Attention, cet article contient des révélations importantes sur la série, et s’adresse principalement aux fans souhaitant se la commémorer ou confronter leurs point de vu.
C’est le 1° octobre 2006 que Showtime a lancé avec fracas la série Dexter, adaptation d’une série de romans de Jeff Lindsay (du moins pour la première saison, le reste ne reprenant que les personnages), devenue aujourd’hui un véritable phénomène avec à la clef des records d’audiences pour la chaîne. On y découvrait pour la première fois le brillant Michael C. Hall dans le rôle de Dexter, qui dès la première scène venait nous expliquer en quoi tuer un professeur de chant était une bonne chose si à côté il est un dangereux pédophile avec sa fameuse phrase d’accroche par laquelle démarre presque toutes les saisons : « tonight is the night » (comprendre « ce soir c’est le grand soir », celui d’une exécution). Et paf, notre meurtrier en herbe est lancé, choquant, divisant avec son apologie du mal, justifiant une vie de serial killer. Un principe pourtant pas si étranger, le récent Wanted en reprenant les codes d’honneur, de même que le manga Death Note. Et après huit grandes années clairsemées de quelques déceptions, il est temps de faire le point sur cette aventure qui a de toute façon marqué les esprits, même si sa fin restera à tout jamais dans les annales des plus gros massacres impardonnables de l’histoire.
Dès la saison 1, on retrouvera des bases qui resteront immuables, la plupart des acteurs restant de bout en bout de la série, restant dans le même corps de métier, et les lieux ne varieront que très peu. Ainsi, dans ce qui deviendra de plus en plus au fil des ans la belle famille de la police de Miami, on y suit Dexter Morgan (Michael C. Hall), un légiste aux pulsions particulières. Soumit depuis sa plus tendre enfance à « A Dark Passenger » (un hôte funeste), une envie de tuer régit sa vie. Mais son père adoptif, Harry (James Remar), lui à apprit à canaliser cette fureur pour en faire « quelque chose de bien » : tuer des gens qui le méritent. Ainsi, celui qui sera plus tard surnommé « le boucher de Miami / Bay Harbor Butcher », débarrasse la ville des meurtriers, violeurs et autres dangereux criminels dont il est avéré qu’ils ont tué et qu’ils recommenceront. C’est ce qu’il appelle son code de conduite, dont la règle numéro une est de ne pas se faire attraper. Alors dirigé par la lieutenant LaGuerta (Lauren Velez), la police de Miami aura fort à faire cette saison : elle est sur les traces du « Ice track killer » (le tueur au camion frigorifique), le meurtrier qui laisse derrière lui des corps vidés de leur sang et découpés en morceaux. Déjà présents dans les forces de l’ordre, on retrouvera les éternels Masuka (C.S. Lee), l’expert scientifique qui épaule Dexter, et le sergent Batista (David Zayas), mais aussi la sœur adoptive de Dexter, Debra (Jennifer Carpenter), celle qui dit « fuck » tous les deux mots (le deuxième étant généralement « shit ») et qui espère passer des mœurs aux homicides, et aussi le suspicieux sergent Doakes (Erik King). Tout ce petit monde présent dès le tout premier épisode, de même que celle qui apportera une formidable romance au cours des quatre premières saisons : Rita (Julie Benz), « petite amie » de Dexter.
Ce premier contact – avec le recul – est tout de même déjà bien représentatif de l’esprit global de la série. Et même si Dexter est jeune et commet certaines erreurs grossières (et pourtant, son premier assassinat avec l’infirmière de son père datait d’au moins quinze ans), son emprunte n’aura finalement pas beaucoup évoluée : enquête minutieuse pour avoir la certitude de la culpabilité de la cible, préparation de la chambre (recouverte de plastique), dernière confrontation avec ses méfaits (photos des victimes), prélèvement sanguin, plantage de couteau en plein thorax puis dépôt du cadavre en mer. Masuka fait ses blagues sexuelles, Angel joue les grands frères, Debra jure comme pas deux, et Dexter se pose déjà ses interminables questions existentielles. Et avec les prémices de l’enquête sur le « ice track killer » (révélé sous les traits de Christian Camargo lors de l’épisode 8, bien que déjà suspect avant ça) et les messages personnels envoyés à Dexter, on prend d’emblée l’habitude des mensonges de notre tueur-légiste, ayant continuellement une longueur d’avance sur l’équipe mais qui joue encore son rôle, son travail devenant par la suite de plus en plus secret, bien que clairement la pression de Doakes se fait sentir, surtout lors des derniers épisodes. – Au passage par rapport à l’épisode 3 où des morceaux du concierge sont retrouvés, mais quelle salope cette LaGuerta d’appeler la mère pour lui dire qu’il est encore en vie alors qu’au mieux il ne restera qu’un tronc ! – Bref, dès le début on retrouvera une part importante du charme de la série, et malgré le cadre classique de la famille policière et de ses enquêtes, la singularité du héros et sa vision des choses donne une dimension unique et révolutionnaire à l’ensemble. Une très bonne première saison donc, avec un tueur « pratique » qui permet d’éclaircir rapidement le personnage de Dexter et d’en faire un symbole de complexité.
