LOST

Lost
2004-2010
Jeffrey Lieber, J. J. Abrams & Damon Lindelof

Démarrée le 22 septembre 2004, Lost est devenue quasi instantanément une série culte qui continue de faire parler d’elle pratiquement une décennie après sa fin. Dans une ère de l’immédiat et du consumérisme exacerbé, c’est une performance qu’on se doit de saluer. Si à partir de la saison 4 les audiences n’ont cesser de baisser, au point de passer de 24 millions de spectateurs au lancement de la seconde saison, à quelques épisodes en dessous de la barre des dix aux Etats-Unis, la série n’en reste pas moins un tout, avec ses hauts et ses bas, et le chemin parcouru est juste incroyable. Il fallait donc y revenir, pour retrouver ces personnages qu’on a tant aimé, cette île qui nous a tant fait théoriser, cette fin qui m’a tant bouleversé. Parce que cette série nous a tous marqué à jamais, il était temps de lui crier tout mon amour.

Pilote de série le plus cher de l’histoire à sa sortie avec vingt millions de dollars pour le double épisode de présentation, la série était un gros pari puisque ayant composé son casting d’inconnus à l’époque, la plupart n’ayant eu que de petits rôles à la télévision ou au cinéma avant la série, qui a permis de faire décoller quelques carrières, mais pas assez vu les prestations incroyables de certains. Le concept même de la série était certes difficile à vendre : un vol s’écrase sur une île « déserte », et on y suit les rescapés du fameux vol Ocanic 815 reliant Sydney à Los Angeles. C’était donc un double pari : rendre une île suffisamment mystérieuse pour qu’on veuille en percer les mystères, et créer des personnages suffisamment bien écrit pour que chacune de leurs histoires nous emporte. Si chacun aura son préféré (quoique j’ai dû mal à concevoir que ça puisse être quelqu’un d’autre que Desmond), il faut bien dire que c’est une franche réussite. Pour nous conter cette aventure sur l’île, en dehors du double pilote et des trois derniers épisodes centrés sur le crash et les quelques instants avant, la série se construit sur une double narration, celle du récit au présent, et les flashbacks sur la vie avant crash de chacun.

Ainsi, les deux personnages les plus mis en avant de la saison 1 sont Kate Austin (Evangeline Lilly), dont on suivra la fugue durant les épisodes 3, 12 et 22 ; et Jack Shephard (Matthew Fox), le docteur/héros qui prendra vite la tête des rescapés et dont la quête initiatique sera mise en parallèle avec son passé de chirurgien durant les épisodes 5, 11 et 20. Personnage ambiguë et mystérieux dont la paralysie s’est envolée une fois sur l’île, John Locke (Terry O’Quinn) fera parti des piliers de la série, cherchant inlassablement le but de toute chose et voulant percer chaque mystère de la vie. Une force de conviction qui tranche radicalement avec la violence de sa vie, dépeinte lors des épisodes 4 et 19. Viennent ensuite Sun (Yunjin Kim) et Jin Kwon (Daniel Dae Kim), le couple sud-coréen, quelque peu en froid à cause du travail de Jin, obligé de travailler comme truand pour le mafieux de père de sa femme, condition sinéquanone à leur mariage. En retrait dû à la barrière de la langue, même si Sun parle anglais (mais comme son mari ne le sais pas, elle le cache), il faudra attendre les épisodes 6 et 17 pour apprendre à un peu les connaître et comprendre le contexte. Rock-star has-been et junkie, Charlie Pace (Dominic Monaghan) fait aussi parti des éléments centraux de l’histoire, mis en avant lors des épisodes 7 et 15, bien que constamment mit sur la touche et dont l’histoire avec Claire (Emilie de Ravin) n’aura de cesse que de vaciller, au point de rester à jamais un amour non consommé. Cette dernière, dont la grossesse servira à faire monter la pression autour des mystères de l’île et son supposé statut désertique, nous montrera les éléments troublant qui l’auront conduit à ce vol lors du dixième épisode. Bad guy beau et ténébreux au lourd passif, James ‘Sawyer’ Ford (Josh Holloway) nous montrera à son tour son passé loin d’être joyeux, d’orphelin traumatisé à arnaqueur marchant sur les pas de son Némésis, et ce lors des épisodes 8 et 16. Personnage tout aussi torturé, Sayid Jarrah (Naveen Andrews) dévoilera son histoire d’interrogateur dans la garde républicaine irakienne durant le 9° et 22° épisode de cette première saison. Personnage plus tertiaire, Boone Carlyle (Ian Somerhalder), aura pourtant le droit à un épisode centré sur lui, le numéro 13, un chiffre qui ne lui portera pas bonheur comme le prouvera l’épisode 20. Outre son histoire avec sa sœur adoptive (re-mariage) Shannon (Maggie Grace), il sera surtout le valet de Locke, le suivant dans sa quête des mystères de l’île. Avant-dernier personnage important de cette première saison, Michael Dawson (Harold Perrineau) est probablement l’un des moins intéressants, n’étant là que pour s’embrouiller avec tout le monde à cause de son sentiment perpétuel de persécution et d’abandon, vaguement expliqué lors de l’épisode 14. Vient alors enfin Hugo ‘Hurley’ Reyes (Jorge Garcia), qui nous fera languir jusqu’à l’épisode 18 avant de nous raconter son gain substantiel au loto et sa rencontre avec la fameuse suite de nombre 4 8 15 16 23 42.

