Power of Faith
Le bruit des sirènes retentit, les médecins sont en panique. Tout est flou autour de moi. Est-ce un effet secondaire de la morphine ? Je n’arrive pas bien à ressentir ce qui se passe, tout juste entend-je ce qu’ils se disent.
– Bordel, qu’est-ce qu’il s’est passé ?
– Difficile à dire, on l’a retrouvé comme ça.
– Où ça ?
– Dans une ruelle. Et c’est pas tout… A côté de lui il y avait sept corps qui gisaient.
– Morts ?
– Plutôt deux fois qu’une, une vraie boucherie ! Un décapité, un autre la tête broyée, un les deux bras arrachés, mort vidé de son sang. J’en passe et des meilleurs !
– Et lui, on a quoi ?
– Jambe droite cassée, bras droit aussi avec hémorragie interne, multiples lésions crâniennes, côtes fêlées, brûlures aux mains et blessures de couteau aux bras et au ventre. Il a déjà perdu près de trois litres…
– Mais pourquoi on s’acharne ? Il va crever d’une minute à l’autre !
– Normalement oui mais ses fonctions sont stables.
– Mais comment est-ce possible ?
– On a déjà stoppé l’hémorragie et ses blessures ont cicatrisées.
– Mais qu’est-ce que… Ses yeux bougent !
– Arrêtez de gueuler comme ça, je suis pas sourd. Si je comprends bien je vais bien ?
– Restez assis monsieur, vous êtes fou !
– Elle va bien ?
– Qui ça ?
– La fille voyons ! A votre avis pourquoi j’ai fracassé ces types ?
– C’est vous seul ?
– Bon je perds mon temps ici moi…
Après un bref état des lieux je me rends compte qu’ils n’ont pas touché à mon portefeuille. Ainsi ils ignorent mon identité. Il est temps…
Avec une vitesse phénoménale, je me débarrasse de mes perfusions, puis, avec un puissant coup de pied, éjecte la porte arrière de l’ambulance, m’élançant dans les airs. Une aura bleue recouvre l’ensemble de mon corps et dessine deux immenses ailes flamboyantes de trois mètres d’envergure. Très vite je peux me cacher dans les nuages, me donnant l’occasion de me remémorer cette éprouvante journée.
Alors que je prenais tranquillement le tram pour la fac, je regardai paisiblement le paysage urbain défiler sous mes yeux. Soudain, une fille d’une vingtaine d’années, se trouvant dans une ruelle, fut violemment frappée au visage par un type peu inspirant. Puis il la bloqua par terre, le reste je ne pouvais que l’imaginer, le tram continuant à avancer. En quelques secondes j’aurai été à l’arrêt et il ne m’en aurai fallu guerre plus pour revenir sur cette scène de crime et peut-être sauver cette fille. Un contre un, pourquoi pas ? Il avait l’air certes costaud mais j’étais moi même musclé et j’avais fait sept ans de karaté. Des mots comme « folie », « danger », « mort » luttaient dans mon esprit contre des « non-assistance à personne en danger », « héroïsme », « devoir », « le bien ». Que faire ?
Je descendis finalement à l’arrêt, bien décidé à la sauver. Mais tout de même conscient du risque. Je prévins (en vain ?) un passant du probable danger de la fille, et prochainement du mien, et qu’il devait donc prévenir qui de droit (police et ambulance, sait-on jamais).
C’est donc le cœur vaillant que je courus au secours de la « princesse ». A mon arrivée sur place je trouvai effectivement la fille et son agresseur, prêt à passer à un autre niveau. Et dans l’élan de ma course, je lui envoyai le plus violent de mes coups de poing, lui fracassant le nez, la mâchoire, lui déchaussant quelques dents, et avec ma bague, lui arrachai une partie de sa joue gauche. Et avant qu’il n’ai eu le temps de tomber, je le relançai d’un violent gauche dans la poitrine, lui broyant probablement bon nombre de ses côtes. Et là, ce fut le drame…
Juste derrière se tenaient pas moins de six de ses copains, sortant déjà couteaux et autres canifs. M’emparant de toute ma colère disponible, je contractai le plus fort possible les muscles de mes bras et serrant mes mains comme un malade. Le premier s’avança vers moi, et avec toute la force que je préparais, je ramenai mes poings de chaque côté de sa tête avec une violence terrible, à tel point que mes mains traversèrent son crâne. Le deuxième n’eut pas le temps de comprendre que déjà mon coude perforait sa cage thoracique, stoppant net l’activité de son cœur. Puis d’un coup de pied je retournai le couteau du troisième en plein dans sa gorge et avec un second coup sa tête tomba par terre. Les quatrième et cinquième me prirent sur le côté, m’entaillant les bras puis m’enfonçant chacun leur lame dans le ventre. Et avec une force sans pareille, je me saisis desdits couteaux que je plantai entre leurs yeux. Puis, les ressortant de leurs cadavres, je tranchai les bras du dernier qui mit quelques minutes à se vider de son sang.
