Sword of Mana
2004
GBA
Référence absolue en matière de RPG japonais, Square Enix (ou Squaresoft selon l’époque) avait il y a un temps une franchise de prestige : les Seiken Densetsu, qui comptent dans leurs rangs les inoubliables Secret of Mana de la Super Nintendo. Depuis, les trois jeux étant sorti furent de terribles accidents artistiques et commerciaux entre un épisode PS2 injouable (un bug faisant repasser au lvl1 après chaque chapitre) et deux volets DS ratés, l’un par linéarité exubérante, l’autre pour cause de tentative foireuse. Heureusement, ici on se rapprochera plus de la simplicité et l’efficacité des débuts.
Graphismes : 18/20
Le studio responsable du jeu est connu pour proposer des graphismes toujours au maximum des capacités des consoles utilisées, et même si Kingdom Hearts : Chain of Memories est techniquement supérieur (d’ailleurs du même éditeur), Sword of Mana est peut-être le plus beau jeu de la console. Reprenant le style 2D propre à la série, le jeu propose un rendu très convaincant, affichant des décors soignés, particulièrement détaillés, riches et colorés. Sublimés par une direction artistique magnifique, les décors bénéficient en plus d’une grande diversité testant à peu près tous les environnements possibles et imaginables. Les personnages et les bébêtes ne sont pas en reste, eux aussi très bien dessinés et possédant en plus un nombre de sprits hallucinant pour les personnages principaux, ayant chacun une centaine de mimiques utilisées. Les boss ne sont pas très impressionnants mais pas d’accident artistique ou au niveau lisibilité à déplorer. En revanche, on regrettera le manque de variétés pour les magies et coups critiques, changeant certes en fonction des armes, mais n’évoluant pas au fil des niveaux. Au moins on saluera les efforts de mise-en-scène, efficace malgré le support.
Jouabilité : 14/20
Il n’y a rien de plus agréable qu’un bon action-RPG dynamique et efficace, chose qu’est le jeu à bien des égares. On peut enchaîner les attaques sans attente avec une fluidité quasi totale (les ralentissements sont vraiment très rares et purement passagers), et à l’aide des gâchettes on peut sauter (L) ou utiliser la magie (R) avec aisance, permettant d’éviter de passer par le menu comme c’était laborieusement le cas par le passé, et même regagner des PM (L + A), chose très pratique. Chaque magie a une portée et une puissance différente en fonction de l’arme choisie qu’on répertorie en trois classes : entaille, frappe et perce. Certains ennemis ne sont sensibles qu’à un seul type, voir aucun, au quel cas la magie entre en jeu, avec encore une fois des sensibilités différentes. Un fait rapidement pénible vu la lourdeur du menu, et puis cela met surtout en pause l’action, un fait toujours nuisible. Autre fait pénible : les classes. Bonne idée dans l’absolue, mais naviguant en terrain inconnu sans la moindre indication, vous avez de grande chance – pour ne pas dire certitude – de passer irrémédiablement à la classe Barbare (si vous choisissez plusieurs domaines d’améliorations pour plus de polyvalence), une classe inintéressante spécialisée dans l’utilisation de la lance, dernière arme obtenue très tard dans le jeu. En parlant d’armes, ces dernières ne pourront s’améliorer que via la forge, principe qui rappelle le bon vieux temps, mais le constat est moins bon ici : les serres se font trop rares et les magasins ne servent à rien en dehors de l’accessoire. Mais parlons des choses qui fâchent vraiment : la difficulté et les sauts. Brillante idée dans l’absolu, les sauts sont souvent chaotiques, d’une imprécision insupportable, nous faisant même douter du chemin à prendre (se retrouver bloquer plus d’une heure au fameux saut de la grotte de la litho-jungle est un grand classique). Parlons ensuite de la difficulté. Tuer un petit monstre en deux-trois coups, bien sûr, mais quand une poignée vient à bout d’un boss, y compris pour le boss de fin plié en moins de dix minutes, on se sent floué. Avec une durée moyenne de quelques secondes à chaque boss, on se sent floué, insulté. Une facilité si extrême est incontestablement une frustration qui gâche le plaisir, pourtant si grand face à une dynamique pareille.
Durée de vie : 15/20
On table dans la moyenne du genre, à savoir pas plus de 15 heures. Les missions annexes étant quasi inexistantes ou alors chiantes, les seules choses gonflant ce chiffre sont le level-up des armes, persos et magies. Ce procédé est très long et fastidieux, et la récompense est pour ainsi dire nulle, pour ne pas dire handicapant vu la facilité du titre, on préférera foncer. Il y a après toujours la possibilité de faire le scénario de l’autre personnage, permettant de voir l’histoire sous un autre point de vu, mais la version avec la fille de Mana est en tous points moins bonne entre une jouabilité restreinte et une impression de moindre importance. Pire encore, une certaine incohérence se développe sur la fin avec des redites, et au final les différences sont minimes.
Bande son : 17/20
Incontestablement l’un des gros points fort du jeu. La saga a toujours bercé dans des mélodies sublimes, et même si on ne peut égaler la force et la poésie des premiers temps, on assiste à un excellent compromis entre innovation et nostalgie, tentant par moment des variétés plus expérimentales et techno. Une ambiance sonore soignée à laquelle on peut ajouter des bruitages de qualité dans le style de Illusion of Time, donc forcément un choix judicieux tant il représente une période charnière du genre.
Scénario : 11/20
Aspect le moins convaincant du jeu, son histoire plombe un peu l’aventure. Deux amis d’enfance qui se retrouvent après une décennie d’errance (sauf pour la fille qui a plutôt eu la belle vie pendant ce temps – mais ça se paye) puis qui se retrouvent embarqués dans la revanche de Vandole, celui qui avait été vaincu par les chevaliers Gemme du temps de leurs parents. Malgré une bonne mise en scène, deux histoires – bien que assez incohérentes entre elles arrivé à la seconde moitié du jeu – et deux temporalités, l’univers est moins riche qu’il n’y paraît, notamment à cause de la faible importance des esprits et de Mana au cœur de l’intrigue. Les rebondissements sont classiques, et même la fin ne surprend guère tant le miracle n’était plus permis. Du classique efficace, mais par rapport aux épisodes de la Super Nintendo, le niveau est clairement à la baisse.
Note Globale : 15/20
Bien souvent les éditeurs prétextent des limitations techniques d’une console pour proposer un jeu laid, mais ça n’est jamais le cas avec Square-Enix, toujours à la pointe en la matière. L’aventure se lance et le bilan frôle la perfection : un style action-RPG ultra dynamique et jouissif malgré la lourdeur des menus, une histoire à priori sympathique, des graphismes d’une beauté hallucinante, le tout bercé par de divines musiques. Un jeu à l’aspect presque irréprochable donc, mais le fond ne cachera pas son jeu bien longtemps. Un côté très linéaire de l’aventure se fait rapidement sentir, de même que le manque de précision de certaines actions. L’histoire patauge immanquablement à force de passer à côté des objectifs, ou simplement faute d’intérêt énorme, et le jeu en pâtit forcément. Rien de rédhibitoire – sauf peut-être le fameux saut de la grotte de la litho-jungle -, mais le plaisir de jeu s’en retrouve amoindri, et si le jeu reste une valeur sûre de la console et aussi en terme de jeu de rôle, il ne parvient malheureusement à se hisser au niveau de ses illustres ancêtres.