Cruella


Cruella
2021
Craig Gillespie

Voici l’un des tous premiers blockbuster proposé en pâture aux salles lors de la réouverture de ses derniers après plus d’un an de fermetures et timides réouvertures en pleine pandémie. Projet de préquel aux 101 Dalmatiens destiné d’abord à promouvoir la plateforme Disney+, le studio a finalement privilégié pendant les premiers mois une sortie simultanée, avant de se rendre compte avec le recul que c’était commercialement la pire idée qui soit, réduisant d’en moyenne 70% les entrées en salle entre les quelques ventes en ligne et surtout le piratage massif alors que beaucoup hésitaient encore à retourner dans les salles par peur de la maladie. Si les chiffres de la plateforme de streaming sont inconnus, le budget est lui aussi très variable selon les sources, oscillant entre un massif 100-125 M$ jusqu’à 200 M$ pour certaines sources. Or avec un box-office mondial de 233 M$, d’un extrême à l’autre on passe d’un succès très relatif à un gouffre financier monumental. Mais puisqu’apparemment une suite est en chantier (sérieusement ?), il faut croire que le vrai budget est plus proche des 100 que des 200 M$.

L’histoire est donc celle de la terrifiante Cruella d’Enfer qui… Ah non ? Non, c’est l’histoire de Estella (Emma Stone), une méchante qui déteste les chiens et maltraite… Ah non ? Non, ce sont donc les mésaventures d’Estella, une pauvre et gentille orpheline qui adore les chiens, vit avec ses deux meilleurs amis Japser et Horace et deux adorables trésors sur pattes. Et elle rêve de devenir styliste et de se venger de la Baronne (Emma Thompson) qui a tué sa mère. Ah et Anita est noire, journaliste, et Roger est avocat. QUOOOIIIIIIIII ???!!!

On ne va pas y aller par quatre chemins, ce film est une catastrophe sur un nombre hallucinants de points, sur la forme mais surtout sur le fond. Vouloir raconter un préquel c’est bien, mais être cohérent avec la suite, ça ne serait-il pas mieux ? C’est bien simple, à part vite fait le duo Jasper / Horace de « respecté » malgré un classique ethnie washing actuel (mais pourquoi diable ne pas inclure de nouveaux personnages pour la diversité au lieu de changer des anciens qui n’ont d’ailleurs rien à faire là ! La diversité oui, mais faite le bien !), l’écriture des personnages est juste affolante. Comme d’habitude avec les relectures de Disney, les méchants n’en sont plus, et de fait il faut inclure un nouveau méchant, mais c’est fait de la pire des manières. C’est bien simple, ce préquel est en quelques sortes un remake puisque la méchante reste la directrice de mode et la gentille une de ses employées, avec au milieu une histoire de chiens. Mais l’écriture est tellement mauvaise entre des dalmatiens tueurs qui changent d’allégeance en deux secondes, mais surtout Cruella elle-même : on nous la présente comme schizophrène, alors qu’en réalité elle n’a aucun saut d’humeur de tout le film et met même une heure entière à faire vite fait preuve de sadisme. Les clins d’œil au film de 1997 sont d’une lourdeur atroce, allant jusqu’à une scène post-générique pour faire le lien quasi direct en reprenant des décors semblables et la fameuse chanson, pourtant arrivant chronologiquement bien plus tard et avec des protagonistes qui n’ont rien à voir sur la papier, que ce soit physiquement, amicalement (d’où Anita et Cruella sont BFF d’enfance ?!) et professionnellement (exit la styliste et le programmeur de jeux, ils sont journaliste et avocat). Le film va même jusqu’à prendre Mark Strong pour jouer les valets au grand cœur, rôle qu’il connaît décidément bien. Les dialogues sont d’une platitude sans nom, le rythme atroce (2h15 !) et nom de Dieu quelle est cette manie de cracher à la gueule des dresseurs d’animaux en remplaçant tous les chiens par des doublures numériques la plupart du temps criardes et sans âme ? Vous n’allez pas me dire que ce sont des créatures devenues dangereuses et difficiles à apprivoiser subitement ? Pour un film avec un tel budget et tourné sans la moindre contrainte sanitaire puisque datant de 2019, c’est un scandale d’avoir des scènes aussi indignes que le parachutage, l’une des pires incrustations que j’ai vu de ma vie. Scénario, personnages, dialogues, liens avec la suite, toute l’écriture est un cuisant échec, visuellement le film a des effets spéciaux immondes, le rythme est d’une mollesse insupportable avec tant de passages ennuyeux et inutiles, et même les acteurs sont cabotins à outrance. Cruella ? Un enfer…

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