Pour la seconde saison, l’intrigue se forme autour d’un terrible étau qui se ressert sur Dexter : l’endroit où gisait les cadavres de ses victimes a été hasardeusement découvert, glaçant d’effroi le monde de la macabre découverte du « Bay Harbor Butcher ». Une saison marquée par la vigilance renforcée de Doakes, plus suspicieux que jamais envers Dexter, qui doit en plus de ça faire avec les doutes de Rita, qui de son côté a percé la machination de Dexter sur l’incrimination de Paul, son ex-mari désormais mort en prison. Par une pirouette il gardera ses faveurs en jouant les drogués repentant, l’amenant aux réunions anonymes et marquant sa rencontre avec Lila (Jaime Murray). Une relation ambiguë qui lui montrera que sa nature peut être acceptée, voir combattue. Une réminiscence à double tranchant : sa relation avec Lila va évoluer (épisode 6) et faire s’éteindre celle qu’il entretenait avec Rita – un mal pour un bien : sa relation avec elle nous étant imposée depuis les prémices, l’occasion nous est donnée de la remettre en cause -. Côté relations, Debra la traumatisée va peu à peu se lier avec l’agent spécial Lundy (Keith Carradine), l’homme en charge de la traque du boucher. Une traque qui devient très dangereuse au fil des épisodes, et on sent un réel danger, alors même que le sevrage est en cours et qu’il apprend à vivre indépendamment de son « dark passenger ». Une excellente saison dans la continuité de la précédente, l’histoire reprenant la traque de Doakes, dont le tournant sera l’épisode 8 avec la découverte des plaquettes de sang dans l’appartement de Dexter. Les deux nouveaux venus que sont Lila et Lundy sont intéressant, bien qu’éphémères, et entre la remise en question de Dexter et l’enquête sur le Boucher, on se retrouve vraiment captivé. Mieux encore, les derniers épisodes sont haletants et ingénieux, permettant aussi de se débarrasser de deux personnages qui devenaient encombrant. Bref, la voix est trouvée.
Déjà abordé en saison passée, l’acceptation de sa nature par Dexter va prendre une toute autre dimension avec l’arrivée de Miguel Prado (Jimmy Smits), un procureur en mal de justice qui basculera du côté obscur après la mort de son jeune frère, tué par Dexter mais par la faute d’un dealer : Freebo, du coup accusé du meurtre. Cible ayant échappée à Dexter, il constitue une grande menace pour lui, d’autant qu’il connaît son visage. Sa grande motivation pour le retrouver sera percée par Miguel, croyant voir là une personne dévouée et de confiance. Une amitié va alors débuter, gênant Dexter dans sa recherche, déjà brouillée par l’idée de devenir père, Rita étant tombée enceinte. De son côté, Debra est tiraillée entre ses enquêtes, son désir de promotion et la demande d’espionnage des Stup, désireuse de demasquer le nouveau policier de Miami qu’elle soupçonne d’être ripoux : Josef ‘Joey’ Quinn (Desmond Harrington). Prit au dépourvu en plein rituel avec Freebo (épisode 2), Dexter va réussir à jouer les improvisateurs avec Miguel, ouvrant la porte à une équipe de justiciers.
Le mystérieux serial killer de cette saison sera surnommé « l’écorcheur », laissant derrière lui des cadavres en partie dépecés. Mais pour Dexter la priorité n’est pas là : avec un bébé et un mariage avec Rita en route, la perspective d’une nouvelle vie le terrifie (l’épisode 5 sera l’occasion de démarrer cette schizophrénie hallucinatoire faisant apparaître son père comme conseiller, fait récurrent dans la série). À noter un élément particulièrement intéressant lors de l’épisode 7, où Debra dit à Dexter que si jamais elle se retrouvait à souffrir à l’hôpital, elle le supplierait de la débrancher, faisant écho à la fin de la série, mais dont je reviendrais lors de la saison 8. La saison prendra un tournant avec le huitième épisode, marquant le premier meurtre rituel de Miguel, tandis que l’enquête sur l’écorcheur prend forme, mais sans créer de véritable intérêt autour : les nouveaux personnages de cette saison, y compris Miguel, n’ont pas un très grand intérêt, et le tout ronronne gentiment. Au final, pas de véritable grand méchant cette saison, pas de nouveau personnage remarquable et pas d’évolution tonitruante. Un certain manque d’enjeux qui donne un coup de mou à la série stagnante, sans pour autant perdre ses qualités premières. En gros ce qu’on retiendra de cette troisième saison c’est le mariage, le bébé à venir, et la tentative ratée de complicité meurtrière.
