Secret of Mana
2018
PC / PS4
Ô tendre souvenir de ma jeunesse… Qu’il est loin le temps où la saga Seiken Dentestu brillait ! Après l’échec du dernier épisode numéroté sorti dans un état embryonnaire sur Playstation 2, quelques spin-off ont vu le jour sur téléphones ou consoles portables, sans jamais égaler de près ou de loin Sword of Mana, qui n’était déjà que poudre aux yeux, à supposer que la saga ait proposé à un moment donné plus que du simple divertissement aux qualités purement techniques et graphiques. Le joueur nostalgique hésitait alors vouloir que la franchise repose en paix et l’espoir d’un nouvel opus réconciliant tout le monde. Finalement, un vague fantasme d’antan a resurgi début 2018 : le « remake » du plus mythique de tous les épisodes, Secret of Mana. Alors même que le studio n’avait aucune ambition pour le titre, de toute évidence développé en marge de leurs gros titres avec une équipe très réduite, les fans de la première heure se sont rués en masse pour déplorer une catastrophe annoncée. Oui, nous aurions aimé un remake ambitieux, alors qu’au final le jeu est une pure copie plus proche du remaster que du remake, mais est-ce une raison pour bouder l’occasion de redécouvrir ce titre mythique sous un nouveau jour ?
Graphismes : 12/20
À moins d’en faire un triple A au budget faramineux pour faire un véritable remake sous par exemple Unreal Ungine 4, compte tenu des enjeux on pouvait difficilement espérer mieux dans l’optique d’un simple remaster. L’angle de vue est inchangé et tout en terme de design et de direction artistique est extrêmement fidèle à l’original. Le choix du self shalding est très pertinent, trouvant là un excellent compromis dans le passage à la 3D. Et c’est peut-être le plus gros soucis du jeu en terme de graphismes. En dehors de la scène d’introduction magnifique qui laisse un peu trop espérer, tout le reste est irrévocablement plat. La narration ne s’offre pratiquement aucune mise en scène, et quand on affiche un rendu à peine supérieur à la Playstation il est honteux de voir une absence totale d’innovation, alors même que les sorts et surtout les boss auraient pu gagner en grandiose. Concernant ces derniers, même si la plupart sont fidèles, voir légèrement mieux, certains font peine à voir comme le rachitique serpent et le piaf court-sur-pattes. De même, les animations des attaques chargées auraient pu profiter d’une refonte tant à part les poings lvl 8, ressemblant à une boule d’énergie, rien n’était mémorable, et comme par hasard c’est cette dernière qui est modifiée pour quelque chose de plus sobre. Le matériau de base n’était pas parfait et il y avait là moult occasions d’y remédier, mais malheureusement le jeu va se cantonner au modèle sur tous les points…
Jouabilité : 8/20
Ce qui est excusable en 1993 ne l’est plus une seule seconde en 2018. Certes, le principe des sphères par arme, la diversité de ces dernières ainsi que les magies propres à leurs deux utilisateurs (offensives pour l’elfe et défensives pour la fille) contribuent à une belle richesse, mais le système de jeu a fait son temps. Devoir attendre que la jauge charge à 100% puis rester trois plombes pour charger une attaque dont la précision laisse à désirer est une frustration sans pareille. Déjà atroce dans l’original, l’esquive des monstres reste toujours un problème, certes moindre, mais pour peu qu’on ait déjà joué à quelques jeux du genre, rater pratiquement une attaque sur deux est une aberration. L’équilibrage est toujours aux fraises, les petits monstres étant bien plus puissants que les boss (!) et la montée en niveau des armes et magies est infernal. Mention à la dryade pour la fille qui demande d’emblée deux fois plus d’expérience que les autres magies, alors même que la montée se calcule par utilisation, et non par PM dépensés, et cette magie est atrocement cher. Un coût aberrant qu’on retrouve un peu pour tout, le gain de PO normal (tuer tous les monstres que l’on voit en avançant) ne permettant pas un instant de s’acheter les différentes armures, et encore moins forger chacune des armes. Le seul ajout consiste en deux raccourcis programmables, que ce soit pour un objet ou de la magie, mais ça ne fera pas oublier le bordel que représente le menu en anneau. Techniquement le jeu est donc très similaire à l’original, voir un chouia supérieur, mais le résultat est indigne des 25 ans qui séparent les deux titres.
