Un Français

Un Français
2015
Diastème

Avec près de vingt ans de retard, voici un film faisant la diatribe des skinheads, expliquant peut-être pourquoi tant de cinémas ont rechigné à le diffuser. Se déroulant sur près de trente ans, le film montre le chemin d’un français, Marc (Alban Lenoir), de 1986 à nos jours. Exacerbé par la prolifération d’immigrés dénaturant le paysage français, dont la culture se retrouve piétinée par d’autres, il va intégrer un mouvement extrémiste qui milite activement pour la suprématie blanche. Convaincu d’être dans le bon camp, il ne reculera devant rien ni personne pour faire valoir sa doctrine, n’hésitant pas à en venir aux mains. Une surenchère de la violence sans fin qui va peu à peu l’user et lui ouvrir les yeux.

Un film coup de poing, engagé et militant, ne souffrant aucune censure, osant jusqu’à des représentations très violentes et limite gores. C’est d’ailleurs probablement ce dernier point qui a valut au film d’être réduit au quasi silence, car autrement un film si bien pensant, anti-racisme, anti-front national et prônant le « aimons nous les uns les autres » aurait dû être chaudement accueilli et couvert de récompenses. À moins que ça ne soit la sympathie du héros, montrant que derrière le monstre bat un cœur et que n’importe qui a le droit à sa quête de rédemption. L’effet « Hannah Arendt« , où quand le monde s’offusque d’apprendre que même les pires monstres sont des humains comme les autres, et que derrière un procès d’intention peut se cacher l’exception qui discrédite tout l’ensemble du raisonnement accusateur. Et pourtant, ce revirement relance l’intérêt du film, sans quoi on aurait fini par tourner en rond dans les méandres de la fracture culturelle, l’occasion de belle séquences fortes et marquante, mais il faut savoir varier les plaisirs. Et de toute façon, ce combat impensable aujourd’hui aurait sonné comme une hérésie tant ce genre de comportement, de tous temps rapidement fatal, serait maintenant stoppé avec une force exemplaire. Et c’est ça qui est intéressant, car à l’image du français moyen qui dans le temps était de culture raciste, le personnage évolue et se rapproche peu à peu des valeurs actuelles. La France perd son identité, sa culture, ses traditions, mondialisée par son immigration et une homogénéisation planétaire, mais ainsi vont les choses. C’est regrettable sur bien des points, le phénomène doit être freiné, l’histoire préservée, mais sans sombrer dans la haine. Tombant régulièrement dans la caricature, le film n’en reste pas moins bon, son message est clair et n’est pas non plus dégoulinant, et sans se hisser au niveau d’un American History X, c’est plutôt pas mal.

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