Après une saison sans véritable méchant, on commence ici directement avec celui autour de qui la saison tournera : The Trinity Killer (John Lithgow – d’ailleurs récompensé par un Golden Globe et un Emmy Award pour son rôle). Point d’attente non plus en ce qui concerne le bébé, Harrison, déjà présent dès le premier épisode. Ainsi, la scène de la maternité de la saison 8 se déroule entre les saisons 3 et 4. De même, on découvre la fraîche relation entre Batista et LaGuerta d’emblée, alors que ce dernier nous avait quitté en compagnie de Barbara. Trinity restera pour beaucoup l’assassin le plus emblématique de la série, et même au bout d’un seul épisode, le mystère fascine : un homme qui se baigne nu avec ses victimes (de jeunes filles, elles aussi nues), leur tranche la cuisse puis se délecte de ce bain de sang, savourant la vision de leur dernier soupir. Les tuant par cycle, il œuvre depuis trente ans, une longévité qui force le respect.
Pour l’occasion, le chasseur de serial killer Lundy va revenir à la charge, rappelant ses sentiments à Debra. Et quand pour son deuxième meurtre Trinity oblige une mère à se suicider en sautant du haut d’un immeuble (épisode 3), le mystère s’épaissi et l’attrait s’en retrouve plus grand encore. Pour clore son rituel, il tue ensuite un homme en le battant avec un marteau (épisode 5). Tout cela pour reproduire le schéma de la mort de ses proches avec chronologiquement sa sœur, sa mère puis son père. Mais alors qu’on le croyait solitaire, on apprendra lors de l’épisode 5 que le bougre a une belle famille rien qu’à lui avec une femme et deux enfants. Pour Dexter qui doit lui aussi gérer famille, travail et son monstre intérieur, voir quelqu’un s’en sortir aussi bien intrigue, fascine. Mais lors de l’épisode 8, Dexter va commencer à faire n’importe quoi : au lieu de se débarrasser de Trinity, monstre avéré n’ayant rien à lui apprendre, il va continuer à le côtoyer dangereusement. Une longue descente aux enfers pour Dexter qui se fera non seulement mal voir au boulot en sabotant son travail et celui de l’équipe, en plus de continuellement s’absenter, mais il va en plus délaisser complètement sa famille, ignorant ses enfants et amenant Rita à avoir envie de le tromper. Tout ça pour s’exposer chaque jour un peu plus auprès de Trinity, ce qui causera sa perte.
Tueur maladroit, père exécrable, mari indigne, collègue asocial (Quinn est même devenu un ennemi) : notre héros tombe en disgrâce, un sentiment un peu énervant par moments. Un enchevêtrement de bêtises et maladresses qui aboutiront à un cauchemardesque « hello, Dexter Morgan » (épisode 11), promesse d’un destin funeste clôturant ce qui aura été une saison particulièrement stressante et poignante, pleine de rebondissements, d’enjeux, de suspense, et mettant surtout en avant un monstre à l’état brut, se posant comme une référence du genre. Malheureusement, aussi brillante soit-elle, cette saison connaîtra une fin des plus exécrables : la mort de Rita, emportée par Trinity. Et c’est ainsi que Dexter perdra pour toujours les notions de famille et paternité…
La cinquième saison démarre donc sous le signe du deuil, déplorant la mort de Rita. L’annonce de sa mort à ses enfants est magnifique : Dexter, revêtant un chapeau de Mickey, annonce de but en blanc la nouvelle, la ponctuant d’un magnifique « sorry for your lost » (désolé pour votre perte), comme si cela les concernait plus que lui. Incapable de ressentir le moindre chagrin quant à la mort de sa femme, il n’arrivera pas non plus à réconforter Astor et Cody, incapables de voir en lui un père, et partiront habiter avec leurs grands parents (épisode 2), laissant Dexter seul avec Harrison, et Debra tentant de récupérer les morceaux, puisant quant à elle sa force de sa nouvelle relation avec Quinn, tandis que les nouveaux mariés Angel et Maria battent déjà de l’aile, leurs caractères autoritaires entrant en contradiction.
