Les Malheurs de Sophie

Les Malheurs de Sophie
2016
Christophe Honoré

Pour tous ceux qui sont nés dans les années 80-90, la série d’animation Les Malheurs de Sophie fut à n’en point douter l’un des souvenirs de télévision les plus forts, mêlant avec une rare subtilité légèreté et tristesse, abordant des thèmes aussi durs que la maltraitance et la mort. Cette histoire tirée des œuvres de la comtesse de Ségur a déjà connu deux précédentes adaptations cinématographiques, mais la dernière datait de 1980 et n’avait pas tellement convaincu. Le projet était donc une superbe nouvelle, mais c’était sans compter sur son réalisateur indépendant, passé maître dans l’art de l’auto-sabotage.

Reprenant les deux premiers livres de la trilogie, Les petites filles modèles et Les malheurs de Sophie, le film nous raconte l’enfance de Sophie de Réan, petite fille capricieuse, voleuse et curieuse, dont le principal passe-temps est de multiplier les bêtises. Peste pourrie gâtée qui se sert de son cousin Paul et des domestiques comme défouloir, elle connaîtra en revanche bien des malheurs.

Spécialiste des images dégueulasses filmées avec des caméras d’un autre âge, le réalisateur passe ici à la haute qualité avec la caméra la plus populaire du moment : l’Alexa, capable de monter au 4K. Et pourtant, cela ne l’empêche pas de couper les bords du cadre pour un ratio « d’époque » et d’incorporer des animations ignobles comme tout enfant de cinq ans aurait honte de montrer. Mais bon, cela est apparemment plus facile à faire que de dresser des animaux et monsieur trouve intéressant les incrustations immondes. Niveau idée de génie, on notera aussi les monologues face caméra, histoire de bien casser le quatrième mur comme un porc, de même que le choix de prendre des acteurs qui n’ont pas « l’intelligence de la caméra » (qui jouent mal quoi). Du coup, on en viens à se dire que Anaïs Demoustier et Muriel Robin jouent bien, c’est dire. Et si au moins ça permettait d’avoir un casting fidèle, mais non : Camille, Madeleine et Marguerite sont particulièrement mal choisies. Sophie et sa mère (Golshifteh Farahani) sont elles aussi hors sujet mais ce sont de loin les personnages les plus intéressants et travaillés, mais ça reste léger. Aussi bien diabolique qu’angélique normalement, Sophie n’est ici qu’une peste qui ne fait guère acte de repentance, atténuant son côté attachant et attendrissant. Le film ne fait qu’enchaîner les bêtises de Sophie, perdant une grande partie de l’essence originelle, la plupart des personnages sont ratés, les enjeux dramatiques torpillés (état de santé prémonitoire et disparition désamorcée) et la sauce ne prend pas. La magie semble bien loin.

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