Final Fantasy VII Remake
2020
PS4/PS5
Incontestablement classé parmi les plus grands RPG de tous les temps au panthéon du jeux-vidéo, Final Fantasy VII n’en fini plus de faire fantasmer les joueurs depuis sa sortie en 1996 au Japon puis l’année suivante dans le reste du monde. Il faut dire qu’outre la révolution de l’époque, un peu gâchée par une mise en scène kitch et une localisation à la truelle mais qu’on excuse par nostalgie et de par la richesse colossale du contenu et de son univers, la saga a su entretenir la flamme. Depuis le modding a permis au jeu de rester voir devenir agréable à l’œil, mais ce qui a surtout fait perdurer la saga fut les nombreux jeux spin-off, dont on retiendra surtout Crisis Core, à l’immense potentiel gâché par du remplissage ennuyeux à souhait mais possédant quelques très grands moments, mais aussi un film d’animation qui a bouleversé le paysage cinématographique mondial : Advent Children. Prouesse visuelle frisant la perfection mais foncièrement vide, le film poursuivait un fantasme qui hanta les fans de la première heure pendant une décennie entière : le « trailer » de l’E3 2006. Servant de vitrine pour la PS3, le trailer montrait ce que pourrait donner un remake de Final Fantasy VII sur PS3, seulement il ne s’agissait là que d’une démo technique, rien de plus. Faire un jeu 3D moderne ne demande pas la même charge de travail qu’à l’époque, et Square-Enix estimait qu’il leur faudrait 30 ans pour réaliser un véritable remake aussi ambitieux ! Ce fut la douche froide, et l’univers étendu s’arrêta aussi tôt.
Mais soudain, alors qu’on ne l’attendait plus, une bande-annonce d’un véritable remake fut annoncé en grande pompes à l’E3 2016, soit dix ans pile après la fausse annonce. Des combats s’annonçant dantesques, des images à couper le souffle. Après un Final Fantasy XV extrêmement décevant et au développement catastrophique, le studio avait grand besoin de redorer son blason, mais un point annoncé très tôt vint calmer les ardeurs. Non, le jeu ne sera pas un remake de l’ensemble du jeu d’origine, ni même du premier CD, mais seulement de la partie sur Midgar, qui comptait à peu près pour 5 heures des 40 heures du scénario de base. Sachant que le jeu ne décollait vraiment qu’une fois avoir quitté Midgar, partant découvrir le monde, il y avait de quoi craindre pour la durée du jeu, son intérêt, mais aussi sur le temps qu’il faudra attendre pour en voir le bout. Cinq jeux ? Plus ? Etalés sur plus d’une décennie ? Le temps nous le dira, mais il est l’heure de faire un premier bilan de cette introduction de l’un des jeux les plus mythique de l’histoire.
A noter que le test a été réalisé sur une version « mise à niveau » PS5
Graphismes : 18/20
C’est évidemment la première chose qui frappe avec le jeu : il est beau. Plus que ça, il est même absolument parfait. C’est là toute là force d’un monde fantastique et du jeu vidéo, du moins dans ce style là, c’est qu’il n’a pas à être pleinement réaliste ou totalement photo réaliste. Le jeu peut se permettre quelques effets de style, de direction artistique, et la lumière peut se permettre de dépasser la réalité, de même que les personnages peuvent avoir un style un peu cartoonesque, du moins ne pas respecter totalement la réalité. Par rapport au film d’animation qui a imposé dans l’imaginaire collectif ce à quoi ressemblait « pour de vrai » cet univers, le jeu est en temps réel aussi abouti que le film d’animation, c’est dire la prouesse. Pour ce que le jeu veut faire, c’est parfait, et la fluidité est à toute épreuve. Les jeux de lumière sont stupéfiants, la mise en scène grandiose, et les effets lors des combats impressionnent. Pourquoi pas 20 alors ? Si la version PS5 corrige quelques soucis, sur le plan technique il n’en reste pas moins qu’il arrive de tomber sur des décors moins travaillés, les fameuses « textures baveuses », et certains PNJ ont clairement des modèles fait « à l’arrache », ou tout du moins avec un degré de finition tellement moindre que la différence est flagrante. De même, ne pas sortir de Midgar abouti inéluctablement à une frustration immense et une redondance terrible des décors, bien que le jeu fasse preuve de beaucoup d’imagination pour se renouveler, mais ça ne suffit pas. On a hâte de voir la puissance du moteur et des effets de lumière dans des décors plus originaux.