Pour se changer les idées, Dexter voulait partir en quête d’un meurtrier : Boyd, un ramasseur de cadavres d’animaux, déchargeant à l’occasion des d’humains. Mais la reprise est difficile (le double ko de l’épisode 3 est particulièrement drôle, mais pas autant que le coup du container dans l’épisode 6 avec la démonstration jubilatoire de Masuka), et les erreurs se multiplient, allant jusqu’à échouer pour la première fois à respecter la première règle du code : ne pas se faire attraper. Accomplissant pour la première fois depuis la mort de Rita son rituel, il découvrira ce qui devait être la prochaine victime de Boyd : Lumen (Julia Stiles). Laissée agonisante dans une pièce close, elle y a subit durant deux semaines sévices corporels et tortures mentales. Etant innocente, Dexter ne pouvait pas la laisser mourir, et son histoire mérite qu’il s’y attarde : Boyd n’était pas le seul à lui rendre des visites désagréables.
Faisant maladroitement solo chacun de son côté, Dexter va finalement comprendre que Lumen a besoin de les voir tous morts pour refaire sa vie, et voir à l’œuvre son hôte funeste ne lui fait pas peur. Esquissé dans la saison 3, Dexter va ici enfin pouvoir partager son fardeau avec elle et reprendre goût à la vie (épisode 8). Mais dans cette grande vendetta, cette saison nous apportera un très beau neuvième épisode où Dexter va ouvrir sa carapace comme jamais et montrer qu’il a en lui la fibre paternelle, nous rappelant au doux souvenir d’Astor, excellent personnage qui nous quittera malheureusement à la fin de la saison et pour ne revenir que subrepticement lors d’un épisode de la septième saison. Et mieux encore, l’épisode se fini par un magnifique coup de pute de Jordan Chase (Jonny Lee Miller), le monstre à la tête du groupe de torture. Pas aussi charismatique et mémorable que Trinity, il reste néanmoins très bon, et la kill list qui l’entoure lui et ses amis est particulièrement intéressante, d’autant que Lumen aura été l’un des personnages les plus remarquable de la série. Dommage que cette noirceur qui réclamait vengeance l’a quitté, lui faisant perdre sa connexion avec Dexter et l’obligeant à partir. Quelle belle fin de série cela aurait été si, main dans la main, les deux amants maudits s’étaient jurer justiciers à vie, perpétrant tous deux le code. Mais non. La saison, sans doutes la plus aboutie, n’aura finalement servit qu’à dire que la vie continue.
À l’image du spectateur qui découvrait la nouvelle saison quelques mois après la fin de la dernière, l’action se déroulait aussi quelques mois après les derniers événements. Mais pour cette sixième saison, on subit un saut narratif d’une année complète. Harrison s’apprête à entrer en maternelle – mais on s’en fout -, Quinn et Debra sont toujours ensemble – mais on s’en fout -, et LaGuerta a laissé tomber son mariage pour devenir Capitaine – vivement qu’elle crève celle là ! -. Quant à Dexter, il est resté le même, prisonnier de son appartement et de ses rituels meurtriers. Le départ de Lumen semble avoir brisé quelque chose en nous, et on part d’emblée avec un fort à priori.
Et en effet, le postulat de la trame principale de cette saison est la religion, les « deux » associés du crime perpétrant des meurtres mis en scène comme dans la bible pour annoncer l’apocalypse. Des bondieuseries qui laissent perplexe au début, et même quelque chose d’aussi énorme que Debra qui passe directe de détective à inspecteur (sans passer par sergent, et au nez et à la barbe de Batista) est accueilli de façon mitigée, son personnage étant devenu aussi inutile que Quinn, incapable de jouer autre chose que la colère. Mais bon, le goût prononcé pour la mise en scène des tableaux et les mystérieux nombres laissés dans les cadavres nous redonnent ce petit frisson de suspense, suffisamment pour passer outre la perte de vitesse. D’ailleurs, à la manière d’un Sixième Sens, un soin particulièrement méticuleux a été apporté au mentor de celui que la police va appeler Doomsday, faisant écho au mentor de Dexter, Harry. Les meilleurs mentors sont ils des projections schizophrènes ? Il faut croire que oui, et un œil aguerri le démasquera assez vite (possiblement dès l’épisode 4, alors que la révélation se fait lors du 9°).
