La Fille de Brest

La Fille de Brest
2016
Emmanuelle Bercot

Dans la vie il y a des métiers biens moisis, pas forcément en terme de travail ou de rémunération mais en terme d’impact social et d’image que cela renvoie. Etant donné que les grands groupes pharmaceutiques ont un monopole total en matière de distribution et fixation des prix, mais aussi et surtout avec régulièrement des scandales de produits hautement dangereux délivrés sans véritable contrôle, dire que l’on est huissier ou trafiquant de drogue est plus valorisant que dire que l’on travaille à l’élaboration des médicaments de Sanofi par exemple. Derrière ce titre breton complètement osef se cache en réalité une affaire qui fut beaucoup médiatisée ces dernières années : le Mediator.

Mit sur le marché en 1976 par l’agence Servier, le Mediator fut prescrit à plus de trois cent mille personnes, d’abord pour lutter contre le diabète puis dans un second temps pour pallier à l’absence de satiété chez certaines personnes en situation d’obésité morbide. Bien que cela faisait dix ans que certaines personnes avaient soulevé des questions à propos du médicament, en 2007 une pneumologue de Brest, Irène Frachon (Sidse Babett Knudsen), s’est rendue compte d’une déformation d’une valve du cœur chez une patiente sous traitement du Mediator. Avec l’aide d’un collègue (Benoît Magimel) chercheur dans le domaine, elle va tenter de prouver l’implication du médicament dans les problèmes cardiaques de certains patients.

Oh mon dieu, « le scandale du Mediator » ! Sachant que le médicament était beaucoup prescrit à des personnes en situation d’obésité extrême, avec probablement une espérance de vie ridicule et forcément déjà des problèmes cardiaques à la base, on s’attendait forcément à une hécatombe. Plusieurs centaines de milliers de personnes en l’espace de trois décennies, on pouvait s’attendre à un chiffre qui en impose, mais impossible de dissimuler un rire tonitruant face à une vérité aussi risible : 500 morts. Mais quel médicament miracle ! C’est prodigieux un score aussi faible vu le public visé, et la vraie question du livre sur lequel se base le film (Mediator, combien de morts ?) devrait être « combien de vies sauvées ? ». Plus encore, en terme de coupe-faim et de médicament contre le diabète, y avait-il un vrai médicament palliatif ? Sans quoi d’autres questions nous viendraient suite au retrait du médicament : le retrait du Mediator, combien de morts ?

Pour replacer un peu les choses dans leur contexte, les accidents domestiques représentent 20 000 morts par ans, soit près de 600 000 morts sur la même durée qu’il a fallut au Mediator pour « tuer » quelques 500 patients qui ne partaient déjà pas gagnants. Et même si on élague un peu sur la vague notion d’accident domestique, il y a eu – toujours sur le même laps de temps – plus de trente mille personnes mortes noyées dans leur bain, soit soixante fois plus ! Alors quand un film entier est basé sur un pseudo scandale absolument ridicule et qu’on en fait des caisses, difficile de partager l’engouement pour la justice de la pseudo héroïne. D’ailleurs, sa nominations aux Césars fut une sacrée blague tant la pauvre actrice danoise est médiocre dans ce rôle de mégère psychopathe et narcissique, battant tous les records en matière de sur-jeu et cabotinage. Diantre que ça fait peine à voir… Bref, une histoire qui veut se donner des airs de drame national alors c’est un non-événement absolu, et le personnage principal est totalement insupportable de par l’interprétation catastrophique qui nous est imposée. À l’image des patients gravement atteints par la maladie incapables de bouger, on contemple le film telle une baleine échouée qui gesticule péniblement dans un dernier souffle d’agonie.

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