Sorte de mise en bouche, la saison 1 est surtout là pour poser les bases de la série et ouvrir de nombreuses portes à développer par la suite. Avec pratiquement 50 passagers et une dizaine de personnages vraiment développés, il faut nous laisser le temps de nous habituer à chacun et de créer une certaine affecte avant de potentiellement commencer à les confronter à un quelconque danger, qui n’arrive donc qu’après une dizaine d’épisodes. Le principe des flashbacks est d’autant plus intéressant qu’il s’agit là aussi d’une des fameuses « boîtes » du créateur J.J. Abrams, dont le principe est de développer l’univers tout en amenant encore plus d’interrogations. Par exemple, on n’apprendra comment Locke s’est brisé le dos qu’en milieu de saison 3 ! Ainsi, on en apprend plus sur les personnages tout en apprenant à chaque fois qu’il y’a tellement plus à découvrir, donnant envie de voir la suite, d’autant qu’en plus des histoire de chacun, il y a cette fameuse île. Découverte dès l’épisode 11, la trappe ne sera ouverte qu’à la toute fin de la saison, soit l’épisode 25, faisant languir le spectateur une année entière pour découvrir le fameux compte à rebours et l’homme le plus classe du monde. Entre les histoires en suspens et les mystères grandissants, la première saison est donc une parfaite réussite, développant des personnages charismatiques et intéressants, plongés dans une plus grande histoire qui a tant à nous dire. La diversité de lieux (la plage, la grotte, la jungle, le bunker), de personnages et la double narration mettant en parallèle le présent et le passé de chacun est brillant, reste le rythme un peu mou et des personnages en deçà ou sous-exploités (Hurley, Charlie et Sawyer vraiment trop en retrait).

Saison 1 :

La saison 2 démarre sur les chapeaux de roues : alors que l’ouverture de la trappe venait d’exploser, le radeau envoyé chercher du secours, avec Jin, Sawyer, Michael et son fils, avait rencontré « les autres », kidnappant le gosse et laissant les autres pour morts à dériver sur des morceaux de bois pulvérisés à coup de grenade. La tension était à son comble et l’ouverture ne déçoit pas, montrant non seulement que la trappe était habitée par le futur mythique Desmond (Henry Ian Cusick), mais qu’en plus les passagers de la queue manquante de l’avion Oceanic 815 avaient survécu ! Vu leurs importances ça n’était pas une surprise, mais les membres du radeau ont eux aussi survécu et vont échouer sur l’autre côté de l’île, là où s’était crashé l’autre partie de leur avion. Pendant que Jack, Locke, Hurley et Kate vont découvrir la trappe et le fameux bouton à presser toutes les 108 minutes en entrant le code 4 8 15 16 23 42, sans quoi cela provoquerait la fin du monde, on suivra donc en parallèle la poignée de survivants de l’autre moitié (Libby, qui sera la love interest de Hugo, Ana-Lucia (Michelle Rodriguez), une ex flic, Mr Eko (Adewale Akinnuoye-Agbaje), un religieux anciennement dealer, Bernard, le mari de Rose de l’autre côte de l’île, et l’hôtesse de l’air), décidant de rejoindre l’autre côté de l’île, moins austère. Deux arcs qu’on avait hâte de voir se recouper, mais la série fera là aussi preuve d’une lenteur certaine, prenant pas moins de huit épisodes.