On découvrira ensuite (épisode 6) que les tueries ne sont pas une mise en garde contre la fin du monde, mais l’accomplissement de l’Enesserette, rituel provoquant l’apocalypse (au sens cataclysmique, et non littéraire). Mais la véritable découverte est à mettre au crédit de l’épisode 7, la perle de la saison qui fait écho au neuvième de la saison précédente. Avec la mort gratuite du frère Sam, Dexter est persuadé ne plus avoir de lumière en lui, et le temps d’un épisode sa conscience changera d’apparence : le père deviendra le frère. Au revoir Harry, toi qui tentait de contenir le monstre, et bonjour Bryan, le Ice Track Killer et frère de Dexter. Un épisode placé sous le signe de Trinity : il semblerait que son fils Jonah est reproduit le même schéma que lui en tuant sa mère et sa sœur, l’occasion d’un road trip assez inoubliable.
Une petite interlude, puis on repart sur les traces de Travis Marshall (Colins Hanks, fils de Tom), véritable et unique responsable des meurtres censés provoquer l’Apocalypse. Le pauvre Gellar, accusé de tous les maux et utilisé comme bouclier par Travis, croupissait en fait depuis le début dans un congélateur, tel un bébé mal tombé. Cette découverte met aussi en avant une tare de Dexter particulièrement prononcée dans cette saison : l’absence de remise en question de ses jugements premiers. Une mentalité très fermée un peu saoulante à force… Et paf, l’épisode 10 nous balance une belle incohérence : Dexter fait référence à Deb de l’assassinat de sa mère, alors qu’il est censé lui avoir fait croire qu’il ne s’en rappelle pas pour faire croire qu’il n’a jamais été au courant pour sa relation avec son père adoptif, une chose déjà limite du fait qu’il soit à l’origine de cette enquête.
Mais le plus important et irrémédiable dans cette saison est la conclusion de cet arc biblique, alors que Dexter mit fin aux jours de Travis : Debra assista à la scène, l’amenant définitivement dans la confidence. Et c’est très fort, car si cette saison fut la plus mauvaise entre le manque d’évolution des personnages et un vide relationnel incroyable (aucune histoire d’amour), et qu’en plus l’enquête sur les témoins de Dieu mit un sacré temps à se lancer correctement (il faudra attendre l’épisode 9 pour que Travis devienne un véritable icône maléfique), ce twist nous donne méchamment envie de poursuivre l’aventure, pour voir si une personne peut être dans le secret de Dexter et rester avec lui malgré ce poids. Nouveau coup de mou pour la série, mais la formule marche encore très bien et l’envie persiste : une belle longévité qui perdure !
Oh mon dieu mais elle le sait maintenant ?! Mais que va t-il se passer, c’est énorme, le suspense est insoutenable ! Alors forcément, Dexter joue à nouveau la carte de « ah non, c’est la première fois que ça m’arrive, j’ai craqué ». Il l’a déjà fait avec Miguel et Lumen, donc on repassera sur l’originalité. Mais dès le premier épisode, son secret est percé par Debra qui découvre la sombre vérité : il est le Bay Harbor Butcher. On aurait pu se passer de ce rebondissement tonitruant, mais il est vrai qu’on se demande depuis longtemps comment elle pourrait réagir. Dénie, furie, dépression ? Un peu de tout, mais avec une bonne dose de Fuck, Shit et autre Jesus Christ. Plus encore, Dexter devra aussi faire face à Louis, le stagiaire de Masuka, lui aussi sur sa piste et qui a mit la main sur le bras du Ice Trick Killer, prêt à lui faire du chantage. On nous mettra aussi d’emblée sur la piste des trafiquants ukrainiens et leur marché de la prostitution.
Une intrigue qui s’installe donc rapidement, puisque avec le second épisode, ce qui sera l’histoire la plus importante de la saison prendra place. Deb tentant une méthode de sevrage avec surveillance rapprochée pour que Dexter ne tue personne, on assistera à des moments de manque de la part sa part, s’imaginant massacrer tout le monde comme si c’était la seule chose importante et advienne que pourra (épisode 3). Un moment particulièrement drôle et imaginatif. Puis finalement, elle se rendra compte que la passion de son frère est « un mal nécessaire », tolérant ses agissements. Un épisode qui nous offrira les prémisses de ce qui faisait tellement défaut à Dexter : l’amour. Sa rencontre avec Hannah McKay (Yvonne Strahovski, alias Miranda Lawson dans la saga SF Mass Effect et accessoirement l’une des plus belles femmes au monde) est magnifique, pleine de poésie, de tendresse et de maladresse. Une romance qui s’installera à la fin de l’épisode 6, apportant quelque chose de déjà plus solide que Joey Quinn et sa strip-teaseuse, la Nadia qui travaille au club appartenant à Isaak Sirko, le chef de la mafia ukrainienne. Cette relation permettra au gang des Koshka de tenir Quinn, obligé de coopérer avec eux et faire relaxer Isaak pour protéger Nadia. Mais les choses vont se gâter pour Dexter : Debra va se lancer dans une vendetta contre Hannah, sa nouvelle copine, LaGuerta va recentrer son enquête sur le Bay Harbor Butcher sur lui et avec la libération de Isaak, le moindre faux pas pourrait lui être fatal.