Et dans cet excès de rage, mon corps se mit à brûler d’un bleu vif avant qu’une vive douleur me fit exploser le bras et la jambe. Puis après, je me suis évanoui à cause de la douleur inouïe.
La suite, vous la connaissez.
N’empêche, je suis actuellement à quoi, 200 mètres voire 500 d’altitude ? Quoique, c’est nuageux par ici… J’ai peut-être dépassé le kilomètre, je m’y connais pas bien. Mais bizarrement, je ne souffre d’aucun manque de chaleur, cette aura bleue m’a en plus soignée toutes mes blessures. Classe ! Mais quand même, faut que je me trouve des lunettes d’aviateur, ça fouette les yeux la vitesse. Je fais quoi, du 200km/h ? Sans forcer en plus. Je vais peut-être tenter une accélération…
L’air s’engouffre dans mes cheveux les faisant virevolter (merde mon brushing !), mes joues se déforment, mes vêtements claquent contre mon corps, le son du frottement avec l’air m’explose les tympans. Pas de doute, je peux aller très vite !
Je me mets a penser à toutes les possibilités offertes par un tel pouvoir : tourisme, super-héros ou tout simplement des trajets quotidiens plus courts. Et ça tombe bien puisque je n’ai pas mon permis ! Je suis censé le repasser une troisième fois en novembre. J’ai bon espoir car mon meilleur ami Jérémy l’a eu lors de son troisième essai. Et puis pour les trajets cours, la voiture vaut peut-être mieux que les grandes ailes bleues, et puis c’est plus discret. Néanmoins, mon pouvoir me permettra de me rendre tranquillement dans des endroits plus isolés et attrayants comme la Lozère. Je connais une personne qui habite à 15 km de chez moi mais j’aurai plus de chance de la voir en Lozère, pourtant située 150 km plus loin. Je pourrai aussi m’envoler vers Paris et retrouver un autre de mes meilleurs amis : Willy. Tant de pouvoir, tant de possibilités et pourtant je suis seul. Si je me fais remarquer on me pourchassera, si on me découvre on me tuera et si j’en parle à quelqu’un je le mettrai en danger.
Ah, voilà le parc près de ma maison, je n’ai plus qu’à me poser, rentrer et réfléchir à tout ça. De toute façon, je ne maîtrise probablement qu’une petite partie de mon pouvoir et peut-être arriverai-je à œuvrer discrètement ?
Et malgré cette solitude et ce désespoir qui me gagnent, j’irai de l’avant.
Épisode I
L’air est glacial et le sol est recouvert d’une épaisse couche de neige. Au fur et à mesure de ma marche sur ces terres inhospitalières, je sens mes forces me quitter. Et je ne suis visiblement pas le seul à l’avoir remarqué : cela fait presque vingt minutes qu’une meute de loup me piste. Heureusement, j’aperçois au loin une grotte où je pourrai me cacher.
Mais à peine m’étais-je posé que l’haleine putride d’un ours, visiblement affamé de ne pas hiberner, me prit au nez. Et quelle puanteur ! Mais comme j’étais trop fatigué, je me découpai le bras en échange du loyer. De toute façon, ça repousse en quelques jours grâce à mon pouvoir. Et d’après Nounours, c’est comme ça que je l’ai appelé, ça se digère très bien l’humain.
J’ai passé les deux semaines suivantes dans cette grotte, histoire de reprendre des forces et que mon bras, et après ma jambe, repoussent. Durant cette période, je buvais la neige fondue et mangeais les quelques animaux égarés (deux chauve-souris, un oiseau non-identifié et un rongeur bizarre). Pour mon départ, le ciel était dégagé et la chaleur reprenait ses droits. Et même si ce jour signifiait de reprendre ma quête pour sauver mon amour, j’avais entretenu une certaine amitié avec Nounours et se dire au revoir fut très dur. L’enlaçant une dernière fois, les larmes aux yeux, je lui fis un petit bisou sur la joue et lui laissa en cadeau l’amulette de Torman reçue en cadeau de la main du Roi en personne lors de la fameuse croisade de 2015.
– Merci Antoine pour ce talisman, je le porterai en ton souvenir.
– C’est moi qui te remercie Nounours, sans toi je serais probablement déjà mort.
– Et moi donc ! Elle a bien de la chance de pouvoir compter sur toi. Je te souhaite bonne chance pour ta mission.
– Adieu mon ami.
Puis l’instant d’après, je lançai une boule de feu dans le ciel pour appeler mon fidèle dragon Kirsh.
