rameuter des millions de personnes quand de plus ambitieux projets se rétament méchamment, c’est tout simplement désespérant, et en voici l’un des exemples les plus flagrants.
Le film nous plonge dans un futur proche où une succession de crises et de gouvernements inefficaces sont peu à peu venu à bout de la France. Le chômage avoisine les 30%, les trois quarts de la population vit sous le seuil de pauvreté, l’état a fait faillite et les superpuissances économiques (agences bancaires et multinationales) ont racheté la pays, se pliant désormais à leur seule volonté. Le peuple agonise et est au bord de l’insurrection, mais de son côté Arès, boxeur professionnel, tente simplement de survivre en jouant avec le système, servant de cobaye pour une agence de médicaments souhaitant tester sa nouvelle drogue de combat (chose devenue légale dans cette projection futuriste).
Si bien sûr le film n’est pas parfait et a des allures de série B américaine sortant directement dans les bacs, on tient là un film d’anticipation intéressant qui fait preuve d’une originalité et d’une profondeur extrêmement rares en France. On voit là un Paris futuriste non sans rappeler les cités dangereuses de l’excellent Dredd où l’urbanisme rime avec insalubrité et surpopulation, la ville est poussiéreuse et l’atmosphère révolutionnaire se fait pesante. Le film revendique des influences telles que Les Fils de l’homme, et effectivement on retrouve ce genre d’ambiance angoissante et sale, ce qui marche plutôt bien et est raccord avec le climat de tension dépeint. Découvrir ce futur sous l’angle d’une personne non-impliquée est aussi très intéressant puisque visiblement certains arrivent à accepter la situation et même en profiter. Mieux encore, le film possède une histoire véritablement prenante avec une évolution psychologique des personnages certes prévisible mais non moins bien amenée, et même la réalisation arrive à nous embarquer en faisant écho à des pattes visuelles d’antan comme Blade Runner. Le film est très court et condense parfaitement son propos, nous faisant d’autant plus regretter les quelques imperfections. Si visuellement le manque de budget ne se ressent pas trop, on le paye au niveau des acteurs, pour la plupart assez mauvais. Il est vrai que le thème en rebutera certains (enfin surtout certaines), mais il est important de soutenir ce genre d’initiatives chez nous tant ça fait du bien de voir enfin un style différent, surtout quand l’œuvre en question est aussi aboutie.