Wonder Woman 1984


Wonder Woman 1984
2020
Patty Jenkins

Assurément l’un des films les plus appréciés du DCEU, le premier Wonder Woman fut effectivement une bonne surprise, les critiques étaient excellentes, les ventes physiques qui ont suivi les excellents chiffres en salle (818 M$ dans le monde) furent très encourageantes, et la hype était à son maximum pour cette suite. Qu’importe la qualité du film, cette suite avait aligné toutes les conditions nécessaires pour assurer le milliard au box-office, mais c’était sans compter sur cette fameuse saloperie qu’on appelle Covid. Le film devait sortir en juin 2020, puis a été décalé en novembre, et il est finalement sorti fin décembre dans un contexte où les premières salles rouvraient péniblement dans quelques pays, et le film se voulait justement être le fer de lance de la réouverture. Seulement voilà, re-fermeture, sortie simultanée sur HBO Max, piratage massif et confinement sur une grande partie du globe ont fait de cette tentative de reprise l’un des cinq plus gros ratage de l’histoire : 200 M$ de budget brut (donc 350 M$ minimum avec les trois campagnes marketing pour les différents reports) pour des revenus bruts de 166 M$. Un carnage qui s’explique en très grande partie par le choix de sortir le film contre vents et marées de covid, et fut d’ailleurs pendant quatre mois le second plus gros « succès » de l’ère covid. En France, le film fut proposé en VOD en mars 2021, avant de débarquer en vente physique le mois suivant comme un vulgaire film de série B. Triste sort qui a pour l’instant tué la franchise, mais au delà du désastre commercial, impossible à pleinement évaluer de part l’omerta sur les chiffres en VOD/streaming, le film est malheureusement aussi en grande partie un désastre artistique.

Alors que les autres films de l’univers DC étaient clairs sur le fait que la super-héroïne n’avait pas renfilé son costume depuis la Première Guerre Mondiale, voilà une suite se déroulant pourtant dans les années 80. Suite ou pas vraiment suite ? Univers alternatif ? Aucune réponse, mais de quoi parle donc le film ? Eh bien comme par hasard, une pierre exhaussant tous les vœux va atterrir là où travaille Diana Prince (Gal Gadot), et comme par hasard un homme d’affaire raté (Pedro Pascal) cherchant désespérément ladite pierre va justement faire un don d’argent qu’il n’a pas à ce même institue, et comme par hasard il va tomber sur la pierre, et comme ça tombe bien il va réussir à la subtiliser à une employée (Kristen Wiig) qui bah alors là si si on vous jure c’est pas une facilité scénaristique, ça tombe incroyablement bien parce que c’est justement son type d’homme et elle va le laisser partir avec. Comment, les gens sont dégoutés que Steve Trevor (Chris Pine) soit mort dans le premier film ? Bah la pierre va le ressusciter !

Ce film devrait être étudié comme cas d’école sur à quel point tous les mauvais choix ont été fait. Ce qui fait avancer le scénario est systématique des coïncidences de l’enfer, et le film échoue à créer des enjeux. Comment se dire que Steve va rester, que le monde va vraiment partir en vrille définitivement quand on connaît déjà l’état du monde quelques décennies plus tard ? Et surtout, comment craindre pour qui que ce soit dans un film sans méchant ? Car oui, et c’est sans doute le plus gros ratage du film : le fameux arriviste et juste quelqu’un qui veut rendre fier son fils et prouver au monde qu’il n’est pas un raté qu’on peut laisser en marge de la société, et la Cheetah est juste une conne. Aucune transformation physique, du pouvoir mais sans but derrière, et au final ça ne change pas qui elle est au fond. En vrai la méchante du film serait Wonder Woman elle-même, préférant délaisser l’humanité et même voler le corps d’un innocent pour y projeter le souvenir de son aimé. Des enjeux inexistants donc, mais pire encore, le chemin pour arriver à l’une des conclusions guimauves les plus navrantes jamais vue doit passer par des pans entiers ne servant absolument à rien. Le film se veut grandiose, épique, international, et dans cet optique pour redynamiser un milieu de film qui ne fait que prolonger l’exposition d’introduction, on nous sort une bonne demi-heure de film en Afrique du Nord sur un sultan cupide, mais au final personne n’en ressort avec quoi que ce soit de plus, cela ne fait avancer aucune intrigue principale ou même secondaire, tout cela pour offrir des séquences d’action poussives et toujours sans le moindre enjeu. Mais au final le plus gros point noir du film est son époque : 1984. Alors que moult films ont su tirer parti de la nostalgie pour proposer quelque chose de frais et attachant, c’est ici un contexte qu’on oubliera sans cesse tant rien ne vient le rappeler, tant visuellement que thématiquement. La critique du capitalisme est limite moins pertinente à l’époque que maintenant, l’accent est très peu mis sur les costumes ou technologies de l’époque, et au niveau de l’étalonnage le film est très gris, loin des teintes colorées et décomplexées des années 80. Donc non, rien ne justifie d’avoir placé cette histoire en 84, et le film ne s’en sert à aucun moment, ou de manière totalement anecdotique.

Naufrage absolu donc ? Eh bien pas loin effectivement, car si tenter de ranimer l’humanité de l’espèce humaine fait écho au grand cœur de notre chère amazone, et si constater que son amour pour Steve est toujours palpable des décennies plus tard est touchant, dans les fait le développement est juste catastrophique, à la limite du nanardesque mais sans faire rire pour autant. Juste navrant. Reste donc une Gal Gadot toujours éblouissante, des effets spéciaux très corrects globalement (enfin vu le prix c’est tout de même la moindre des choses) et une intro sur l’île des amazones très réussie, mais les nouveaux personnages sont mal branlés, trop gentillets pour faire de véritables antagonistes, le scénario est poussif au possible, les enjeux saccagés, le rythme atroce (2h31 et plus de la moitié ne sert à rien) et globalement le constat est irrévocable : c’est juste chiant.

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