Dark Waters


Dark Waters
2020
Todd Haynes

C’était il y a vingtaine d’années, une série de reportages alertaient sur la possible toxicité des poêles avec un revêtement en teflon, mais visiblement pas de quoi s’alarmer puisque cette matière et ses dérivés sont encore largement présents dans nos vies, comme par exemple les punaises, rubans adhésifs ou encore et toujours en cuisine avec désormais les plaques de cuisson. Et la société DuPont se porte mieux que jamais, affichant un chiffre d’affaire frôlant les cent milliards de dollars pour des bénéfices affolants au delà des 25%, ce qui en fait l’une des entreprises les plus rentable au monde. Et si je vous disais que la toxicité de leurs produits est avérée, intentionnelle, aurait déjà coûté la vie à au moins 150 millions de personnes au cours des dernières décennies et aurait été plus mortelle que le Coronavirus l’an dernier ? Affolant vous dis-je…

Effroyable histoire malheureusement vraie, elle prit place à la fin des années 90 alors qu’un fermier contacta un grand cabinet d’avocat, la Taft compagnie, pour enquêter sur l’empoisonnement de ses animaux, pensant que la décharge locale polluait la rivière. Cette histoire se passant dans sa ville natale où réside encore sa grand-mère, l’associé du cabinet Robert Bilott (Mark Ruffalo) va simplement se rendre sur place, juste histoire de jeter un coup d’œil à l’affaire. Face à non pas quelques cas isolés et mineurs, mais bien l’entièreté du bétail mort dans d’atroces souffrances en développant des cas sans précédents de cancers et malformations aiguë, il va accepter de mener l’enquête, loin de se douter de l’ampleur des méfaits qu’il va découvrir.

Imaginez l’un des plus grands groupes d’avocats d’entreprises, spécialisés dans la représentation de groupes chimiques, se rendant compte que l’un de ses clients, DuPont, qui se trouve être l’un des groupes les plus puissants de la planète, a sciemment et volontairement empoisonné non pas quelques milliers de personnes, mais l’absolue entièreté des 7 milliards d’habitants de la planète au nom du sacrosaint profit. Pour le cinéphile avide d’intrigues passionnantes, le film est une rare pépite, nous régalant de thèmes forts sur la morale et la quête de justice, avec à la clé une affaire des plus palpitantes, regorgeant de rebondissements historiques et à l’impact décuplé par deux mots lourds de sens : « histoire vraie ». Oui, tout cela est réel, et le film est d’autant plus important de par la connivence des médias et gouvernements, minimisant l’affaire, et le film a d’ailleurs fait l’objet d’une censure massive. Malgré des critiques exceptionnelles, le film a eu une distribution réduite, surtout en France où il est sorti quelques jours avant le premier confinement et fut un des seuls à ne pas avoir bénéficié d’une vraie seconde sortie à la réouverture des salles. Mais plus encore, alors que le film était acclamé, il fut totalement snobé par la totalité des cérémonies. Preuve de l’influence titanesque du géant américain ? A n’en point douter.

Le film fait montre d’une grande efficacité pour conter cette histoire, le rythme étant parfaitement maîtrisé entre les coups de maître et les révélations effrayantes, et c’était d’autant peu évident que le récit s’étale sur de nombreuses années. Un temps qui passe pas forcément très visible sur le visage des acteurs, notamment Anne Hathaway, mais ce manque de budget maquillage est compensé par le charisme des acteurs. Outre Bill Pullman, on retrouvera surtout Tim Robbins, plus charismatique que jamais et dont la force morale impressionnera. Quand un film met en avant un complot si dantesque que l’on se dit que l’humanité est si nocive qu’elle finira par s’auto-détruire d’ici la fin du siècle, avoir des personnes prêtes à prendre tous les risques pour rendre le monde meilleur fait chaud au cœur. Une leçon d’histoire, une leçon de vie, mais aussi une leçon de cinéma sur comment réveiller les consciences.

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