Laissez faire les femmes !

Laissez faire les femmes !
1936
Paul Martin

Préserver nos œuvres culturelles est primordial, mais faire un choix est toujours difficile. Restaurer un film coûte cher, et des fois le film en question n’avait pas forcément de doublage en français, ou alors il a été perdu ou trop endommagé, et en refaire un engage là aussi de nouveaux frais. Alors quand une production germanique, co-financée et tournée aux Etats-Unis juste avant la Seconde Guerre Mondial, se voit être l’objet d’un tel soin, c’est probablement qu’il y a matière à s’y intéresser.

Alcoolique notoire qui passe plus de temps au bistro qu’au bureau, un journaliste d’un magasine new-yorkais donne régulièrement du travail supplémentaire à ses collègues, mais cette fois c’était la fois de trop. Frank et Stoddart, deux joyeux lurons qui n’imaginent pas devoir travailler pour justifier leur salaire au journal, vont trouver le bon pigeon pour remplacer leur compère saoul : Gil, un autre glandeur du journal recruté en tant que poète mais qui n’a jamais été publié. Embobiné par d’habiles flatteries et autres promesses mensongères, il va accepter de passer sa soirée au tribunal pour faire un article sur les affaires s’y déroulant. Autre temps autres mœurs, une jeune femme, Ann Garden, va y être jugée pour vagabondage (grosso modo SDF, chose interdite à l’époque). Menacée d’être envoyée en prison et n’écoutant que son grand cœur, Gil va se précipiter pour voler au secours d’Ann, se faisant passer pour son fiancé. Seulement le sauvetage va complètement déraper et l’affaire va prendre des propensions dantesques.

Rappelant la belle époque où tout semblait possible et où le travail était affaire de passion, le film démarre très fort avec le choix du cadre journalistique, évoquant l’ambiance de la série Ma Sorcière bien aimée, il est vrai sortie plusieurs décennies après. Inimaginable aujourd’hui, tout le monde semble se la couler douce et rater un jour de travail pour cause d’ébriété donne presque lieu à un arrêt maladie, c’est dire. La première séquence nous régale d’emblée en plus, mettant en scène un jeu du « passe à ton voisin » assez drôle et bien écrite. On arrive ensuite à la clef de voûte de l’ensemble : le procès où le héros va devenir le protecteur d’une jeune femme, emporté par sa fougue. Un concept de cohabitation impulsive très amusant, d’autant que le film est très léger et s’offre même une séquence de comédie musicale. Porté par un doublage français excellent avec notamment celui qui faisait Onizuka dans l’anime de GTO, la restauration est de bonne facture entre un son totalement refait et une image assez jolie où la plupart des trous dans la pellicule ont été comblés. Le film ne peut certes pas prétendre à une place digne d’un Citizen Kane dans le paysage historique du cinéma, mais il est néanmoins le témoin d’une belle époque qu’on aurait aimé mieux connaître.

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