La Ligne verte
2000
Frank Darabont
Je me souviens, c’était la nuit du 31 décembre 2000 pour le nouvel an, un passage à la télé sur Canal+ où il fallait bien une occasion de devoir attendre minuit pour tenter un film d’une telle longueur : plus de trois heures, ce qui reste à tout âge une épreuve que de réussir à s’intéresser et à rester alerte aussi longtemps. Déjà le film avait une certaine aura, mais on était loin du statut archi culte, de monument éternel qu’il a aujourd’hui. Est-il toujours à la hauteur ?
L’histoire prend place en 1935, dans le bloc E de la prison de Cold Mountain, la fameuse ligne verte où attendent les condamnés à mort devant passer sur la chaise électrique. Paul Edgecomb (Tom Hanks) est habitué d’y recevoir les pires criminels qui soient, mais il est vrai que l’arrivée d’un certain John Coffey (Michael Clarke Duncan) fut marquante : un colosse aussi immense qu’imposant, condamné à mort pour le viol et meurtre de deux fillettes, comble de l’horreur. Et pourtant, cet homme semble non seulement loin du monstre dépeint, mais semble même être un envoyé du ciel là pour aider son prochain.
On peut dire que la carrière de Frank Darabont fut une anomalie : très tôt il a enchaîné ce qui sont considérés comme deux monuments du cinéma et figurant parmi les mieux notés de l’histoire, Les évadés et le film ici présent, mais la suite fut aussi aléatoire que catastrophique, enchaînant navets et bides. Il faut dire que les éléments marquants ne manque pas entre Mister Jingle, les miracles, les deux tarés (un de chaque côté des barreaux) et ce casting de fou furieux. On retrouvera en plus du tandem cité David Morse, Bonnie Hunt, James Cromwell, Gary Sinise et Sam Rockwell. Globalement l’histoire est pas mal, pas incroyable mais bien ficelée, et on se prend à cette ambiance étonnamment détendue et chaleureuse malgré le fait qu’on soit dans le couloir de la mort. Mais de là à parler d’immense chef d’œuvre ? Le rythme est assez catastrophique, ce qui est souvent le cas avec de telles durées, mais clairement on pourrait facilement enlever une grosse heure. Ensuite, l’épilogue / prologue est un peu raté, en faisant des caisses sur un vieil homme dont la longévité n’a rien de si exceptionnelle. Est-ce pour dire que c’est un narrateur non fiable qui voit des signes ou des miracles là où il n’y en a pas ? Voilà qui serait au moins aussi nuisible que la fin abjecte de cette merde de Big Fish que je ne conspuerais jamais assez tant le potentiel était immense et la fin un non moins immense gâchis. Un bon film donc, dont le casting ne cesse de prendre de la valeur avec les années, mais qui avec du recul, propose tout de même une histoire pas si incroyable et souffrant de longueurs aberrantes.