Mettant plus de temps à démarrer étrangement, cette seconde saison est néanmoins particulièrement riche en histoire, introduisant les stations Dharma et les « autres », et si sur les cinq rescapés de la queue (arrivée retracé dans le septième épisode) trois vont plus ou moins quitter la série, ce qui sera un sacré soulagement pour Ana-Lucia, le personnage de Mr Eko sera une excellente surprise, se positionnant comme le pendant religieux de John Locke. Vu brièvement dans les premiers épisodes, il faudra attendre le double épisode final de la saison pour que Desmond commence à nous éblouir, surtout dans l’épisode 24, le précédent nous racontant sa mésaventure sur l’île qu’on s’imaginait déjà bien. La répartition des flashbacks par personnages est ici plus équilibrée avec deux épisodes consacrés à Jack (1 et 11), pareil pour Locke (3 et 17), Hurley (4 et 18), Sun et Jin (5 et 16), Ana-Lucia (8 et 20) et Mr Eko (10 et 21). Lourde chute donc pour Kate, qui passe de trois à un seul flashback (épisode 9) ; Sawyer, Sayid et Charlie sont aussi en retrait avec un épisode chacun (13, 14 et 12 respectivement) ; tandis que Michael stagne à un épisode (2). Reste deux anciens qu’on présente enfin : Shannon (épisode 6, qui scellera son destin), ainsi que Rose – et Bernard du coup – pour un épisode 19 étonnamment intéressant. Les épisodes 15 et 22 sur des événements passés sur l’île pour Claire et Michael ne comptant pas vraiment. Reste un autre grand futur personnage présenté lors de l’épisode 14 et qui restera près de dix épisodes enfermé dans le bunker : Benjamin Linus (Michael Emerson), qui n’est autre que le chef des autres. Un personnage aussi fourbe qu’inquiétant, sur qui reposera beaucoup de tension et d’enjeux. Le double épisode final centré sur Desmond, la confrontation avec les autres et le bunker, est juste magistral, loin de se douter de la claque monumentale qui allait suivre le fameux tournage de clé.

Saison 2 : 

Décidément très forte pour créer un suspense insoutenable en fin de saison, la série avait frappé encore plus fort : cette fois ce n’est pas la porte de la trappe, mais le bunker entier qui a explosé, laissant planer le doute sur le sort de certains personnages centraux, tandis que les plus importants, Jack, Kate et Sawyer, ont été livré aux autres par le nouvel ennemi public numéro un qui a tué Ana-Lucia, Lybie et sacrifié trois de ses amis pour s’enfuir de l’île avec son fils, Michael. Ça y est, les premiers épisodes nous confrontent enfin avec les autres, dont le chef Benjamin Linus souffre d’une tumeur sur la colonne vertébrale, et c’est pour cela qu’il a capturé Jack et ses amis. Lui parce qu’il est chirurgien spécialisé sur ce domaine, et ses amis pour avoir un moyen de pression sur lui. Un bras de fer psychologique entre Ben et le monde qu’il manipule. Un jeu de dupe palpitant avec en parallèle la romance Kate / Sawyer qui atteint enfin un nouveau niveau, et le coup du pacemaker en marquera plus d’un. Un séjour à la station de l’hydre qui permettra d’introduire un nouveau personnage à l’importance cruciale : Juliet Burke (Elizabeth Mitchell).

L’autre partie de l’intrigue est malheureusement un peu moins intéressante. Tout un épisode tourne autour du sauvetage de Mr Eko, mais ce dernier est pourtant tué deux épisodes plus loin, rebroussant chemin sur toute son évolution psychologique et balayant tout acte de repentance. Apparemment des problèmes entre l’acteur et la production… De même, l’épisode 14 sur Nikki et Paolo est un bel exemple de perte de temps, inutile au possible. Le scission entre Jack et Locke est décevante, l’un manquant de recul et l’autre ne sachant absolument pas ce qu’il fait, arborant pourtant une arrogance parfois saoulante. L’origine de cette discorde ? La possibilité de quitter l’île avec un bateau arrivant vers eux, mais leurs intentions semblant plus obscures qu’il ne veuillent bien l’avouer. On pourrait avoir tendance à dire que cette saison est un peu en dessous des deux premières, mais la première partie avec les autres est vraiment palpitante, et le grand sauveur de la série va frapper très très lourd lors du huitième épisode : Desmond. Comment a-t-il survécu à l’explosion de la trappe ? Que s’est-il passé ? Pourquoi voit-il Charlie mourir sans cesse ? Durant l’un des tout meilleurs épisodes de la série, on revisitera le passé de Desmond de façon brillante : sonné par la décharge electro-magnétique de l’auto-destruction, il va se retrouver projeté astralement dans son corps passé, revivant alors un tournant dans sa vie avec une sensation de déjà-vu, persuadé – à juste titre – de refaire les mêmes erreurs. Un tour de force émotionnel et psychologique, porté par un acteur époustouflant livrant une prestation qui marquera à jamais les esprits, et l’occasion de voir enfin ce si bel amour avec Penny (Sonya Walger), la fille de cette grande menace de l’ombre : Charles Widmore (Alan Dale).

