La Planète des Singes – Suprématie
2017
Matt Reeves
Monument de la science-fiction, le roman de Pierre Boulle a pour le moment donné lieu à neuf films dont voici le dernier en date, clôturant une trilogie, démarrée en 2011 avec La Planète des singes – les origines, se posant comme un préquel au roman. Choisissant de s’éloigner un peu du support d’origine pour proposer une histoire originale, les deux premiers films de cette trilogie se posaient tout de même comme des versions alternatives – et heureusement bien plus réussies – des épisodes de 1972 et 1973, à savoir La Conquête et La Bataille de la planète des singes, bien que l’épisode de 2014, L’affrontement, ne recoupait pas jusqu’à la fin du dernier film de la pentalogie première. C’était donc tout l’enjeu de ce dernier film, clôturer la boucle, avec bien sûr le suspense d’une réalité alternative comme pour son ancêtre.
Suite à la confrontation entre l’humanité et les singes évolués, la question se posait de savoir si une cohabitation allait être possible ou si une guerre devrait déterminer qui des deux dominerait la planète. Emmenés par leur leader César (Andy Serkis), les singes avaient décidé de vivre reclus dans leur forêt, laissant l’humanité s’entre-déchirer de son côté, mais Le Colonel (Woody Harrelson), chef d’une armée humaine, va passer à l’offensive. Le virus qui a décimé la quasi entièreté de l’humanité et rendu les singes plus intelligents a muté : désormais les quelques survivants humains sont frappés par un syndrome dégénératif les faisant régresser à un stade quasi primitif. L’homo sapiens est menacé d’extinction mais la situation des singes est elle aussi très précaire, rendant la confrontation déterminante.
L’enjeu premier du film était de rejoindre les événements du film originel La Planète des singes, ceux du roman / de la version de 2001 ou du moins quelques chose d’équivalant. Etant donné que nulle guerre nucléaire n’a eu lieu et que les événements sont bien trop rapides pour laisser le temps à l’humanité d’évoluer comme dans Le Secret de la planète des singes, probablement le fruit de millénaires ou du moins de centaines d’années de mutation, la première hypothèse est d’emblée écartée. Les autres n’ont pas tellement plus de crédibilité tant le problème de continuité temporel est infranchissable, faisant de cette trilogie une entité à part entière et qui ne peut se rattacher à aucune autre. Ça n’est pas faute de multiplier les clins d’œil comme avec Nova, mais ça n’en reste pas moins gadget. Avec la mutation du virus et ses répercutions, le film se dote une fois de plus d’une logique plus convaincante que n’importe lequel des autres films en dehors de la nouvelle trilogie, donnant une raison scientifique à un changement improbable. Malheureusement, ce sera bien là le seul argument scénaristique du film, le reste étant particulièrement prévisible et se contentant d’opposer moralement les deux camps. Ceux qui espéraient un affrontement au sommet seront fortement déçus, la fameuse « guerre » étant de petite échelle et pas du genre qu’on pouvait espérer. Les retournements de situation sont faciles et la fainéantise est parfois énorme comme avec le coup du trou bien pratique trouvé par hasard. Le film tente quelques pointes d’humour, sans grand succès, de l’émotion, tant bien que mal, de l’action violente, trop peu, et un questionnement moral et politique, assez superficiel. La claque visuelle n’a plus lieu d’être après L’affrontement, les progrès étant moins stupéfiants, et en terme de rythme le film a de nombreux soucis, les 2h20 se sentent bien trop par moments. La conclusion est propre, possède sa propre logique et nous offre quelques grands moments avec quelques séquences de grand spectacle, sans compter les prouesses d’animation toujours d’actualité, mais la grandeur des deux précédents ne rayonne pas aussi fort et j’en attendais probablement trop.
Critique disponible en vidéo complémentaire :
https://www.youtube.com/watch?v=upygkC55QQU&t=25s