La dernière lettre de son amant


La dernière lettre de son amant
2021
Augustine Frizzell

Voici une mise en abyme de la chute des valeurs, tant morales que romantiques, face à l’inexorabilité du temps qui passe et le poids de nos décisions personnelles. Adapté d’un roman de Jojo Moyes, le film va confronter deux époques, deux visions du monde, et sur comment le passé nous permet de tirer des leçons au présent.

Contemporaine, Ellie (Felicity Jones) est une femme libre, multipliant les coups d’un soir sans aucune forme d’attachement, parcourant la vie comme un jeu sans conséquences. Travaillant comme chroniqueuse dans un organe de presse, elle va un jour tomber sur une lettre des années 60 où un fougueux Mr. Boot (Callum Turner) déclare sa flamme à une certaine J (Shailene Woodley), apparemment mariée et qu’il invite à prendre la fuite avec lui. Piquée au vif dans sa curiosité, va alors débuter une enquête pour comprendre qui sont les deux amants, et où les a mené cette idylle.

Le film part ainsi du monde moderne, terne et froid, pour nous replonger dans la fougue et la passion des années 60, mais qui étaient gangrénées par les non dits, les pulsions réprimées, le sens des convenances et autres mariages de confort, de façade. Le film met ainsi en exergue une femme moderne, sans valeurs, qui apprend à connaître la vie d’une autre d’un autre temps, qui était prête à sacrifier la sienne sur l’autel de la bienséance et le conformisme, mais qui va renaître après la rencontre d’un homme tendre qui saura l’aimer comme elle ne l’a jamais été. Romance épistolaire, cachée, fantasmée, remettant ainsi l’église au centre du village pour rappeler à l’enquêtrice qui nous offre cette histoire par procuration, que la vie a tout de suite plus de sens si on la partage avec quelqu’un qu’on aime. Certains pendants de l’histoire sont trop prévisibles, notamment à cause de la première scène qui en dit trop, trop tôt, mais on reste captivé par cette tendre histoire, attachante, d’autant que l’histoire au présent est très mignonne également avec le complicité naissante entre Ellie et le responsable des archives. Un beau moment suspendu qui se laisse pleinement apprécier.

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Miss Bala


Miss Bala
2019
Catherine Hardwicke

Succès modéré aux Etats-Unis, le film aura majoritairement débarqué en VOD dans le reste du monde par la suite, ce qui est étonnant quand on sait que la réalisatrice Catherine Hardwicke fut incontournable sur la première décennie des années 2000 avec nombre de succès critiques puis commerciaux. Il faut dire qu’on aura rarement vu un film aussi pauvre scénaristiquement.

Américaine d’origine hispanique, Gloria (Gina Rodriguez) va retourner à Tijuana au Mexique, où elle a grandi, dans l’espoir d’obtenir un travail de styliste et aussi renouer avec une amie d’enfance. Seulement un soir, en boîte de nuit avec ladite amie, elle va se retrouver au milieu d’un règlement de compte entre une mafia locale et des forces de l’ordre corrompus, et les choses vont mal tourner : son amie sera portée disparue, et elle sera enlevée par les mafieux.

Rarement un film n’aura été aussi bancal au niveau de l’écriture. Après l’éternelle scène de la boîte de nuit et une histoire de styliste qui ne sera plus jamais abordée, on enchaînera coup sur coup connerie sur connerie. On la menace si elle balance, elle balance, donc elle est dans la merde, d’autant qu’on l’avait prévenu littéralement la scène d’avant du caractère ripou des flics du coin. Ensuite, elle s’évade, se fait rattraper par la CIA, puis devient une taupe car elle est trop conne pour faire valoir ses droits ou expliquer la situation. S’en suit le caméo le plus survendu de l’histoire : Anthony Mackie, déjà osef, mais carrément mis sur l’affiche sur Netflix. Re embrouilles de qui est avec qui, début de Stockholm, mais dans le vide. Le concours de Miss revient comme un cheveux sur la soupe, et n’est juste pas traité : elle doit y aller, et paf elle gagne, juste pour faire avancer l’histoire. Et puis surtout paye ta crédibilité de miss avec une candidate bouboule au regard d’huître… On dirait une scénario de film d’horreur de série B n’avançant que grâce à la connerie des protagonistes, mais c’est vendu comme un actionner thriller, sauf qu’au final c’est juste con et un peu lent par moments. Quelques plans esthétisés, une bonne mise en scène, un peu de tension, mais c’est bien maigre pour justifier le visionnage.

