Batman v Superman : L’Aube de la Justice

Batman v Superman : L’Aube de la Justice
2016
Zack Snyder

Depuis des années Marvel se gave dans les grandes largeurs au box office, ayant fait des super-héros la chose la plus rentable qui soit au cinéma. Pire encore, l’une des dernières franchises populaire non-affiliée est retombée dans l’écurie Marvel de Disney : Spider-Man. De leur côté, les DC Comics de Warner Bros n’ont jamais fait mine de rivaliser en dehors de la trilogie du Dark Knight, alors même qu’en terme d’entrées les deux films de super-héros les plus vus de l’histoire sont les tous premiers Superman et Batman, pour ainsi dire les héros les plus iconiques qui soient. Bien décidée à capitaliser sur le succès croissant des super-héros, la Warner a donc voulu faire comme son rival en jouant la carte de l’univers étendu, rassemblant tous ses héros pour La Justice League, les Avengers de DC. Seulement voilà, la trilogie du Dark Knight n’ayant pas pu s’intégrer au nouvel univers, cette mise en bouche de la Justice League arrive après seulement un film : Man of Steel, l’excellent reboot de la franchise Superman, mais qui n’avait pas rapporté tant que ça (668 M$). Des bases solides, mais il était probablement trop tôt pour capitaliser dessus en faisant s’affronter ses deux plus grands protagonistes, et il se pourrait bien que les recettes soient largement inférieures aux attentes et peinent à égaliser celles du Dark Knight Rises (1,085 milliard).

Suite directe de Man of Steel, le film parle des conséquences de l’affrontement entre le général Zod, qui voulait transformer la Terre pour en faire une nouvelle colonie, et le sauveur venu d’ailleurs, Superman (Henry Cavill). La ville de Métropolis a beaucoup souffert de l’attaque, et depuis nombre de personnes sont inquiètes de voir quelqu’un possédant la force d’un dieu agir à sa guise, sans contrôle possible, notamment Bruce Wayne (Ben Affleck), le Batman de Gotham City. Conforté dans son idée que Superman est une menace par la campagne de diffamation qu’un certain Lex Luthor (Jesse Eisenberg) mène dans l’ombre, Batman va chercher par tous les moyens une solution pour empêcher d’agir définitivement celui qui pourrait détruire la planète par sa seule volonté.

Voici donc ce qui devait être « le plus grand combat de gladiateur de l’histoire », mettant face à face deux des plus légendaires guerriers de notre culture. La hype était à son maximum, les bandes-annonces étaient titanesques, les retours internes parlaient d’un Batman absolument génial qui allait faire date, et puis surtout le film faisait suite à l’un des films de super-héros les plus réussi qu’il soit. Plus encore, on introduit la Justice League avec la présence renforcée de Wonder Woman (Gal Gadot) et les caméos de Flash (Ezra Miller) et Aquaman (Jason Momoa), faisant du film le tournant majeur de l’univers étendu. Bref, le chef d’œuvre absolu était attendu de pied ferme, et on ne pouvait bien sûr qu’être déçu.

Tout le monde ou presque s’accordera à dire que la trilogie débutée avec Batman Begins était exceptionnelle, et en reprendre le protagoniste aurait donné au film une ampleur incomparable, alors repartir avec un interprète supplémentaire pour un homme chauve-souris qui n’en a que trop connu, on part forcément avec de grosses réticences. Voir donc dès le premier plan une énième origin story au justicier de Gotham, et devoir se retaper toute une introduction sur son personnage, son univers et son cheminement, c’est lassant. Plus vieux et torturé, le personnage reste intéressant, d’autant que plus brutal et classe que jamais, avec un costume bestial ainsi qu’une armure massive qui sont assurément les plus réussis vus à ce jour, mais malgré un background longuement développé, il n’a pas encore gagné à nos yeux le charisme nécessaire pour un rôle d’une telle importance. Dans le même ordre d’idée, l’intervention de Wonder Woman, aussi excellente soit-elle, est prématurée puisque son film solo arrivera l’été 2017. La stratégie offensive de Warner n’est d’ailleurs pas très bonne dans la mesure où l’on aura eu que deux films solos avant la Justice League, alors même que quatre autres sont prévus après, faisant ainsi une logique inversée par rapport à Avengers, et ça laisse dubitatif. C’est ça quand on a cinq ans de retard : à vouloir rattraper le temps perdu, on brûle les étapes…

Refaire un Batman était donc une mauvaise idée, mais dans les faits Ben Affleck est tout de même excellent, et il nous offre une version sensiblement différente de ses prédécesseurs. De même, voir s’affronter ces deux monuments est colossal, et avoir un avant goût de la Justice League, avec tout un tas de clin d’œil sur ce que la suite nous réserve, ça en jette. La réalisation de Zack Snyder est toujours aussi magnifique, avec des plans très stylés proches des meilleurs romans graphiques, les combats sont spectaculaires et les méchants, Lex Luthor et Doomsday, emblématiques, et tout ce qui entoure le personnage de Superman est juste parfait, ce qui est logique dans la mesure où il porte tout l’univers étendu sur ses épaules pour l’instant, et ce film est pour ainsi dire un Man of Steel 2 dans la mesure où tous les enjeux tournent autour de Superman, que les deux méchants sont issus de son univers et qu’on retrouve Lois Lane (Amy Adams), le directeur du Daily Planet (Laurence Fishburne) ainsi que les parents adoptifs du héros (Diane Lane et Kevin Costner). De l’univers de Gotham, on ne retrouvera qu’Alfred (Jeremy Irons). Néanmoins, le film est loin de convaincre autant que ce qu’on était en mesure d’espérer et est clairement en deçà du niveau de Man of Steel.

Il est intéressant pour un film de cette ampleur de ne pas céder à la facilité et multiplier les scènes d’actions, mais l’équilibre n’est pas bon pour autant, nous livrant au final tout juste demi-heure de combat sur 2h30 de film, le tout évidemment concentré sur la fin. Alors déjà que le début traîne à nous réexpliquer éternellement d’où vient Bruce Wayne, alias Batman, nous faire poireauter plus de la moitié du film avant que le tant attendu affrontement commence, sachant qu’on sait pertinemment que le vrai combat n’est pas celui-ci, cela donne une impression de longueur au film. Pour éviter qu’on s’endorme sur notre siège, on aura droit à de grosses séquences sorties de nulle part, utilisant la bonne vieille technique des rêves, mais ça créé un sentiment d’artificialité. La musique ne marquera pas beaucoup en dehors du puissant thème de Superman qu’on connaissait déjà, mais le plus gros problème du film nous vient de Jesse Eisenberg. Lex Luthor est l’ennemi juré de Superman, et sa présence était pleine de promesses, et en terme d’écriture son personnage est très bon, mais l’acteur cabotine à outrance et ne convient vraiment pas. Il apparaît plus comme un psychopathe que comme un génie, et il détonne avec le reste du film. De même, Doomsday n’est là que pour faire le « boss final », plus créature de Frankenstein invincible que réel antagoniste. Une réunion pas si « haut au sommet » que ça, c’est spectaculaire mais sans plus, Batman est excellent mais on aurait préféré retrouver l’ancien ou au moins faire l’impasse sur son origin story, rabâchée à de nombreuses reprises, et le tant attendu impact de la confrontation arrive tardivement avec déjà nombre d’enjeux désamorcés en amont. Le travail accompli est très bon et le principe du film est prodigieux, mais au final le résultat n’est pas si dantesque. On en attendait clairement plus.

 

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