Comme pour chaque saison, on finira par un énorme twist d’une toute nouvelle nature : de l’auto-spoiler. Trompant le spectateur avec sa forme de flashbacks sur Jack, les deux derniers épisodes montrent en réalité des flashforwards, c’est à dire des événements se déroulant dans le futur, divulguant donc qu’à minima Jack et Kate quitteront l’île. On dira aussi au revoir à Charlie, malmené tout du long et qui n’aura jamais pu connaître le bonheur avec Claire, se sacrifiant pour rétablir les connexions (alors même que Desmond se sera trompé sur sa vision, ce ne sera pas Claire qui portera Aaron dans l’hélicoptère). On terminera pour cette saison sur un petit tour présentiel, avec le retour écrasant au premier plan de Jack, comptant pas moins de quatre épisodes centrés sur lui (1, 9, 22 et 23). Il sera suivi de très loin par une pléthore récoltant deux épisodes dédiés : Sun et Jin (2 et 18), Locke (3 et 13, avec enfin l’explication sur son handicap), Kate (6 et 15), Juliet (7 et 16), et  Desmond (8 et 17). Viennent alors Mr Eko (5) et Charlie (21) qui auront droit à un dernier tour de piste pour les accompagner dans la tombe. Ben aura droit à son tout premier flashback lors du 20° épisode, tandis que Sawyer (4), Hurley (10), Sayid (11) et Claire (12) auront droit à un petit épisode chacun.

Saison 3 :

Pour ceux qui s’en souviennent, l’année de la quatrième fut la fameuse année de la grève des scénaristes. Si heureusement cette grève ne s’est pas soldée par des scénarios écrits à la truelle, cela a eu pour effet de raccourcir drastiquement le nombre d’épisodes. Oscillant entre 23 et 25 lors des trois premières saisons, le total d’épisodes passe ici à 14, et c’est probablement ce qui a en partie sauvé la saison. On ne va pas se mentir, dévoiler une sortie de l’île était une très mauvaise idée, et cette saison va s’y enfoncer un peu plus en dévoilant très vite la liste des « Oceanic Six », c’est à dire les « six survivants » du vol Oceanic 815. Certes, on a alors le suspend de comment et pourquoi, et que sont devenus véritablement les autres, mais la série va un peu trop s’y embourber, et avec le recul cela n’aura pas apporté grand chose.

Parmi les grandes nouveautés de cette saison, il y a bien sûr l’équipage de Charles Widmore, que ce soit le mercenaire Keamy Martin (Kevin Durand) de 1m98 et plus musclé qu’une statue grecque, ou l’équipage de l’hélicoptère scientifique envoyé en reconnaissance, avec à son bord le pilote Frank Lapidus (Jeff Fahey), l’archéologue Charlotte Lewis (Rebecca Mader), le physicien Daniel Farradey (Jeremy Davis) ou encore l’homme qui parle aux morts, Miles Straumes (Ken Leung). Si on ne les appréciera pas forcément tout de suite, ils seront au final très intéressants, surtout Farradey dont l’interprétation à fleur de peau est incroyable. On suivra donc un Jack à la dérive, enchaînant toutes les pires décisions, un Locke à l’abandon, dépassé par Ben, avec en parallèle les gentils du cargo, et les militaires venus faire place nette.