L’épisode 8 nous rappellera au bon souvenir de la paternité, car oui, Dexter a un fils et même deux beaux-enfants de son mariage avec Rita. Si déjà Harrison voit son père une demi-heure par jour gros maximum, il sera envoyé en pension chez des grands-parents avec qui il n’a aucun lien de sang (les parents de Paul, le père des enfants de Rita) pour finalement refaire coucou avec ses demi frères et sœur Astor et Cody, revenant pour leur seule participation des trois dernières saisons, mais en mode simple figurant. C’est moche… Mais pas autant que la découverte de l’homosexualité de Isaak Sirko, transformant le gros mafieux terrifiant en vieille tantouze sentimentale. Une histoire qui contrairement aux autres saisons ne durera pas jusqu’au bout : cet arc narratif prenant fin avec l’épisode 9, ou du moins la partie avec Isaak, Quinn sortant toujours avec Nadia, le réseau mafieux ukrainien n’en a pas fini. Mais bon, perdre le principal fil conducteur de la série avant la fin, ça la fout mal, et difficile de rebondir sur le pyromane, une belle déception pliée vitesse grand V.
De même, l’éternelle rengaine du « Dark passenger » est rébarbative, quoiqu’une évolution est possible ; Debra qui continue à s’acharner sur Hannah, ça saoule ; et au final la relation Dexter / Hannah s’en tient à une simple attirance mutuelle pas si intéressante. D’ailleurs, avec la traque de Debra contre elle et les risques de terminer en prison s’aggravant de jour en jour, Hannah décida de la tuer, s’attirant les foudres de Dexter qui n’hésita pas à la faire tomber pour le meurtre de Sal Price, celui qui écrivait un livre sur ses meurtres. La situation devient donc critique entre Hannah emprisonnée et Dexter poussé à bout par LaGuerta, qui n’hésita pas à l’arrêter sur des preuves falsifiées par lui, se couvrant ainsi de ridicule mais la confortant dans sa théorie sur le boucher de Miami. Tout une succession de dérapages qui aboutira à l’évasion de Hannah et au meurtre de LaGuerta dans une fin des plus stupides, activant notre cervelle de lézard qui détecte une alerte cruchasse. Alors que Dexter avait tout prévu, Deb s’est encore une fois mêlée de ce qui ne la regarde pas et a fait foiré le plan, la tuant avec son arme de service, faussant la trajectoire, et laissant au passage de nombreuses empruntes sur son chemisier.
Le bilan de cette saison est donc terrible puisque Debra a réagit comme une conne de bout en bout, la romance avec Hannah fut tout juste effleurée et la rupture de Dexter est stupide, LaGuerta a eu ce qu’elle méritait et il n’y aura eu au final qu’un petit méchant de faible envergure et pas très intéressant. Avec en plus le côté paternité qui devient ridicule de par son manque d’investissement, la saison marque des signes de faiblesses inquiétants, et heureusement que la saison 8 fut la dernière, car même si la formule reste bonne, la série commence sérieusement à s’embourber.
La saison 8 commence dans un flou total et la situation est déjà chaotique. Tout commence six mois plus tard et on ne sait pas comment s’est terminée l’affaire LaGuerta puisque sa mort est connue mais Debra n’est pas en prison. Comment Dexter a t-il sauver sa scène de crime fictive ? Un mystère. Tout juste sait-on que ce meurtre a tellement pesé sur elle qu’elle a quitté la police pour devenir chasseur de prime dans une police privée et qu’elle a coupé les ponts avec tout le monde. Une mort qui a aussi affecté Batista, qui est du coup est revenu dans les forces de l’ordre avec une promotion (lieutenant), reportant son projet de restaurant à temps plein. Le député chef Matthews est lui aussi de retour, suffisamment d’eau ayant dû couler sous les ponts depuis son affaire de la prostituée.
On reprend ensuite directement les bonnes habitudes, à savoir introduire directement celui (tient c’est vrai, il n’y a jamais eu de monstre au féminin, Lila ne pouvant clairement pas y prétendre) qui sera le grand méchant de la saison : le Lobotomie-Man (il n’a pas de nom officiel, il sera seulement appelé quelques fois le « Neurochirurgien »). Pour aider l’équipe dans cette enquête, le docteur en psychologie Evelyn Vogel (Charlotte Rampling) se portera volontaire. Un personnage intriguant qui dévoile dès les prémices son appartenance au passé de Dexter, savant exactement qui il est et que son code du « meurtre moral » lui vient de Harry. La raison est simple : c’est elle qui avait orienté Harry vers ce code et qui l’avait aidé à le canaliser.