Jouabilité : 16/20
On en rêvait, on y est presque. Si sur le fond le film Advent Children était assez décevant, en termes de combats le spectacle était total, et manette en main on rêvait de retrouver les mêmes sensations. Si c’était pour retrouver du tour par tour, autant jouer au jeu d’origine, qui restera un must intemporel de toute façon. Eh bien le jeu se rapproche sensiblement de ce qu’on pouvait espérer, proposant de l’action RPG incroyablement bourrin et jouissif, tout en restant technique. En fait, le jeu est très proche des jeux de combat Dissidia, avec le même système de jauge de PV et de choc, avec des attaques plus ou moins efficaces sur l’une des deux, et mettre un ennemi en état de choc permet de faire baisser bien plus vite ses PV. Sur certains c’est inutiles, sur d’autres c’est indispensable, avec pas mal d’entre deux qu’il faudra jauger. Dans tous les cas, le jeu se veut très accessible, proposant un mode facile où l’on peut foncer dans le tas sans se poser trop de question, un mode difficile où chaque erreur sera potentiellement fatale (avec l’éternelle obligation de lvl up), et le mode Normal, pour ceux qui veulent se donner bonne conscience alors qu’il auraient probablement plus de plaisir sur le mode facile. Chaque personnage se joue d’une manière totalement différente, renouvelant l’expérience et permettant de corriger les faiblesses des uns par les forces des autres, et c’est globalement très plaisant. Reste deux soucis notables : l’absence de recover (touche rond dans les Kingdom Hearts et Dissidia), permettant de se rétablir après un choc aérien, évitant de se faire enchaîner salement. Ce premier point brise parfois le rythme, et on comprend mal cette absence. L’autre souci notable est le faible sentiment de progression. Certes, le jeu est une première partie et on imaginait mal débloquer l’omnislash directement, mais n’avoir que deux limites et si peu de techniques est dommage. On regrettera aussi le faible intérêt des missions annexes, et surtout la lourdeur du chapitrage coupant toute envie de tenter le 100%. A noter aussi une grande déception incompréhensible, alors que c’était un principe de base repris sur tous les autres jeux depuis : le niveau maître d’une matéria n’en génère plus une nouvelle, alors que c’était la base même du farming et manne financière incontournable (surtout avec la matéria « Tout »). On pourra aussi se plaindre de très légers soucis de caméra, mais globalement la gestion est excellente, et tous les problèmes sont peut-être lié à la ville étriquée de Midgar et le fait que ça ne soit qu’une première partie.
Durée de vie : 08/20
Amer déception, et c’est probablement là le principal défaut du jeu : il souffre du syndrome Crisis Core, à savoir du remplissage intempestif et nuisible. En ligne droite et en mode facile, on viendra à bout de l’histoire en 15-20 heures, ce qui à titre personnel est une excellente durée de jeu car rarement les jeux plus longs nous tiennent tout du long en haleine. Oui mais voilà, même si certains passages sont plus développés, l’équipe n’a pas su transformer un segment original de cinq heures en plus de contenu, faisant que même le scénario « principal » est composé de remplissage insipide comme de passer des heures à actionner des mécanismes (éteindre des lampes, ouvrir des vannes, actionner des leviers) pour avancer dans des dédales où il ne se passe rien de nouveau. Et que dire des missions annexes, à base de recherche de chats ? Non, le jeu reposait sur un passage trop court, et l’étirement est laborieux. Sur les 15-20 heures de missions « centrales », un grand maximum de huit présentent réellement un intérêt. Et de part la construction en chapitre cassant toute envie d’exploration, autant dire qu’on ne s’y replongera pas.
Bande son : 18/20
On passera très vite sur ce point : le jeu reprend les musiques d’Uematsu, peut-être le plus grand compositeur de tous les temps. Les musiques d’origines sont légendaires, les réorchestrations sont grandioses. Le jeu bénéficie aussi d’un doublage VF de très grande qualité, reprenant les acteurs du film d’animation, qu’on a pu entendre ailleurs à quelques occasions spéciales, notamment à l’époque où les Kingdom Hearts avaient un doublage français. L’immersion n’en est que plus grande.
Scénario : 14/20
C’était une claque monumentale à l’époque, mais forcément, l’histoire ne décollant et ne révélant son potentiel que bien plus tard dans la trame narrative, cette première partie en pâtie lourdement. On reste sur de la réflexion de surface, aussi bourrue que Barret, faisant de la propagande écologique sur fond de vilaine méga-corporation, alors que le vrai sujet est la gestion des traumatismes, la quête d’identité et l’avenir de l’humanité au sens large, sa propension à détruire la planète ne s’arrêtant pas à l’écologie, loin s’en faut. C’est même une menace très tertiaire au regard des cataclysmes cosmiques et militaires. L’univers est d’une richesse folle, mais on en effleure à peine la surface, et les ajouts ne pèsent pas bien lourd. Au contraire, mise à part le développement du personnage de Jessie, les autres ajouts sont nuisibles : les fileurs ne servent qu’à nous embrouiller et complexifier inutilement l’histoire (à moins que ?). Une mise en bouche, mais le plat tarde à arriver.
Note globale : 15/20
Un bel enrobage au potentiel immense, mais une simple introduction qui peine à se suffire à elle-même, voilà comment on pourrait résumer la situation. Beau à se damner, jouissif manette en main, le jeu est la première pierre d’une très grande histoire, mais on en verra que la première goutte, peinant un remplir un immense verre. Midgar est une ville intéressante, catalyseur d’une idéologie qui montrera ses limites, mais dans le jeu d’origine, c’est un lieu parmi tant d’autres, et pas là où les plus grands moments auront lieu. Trop peu de confiture pour une tartine bien trop grande, le jeu ne proposera que quelques heures vraiment captivantes au milieu d’un océan de missions au mieux oubliables, au pire ennuyeuses à souhait, nous poussant à rusher pour en finir. Bien sûr, faire tous les modèles des personnages, les animations, le système de combat, tout ça est un immense travail et il était tellement plus simple de tout situer au même endroit pour accélérer le développement, mais on espère maintenant que le développement de la suite s’en trouvera simplifié et qu’il ne faudra pas attendre 4-5 ans entre chaque épisodes, car aussi frustrante que soit cette introduction, elle démontre surtout un potentiel immense qu’il nous tarde de pleinement découvrir.