Film mystérieux, il avait connu une campagne de pub de grande qualité, en perdant complètement le spectateur sur la nature même du film. Est-ce une histoire de bois hantés ? De monstres mystiques ? D’Amish ? Il faut dire qu’à l’époque M. Night Shyamalan était encore en odeur de sainteté, malgré l’accident d’Incassable. Après tout, son dernier film parlant d’extraterrestres, on pouvait s’attendre à tout.
Le film nous propose donc de découvrir un village un peu spécial. Il y a de longues années, un groupe de personnes (dont William Hurt, maire du village, Brendan Gleeson et Sigourney Weaver) ayant perdu un être cher assassiné froidement se sont rassemblées, et ont décidé de quitter à tout jamais les villes, terres de désolation et de barbarisme. Ils vivent désormais dans leur petite communauté en autarcie, paisibles. Mais leur village vie dans une crainte constante : la forêt qui les entoure est habité par des créatures malfaisantes. Néanmoins, un accord a été passé : s’ils ne profanent pas leur forêt, ils n’entreront pas dans leur village. Une situation qui les coupent aussi du monde extérieur, les privant notamment d’aide médicale. Voulant aider, Lucius Hunt (Joaquin Phoenix) souhaiterait partir quérir des médicaments, mais les lois sont claires : la ligne ne doit jamais être franchie. Nourrissant un amour grandissant pour Ivy (Bryce Dallas Howard), il s’attirera malheureusement les foudres de Noah (Adrien Brody), lui aussi éprit d’elle, qui par sa démence l’attaquera violemment. Traverser la ligne va alors devenir primordial pour le sauver.
Le film possède immédiatement une ambiance très personnelle entre cette petite communauté énigmatique, ses codes, et surtout cette forêt terrifiante qui abriterait les pires démons. On y retrouve une dichotomie du bien et du mal, symbolisée par un code de couleurs : les créatures sont attirées par le rouge, et le jaune protège les villageois. Si on retrouve aussi certains codes chrétiens intégristes ou amish, la principale religion tourne autour de « ceux dont on ne doit pas en parler » (les créatures des bois). Alliant un style visuel pesant et froid à une musique belle et angoissante, l’ambiance du film est particulièrement réussie. Les personnages sont eux aussi très bons entre un maire charismatique, une aveugle envoûtante, un grand naïf attendrissant, et un psychopathe qu’on voit tour à tour comme innocent puis dangereux. Leurs interprétations les rendent encore meilleurs. Pour ce qui est de l’histoire en elle même, elle reste assez sommaire, malgré quelques bonnes idées disséminées, mais donnant lieu à une fin plutôt inattendue et intéressante. Une petite faiblesse scénaristique qui n’empêche pas le film d’être très bon, reposant sur un suspense pesant et une ambiance parfaitement retranscrite.