Je quittai donc l’Islande et me dirigeai vers la prison de la tour de glace du pôle. Je n’ai pas le droit à l’erreur sinon elle mourra. Son exécution est prévu pour bientôt. Mon plan était simple : casser une des vitres du troisième en vérifiant que personne ne s’y trouve, puis casser le mur de derrière, descendre en rappel jusqu’au rez-de-chaussée et enfin passer la porte des sous-sols. De là je libèrerai les prisonniers de niveau 1, casserai le mur de derrière et accèderai aux cellules où je pourrai la trouver. Malheureusement, on m’attendait… Tout se déroula comme prévu mais au moment de ressortir, les gardes les plus puissants étaient prêt à me cueillir. Mais je réussis à me cacher dans un renforcement du mur dans la salle de niveau 1 avec Alina. Nous y passâmes près de trois heures, le temps que les troupes se retirent. Passant par un chemin détourné, nous nous retrouvâmes dans une pièce circulaire protégée par quelques gardes et Christian Bale. Mais une ouverture possible me sauta aux yeux et…
» They say we’re young and we don’t know
Won’t find out till we grow
Well I don’t babay that’s true
Cause you got me and baby I got you
Babe, I got you babe, I got you, babe.
Debout les campeurs et hauts les cœurs ! Oubliez pas vos bottes parce que ça caille… «
Putain de réveil… Ah là là ! J’étais en train de faire un rêve super pourtant ! Tiens, ça me fait penser, est-ce vrai ? Je me mis à contracter très fort mon avant bras. Une chaleur monta progressivement et une flamme bleue tournoya autour. Un large sourire se dessina sur mon visage. Il fallu que j’en eus le cœur net… Après m’être levé du lit, j’ôtai le haut de mon pyjama et contracta fortement mes muscles du dos. Et comme prévu, deux grandes ailes bleu flamboyaient derrière moi.
– Pas de doutes, j’ai bien le pouvoir !
Épisode II
Une nouvelle journée commence… Faire comme si de rien n’était, en voilà un challenge ! Je n’ai qu’à faire comme tout les jours : ouvrir mes volets, allumer mon ordi, me laver, … Houa ! Quel teint resplendissant, quelle netteté de peau ! Y’a pas à dire, la régénération ça change la vie. Bon par contre si je passe 15 minutes à m’admirer je vais finir par être en retard. Bon, donc nourrir le chien, le faire sortir, me nourrir, m’habiller, prendre mes affaires et verdict ? 7h20, en retard comme d’habitude… Et si ? Non, pas aujourd’hui, le ciel est trop dégagé.
Après quelques six minutes de marche (normalement quatre mais c’est dur le matin…) j’arrivais enfin au tram, lui aussi en retard. Quelle chance : me voilà avec un retard supposé d’un quart d’heure. Si ça continu je vais arriver après le prof… Mais finalement non puisqu’à mon changement au Corum je croisai ledit professeur de proba, pas spécialement pressé lui non plus. Par contre, pas moyen de me faire repérer parce qu’il voudra me parler, faire le prof sympa et faire comme si c’était mon ami. Je pense qu’être « ami » avec un prof, à la limite, mais uniquement pendant les cours, pas en dehors. En plus dans le tram je suis plutôt du genre à ne pas me mélanger et rester adossé contre le mur à écouter Virgin radio.
Et donc comme prévu, je me pointai avec 15 minutes de retard, suivi de près par le prof. S’en suit un TD classique mais plutôt amusant grâce à un atelier énigme derrière moi. Une journée banale et chiante en somme. Par contre, je devais retrouver un de mes meilleurs ami pour le repas : Hugo. Et comme à chaque fois, on se prend un panini ou un sandwich pour manger tranquillement dans un des coins de verdure, qu’importe le temps. Et à peine j’arrivais au Fournil St Nicolas que se pointa Hugo, une synchronisation inédite !
– Yo Hugo !
– Ah, tiens. Salut mec ! Dur le retour après les vacances…
– J’ai cru comprendre au vu des photos sur ton Facebook. Pas de nouveaux trous noirs ?
– Nan, pas c’te fois. Et toi ?
– Bah y’a eu mon frère qui est venu, c’est déjà bien. (Et sinon j’suis devenu un dieu avec des ailes bleus et une force extraordinaire)
Tiens mais qu’est-ce qui ce passe ? Je me sens bizarre, mon cœur s’emballe. Alina ? Non, c’est pas possible… Merde, tout devient bleu devant mes yeux avec un halo jaune autour des gens. Et c’est quoi en violet ? On dirait des tracés… Y’en a deux qui se rapprochent !
– Hugo ta casquette !