En dehors de trois épisodes sur l’arrivée de Juliet sur l’île (épisode 6), la chute aux enfers de Michael qui le conduira à nouveau sur l’île (épisode 3) et un brin d’histoire sur Locke (épisode 11), le reste des épisodes raconteront en parallèle des altercations sur l’île les vies après avoir quitté les lieux pour Hurley (épisode 1), Sayid (3), Kate (4), Sun (7) et Jack (10), avec aussi un résident de l’île non compris dans les six (avec Aaron) : Ben (9), qui devra lui aussi quitter l’île. Les nouveaux sont bons et la double narration marche toujours très bien (le piège de l’épisode 7 est excellent), faisant que la cuvée est toujours de grande qualité, mais encore une fois, ce qui sauve la série d’une baisse d’intérêt est le légendaire Desmond, nous offrant ce qui est peut-être le meilleur épisode toutes séries confondues de toute l’histoire : l’épisode 5. En plein déphasage, il subira des sauts temporels pour ce qui se présente comme un moyen-métrage d’enquête / science-fiction à part entière à la recherche d’une constance. Le montage et la réalisation sont incroyables, le jeu d’acteur est ahurissant et le résultat est une claque sans commune mesure. L’un des plus grands moments de l’histoire de la télévision et des arts audio-visuels en général.

Saison 4 :

Si certains ont fini par décrocher, on tient probablement ici la saison qui en est responsable. Déjà annoncé par Jack lui-même lors du final de la saison 3 dans un flashforward : they have to go back (ils doivent y retourner). Or il aura fallut attendre la fin de la saison 4 pour qu’ils quittent l’île sur laquelle ils doivent y retourner, et ce sera tout l’enjeu de cette avant-dernière saison : y retourner. Comme le présent a rattrapé les flashforwards, on suivra donc en parallèle la vie des Oceanic Six et la survie des rescapés de l’île, Ben ayant fait « dérailler » l’île en la déplaçant dans l’espace, perturbant son axe dans le temps, et ce jusqu’à ce Locke déplace à son tour l’île comme il devait le faire. On perd ainsi le principe même de la série : mettre en parallèle des événements d’un autre temps (passés ou futurs avec la saison 4) avec l’action cours. La double narration est laissée de côté durant les neuf premiers épisodes, reprenant quand tout le monde se retrouve sur l’île.

Et c’est là l’un des plus gros raté de la série : le passage en ville fut inutile, Locke est mort pour rien, on ne verra jamais vraiment la vie au village Dharma, et deux des meilleurs personnages de la série se sont progressivement perdus. Le virage aura surtout été fin saison 3-saison 4 pour Jack et Locke, se vautrant dans de mauvais choix jusqu’à en devenir aigris, détruits. Plus qu’une ombre serait-on tenté de dire pour Locke, d’autant – et c’est un des choix les plus douteux – que sa mort restera définitive, sa « résurrection » étant un leurre d’un être dont ne comprendra que plus tard la nature exacte.

Dernière ligne droite oblige, on nous introduit enfin le gardien de l’île, le mystérieux Jacob (Mark Pellegrino). Son arrivée permet une relecture donnant plus de profondeur, mais cette fois l’engouement retombe un peu et il était grand temps de conclure. Durant cette cinquième saison, cinq personnages auront droit à leurs flashback : Sayid, Kate, Ben, Miles et Daniel (dans l’ordre, épisodes 10 à 14). Déjà privé de son amour, Charlotte, ce dernier connaîtra lui aussi une fin prématurée au goût amer, tant elle aurait pu être facilement évitée et n’apporte rien, loin du degré de choc par exemple de l’exécution brutale de la fille de Danielle Rousseau (Mira Furlan), Alex (Tania Raymonde), lors de la saison 4.

Saison 5 :

La dernière saison est de loin la plus difficile à appréhender et à juger tant on y retrouve le pire et le meilleur de la série. Tout en bouclant l’histoire au présent sur l’île, la série nous raconte en parallèle l’histoire de chacun s’il n’y avait pas eu d’île, si leur vol ne s’était pas crashé, incluant donc la sélection dès leur plus jeune âge pour certains par Jacob, influençant certains points de leurs vies. Cette réalité alternative, qui n’en est en fait pas une, est largement plus intéressante que ce qui se passe sur l’île, l’intérêt étant à ce niveau-là en chute libre. Juliet morte, Jack en coquille vide, puis très vite une autre fausse résurrection avec Sayid, simple ombre manipulée par le monstre. Tout le monde part à droite à gauche, les convictions s’envolent, Hugo prend malgré lui une part importante (puis centrale même) et on se perd entre les protecteurs de l’île qui meurent sans jamais n’avoir rien fait (la caricature d’asiatique qui préfère parler japonais par snobisme est insupportable à jouer les mystérieux et semer le trouble de façon contre-productive). Le rôle de Jacob y est aussi complètement anodin, tout juste apprend t-on lors de l’épisode 15 sur ses origines que la créature n’est pas son frère, qu’il a tué, mais la matérialisation de ses souvenirs et de sa colère, se nourrissant de la rancœur des morts en prenant leur mémoire et copiant leur corps.

