Fatima

Fatima
2015
Philippe Faucon

Encore sous le choc du somnifère ambulant qu’était la cérémonie des Césars 2015, beaucoup ont acclamé celle de cette année, pas terrible mais fonctionnelle, et au fond rien a changé. Deux années coup sur coup, voguant sur le bien pensant, la crise migratoire et la peur du terrorisme islamique, deux films musulmans ont gagné le prix du meilleur film. Moins honteux que le putride Timbuktu, Fatima prouve une fois de plus la supercherie des Césars.

Nous riches français ingrats que nous sommes, baignant royalement dans nos 40% de chômage pour les moins de 25 ans, nous n’avons pas conscience de la misère des pays du sud du bassin méditerranéen. Pour avoir une vraie chance de s’en sortir, nombre de leur habitants n’hésitent pas à venir immigrer chez nous, mais déchantent très vite. Le marché de l’emploi leur est tout autant fermé, et le stéréotype de la mère femme de ménage et le père ouvrier de chantier est une réalité. En pleine précarité, Fatima, faisant des ménages et ne parlant pratiquement pas un mot de français, tente d’élever ses deux filles dans ce monde désabusé.

Après le douloureux lauréat de l’an dernier, je m’attendais tellement à un étron aussi puant que la surprise fut relativement bonne en y découvrant un film correct. Là où La loi du marché délivrait une vision exclusivement pessimiste et dépressive du système, avec en plus l’une des réalisation les plus dégueulasse de l’histoire avec des acteurs minables, on s’en sort nettement mieux ici. Bien sûr, la première génération à être arrivée n’est pas spécialement jouasse, mais c’est au travers des deux filles que l’espoir va naître, du moins pour l’aînée qui souhaite vraiment s’en sortir et faire des études de médecine, d’ailleurs récompensée par le prix de l’espoir féminin, et c’est assez mérité. L’histoire est basique mais les personnages sont intéressants, voir attachants, à l’exception de la plus jeune des filles, peste tête-à-claque dont l’interprète est tout simplement atroce. Si la réalisation n’a rien de très intéressant, certaines idées le sont plus, comme la gestion de la langue arabe, utilisée de manière à ce que le côté culturel soit transmit sans que cela ne gène trop la compréhension du spectateur, sauf lors de deux passages vers la fin, un peu trop longs et ne reposant pas sur un échange à moitié français. La courte durée du film (1h19) le rend plus accessible aussi, mais de là à parler de « meilleur film français de l’année », la blague passe encore assez mal. Sur ce, la critique Spotlight débarque bientôt, en espérant que les américains soient moins cons que les français…

Critique disponible dans une version vidéo alternative :
https://www.youtube.com/watch?v=VDwZdyC_EUw

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