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Lou


Lou
2022
Anna Foerster

Pas grand chose à dire sur cet énième d’agent secret sous couverture décidément jamais trop vieux pour ces conneries. Vieille en l’occurrence, puisque dans un trou paumé, c’est une certaine Lou (Allison Janney) qui a décidé de s’y cacher après une carrière comme agent de la CIA. Se faisant âgée et gagnée par l’arthrose, elle souhaitait mettre fin à ses jours, mais c’était sans compter sur sa voisine, qui va débarquer chez elle affolée : son mari, censé être mort, aurait kidnappé sa fille. Connaissant visiblement le bonhomme, Lou va décider de le prendre en chasse, car elle seule pourrait ramener la petite en vie.

Malgré que la réalisatrice ait une carrière quasiment exclusivement télévisuelle, son travail sur le film est un des rares points positifs qu’on peut mettre en avant. Outre l’envergure des décors et le côté oppressant de cette forêt à perte de vue, avec de surcroît le temps apocalyptique qui en rajoute une couche, visuellement le film marche très bien. L’action est assez bien maîtrisée : rien de novateur, mais c’est efficace. Par contre, le scénario est indéniablement catastrophique : tout est cousu de fils blancs et d’un niveau de fainéantise d’écriture ahurissant. Cliché sur cliché, et on ne saura jamais vraiment pourquoi la CIA en a après Lou. Si elle a effectivement balancé des informations secrètes, ce qui est fait est fait, à quoi bon la traquer pour du vide ? Ca vole très bas au niveau du plafond, mais c’est esthétique. Du pur contenu aussitôt oublié…

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The Mother


The Mother
2023
Niki Caro

Il est vrai que les tueurs d’élite légendaire sont légion chez les hommes (Mr Wolff, John Wick, Taken, The Grey Man ou encore Tyler Rake), donc voir une version féminine était logique, inévitable, tout en se rappelant que contrairement aux exemples cités plus haut, le genre a aussi ses ratés avec le minable The Killer déjà pondu par Netflix. Les critiques semblaient d’ailleurs pointer vers ce second cas de figure, et c’est le cas sur certains points, mais on est pas passé loin d’un excellent divertissement.

Après s’être fait enrôlée malgré elle dans des histoires de trafic, une ex militaire (Jennifer Lopez) va prendre conscience de l’étendu dudit trafic et de ses pires pendants, décidant de fait de contacter la CIA pour tout balancer. Seulement voilà, étant enceinte, elle devra se séparer de son enfants et n’avoir aucun contact avec elle, pour sa protection. Douze ans plus tard, elle devra reprendre du service pour la sauver, se retrouvant la cible du trafiquant (Joseph Fiennes) qu’elle a autrefois trahis.

Le film aurait pu être très bon, possède de grande fulgurances, mais toutes gâchées. Le principe du personnage surpuissant se battant pour ses proches ou pour une cause, on a déjà vu pas mal de cas prouvant que badassitude, famille / honneur et action font un excellent combo divertissant. C’est encore le cas ici, mais il toujours est-il que de savoir le justifier, c’est mieux. Aucune révélation sur le père biologique pour expliquer une chasse à la femme qui reprend après plus d’une décennie sans raison, et tout ce qui fait avancer le scénario n’est que prétexte grossier. C’est con, parce que la mise en scène est efficace, le budget conséquent, nous faisant voyager et mettant en avant de grands décors somptueux. Et le film a une belle originalité moralement grise, et on aime l’irrévérence : former une fille de 12 ans à devenir une survivaliste, capable de tuer. Et raté, après un arc entier de formation très réussi, elle ne sert à rien. Plein d’idées, mais rien derrière, mal utilisé voir oublié sur le bas côté. Du gâchis… Un gros potentiel, beaucoup de talents et de moyens, mais une écriture mauvaise et un effet petits bras qui n’ose pas jusqu’au bout.

