Le Robot Sauvage
2024
Chris Sanders
Cache-misère ou coup de génie qui a sauvé le projet ? Alors que les coûts de production du cinéma d’animation atteignent des sommets de plus en plus intenables (pour ainsi dire plus aucun film Disney Animation n’arrive à se faire à moins de 200 M$ de budget) tant le matériel informatique est de plus en plus onéreux avec des temps de rendu de calcul 3D toujours plus poussés dans une course à la prouesse technique, ce film en fait le contre-pied total. Une 3D très rudimentaire, servant juste de base pour ensuite dessiner et peindre par dessus, et le résultat est là financièrement : seulement 78 M$ de budget, faisant donc des 324 M$ récoltés dans le monde une vraie réussite commerciale, ce qui aurait été désastreux avec un budget classique.
Que se passerait-il si un robot d’assistance perdait sa raison d’être dans un environnement dénué d’humains ? C’est ce qui va arriver au modèle robotique Rozzum 7134, se réveillant sur une île sans la moindre trace de civilisation. Elle va alors décider d’étudier les animaux sur place pour éventuellement les comprendre et leur venir en aide, permettant de perdurer sa raison d’être qui est d’aider les autres.
Sur le papier, on croit avoir là de la fable pour enfant extrêmement classique à base de société animale où un élément extérieur est d’abord rejeté pour sa différence, avant de gagner peu à peu la confiance et l’amitié de tous par sa force de détermination et son sens aiguë de l’entraide. Et effectivement, sur bien des aspects on retrouve ce côté conte pour enfants, avec une structure proche de bien des œuvres animalières, mais pas celles pour enfants. J’y ai plus vu Sur la Terre des Dinosaures pour son côté danger de chaque instant et la survie avant tout, car il ne faut pas s’y tromper, avec très tôt pléthore de morts, une faune résignée blaguant sur un nouveau né tué à l’instant, clairement le film n’est pas pour les plus jeunes. Et sans trop en révéler, l’histoire sera aussi bien plus ambitieuse que juste un robot qui fait ami-ami avec les animaux, et heureusement que le film fut réalisé pour un si bas coût et que son succès permettra d’aller plus loin, étant l’adaptation du premier tome d’une trilogie. Une histoire qui fera d’ailleurs montre d’un grand soin d’écriture tant chaque élément, même celui semblant le plus tertiaire, va apporter une leçon qui servira le moment venu, avec un sens du timing impressionnant.
Reste alors l’aspect artistique, plus mitigé. Alors oui, quand on puise directement son inspiration du robot du Château dans le ciel, évidemment que le style est réussi, mais ça ne vaut que pour le robot, dont l’acclimatation à la nature reste moins inspirée que ce qu’on a pu voir par exemple dans Rebel Moon. Pour les animaux, le style est un peu trop cartoon, et globalement on sent la technique à des années lumière des plus beaux représentants du genre comme Raya et le dernier dragon. La mise en scène est grandiose, au même titre que la musique vraiment épique, l’un de ses plus gros point fort, mais j’ai ressenti ce sentiment d’œuvre bridée, comme le brouillon visuel qu’était l’extraordinaire Conte de la princesse Kaguya. Avec de plus gros moyens, l’ampleur du film aurait été décuplée, d’autant que j’ai adoré son côté Divergente. Le thème est aussi peut-être un peu trop classique par rapport à un Dragon, et niveau robot attendrissant, difficile de passer après un Wall·e. Espérons que les suites sauront aller plus loin encore.