Les Garçons et Guillaume, à table !

Les Garçons et Guillaume, à table !
2013
Guillaume Gallienne

En voilà une surprise de taille : alors que la bande-annonce laissait entendre une sombre bouse sur un homosexuel refoulé, le film a attiré pas loin de trois millions de spectateurs, sans compter bien sûr la razzia qu’il a fait aux derniers Césars. Meilleur montage, meilleure adaptation, meilleure première œuvre, meilleur acteur et meilleur film. Cinq prix dont le plus important de tous. Mais comment est-possible ? La bande-annonce est-elle à ce point préjudiciable au film ? Sans parler d’excellence, il faut bien avouer que le film n’est pas dénué de qualités.

Adapté de la pièce de théâtre de Guillaume Gallienne retraçant sa propre vie, le film mélange habilement des extraits de la pièce avec les flash-back correspondants. De son voyage en Espagne jusqu’à la fin de scolarisation en Angleterre en passant par un internat pour garçons, Guillaume nous raconte son parcours initiatique à la recherche de lui-même, perdu entre son amour mimétique pour les femmes, spécialement sa mère, et son entourage voyant en lui une tarlouze finie. Jouer les filles est pour lui une occupation divine, mais peu enclin à la sexualité, il se laissera peu à peu convaincre de son homosexualité par ses proche, n’ayant aucune opinion personnelle. Piégé dans une situation qui l’amuse, il n’en reste pas moins blessé par le rejet quasi général qu’il subit.

Le premier des prix au moins partiellement mérité qui saute aux yeux est le montage. Le point de vu narratif du film n’est pas mauvais puisqu’il propose de vivre toute une succession d’événements dans un ordre chronologique et montré au présent, tout en le racontant avec un point de vu omniscient, puisque dit par Guillaume des années plus tard sur une scène. La réalisation est elle aussi plutôt bonne, elle avait d’ailleurs été nominée, les couleurs ressortant de façon surréaliste, soulignant ainsi la vision décalée de son héros. Un héros particulièrement bien interprété, et encore heureux puisqu’il ne s’agit pas d’un rôle de composition mais d’une auto-représentation. Le prix décerné n’est alors pas forcément judicieux, mais on lui accorde de bon cœur. Côté histoire, c’est là que les pires craintes résidaient, mais cela va s’avérer être une bonne surprise. Loin de la caricature homosexuelle que d’aucun suspectaient, le film dresse le portrait d’un « homme » simplement différent, dont le comportement relève plus de l’autisme ou de la schizophrénie, et on assiste à quelque chose d’assez psychologique. De là à parler de meilleur film de l’année, il ne faut pas non plus abuser. L’œuvre est singulière et touchante de par son ton personnel, drôle par moments et plus solennel à l’occasion, aboutissant à un film réussi, mais pas autant que ses prix pourraient laisser croire.

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