Durée de vie : 10/20
Rien de spécial à dire sur le sujet, si ce n’est que le jeu de base est déjà court (à peine 10h quand on connaît, pas plus de 15h même en montant tout à fond). Il aurait été bienvenu de proposer un minimum de contenu supplémentaire, ne serait-ce que pour surprendre le joueur en enrichissant une histoire qui ne demandait qu’à l’être. On aurait aussi pu proposer plus de challenge avec un nouveau lieu rempli de boss inédits avec, comme dans la plupart des autres RPG, des monstres plus puissants que le boss de fin (et ça n’aurait pas été dur à justifier tant le passé aurait pu receler des créatures terrifiantes). Mais bon, au lieu de ça on se tape des dialogues ennuyeux lors des passages à l’auberge…
Bande son : 15/20
Alors qu’on se le dise tout de suite, si le jeu propose des choix, ils n’en sont pas vraiment. Alors même que Square-Enix a fait un travail extraordinaire de réorchestration pour ses remakes ambitieux et réussis de Final Fantasy X HD et Final Fantasy XII TZA, c’est ici un supplice de chaque instant, et choisir les musiques originales est une question de survie. De même, le jeu ayant choisit de doubler ses dialogues, pour coller au style très coloré et atypique du jeu, celui des acteurs ne se fait pas dans la dentelle, et à ce niveau là le japonais passe bien mieux que l’anglais.
Scénario : 6/20
Quoi, qu’entend-je ? Quel est cet affront ?! Non, le scénario du jeu reste inchangé et on a même tendance à pouvoir mieux l’apprécier puisque la localisation française de l’époque, faite sous le manteau avec un sens du ridicule implacable (vive Rambo et compagnie… ), laisse place à quelque chose de plus respectueux du matériau d’origine, et les phases de dialogue sont un peu plus soignées. Reste que l’éternel coup du héros prophétique qui sauve le monde avec une princesse et un lutin, face à des méchants très vilains qui veulent simplement dominer le monde en faisant des conneries que le passé nous a montré vouées à l’échec, c’est de plus en plus grotesque avec le temps. C’est d’autant plus rageant que le passé en question semble passionnant, et les ruines de l’ancien monde auraient dû être plus creusées. Le jeu survole son sujet sans la moindre intensité dramatique, les héros n’ont aucune conviction et pas d’autres enjeux que la pression du reste du monde, et les méchants défilent en arrière-plan dans l’indifférence la plus totale. Quand on est petit, un peu de magie, de poésie, un bon esprit de camaraderie et c’est parti. Une fois adulte, il en faut plus pour nous faire rêver, et les décennies d’évolution techniques ont permis de mettre en scène des histoires autrement plus ambitieuses. Eh bien ici il n’y a que trop peu d’effort d’adaptation.
Note Globale : 11/20
Ressortant tout juste de deux rushs du jeu (l’original plié en une soirée et une matinée et celui-ci fini en 12h), il m’est honnêtement impossible de dire que ce remake / remaster est moins bon que l’original pour la simple et bonne raison que le système de jeu, les musiques, l’histoire et son déroulement sont identiques, et même les graphismes sont au plus près de ce que proposait son modèle. L’ambiance est conservée et manette en main le plaisir de jeu est peu ou prou le même. Et pourtant, si c’était à refaire je referais une partie sur Super Nintendo plus que sur ce jolie lissage. Mais alors, pourquoi diantre hypocrite de mes deux ?! Eh bien tout simplement parce que si je veux retrouver le plaisir d’antan, autant s’y replonger, car au fond la légère mise à jour graphique, indigne d’une PS2, n’efface pas l’amertume de certains changements. À trop en montrer, certains boss perdent en crédibilité, pratiquement aucun changement n’est profitable et les anciens comme moi passeront le plus clair de leur temps à se faire la réflexion que le design original était plus probant. 25 ont passé et ce qu’on était enclin à pardonner devient une hérésie. Si une communauté s’était formée autour de ce remaster, peut-être qu’à force d’être modé de partout le jeu aurait pu considérablement s’enrichir pour devenir ce qu’on attendait de lui, mais il semblerait que sa mort soit déjà actée, et il n’y aura personne pour y verser une larme.