 

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L’Amour au pied du mur


L’Amour au pied du mur
2024
Patricia Font

Apparemment gros consommateur de comédie-romantique, l’algorithme Netflix a jugé pertinent de me mettre ce film en avant, et ce depuis des semaines, teasant son arrivée avant même sa mise en ligne, chose assez rare. Il faut dire que le film avait l’air mignon, la musique était très entraînante (mais publicité mensongère, la musique de la bande-annonce n’est pas présente dans le long-métrage) et le concept avait l’air prometteur.

L’histoire est celle de Valentina et David, vivant chacun dans deux appartement mitoyens dont le mur commun est on ne peut plus mal insonorisé, au point d’avoir l’impression d’être colocataires malgré eux. Lui est un inventeur ayant besoin de calme pour se concentrer, alors qu’au contraire, elle aspire à devenir pianiste et pratique beaucoup dans l’optique d’un concours imminent. Et bien sûr, de la proximité né la complicité.

Il est vrai passé inaperçu à sa sortie, faisant tout juste un demi-million d’entrée, l’histoire était à la base celle de Un peu, beaucoup, aveuglément, film français sorti en 2015 et dont il s’agit ici d’un remake espagnol made in Netflix. Vu l’écart des retours entre les deux films, je vais m’empresser de rattraper l’original, car c’est très sympathique, à défaut de révolutionner le genre, l’idée étant archi classique (Un Duplex pour trois et autres histoires de collocation forcée où la guerre fait rage pour l’occupation exclusive des lieux). L’alchimie passe bien, les personnages sont attachants, le tout est joliment mis en scène, se reposant bien sûr sur des clichés éculés du genre, mais c’est du feel-good efficace. C’est vrai que tout va un peu vite et qu’on reste un peu sur notre faim, mais c’est déjà pas mal, en attendant de voir si le concept était plus abouti dans l’original.

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Toi chez moi et vice versa


Toi chez moi et vice versa
2023
Aline Brosh McKenna

Après avoir scénarisé moult comédies romantiques plus ou moins populaires, allant de 27 robes à Le Diable s’habille en Prada, et réalisé quelques épisodes de série par ci par là, voici une première réalisation pour Netflix, avec deux acteurs très bankables dans les 10-15 premières années du troisième millénaire, mais qui n’existent désormais que sur petit écran depuis près de dix ans. Autant dire que le projet ne sentait pas spécialement l’ambition.

On suivra deux personnes, Debbie (Reese Witherspoon) et Peter (Ashton Kutcher), qui ont eu un coup d’un soir il y a 20 ans, mais qui sont restés amis depuis, et même meilleurs amis malgré la distance. Elle a fait sa vie à Los Angeles où elle élève seule son fils de 13 ans, tandis que lui travaille dans le marketing à New-York à l’autre bout du pays. Des vies très loin de leurs aspirations de jeunesse, et pour quelques jours ils vont échanger de place, Debbie devant faire un stage pour obtenir un diplôme à NY alors que lui va se porter volontaire pour garder le fils de cette dernière.

Des gens qui échangent de maisons, c’était le pitch de base de The Holiday, sauf que cette fois pas de plongée dans l’inconnu puisqu’ils sont amis. Rien de très original donc, de même pour le playboy s’occupant d’un garçon, c’était déjà l’histoire de Pour un garçon. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que le déroulé fait tout sauf naturel : la lesbienne à LA n’a aucun background, c’est un pur réceptacle à exposition, ne servant qu’à ce que les autres lui expliquent leurs vies. Même constat pour la Minka de NY, arrivant comme par hasard pour là encore servir de confidente providentielle. La romance est expédiée en 15 minutes à la fin, sans autre évolution que bon bah voilà. Un niveau d’écriture abyssal, légèrement sauvé par des acteurs charismatiques et une production correcte, mais ça reste léger. Pas grand chose à sauver.

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The Gray Man


The Gray Man
2022
Joe Russo, Anthony Russo

Après avoir mené le genre super-héroïque à son apogée, les frères Russo ont porté une adaptation de la saga éponyme pour Netflix. Un projet archi ambitieux puisqu’il semblerait que le budget alloué fut démentiel : 200 M$, un score digne des James Bond, ce qui est logique puisque le film est dans le même genre, à savoir du thriller / action d’espionnage où le voyage est de mise.

