Le Hobbit : la Bataille des Cinq Armées

Le Hobbit : la Bataille des Cinq Armées
2014
Peter Jackson

Cette fois semble la dernière : entre un Peter Jackson qui y a passé beaucoup trop de temps à son goût et des héritiers de J.R.R. Tolkien peu enclin à céder les droits de ces autres œuvres, il semblerait que cette troisième partie de la trilogie du Hobbit soit la dernière incursion cinématographique en Terre du Milieu pour un bout de temps. Triste tant aucun autre film d’héroïque-fantaisie ne tient la comparaison avec Le Seigneur des Anneaux, à part peut-être justement ce préquel, toujours mené de main de maître avec une ambition aussi grande que son budget, permettant un visuel parfois meilleur (même si malheureusement, depuis Un Voyage inattendu, le grandiose des décors se perd un peu). Il est donc l’heure de faire nos adieux à une immense saga, en espérant le rendez-vous à la hauteur de l’événement.

Une flèche décochée par Barde (Luke Evans) et s’en est fini de Smaug, de leur quête. Thorïn (Richard Armitage) a réussi à reprendre sa montagne et il peut désormais gouverner en paix. Vraiment ? Un plus grand danger s’apprête à s’abattre sur eux : Sauron. Retrouvant ses pouvoirs, il a mit sur pieds deux armées d’orques prêtes à se lancer à l’assaut de la montagne. Au même moment, une armée de nains marche dans la même direction pour stopper la tentative d’assaut d’une armée elfe, très intéressée par le trésor. Deux armées face à deux armées de Sauron, avec les rescapés hommes de Lacville au milieu de la bataille. La montagne d’Erebor sera le théâtre d’une guerre entre cinq « armées » dont dépendra l’avenir de tous.

Avec La Désolation de Smaug qui tournait beaucoup autour du Dragon, on avait pas mal eu tendance à assimiler la quête d’Erebor au dragon, et le voir mourir comme une merde au bout de dix minutes de film, ça choque. Mais finalement non, le but premier était de récupérer le trône, et pour cela il faut lutter contre les assaillants dans une ultime bataille. Scénaristiquement le film s’en sort pas mal, rebondissant rapidement et efficacement, arrivant même à continuer à donner de l’importance à Bilbon (Martin Freeman) alors qu’on aurait pu croire son implication révolue. La transition vers la trilogie originale est bien négociée, même si on retrouve l’éternel problème du sens de la vie après avoir vécu tant de choses. Goûter au frisson de l’aventure, trouver un but à sa vie, pour finalement redevenir l’être insignifiant qu’on était. L’amour aurait pu en être la réponse appropriée, mais ça n’est pas le cas. Mais bon, Le Retour du roi n’apportait pas tellement de meilleure réponse non plus. Une belle histoire qui trouve donc une conclusion à la hauteur, sans décevoir ni subjuguer.

D’un point de vu technique en revanche, il y a déjà plus de choses à reprocher au film, bien que pas spécialement spécifiques à cette troisième partie. Ignominie qui nous est encore une fois infligée, le HFR (doublement du nombre d’images projetées par seconde) prouve une fois de plus la connerie de son principe. L’image est tout sauf fluide, massacrant l’esthétisme du film, et pire encore, lors des plans rapprochés avec des personnages en mouvement, c’est tout simplement vomitif, donnant une impression d’accélération. Entre ça et la 3D bâclée qui obscurci l’image dans des propensions énormes, une bonne partie de l’immersion s’en retrouve ruinée. En découle alors une overdose d’effets spéciaux rendant les décors surréalistes et peu crédibles, notamment lors du sauvetage de Gandalf (Ian McKellen) par Galadrielle (Cate Blanchett), Sarouman (Christopher Lee) et le chef de Faucombe (Hugo Weaving). Déjà que la séquence semble sortir de nulle part, elle nous assomme en plus d’effets ratés ou tapant trop dans la surenchère. Difficile dans pareilles conditions de dire si la mise en scène est bonne ou si le design est agréable, mais en l’état on est loin de pouvoir les apprécier. Côté déception encore, citons cette fameuse bataille. Pour commencer il n’y a pas cinq armées mais plutôt trois (c’est pas parce qu’il attaque en deux fois que ça ne reste pas l’armée de Sauron) et une poignée d’hommes non entraînés. Et question spectacle, la bataille fait petit joueur comparée à celles du Seigneur des Anneaux, surtout que les trolls sont atrocement sous-exploités, de même que les verres géants, au final complètement inutiles. « La bataille des cinq armées », ça claque, mais dans les faits pas tant que ça, surtout comparé à ce qui a déjà été fait.

Pas de surprises donc, Peter Jackson a ressorti la même formule et s’en sort à peu près de la même manière. Son travail de réécriture sur le scénario de ce préquel est louable, arrivant à rendre ce conte pour enfants presque aussi intéressant que sa précédente trilogie, et grâce à un budget quasi illimité, il a amené le spectacle à un degré supérieur (à condition de profiter du résultat dans de bonnes conditions, sans HFR ni 3D). Bien sûr, et c’est imputable au matériau de base, les prouesses techniques ne rattrapent pas l’envergure moindre de cette épopée, mais la fibre de l’aventure est palpable, communicative, surtout dans la première partie (la plus épique), et malgré un casting moins prestigieux et convaincant, il aura réussir à rendre la plupart de ses héros emblématiques, rajoutant même avec brio Tauriel (Evangeline Lilly), brillant personnage mais un peu sous exploité, contrairement à Legolas (Orlando Bloom), qui globalement n’a rien à foutre ici. Ainsi, sans vraiment valoir ses prédécesseurs, cette trilogie fut tout de même excellente, et cette troisième partie ne change rien au constat. Sur un air sublime de Billy Boyd, c’est donc le cœur lourd qu’on dit au revoir à cet univers, et j’espère qu’il n’y aura pas de remake de cette saga avant plusieurs générations.

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