Sa vraie rencontre avec lui sera indispensable car le nouveau serial killer en a après elle – sans doute un ancien patient – et l’aide de Dexter pourrait lui sauver la vie. Mais comment pourrait-il la protéger quand les morts s’accumulent autour de lui et que sa propre sœur le déteste et adopte un comportement autodestructeur ? Incapable de quoi que ce soit et son cas atteignant une gravité telle qu’elle songe à confesser le meurtre de LaGuerta, Dexter se tournera vers Vogel, misant tout sur ses talents de psychologue. Un essai brillant puisque Debra va arriver à la conclusion que si son père s’est suicidé parce qu’il croyait avoir créé un monstre, elle devrait en faire de même, mais pas sans l’entraîner avec elle dans la mort. Ainsi, dans l’épisode 4, elle précipitera la voiture dans une étendue d’eau, espérant envoyer deux âmes perdues aux enfers. Comme quoi il faut avoir touché le fond pour remonter : cet incident la ramènera sur le droit chemin, prêtant même main forte à Dexter lorsque Vogel sera enlevée, nous faisant croire à la fin du Neurochirurgien. Que reste t-il alors ? Une promotion de sergent à décerner, un fils de riche potentiellement meurtrier ? L’espoir nous quitte déjà : aucune intrigue digne de ce nom alors que la saison est bien avancée et qu’elle est la dernière.
Avec l’épisode 6, une piste mainte fois abordée va refaire surface : l’éternel complexe de dieu. Comme Vogel qui a créé Dexter, il souhaite à son tour reproduire ce schéma avec Zach Hamilton en lui enseignant le code. Une situation déjà exploitée avec un jeune semblable dans la saison 1, avant d’être réitéré entre autre en saison 3 avec Miguel Prada. Cet épisode se terminera aussi par un retour intéressant : celui de Hannah, dont la romance ne fut que trop brève, plus encore que celle avec Lumen. Elle se fait désormais appeler Maggie Castner et s’est entichée d’un très riche homme d’affaire, et sa visite était en fait le fruit de l’improvisation (des scénaristes). Par la suite avec l’épisode 8 on pensait la série reprendre un peu d’élan pour une possible bonne fin : la romance avec Hannah prend forme avec en prime un Zach en plein apprentissage et qu’on imagine parfait pour reprendre le flambeau et même Debra s’interroge quant à redevenir Détective (rétrogradation de deux échelons) à la police de Miami et accorde son pardon à Hannah. Puis en l’espace de quelques minutes tout s’effondre : Zach est retrouvé mort, tué par le Neurochirurgien qui n’était pas celui qu’on croyait, et l’investigation de Debra à l’encontre de Hannah amène une ombre menaçante, celle de son patron très intéressé par l’argent qu’elle représente de par son statut de fugitive. Dans l’épisode suivant les derniers éléments prennent place : on découvre que Vogel a en fait un fils qui a simulé sa mort trente ans auparavant et qu’il est le Neurochirurgien, et Dexter et Hannah ont décidé de refaire leur vie en Argentine avec Harrison une fois le problème Vogel réglé.