Le film est centré sur Sierra Six (Ryan Gosling), un mercenaire de la CIA chargé de faire dans l’ombre le sale boulot, en échange de quoi il peut jouir d’une certaine forme de liberté, lui qui devait croupir en prison à la base. Son monde va s’effondrer quand il va avoir pour mission de tuer une nouvelle cible, qui va s’avérer être Sierra Quatre, qui lui confiera des informations sensibles sur Carmichael (René-Jean Page) et son assistante (Jessica Henwick), deux agents corrompus. Pour couvrir leurs arrières, ils vont lancer à la poursuite de Sierra Six, Lloyd (Chris Evans), un psychopathe qui va enlever la fille de Fitroy (Billy Bob Thornton) pour faire pression sur Six puisqu’étant la personne dont il est le plus proche.

Agents corrompus et mercenaire légendaire avec une prime sur la tête : le scénario est archi convenu et est pour ainsi le même que la plupart des derniers John Wick, donc pas foufou. C’est surtout un prétexte pour nous faire voyager un peu partout, à la recherche d’une personne ou d’une autre, et le résultat est chancelant, allant de l’ennuyeux au très bon. Le démarrage est assez poussif, avec quelques temps morts et le passif des personnages est au mieux bidon (surtout le coup du père violent, faiblard), malgré quelques passages corrects comme l’avion. Il faudra attendre Prague pour que le film décolle, dévoilant de bonnes idées de mise en scène, un dynamise efficace et une générosité décomplexée dans la violence et l’action. La seconde moitié se révélera très divertissante avec des décors magnifiques comme le château en Croatie. Le casting prestigieux, incluant également Ana de Armas, est aguicheur, mais pas toujours optimal, Chris Evans peinant à convaincre en méchant. En résulte un film généreux mais pas toujours bien rythmé, et souffrant surtout d’une écriture au mieux paresseuse. Une suite avait été annoncée, et peut-être qu’à l’image de Tyler Rake le potentiel va exploser. A voir.

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The Call


The Call
2020
Chung-Hyun Lee

Imaginez, un téléphone hanté par le passé, où l’objet lui-même est un pont temporel au delà du temps ? C’est le concept fou du film, où une jeune femme, Seo-Yeon (Shin-Hye Park), va recevoir un étrange appel d’une autre jeune femme (Jeon Jong-seo), qui se trouve habiter dans l’exacte même maison, mais à 20 ans d’écart. Après l’incrédulité, elles vont devoir à force admettre l’impensable et que le téléphone relie bien deux points temporels. La première, hantée par certains traumatismes de son passé, va y voir une chance incroyable de peut-être influer voir corriger le cours du temps, tandis que la seconde, cloitrée chez elle à cause d’une belle-mère abusive, va y voir un potentiel échappatoire.

On se retrouve devant une sorte de L’Effet Papillon, mais où il n’existe qu’un seul lien avec le passé, et qu’il avance irrémédiablement, donc toute modification du cours historique sera définitivement modifiée. Le film installe habilement un ton sombre et horrifique, avant de nous endormir sournoisement pour mieux nous rappeler à l’ordre, avant de recommencer de plus belle de façon encore plus vicieuse. C’est une notion classique du cinéma, habilement détournée pour mieux revenir en pleine face : jouer avec le passé n’est jamais ni anodin ni gratuit. On sent parfois se dessiner la logique choquante et violente du récit, mais le film se garde toujours quelques revers cachés pour mieux nous briser psychologiquement. Car oui, le film n’est pas évident à appréhender et est à fortement déconseiller aux plus sensibles, sa radicalité étant loin des standards occidentaux en matière de cinéma, mais pour peu qu’on sache apprécier cette différence, c’est un véritable choc. Constamment sur le fil, jouant avec les codes du genre, le film est un beau renouveau, tant sur son utilisation du lien temporel que sur les codes horrifiques. Assez brillant en somme.

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Enola Holmes 2


Enola Holmes 2
2022
Harry Bradbeer

On ne va pas se mentir, le premier Enola Holmes était tout juste regardable d’un œil distrait, et l’idée d’une suite n’avait clairement pas de quoi emballer. Mais sait-on jamais, l’univers d’enquête de sir Conan Doyle est passionnant, l’actrice principale a fait quelques progrès depuis au niveau acting, et le personnage de Sherlock Holmes était si brillamment interprété par Henry Cavill que sa seule présence constitue un argument solide en soi. Et effectivement, le miracle n’était pas loin (sauf que… ).