Si la conclusion sur l’île est en grande partie satisfaisante entre le sauvetage de Desmond, crime impardonnable que de l’avoir obligé à revenir, mais heureusement il retrouvera Penny et son fils, et les survivants partant dans l’avion, permettant à Claire de retrouver Aaron, on ne peut s’empêcher de se dire que Widmore et son équipe n’ont servi à rien, de même que les protecteurs. Certaines morts ont été scandaleuse comme le couple Kwon qui méritait tellement de retrouver leur fille, et même si la symbolique autour de Jack avec Vincent se couchant à ses côtés est magnifique, c’est lui qui aurait dû monter dans l’avion avec Kate, permettant à son rêve de paternité (Dylan Minnette) de devenir réalité. On regrettera aussi l’impact inexistant de Richard (Nestor Carbonell), homme de l’ombre de la série dont l’épisode sur son passé (9) est excellent, permettant enfin à Hugo de tirer pleinement parti de son pouvoir, clairement sous exploité aux vues de cette dernière saison.

Vient alors cette réalité alternative où le vol ne s’est pas écrasé sur l’île, permettant de développer de nouvelles histoires amusantes et touchantes où les destins continuent de se recouper. Des passages excellents, mais dans quel but ? Pur fan-service ? Oh que non, et comme toujours la pirouette nous mettant une énorme claque viendra du prodigieux, miraculeux, extraordinaire Desmond, qui découvrira lors d’une expérience de mort imminente la vérité sur cette réalité, bien qu’il ne le comprendra vraiment que plus tard : ça n’est pas une réalité alternative mais le purgatoire. Certains sont morts sur l’île il y a des années comme Boon, Shannon, Lybie ou Charlie, d’autres un peu plus tard comme Charlotte, Daniel, Locke ou Jack, et d’autres ont pu quitter l’île et mener une autre vie après. Il va donc servir de messager, les rappelant à leurs vies passées, car au delà des malheurs et de la mort, la vie sur l’île fut une incroyable expérience pour tous, qui leur permis de découvrir le sens de la vie. Outre les retrouvailles de Desmond et Penny, nombre d’histoires referont surface, certaines simplement belles et fortes comme Hugo/Lybie, Daniel/Charlotte et Sayid/Shannon, d’autres nous mettrons la boule à la gorge comme Kate/Jack et Sun/Jin, tandis que d’autres nous feront ressentir des sentiments bien plus forts, Charlie/Claire et Sawyer/Juliet en tête.

On en regrette presque les passages sur l’île tant en dehors des origines de Richard et Jacob, seule la fin avec la larmoyante scène du chien nous tiendra en haleine. La conclusion de l’aventure est donc un peu en dent de scie, nous donnant l’impression que si l’île n’en a pas fini avec nous, on en avait déjà fini avec elle dès la dernière saison. L’idée du purgatoire est exceptionnelle, le traitement parfait et l’intensité émotionnelle bat des records lors du double épisode final, on regrette juste que tout le monde n’a pas eu la fin qu’il méritait. Sun et Jin morts noyés, Sayid vidé de toute substance et sacrifié dans l’indifférence générale, Locke oublié en chemin, Farradey mort pour rien, Jack ravagé par le chagrin, Hurley et Ben isolés tout le restant de leurs vies et ceux partis dans l’avion dont on ne saura s’ils ont pu avoir un semblant de vie après les événements : tant de points qui en décevront plus d’un. Un adieu loin d’être parfait, mais tout ce qui touche au purgatoire est un chef d’oeuvre d’écriture, brillant récit de destins croisés à l’intensité dramatique et émotionnel éblouissante. Du pur génie qui tutoie les plus hautes sphères de la création.

Saison 6 sur l’île :

Saison 6 purgatoire et fin :

Au passage si quelqu’un avait un remontage de la saison 6 avec exclusivement les passages au purgatoire, il aurait à tout jamais ma reconnaissance éternelle.

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