Une dernière ligne droite où le suspense est de mise entre le stress sur la possible arrestation de Hannah et la course contre la montre pour arrêter Oliver Saxon, alias le fils de Vogel. Mais l’espoir de voir une fin heureuse s’envole au fur et à mesure que l’histoire avance : l’étau se ressert autour de Hannah avec l’incident de l’hôpital, où elle a dû emmener Harrison pour un bobo au menton, et avec la mort de Evelyn Vogel, Dexter multiplie les erreurs et une autre tragédie semble inévitable. Pendant un instant on croyait vraiment que la série aurait pu se terminer sur une « mother fucker happy end » avec Debra redevenue policière et probablement mariée avec Quinn, tandis que Dexter, débarrassé de son hôte funeste libéré grâce à Oliver qu’il a livré à la police, coule des jours heureux avec sa nouvelle famille en Argentine. Pas une grande fin mais une fin de qualité qui achève chaque histoire sur une note positive, pleine de promesses quant à un avenir radieux. Mais seulement voilà, la série ne s’est pas arrêtée à cinq minutes de la fin de l’avant dernier épisode…
Les répercussions d’actes anodins peuvent être monstrueux. Et c’est comme ça qu’un connard de Marshall va libérer Saxon et ainsi démarrer une suite d’événements qui feront de la fin la série l’une des pires du genre. Bon, Debra est blessée et s’en remet doucement à l’hôpital, Saxon cours toujours et le voyage en Argentine est repoussé, mais tout était encore possible. Puis enfin Saxon est arrêté, Hannah et Harrison sont partis – même si on aurait put craindre à une interpellation de Elway, finalement déjouée – et tout aurez dû se passer pour le mieux, mais l’état de Debra s’aggrava : la mort cérébrale est prononcer et elle restera un légume à vie. Elle constituait la dernière attache de Dexter à sa précédente vie, et il aurait pu passer outre, mais non… La scène de vengeance est très intéressante et voir mourir celui qui a brisé la vie de sa sœur aurait pu lui suffir. Ainsi, on aurait assisté à un dernier épilogue en Argentine mitigé entre bonheur et nostalgie, avant une toute dernière scène post-générique à la Mass Effect 3 où l’on verrait Debra sortir du coma et ouvrir les yeux, posant le regard sur un Quinn resté à son chevêt des semaines durant, et semblant lui aussi revenir à la vie. Et paf, fin de qualité, applaudissement et larme à l’œil ! Quel talent, quel génie, quelle série inoubliable ! Mais non, bande d’incapables ! Respectant la promesse qu’il avait fait en saison 3, il va débrancher sa sœur, lui donnant lui même la mort, avant de se suicider en fonçant avec son bateau sur l’ouragan, laissant seuls Hannah et Harrison, abandonnant les dernières personnes qui comptaient sur lui. Mais le pire, c’est que ça n’est pas fini ! En effet, on ne sait comment, Dexter a survécu à son naufrage et est désormais bûcheron dans un endroit style le Canada, abandonnant ainsi doublement et délibérément sa famille, se punissant autant qu’eux. FIN
Un fin mauvaise ? Oh bah non, simplement la pire imaginable : on perd gratuitement un des personnages clef de la série et le héros tombe en disgrâce en nous faisant carrément regretter d’avoir connu la série. Une saison pas mauvaise, elle avait même le potentiel pour nous emporter loin (nouvel angle sur la jeunesse du personnage principal, retournements de situation, apprenti prometteur, méchant dangereux, histoire d’amour faible mais on s’y attache, et l’idée d’une nouvelle vie nous enchantait avec des perspectives de fins très bonnes), mais voilà : les derniers instants sont une aberration. Pour les scénaristes, la seule contrainte était de ne pas faire mourir Dexter. La belle affaire ! Sa mort serait en effet une piste encore plus stupide que celle choisie ! Dexter, sur le point de recevoir l’injection létale, revoyant tout les gens qu’il a tué : de quoi rendre encore plus rageurs les fans qui croyaient en ce héros. Mais de toute façon, dans les deux cas l’indignation est un euphémisme. Une fin tellement minable qu’elle restera en travers de toute une génération.
Un jour peut être nous en rirons, mais certainement pas avant longtemps, à moins que certains projets ne viennent rectifier le tir. En effet, la raison principale pour laquelle il était interdit aux scénaristes de faire mourir Dexter est que la chaîne Showtime se voit bien prolonger l’affaire, que ce soit avec une possible seconde série faisant office de suite, par le biais d’un spin-off ou même via un film à destination des salles obscures. Il faut dire que parmi toutes les séries policières qui pullulent sur nos écrans de télévision, celle ci fut particulièrement originale de par son orientation « dérangeante » (centrée sur un serial killer) et la qualité fut largement au rendez-vous, durant un temps du moins. Et les spectateurs ne s’y sont pas trompé : elle fut de très loin la plus regardée de l’histoire de la chaîne, et retrouver pareille locomotive n’est pas chose aisée. Mais cela peut-il réellement se faire ? La colère des fans est telle qu’il faudrait réagir très vite, sans quoi l’histoire se tassera et la série sombrera dans l’indifférence. L’exemple de Mass Effect 3 est un cas d’école : franchise d’une qualité inégalable, sa fin fut trop brutale, brouillonne, et ne tenant pas compte du parcours du joueur. Les fans ont crié au scandale, un DLC gratuit est sorti et a rallongé la fin d’une demi-heure tout en multipliant les fins alternatives et le résultat fut comme le jeu : bluffant. Donc à moins que pareil soin ne soit apporter ou qu’une annonce paraisse sur une possible alternative, l’image de cette série qui avait tout d’une série de légende risque de se voir rognée et les projets à venir risquent d’en pâtir sérieusement.