Pour sa seconde enquête, Enola Holmes (Millie Bobby Brown) va partir à la recherche d’une certaine Sarah, fille travaillant dans une usine d’allumettes, et qui est portée disparue depuis quelques jours, source d’une immense inquiétude pour sa jeune sœur. Entre complot politique, romantique ou économique, Enola devra retrouver sa trace et comprendre pourquoi elle a disparu, volontairement ou non.

En voilà un film qui fait souffler le chaud et le froid, surtout le froid. Le début confirme les craintes sur le ton : on est bien sur de la suite pure et dure, avec toujours ce style enfantin et maladroit qui aime jouer avec le quatrième mur, mais juste comme une gimmick, sans que cela ne soit justifié par quoi que ce soit. Mais d’un autre côté, l’enquête a l’air plus poussée, le discours féministe est moins frontal et stupide, acceptant plus l’aide d’hommes quand ils sont compétents, en se rappelant que l’amour est la source même de la vie, et est donc un facteur primordial. Mieux, le déroulé a quelques fulgurances, montrant une construction assez intelligente par moments, et Sherlock est beaucoup plus présent, rivalisant avec le niveau de classe et de mentalisme de l’ultime diptyque Sherlock Holmes. Donc après un démarrage poussif et en gardant quelques réserves (notamment Helena Bonham Carter et David Thewlis qui en font des caisses), le potentiel est là, on se surprend à passer un bon moment, se grisant des références à Moriarty et rêvant d’un film centré sur le personnage d’Henry Cavill. Puis c’est le drame, coup sur coup. La révélation de qui est Moriarty, historiquement un homme britannique professeur dans une université de Londres, donc vu l’époque il va s’en dire forcément un homme blanc, nous tombe dessus comme un immense coup de hache en pleine tête. Et si cela ne suffisait pas, le tout dernier clou dans le cercueil de cet univers nous ait porté par la dernière scène, dévoilant le fameux iconique collègue de Sherlock : Watson. Comme pour Moriarty, il faut le voir pour le croire, sachant que le film est bien censé se dérouler dans le Londres de la fin XIXème début XXème siècle. Je ne pensais pas y croire, puis j’y ai pas mal cru, avant d’avoir juste envie de mourir et que le carnage s’arrête. L’exemple parfait des ravages du wokisme, le vrai. Paraît-il qu’un troisième opus est prévu pour 2025. Vu le tournant final, pitié non…

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The Witcher


The Witcher
2019-2023
Lauren Schmidt Hissrich

Grande saga littéraire polonaise de Andrzej Sapkowski, l’histoire du Sorceleur a surtout explosé auprès du grand public à travers les jeux-vidéo, et tout particulièrement le troisième opus, The Witcher 3 : Wild Hunt, puisque sur les 75 millions de jeux vendus, 50 proviennent uniquement du troisième volet (ce qui le place huitième du top 10 des jeux les plus vendus de l’histoire). Un jeu que je n’ai malheureusement jamais fini, ayant voulu avancer trop vite dans l’histoire en négligeant potions et équipement, au point de me retrouver bloqué devant un boss infaisable, même en mode facile (oui, mes compétences en la matière sont globalement risibles). Mais un jour qui sait.

C’est donc tout naturellement qu’un projet d’adaptation fut étudié, et c’est Netflix qui a acheté les droits pour une série, qui a assurément frappé fort, la première saison était tout simplement le programme le plus vu de la plateforme juste derrière Stranger Things en 2019. Et malgré un budget modeste de tout juste 92 M$, le résultat est incroyable : des décors réels, le moins d’effets spéciaux possible, et beaucoup d’animatroniques avec des design aussi inspirés qu’un Labyrinthe de Pan, c’est dire !