– Heu ? Tiens…
Après avoir mit sa casquette, restons discret, je libérai toute l’adrénaline accumulée avec ma nouvelle vue et je déployai deux ailes bleues beaucoup plus grandes et mieux formées. Et au lieu de se contenter d’être des flammes, elles se matérialisèrent pour ressembler à s’y méprendre à des ailes de dragon. Le reste de mon corps, recouvert d’une aura bleue, se développa de manière fulgurante, doublant ma masse musculaire. Et c’est avec une vitesse hallucinante que je fonçai vers le point de rencontre des lignes violettes au moment précis où un vélo était supposé être percuté par une voiture. Et dans mon élan, je soulevai cette personne et son vélo pour les déposer plus loin sur le trottoir. Tout en veillant à garder la tête baissée, de même que la visière de la casquette, avant de finalement m’envoler le plus haut possible.
Bon, normalement seul Hugo connait mon secret. Dire que j’aurai même pas tenu un jour… Ah ça sonne !
« Tu passes ta vie le jour, la nuit assis devant l’écran.
Tu n’as besoin de personne sonne s… «
Salut Hugo ! Quoi de neuf ? Ah toi aussi t’as remarqué ? Pas très discret ouais… Ça m’est arrivé hier alors que je me battais contre quelques clampins. Exactement sept, comment t’as deviné ? Dans le Montpellier + ? Ah, j’ai raté une occasion de passer dans le journal… N’empêche, on capte super bien là haut. Bah là je fais du surplace au dessus du zoo. A genre deux kilomètres d’altitude histoire qu’on croit à un oiseau. Non parce qu’il parait que l’œil humain affiche tout ce qui est à plus de 200 mètres au même plan. Pratique ! Bah sinon je te propose dans un souci d’équité de réfléchir à ma situation autour d’une table ronde avec Jérémy, Pascal et Alina. On n’a qu’à dire le week-end prochain. Bah celui là je suis prit et s’est censé être le plus beau de ma vie. Alina, absolument. On se tient au courant ? A plus. Et au fait, je te reporterai ta casquette mdr. (oui oui, mdr à l’oral)
Bip Bip… (pour dire que ça raccroche)
Bon, maintenant il ne s’agirait pas de rester planté dans le ciel trois plombes ou je vais finir par attirer l’attention :
– Tiens maman, regarde !
– Qu’est-ce qu’il y a ?
– Y’a un drôle d’oiseau qui vole sans se déplacer.
– On appelle ça faire du surplace. Et… Oh mon dieu ! C’est surnaturel il faut immédiatement alerter la police, la CIA, le FBI et Interpol ! Ça tombe bien, j’ai justement leur numéro personnel.
– Bonjour, vous nous avez appelé ?
– Oui, c’est là dans le ciel, regardez !
– Mais c’est bien sûr, Antoine Lepage ! Cela fait depuis l’affaire des sept morts qu’on le cherche ! Il ne nous échappera pas !
Certes j’exagère un chouïa mais bon, soyons prudent… Bah tiens ! Justement l’enclos des ours ! Après mon histoire avec Nounours on va super bien s’entendre. Mais comme c’était un rêve, au cas où, je vais plutôt me poser à côté. Et voilà ! Quand même, c’est assez désert le zoo aujourd’hui… Remarque, coup de bol ! Pom pom pom. Ah merde…
– Mais qu’est-ce que vous faites là monsieur ?
– Bah ça se voit pas ? Je visite.
– C’est-à-dire que c’est fermé…
– Diantre ! Mais comment-se fait-il que je sois rentré ?
– J’allais vous le demander.
– Par la porte pardi !
– Mais elle est fermée… Vous ne devriez pas être là.
– Je vois… Oh mon dieu derrière vous ! (Méga sprint !!!)
– Eh arrêtez-vous !
Et c’est à ce moment là qu’une nouvelle facette de mon pouvoir se manifesta : la rapidité de motricité, à savoir courir à quelques 150km/h. Ça fuse !
Et après avoir semé le garde, quelle ne fut pas ma chance : un nuage accompagné d’un vent d’ouest ! Autrement dit le camouflage parfait pour m’escorter jusqu’à chez moi, tant pis pour l’anglais… C’est d’autant plus dommage que j’allais recevoir la note de mon magnifique exposé d’anglais sur le micro-onde, nouvelle découverte imputable au désormais célèbre Bob Johnson. Hop hop flip flap, tel un automatisme. Ce pouvoir m’apparait maintenant comme une évidence, une partie manquante de mon être. Et c’est avec ces pensées philosophiques que je me laissais flotter dans ce nuage si rafraichissant (= putain ça gèle là dedans). Mes batteries semblent donc limitées puisque le froid commence à m’atteindre. Nouveau sujet de pensée : cette limite serait-elle un handicap en cas de combat épique contre un super-méga-vilain ?
Tiens, voilà de nouveau le parc… Quelle heure est-il ? 14h11. Heum heum…
– Coucou, je suis rentré !
– Déjà ?
– Bah oui, le prof d’anglais n’était pas là…
Piouf, j’suis crevé moi…