Jusqu’à la Garde

Jusqu’à la Garde
2018
Xavier Legrand

La dernière cérémonie des Césars a récompensé à quatre reprise ce film, et pas dans les moindres catégories : meilleur film, meilleur scénario, meilleure actrice et meilleur montage. Cela me rappelle que je n’ai toujours pas vu le gagnant de l’an dernier, la faute à un thème qui ne me concerne pas, voir qui me dérange. Mais quand je me remémore les autres gagnants des deux dernières décennies, sur les vingt films très peu m’auront vraiment marqué, et je n’en ai apprécié qu’une poignée. C’est dire à quel point je ne crois plus beaucoup en cette cérémonie.

En France, près de trois femmes par semaine meurent de violences conjugales. À quand un film sur les baignoires qui tuent une centaine de gens chaque jour ? Soit-disant victime de violences, Miriam (Léa Drucker) avait kidnappé ses enfants et refusait jusqu’alors que le père (Denis Ménochet) ne les approche, mais avec un tel comportement le verdict ne pouvait qu’aller en faveur du père, qui obtiendra donc ses droits habituels (un week-end sur deux, moitié des vacances scolaires). Ce dernier, prêt à tous les sacrifices pour la chair de sa chair, va quitter son travail et ses amis pour s’installer là où sa famille est partie, à 500 km de son ancien foyer. Ayant enfin obtenu gain de cause au niveau de la justice, il pensait pouvoir enfin reprendre le cours de sa vie, mais c’était sans compter sur son ex femme, multipliant les coups en douce et ayant réussi à liguer ses enfants contre lui.

N’y allons pas par quatre chemins : ce film est raté. Son but est d’alerter sur la violence conjugale, mais le film n’en montre jamais. Au contraire, à la place on a une espèce de folle qui semble vouloir faire du mal à son ex mari pour des raisons qui échappent totalement au spectateur. Elle parle sans cesse de sa violence, de sa méchanceté, mais le film nous montre sa dévotion, son besoin d’amour, constamment mis à mal par cette mégère qui le pousse sans cesse à bout. On est typiquement dans le cas d’une personne qui demande à une personne calme de se calmer : du pur foutage de gueule qui pousse justement quelqu’un de calme à devenir violent. Le film en viendrait presque à légitimer la violence conjugale quand on voit tant d’injustice et de méchanceté gratuite, et c’est là son plus gros problème. Pour rendre son propos cohérent, il aurait fallut montrer cette dite violence conjugale, puisque même la notion de « conjugale » n’a pas lieu d’être dans la mesure où la séparation a déjà eu lieu. Ou alors il aurait fallut faire de la mère un personnage droit, et non une vile manipulatrice passant son temps à mentir. Elle en devient à force la créatrice d’un monstre dédaigneux et horripilant, son fils. De même, si le père était effectivement violent, il aurait fallut le montrer énervé sans raison, et pas exclusivement quand le monde s’acharne à le rendre malheureux. Un mot aussi sur le scénario passablement mauvais, au développement si prévisible et aux histoires laissées en plan, comme celle de la fille. La réalisation est elle aussi fade, mais pire reste sans nulle doute la fin : un modèle d’arrogance. Une porte qui se referme pour tourner la page, un générique qui défile sans un son, toute une symbolique. De la pure esbroufe qui ne fera ni oublier les faiblesses d’écriture avec les histoires laissées en plan, ni le problème viscéral de la thématique mise à mal par un propos contradictoire. En somme, le film n’a rien de novateur et se montre assez ennuyeux, tout en ratant complètement message. Lamentable.

Disponible en vidéo complémentaire : https://youtu.be/njiXzQ0HHRc

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