On y suit en parallèle trois histoires, de la plus ancienne à la plus récente chronologiquement : celle de Yennefer (Anya Chalotra), une handicapée traitée par ses parents comme du bétail et qui sera vendue à Tissaia (MyAnna Buring), une formatrice en magie voyant en elle le potentiel des plus puissantes sorcières ; on suivra également le fameux Witcher / Sorceleur, Geralt de Riv (Henry Cavill), sorte de guerrier ultime formé à la fois aux arts magiques et au maniement des armes, ayant juré neutralité dans les différents conflits politique, dont la fonction et de venir en aide à qui en a les moyens pour différents problèmes, souvent des monstres à terrasser ; et enfin Ciri (Freya Allan), princesse d’un royaume qui subira l’attaque d’un autre royaume, et qui devra lutter pour sa survie.

La première saison est une masterclasse du genre, posant les bases d’un univers d’héroïque fantaisie d’une richesse folle, avec une identité tranchée et que j’ai trouvé personnellement juste incroyable. Dès l’introduction on voit une réalisation sous transe avec des combats à l’épée à la chorégraphie épique et d’une violence inouï, et un point frappera d’emblée et restera indiscutable tout du long : Henry Cavill est absolument parfait. Il ne colle pas vraiment au personnage du jeu, mais ce qu’il propose est plus viscéral et intéressant, montrant réellement une autre forme de monstruosité, s’éveillant à cette chose contre nature qu’on appelle « sentiments ». C’est prodigieux. Chaque pendant des intrigues est passionnant, que ce soit les missions du Witcher, l’entraînement de Yennefer ou l’effondrement de la vie de Ciri, avec une triple narration d’une rare intelligence qu’on ne comprendra qu’aux deux tiers du récit. Brillant. On notera aussi l’impayable Jaskier (Joey Batey), aussi amusant qu’attachant, et marquant les esprits avec le fameux « Toss a coin to your Witcher ». Style personnifié et réussi, musique incroyable, acteurs parfaits, narration exigeante et brillante, combats épiques et montée en puissance grisante avec un final en apothéose : une première saison à faire saliver d’un niveau de perfection ahurissant.

Saison 1 :


Immense carton que la première saison, donnant confiance à Netflix pour la suite, et donc pratiquement doubler le budget alloué, le passant à 176 M$ pour la seconde salve. En résulte une suite plus grande, plus riche, plus épique, plus généreuse. On continue cette fois encore les conflits politiques et autres jeux de pouvoir en toile de fond, avec comme objectifs principaux pour les personnages clés de retrouver son chaos pour Yennefer, très affaiblie suite à la bataille finale de la première saison, et de former Ciri à devenir une Witcher pour Geralt. Une seconde saison qui décuple le grandiose, donnant plus de place aux créatures et à la magie, augmentant les différents enjeux en teasant déjà l’ultime menace de cet univers : la horde sauvage (the wild hunt). Dès le premier épisode on rentre à fond dedans, avec un quasi huis clos dans un immense manoir abandonné, montrant ce qui est le cœur même de cet univers : une simple balade à priori anodine, quelqu’un qui nous raconte son histoire, et ça finie en légende locale avec une malédiction et une créature à l’imaginaire fou, ou quand le quotidien peut basculer dans une forme de monstruosité ultra violente. C’est encore une fois d’une grande maîtrise, grisant à suivre, mais malheureusement les gens sont cons : beaucoup se sont plaints de la première saison avec sa triple narration à trois timeline différentes évoluant à trois vitesses sensiblement différentes. Bou réfléchir c’est pas agréable… Résultat, la narration est ici plate et rectiligne, enlevant cette originalité folle qui rendant jubilatoire la pleine compréhension des événements. Donc même si pour tout le reste la seconde saison fait à peu près tout mieux, la claque est moins marquante, mais on reste sur un niveau remarquable.

Saison 2 :

Avant de parler à proprement parler de la saison 3, parlons de ce désastre de communication m’ayant fait attendre presque un an avant d’enfin me décider à continuer cette série pourtant portée aux nus. Véritable centre névralgique de la série, Henry Cavill est pour beaucoup dans le succès de cette dernière, car outre le fait d’incarner le personnage principal, il a surtout offert une prestation singulière qui a mis tout le monde d’accord, même ceux qui n’ont pas aimé la série dans son ensemble. Or en octobre 2022, soit dix mois avant la diffusion de la première partie de la troisième saison (on y reviendra d’ailleurs) et seulement quelques jours après la fin du tournage, Henry Cavill a annoncé abandonner son rôle iconique, expliquant ne plus supporter les divergences entre la série et les livres / jeux (que beaucoup ont décrié d’ailleurs). Comme presque en même temps il annonçait aussi reprendre son rôle de Superman (mais ça ne se fera à priori jamais), on pensait à une incompatibilité d’emploi du temps, mais comme son remplacement semble aujourd’hui définitif (le tournage de la saison 4 n’a toujours pas débuté, mais les espoirs sont inexistants), il semble que la divergence créative soit réelle. Toujours est-il que quand l’argument principal et atout majeur d’une série se barre, l’attrait d’une série écrite dès les prémices pour durer six saisons n’est plus le même. Alors à quoi bon continuer ? Beaucoup se sont dit pareil d’ailleurs, on parle d’une chute de plus de 30% des audiences quand la saison 2 avait boosté drastiquement celles déjà colossales de la première saison, et égalant sur le long terme, tandis que le lancement en demi-teinte de la troisième s’est effondré avec moins de la moitié des audiences au final.

Il faut dire aussi que la troisième saison s’embourbe dans un conflit politique pas vraiment passionnant et qui n’avance pas, comme tout le reste. Découpée en deux, la première partie comprend cinq épisodes, continuant l’entrainement de Ciri, plus axé sur la magie cette fois, avec d’un côté le Nord subissant les manigances de la Confrérie, scindée entre ceux cherchant le pouvoir, ceux qui valent s’unir, et ceux qui voient la menace de Nilfgaard comme inéluctable, préférant basculer directement chez l’ennemi. Rien n’avance, surtout pas l’histoire des elfes, et le cinquième épisode est un calvaire. On y suit une fête assez banale sans grands enjeux, mais la série en fait des caisses et se croit maligne en revenant constamment sur chaque bout de chaque conversation, d’abord montrée tronquée, avant de peu à peu tout révéler. C’est laborieux, souvent insipide, et il est épuisant de se taper quatre / cinq fois les mêmes dialogues pour enfin avoir un début de piste sur les conflits à venir, sauf que tout est archi prévisible voir déjà révélé dans les précédents épisodes, et même amorcé dans la précédente saison.

Savoir que le changement d’acteur me fera probablement arrêter en fin de saison impacte quelque peu l’appréciation d’une histoire qui restera inachevée, mais même en prenant ça en compte, le démarrage est archi poussif, et les deux derniers épisodes sont pires encore. Marquer une pause en fin d’épisode 6 aurait eu plus de sens, l’histoire prenant un plus grand tournant à ce moment là, bien qu’on puisse déplorer des morts expéditives pour de nombreux personnages clés qui auraient mérité une fin plus épique. La césure ressemble d’ailleurs à une tentative commerciale surfant sur le succès de la quatrième saison de Stranger Things, sans comprendre que ce n’est pas la césure qui a marché (au contraire, j’ai pour ma part attendu la seconde partie avant de commencer la première), mais le fait que la série est géniale et que sa saison 4 était un renouveau salvateur. Au final aucun arc narratif ne trouve de conclusion, tout est en suspend, avec comme seul pseudo enjeu de retrouver Ciri, alors même que tout le monde est constamment séparé et que des retrouvailles ont littéralement lieu tous les deux épisodes. On a toujours le Nord, pas unifié, la menace Nilfgaard, qui n’a pas bougé, et le teasing encore plus léger sur la horde sauvage qui a presque tendance à s’éloigner. Tout ce qui reste, hormis les personnages, est la qualité de la musique, et surtout les combats, toujours aussi sanglants avec un sens de la mise en scène spectaculaire où les superbes chorégraphies sont parfaitement accompagnées par une caméra qui danse sur le rythme des coups. Le savoir faire est là, sauf dans le cinquième épisode, mais l’histoire patine, tout semble s’embourber, se perdre. La chute est rude, et l’espoir n’est pas de mise vu la tronche du remplaçant, bien plus jeune d’ailleurs, alors l’inverse aurait pu se justifier en cas d’ellipse temporelle, mais le reste du casting ne changeant pas, la transition ne peut qu’être catastrophique. Je jetterais probablement un coup d’œil fin 2025 ou 2026 sur la prochaine saison, déjà résigné à ranger la série aux côtés de Elite dans le genre des bijoux d’efficacité qui s’est totalement perdu en cours de route…

Saison 3 :

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