Your Name

Your Name
2016
Makoto Shinkai

Avec pratiquement 360 millions de dollars dans le monde, le film est tout simplement le plus gros succès de tous les temps pour un film issu de l’animation japonaise, surclassant même à domicile la plupart des films du studio Ghibli avec près de 25 millions d’entrées. Marché qu’on ne savait pas amateur de ce genre de film, c’est aussi en Chine que le film a fait la différence, se plaçant parmi les plus gros succès tout animation confondu avec pas loin de vingt millions d’entrées. Alors pourquoi avoir mit pratiquement trois ans à regarder ce film ? Eh bien qui dit japon dit dépression, pays où le taux de suicide est l’un des plus élevés au monde entre les hommes plus petits que la moyenne, avec une capacité musculaire réduite et une pilosité en berne, donc peu virils, et des femmes aux formes plus timides que dans le reste du monde. Bref, des complexés de la vie dans un pays où la pression sociale est sans pareille et où le pouvoir d’achat est en chute libre depuis plusieurs décennies, et ça se ressent dans leur cinéma, souvent pas très joyeux. Généralement j’en ressort profondément déprimé en me disant « oui c’était beau, mais diantre que c’est déprimant », et bizarrement je ne suis pas fan de ce genre d’émotion.

L’adolescence est une période difficile dans la vie de tout un chacun : on doit se forger sa propre identité dans un cadre où il ne faut pas sortir du moule, un moment brutal où l’on aurait le plus besoin de réconfort mais où l’on a le moins confiance en soi, rendant pratiquement impossible toute romance, et on doit en plus faire face à la pression imminente de l’entrée dans la vie active pour laquelle il faut se battre le plus tôt possible. C’est dans cette période des plus compliquées qu’un phénomène étrange va venir tout bousculer. Mitsuha, lycéenne à la campagne, et Taki, lycéen de Tokyo, vont se réveiller un beau jour dans le corps de l’autre. De temps en temps, ils vont aléatoirement se réveiller à la place de l’autre, découvrant pour elle la ville qu’elle a toujours rêver de voir, et pour lui la beauté de la nature et des anciennes traditions. Deux êtres reliés par le destin.

Que c’est rageant de voir un film passer aussi près du chef d’œuvre ! L’idée de deux personnes qui échangent de corps n’a rien de novateur, si ce n’est que le phénomène est ici aléatoire et non permanent, mais l’exécution est excellente. Mise à part le fait qu’il faut vraiment être débile pour ne pas immédiatement se rendre compte qu’il ne s’agit pas d’un rêve, le traitement est plutôt cohérent, et le choix des personnages est parfait. Un garçon de la ville et une fille de la campagne, il ne pouvait pas mieux tomber pour découvrir une vie singulièrement différente, et vu que le côté mystique repose en grande partie sur l’histoire se déroulant à la campagne, on se réjoui de voir une plus grande partie s’axer autour d’elle. Bien sûr, on pourrait toujours dire que les deux échangeurs arrivent trop facilement à faire illusion et que j’aurais personnellement essayé de m’appeler moi-même dès que la possibilité de s’échanger des informations via téléphone se serait présentée, mais globalement jusqu’à la quête avec le verre de saké, le film est quasi parfait. L’animation est magnifique, les décors somptueux, la lumière incroyable. Bref, c’est au niveau des meilleurs Ghibli, l’un des films d’animation les plus beaux qui soit. Vient alors la dernière demi-heure, passablement ratée, jouant avec nos nerfs et nous faisant constamment rager entre une mémoire volatile absurde et un bond temporel à saigner des gencives à force de serrer des dents. Il y avait deux finalités possibles à partir de l’excellent retournement de situation au milieu du film : soit nous faire pleurer en ne changeant strictement rien, soit réussir à faire quelque chose et changer le destin. Le film choisi effectivement de changer le destin, mais en perdant un temps aberrant, saccageant la mémoire et tout ce qui faisait la poésie du récit. Comme pour dire que rien n’est parfait, le film sali sa propre fin et nous refuse la beauté de l’instant. Et sinon, elle va bien la petite sœur dans Le Tombeau des Lucioles ? Psychiatre à Tokyo, il y a de quoi faire fortune…

Ce contenu a été publié dans Cinéma, Critiques. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *