Topaze

Topaze
1951
Marcel Pagnol

Pièce de théâtre écrite par Marcel Pagnol et qui connu un grand succès à sa sortie en 1928, elle fut ensuite adaptée au cinéma en 1932 mais le résultat fut jugé honteux par l’auteur qui décida d’en faire sa propre version quatre ans plus tard. Chose étonnante, il a malgré tout refait une nouvelle adaptation de sa propre pièce quinze ans plus tard que voici, pensant pouvoir sans doute se surpasser lui-même, mais difficile de comparer sans avoir vu la première version. À noter aussi une quatrième adaptation qui a vu le jour en Angleterre en 1961, prouvant s’il le fallait l’immense popularité du personnage à l’époque.

Professeur des écoles dans une pension assez miteuse, Albert Topaze (Fernandel) était néanmoins très dévoué, mais pas au point de mentir pour son directeur, fut-il même le père de la gente dame qu’il convoitait. Ainsi, en se fâchant avec une mère peu encline à reconnaître le statut de cancre de son fils et jouissant d’un malheureux concours de circonstances, il sera mit à la porte, l’occasion rêver pour profiter d’un homme à terre. La mère d’un de ses élèves de cours particuliers va ainsi jouer de son charme pour apposer le nom de Topaze sur une affaire d’escroquerie de son amant, faisant basculer un bon et honnête homme dans un sombre chemin.

Ce film me fait penser à la réplique de l’inspecteur Gordon dans The Dark Knight : « ils ont prit le meilleur d’entre nous ». Ici c’est un peu ça, le passage vers le côté obscur d’un être pur. C’est d’ailleurs bien plus intéressant car quoi de plus ennuyeux qu’une personne aseptisée qui ne connaît aucun vice ? La perfection n’est pas de ce monde et ça sonne faux de vouloir nous le faire croire. Un tel naïf est abusif quand il n’y a pas une forme d’aliénation comme dans Le Schpountz. Comme en plus la représentation de l’école n’a rien de spécialement originale ou captivante, la première partie du film s’en retrouve assez plate en attendant que le piège ne prenne place, et même là le bilan n’est pas ouf. Niveau humour on a connu plus fin, l’histoire est assez vide et les acteurs presque mauvais. Pour une fois Fernandel avait enfin une tête un peu différente d’habitude avec son bouc, mais même ça il ne le garde pas. En revanche c’est une idée de mise en scène louable avec la représentativité inversée (le bouc est typiquement assimilé au diable, alors le lui affubler quand il est sur le droit chemin et le lui enlever quand il en sort fait montre d’une certaine réflexion). Enfin bon, l’histoire est sommaire et ne mérite pas qu’on s’y attarde, pas plus que le film d’ailleurs qui fait péniblement son office.

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Fast & Furious 8

Fast & Furious 8
2017
F. Gary Gray

C’est ce qu’on appelle une longévité record. Alors qu’on croyait la saga en mauvaise posture après le semi-échec de Tokyo Drift, le troisième épisode, le film suivant a changé la donne en remettant en avant tous les personnages iconiques des deux premiers films, relançant l’intérêt et les recettes. Avec Fast Five, la saga s’est même offert ses lettres de noblesse en se dotant de nouveaux venus de premier ordre et le retour de tous les anciens protagonistes, mais aussi et surtout en se payant un scénario de très grande qualité mettant à la rue bien des films de braquage. Depuis, chaque épisode décuple le score du précédent à plus ou moins juste titre, au point que Furious 7 ait été subrepticement le quatrième plus gros succès de l’histoire avec 1,5 milliards de dollars au box office mondial. Seulement voilà, le héros de la franchise est malencontreusement décédé et il faut bien savoir s’arrêter au bout d’un moment.

Toujours sous la houlette du gouvernement américain (Kurt Russell), la bande de Dominic Toretto (Vin Diesel) – incluant Roman (Tyrese Gibson), Letty (Michelle Rodriguez), Ramsey (Nathalie Emmanuel) et Hobbs (Dwayne Johnson) et les autres (sauf Bryan et Mia, en « retraite ») – devait voler un brouilleur électro-magnétique, mais les choses vont mal tourner. En effet, Dom va doubler sa propre équipe pour donner leur butin à une certaine Cipher (Charlize Theron), dangereuse cyber-criminelle. Pourquoi une telle trahison, lui pour qui la famille représentait tout ?

Alors que les trois premiers films s’imposaient comme des productions décérébrées et décomplexées qui n’avaient vocation qu’à offrir du fun, sans parler forcément d’action, par la suite la saga a voulu redorer son blason et s’imposer dans un registre plus sérieux, sans pour autant avoir toujours une histoire passionnante, à l’image de Fast & Furious 6. Cette fois c’est même presque grotesque. Les réactions de Dom ne collent pas et on ne comprend pas son mutisme, Cipher est une méchante bidon qui a la beauté mais ni le charisme ni l’intelligence, nous infligent encore le coup de « oh zut, j’aurais dû vous tuer tant que je le pouvais ». Bah oui connasse ! Comble du comble, même si la cohérence n’est pas de mise, le film est pourtant ultra téléphoné et sonne par moment très faux, comme l’entente express entre Hobbs et Deckard (Jason Statham) ou les interventions de son frère Owen (Luke Evans) et Helen Mirren. Pire, le film nous prend pour des demeurés en nous expliquant lourdement ce qui était implicite. Côté scénario, c’est donc une sacrée déception, mais qu’en est-il du spectacle ?

Après une intro assez grisante nous rappelant les bases de la franchises, à savoir les petites courses clandestines, on enchaînera plutôt bien les phases explosives, sans pour autant faire autant date que la balade avec le coffre-fort ou même le coup du tank sur auto-route. La séquence de baston en prison est trop peu lisible, le contrôle des voitures à distance gère mal l’effet de surenchère, nous faisant même penser à des voitures recréées numériquement, et le coup du sous-marin largement trop montré dans les bande-annonce souffre aussi de cette démesure qui empêche la suspension d’incrédulité. En résulte un dynamisme indéniable mais indubitablement moins savoureux que par le passé, la faute à une écriture plus minimaliste que jamais. Il devient aussi pénible de voir constamment repoussée la présence du héros de Tokyo Drift dans la bande, pourtant actée dans le précédent film mais qui n’est finalement pas présent. Il est vrai que le film était assez bancal sur bien des aspects, mais il reste néanmoins l’un des plus originaux et intéressants de la franchise. On reste sur du divertissement efficace qui envoie du lourd, mais la saga méritait mieux que ça et il aurait été tellement plus fort et respectueux de la laisser reposer en paix avec son humble représentant tant la fin du précédent était parfaite.

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La Fille du puisatier

La Fille du puisatier
1940
Marcel Pagnol

Malheureusement brisé dans son élan par le cuisant échec de Marius et Fanny dont la sortie simultanée fut l’une des pires erreurs marketing de la décennie, la valse des réadaptations de Pagnol s’arrêta sec, alors même que la version de 2011 de La Fille du puisatier fut une excellente surprise. Mais était-ce une meilleure adaptation que l’original dont l’auteur s’était lui-même chargé ? Une vérification s’imposait.

Le film est centré – comme le laissait supposer le titre – sur Patricia, fille d’un puisatier (Raimu). Aînée d’une famille de six filles, Patricia s’apprête à fêter ses 18 ans et est comme on dirait « bonne à marier ». Félipe (Fernandel), grand ami du puisatier, est très intéressé par elle et pense qu’il ferait un bon mari. Mais le choix de Patricia se portera sur Jacques, un jeune pilote. Seulement voilà, à peine leur amour consumé, Jacques fut appelé par l’armée dans le cadre de la Première Guerre Mondiale. Là où la situation se complique c’est qu’elle est enceinte et que la famille Mazel, parents de Jacques, refuse l’enfant. Patricia se retrouve alors rejetée par son père de par le statut bâtard de son enfant.

L’histoire est assez simple : un triangle amoureux où l’un des deux prétendants est hors-jeu d’emblée, une grossesse précipitée et une situation ingérable. Bien sûr, aujourd’hui les naissances hors mariage sont monnaie courante et il en faut plus pour choquer ou déstabiliser le spectateur contemporain, mais c’est justement pour ça que le film marche si bien. Même pour l’époque le ton solennel et le phrasé dramaturgique dénotent, décuplant l’effet comique des grands discours volontairement exagératifs. Il y a quelques situations qui ne prêtent pourtant pas à rire et prit au premier degré c’est tout de même « un grand malheur » comme le dit si souvent le père, mais on retombe inéluctablement sur l’esprit Pagnol où les joies priment toujours sur les moments plus sombres et on peut voir de la lumière en chaque instant si on sait où chercher. Malgré une durée très longue les situations ne patinent jamais et on se délecte de chaque réplique qui égayent les doubles sens de jolies métaphores et autres jeux d’esprit. Les acteurs surjouent tout naturellement, insistant bien sur la force de caractère des protagonistes, mais c’est en adéquation avec l’image qu’ils cherchent à renvoyer d’eux. Seule ladite fille du puisatier peine à convaincre, mais heureusement le film s’attarde plus sur son père et son ami et ils sont nettement plus intéressants. Si le remake a fait un travail formidable et restitue brillamment l’ambiance et les talents de l’époque, cette première version n’a rien perdu de sa superbe et mérite tout autant notre attention.

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Le Schpountz

Le Schpountz
1938
Marcel Pagnol

Et de trois. Voici encore une histoire originale créée pour le cinéma par le grand Marcel Pagnol – à croire que ce fut le cas pour la majorité de ces films – qui officie également derrière la caméra à la réalisation. Sans doute l’un de ses films les plus connus encore aujourd’hui, cette comédie a même eu droit à un remake 61 ans après, bien que ce fut un sacré désastre d’après les critiques. Et quand on voit les beaux restes de l’original, on se demande bien ce qui pousse certains à vouloir détourner l’attention d’un classique si c’est pour se vautrer derrière…

Qu’est-ce qu’un « Schpountz » ? Pour une bande de techniciens et responsables d’une société de production cinématographique parisienne, c’est leur plus grand plaisir coupable. Pour eux le Schpountz c’est une espèce d’abruti arrogant qui se croit doté d’un incroyable don pour le cinéma et qui est tellement aveuglé par un amour propre démesuré qu’il n’est pas en mesure de discerner la moquerie. En tournage dans le Sud, ils vont tomber sur le plus beaux des spécimens jamais croisé : Irénée (Fernandel). Seulement cette fois la plaisanterie ira beaucoup trop loin.

Reprenant avant l’heure le principe moralement limite du Dîné de cons, le film joue sur la crédulité et la bêtise d’un grand dadais qui possède un talent incommensurable pour déformer la réalité et la faire correspondre à ses attentes. À ce niveau là ce n’est plus de la connerie, c’est du pur génie ! Et le résultat ne se fait pas attendre entre le talent de Fernandel et la plume de Pagnol : c’est un pur régal comique qui ne fait pas seulement sourire mais bien rire aux éclats. Le film enchaîne les pirouettes pour faire retomber le héros sur ses deux jambes, relançant constamment le quiproquo et l’aliénation pour des situations de plus en plus rocambolesques. Il arrive même à créer de véritables enjeux dramatiques par une finesse d’écriture inouïe et on en perd pas une miette du début à la fin. Une brillante combinaison d’écriture complexe et de ton décomplexé.

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Merlusse

Merlusse
1935
Marcel Pagnol

À l’image de Jofroi, ce film est aussi un moyen-métrage écrit et réalisé par Marcel Pagnol expressément pour le cinéma, reprenant un thème qui lui est cher et qui fait parti intégrante de chacune de ses œuvre : les préjugés et l’absence de communication qui entraînent le malheur de tous.

Prenant place dans ce qui était à l’époque le seul lycée de Marseille, le film raconte la pénible veille de Noël des oubliés et des indésirables. Certains élèves y étaient placés en pensionnat et quelque uns n’ont pas eu la chance de retrouver leur famille pour les fêtes de fin d’année, devant même, comble de l’horreur, supporter « Merlusse » pour leur dernière soirée d’étude. Derrière ce surnom peu affectueux, une barbe pouilleuse et un cache-œil de borgne pourrait pourtant se cacher le plus brave d’entre nous.

En plus de nous proposer de retrouver l’espièglerie de la jeunesse de l’époque qui nous avait tant fait aimer l’écrivain avec ses autobiographies, le film met en exergue les préjugés de tous, que ce soit la naïveté des plus jeunes ou l’aigreur des plus vieux. Derrière la tragédie de l’isolement et de l’abandon, l’auteur arrive à en dégager de l’humour et de l’émotion par le biais d’une morale très belle et touchante. On tient presque là une version inversée de Scroodge, ce qui ne dénote pas forcément d’une grande originalité, mais qu’importe si le message passe.

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Jofroi

Jofroi
1934
Marcel Pagnol

Célèbre dans l’imaginaire collectif pour ses romans et les adaptations cinématographiques récentes telles le diptyque La Gloire de mon père et Le Château de ma mère, l’artiste Marcel Pagnol a aussi beaucoup marqué son temps en tant que metteur en scène durant les années 30 à 50, s’offrant des succès intemporels qui trouvent encore écho aujourd’hui. S’auto-adaptant le plus souvent, il a de temps à autre créé des histoires originales pour le cinéma, et en voici un exemple avec ce moyen-métrage.

Dans une petite ville de campagne du Sud de la France, un certain Jofroi s’apprêtait à vivre enfin une retraite calme et méritée après une dure vie de labeur. Pour se permettre d’arrêter de travailler, il avait cédé à un autre paysan du coin ses terres, l’aboutissement de toute une vie. Alors quand son repreneur va se mettre à abattre ses précieux arbres qu’il avait lui-même planté il y a quarante ans, son monde va s’écrouler et il va partir en guerre.

Un vieux ronchon, un brave homme dans son droit et une ville prise en otage, voilà le programme de cette comédie très théâtrale. La situation est pourtant simple : l’acte de vente est effectif et l’homme peut faire ce qu’il veut du terrain, mais pas quand un vieux réécrit lui-même les lois comme bon lui semble. Un cas d’école qui aurait pu être assez intéressant, malheureusement la gestion de crise est ratée avec un dialogue à sens unique et une disproportion ahurissante. Les dialogues sont pour la plupart savoureux, le bougre maniant l’art de la dramaturgie à la perfection, mais ça ne suffit pas pour faire office d’œuvre complète. Après tout ça n’était qu’un début, et la suite de son travail sera bien plus intéressante.

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Les Yeux jaunes des crocodiles

Les Yeux Jaunes des crocodiles
2014
Cécile Telerman

Trilogie littéraire qui s’est vendue à plusieurs millions d’exemplaires, la saga de Katherine Pancol voit là son premier tome adapté par sa propre fille, officiant comme scénariste sur ce film. Bien sûr, rien n’avait été annoncé en amont, mais les droits d’adaptation des deux autres livres avait eux aussi été achetés et près de trois ans après la sortie du film aucun des autres n’est ne serait-ce qu’en projet, laissant supposer un retour sur investissement décevant. Pourtant, si le film ne brille pas spécialement, on sent une certaine profondeur scénaristique.

Dans une famille bourgeoise parisienne, leurs deux filles n’ont pas connu le même succès. Si Iris (Emmanuelle Béart) a fait un beau mariage (Patrick Bruel) et croule sous l’argent sans avoir à travailler, sa sœur Joséphine (Julie Depardieu) a fait de belles études qui n’intéressent personne et ne rapportent pas grand chose, ce qui n’est pas évident quand son mari (Samuel Le Bihan) s’est fait la malle et que sa fille (Alice Isaaz) est obnubilée par la richesse. Pour faire son intéressante, Isis va s’inventer écrivaine au cours d’un dîné, reprenant même le thème de la thèse de sa sœur, puis va obliger cette dernière à écrire ledit livre à sa place. Entre les mensonges et les débordements, la situation va peu à peu prendre une tournure ingérable.

Un nègre condamné à vivre la gloire par procuration, cela rappelle L’Autre Dumas, ou alors Californication si on part du côté de la spoliation. C’est donc un thème assez classique mais qui fonctionne toujours puisque la situation ne laisse jamais indifférent, que ce soit par la nonchalance du spoliateur qui peut provoquer le rire ou part la détresse du spolié qui peut nous attendrir ou nous faire rager. Ici, bien qu’en dehors de Patrick les acteurs soient assez mauvais, l’empathie marche très bien et le récit est très riche, réussissant à développer des histoires secondaires solides à l’image du beau-père qui réveille en nous cette envie de chair fraîche et de bousculer les petites bourgeoises tel un trotskiste fan de Lolita. Parce que oui pourquoi pas. Malgré une durée copieuse, le film se laisse aisément regarder de par la multiplicité des intrigues, certes classiques mais efficaces, de même que de par ses personnages captivants, là aussi assez stéréotypés et pas super bien interprétés de surcroît, mais la somme des deux créée une empathie fonctionnelle. Il est probable que le roman était autrement plus abouti, mais ça reste une petite comédie française légère et sympathique.

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Évolution

Évolution
2016
Lucile Hadzihalilovic

Si on peut y retrouver des films indépendants intéressants, le niveau global des films présentés à Gérardmer est souvent bas, voir médiocre. Pour se rassurer on pouvait cette fois se concentrer sur le prix du jury et le prix de la critique reçus par ce film, mais quand on se rappelle qui a gagné le prix du meilleur film cette même année (Jérusalem, aux critiques tellement abyssales que je ne m’y suis pas risqué) on ressent l’effet Cannes où chaque prix est une vaste blague. Et décidément, nous n’avons pas le même humour…

Une ville abandonnée au bord de l’eau, des femmes et des petits garçons. En quelle année somme nous ? Pourquoi n’y a t-il que des femmes d’une trentaine d’années et des petits garçons aux alentours des 7 ans ? Que font-ils là ? C’est quoi ce délire autour de l’étoile de mer ? Mon dieu mais elle a quoi dans le dos ? C’est une histoire de femmes pédophiles oui ou merde ? C’est qui ce vieux barbu qu’on ne voit que dans une espèce de rêve halluciné et qu’on ne revoit plus après ? Y a t-il un scénariste ? Chut il fait un bad trip !

Aie aie aie… Faire du film contemplatif, pourquoi pas, en plus l’image du film est plutôt bien soignée et la réal trouve quelques idées de mise en scène intéressantes comme une certaine lumière qui a la forme d’une étoile de mer. Le petit qui joue Nicolas est particulièrement bien éveillé et globalement les acteurs sont même assez bons, sans compter qu’en plus l’ambiance oppressante marche carrément. On aurait pu se laisser simplement porter par ce film ô combien malsain tant d’un point de vu artistique l’imagerie et l’ambiance sont superbes, mais pourtant le film est un ratage complet. Le film se repose quasi exclusivement sur son idée glauque et mystérieuse, mais le problème c’est que ça n’a scientifiquement aucun sens. Que ce soit le choix de la cible ou de la technique d’évolution, rien ne colle. L’utilisation de petits garçons semble n’avoir vocation qu’à choquer et le film y sacrifie sa cohérence, déjà mauvaise même sans ça. Pire, le film ne fait que montrer son idée sans la développer ni l’expliquer. Malgré une durée de 80 minutes, le temps paraît bien long entre l’histoire minimaliste et la faible quantité de dialogues. Soigner la forme c’est bien gentil, mais encore faut-il avoir quelque chose à montrer.

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The Edge of Seventeen

The Edge of Seventeen
2016
Kelly Fremon Craig

Beaucoup parmi nous ont grandi avec les teen-movie des années 80-90 (voir début 2000) sur la vie de lycéens (de temps à autre étudiants) en proie avec les incertitudes de la vie, que ce soit au niveau professionnel ou sentimental. On repense souvent avec nostalgie de la grande époque de American Pie, American Party, Road Trip et autre Sydney White, l’un des plus récents parmi les dignes représentants du genre, mais ce style de plaisir coupable est de plus en plus difficile à assouvir, d’autant que certaines tentatives récentes se sont lamentablement plantées, à l’image de Everybody Wants Some !!.

Comme d’habitude, il sera une nouvelle fois question des éternels problèmes de l’entrée dans la vie adulte avec diverses peines de cœur, que ça soit au niveau familial, amical ou plus sentimental. N’ayant jamais su s’intégrer, Nadine (Hailee Steinfeld) n’avait jusqu’alors qu’une seule amie (Haley Lu Richardson), mais elle va se brouiller avec elle le jour où elle commencera à sortir avec son frère. Livrée à elle même, elle va devoir apprendre à se reconstruire toute seule.

Cette fois il semblait que le cru allait être particulièrement bon avec 7,5 sur IMDb et 95% de satisfaction sur Rottentomatoes, sans compter la nomination aux Golden Globes de son actrice principale. Et effectivement, le film a de solides arguments. La réal du film est bien fichue, les acteurs -bien qu’invariablement trop vieux pour leurs rôles – sont plutôt bons (coup de cœur au passage pour la meilleure amie ultra canon), l’humour évite la vulgarité et on retrouve surtout Woody Harrelson en professeur branleur dont la familiarité et l’implication rappellent brillamment GTO. Le film est donc assez efficace et se laisse regarder, pour autant il ne marquera ni par une quelconque réplique culte, un passage osé ou un moment touchant. Du bon travail mais un peu trop lisse pour prétendre à plus qu’un simple divertissement pour ados.

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Arès

Arès
2016
Jean-Patrick Benes

On se plaint tout le temps en France du manque ahurissant de diversité de nos salles de cinéma, mais c’est pourtant les choix des spectateurs qui contribuent à ce déplorable constat. Quand on voit de piètres comédies rameuter des millions de personnes quand de plus ambitieux projets se rétament méchamment, c’est tout simplement désespérant, et en voici l’un des exemples les plus flagrants.

Le film nous plonge dans un futur proche où une succession de crises et de gouvernements inefficaces sont peu à peu venu à bout de la France. Le chômage avoisine les 30%, les trois quarts de la population vit sous le seuil de pauvreté, l’état a fait faillite et les superpuissances économiques (agences bancaires et multinationales) ont racheté la pays, se pliant désormais à leur seule volonté. Le peuple agonise et est au bord de l’insurrection, mais de son côté Arès, boxeur professionnel, tente simplement de survivre en jouant avec le système, servant de cobaye pour une agence de médicaments souhaitant tester sa nouvelle drogue de combat (chose devenue légale dans cette projection futuriste).

Si bien sûr le film n’est pas parfait et a des allures de série B américaine sortant directement dans les bacs, on tient là un film d’anticipation intéressant qui fait preuve d’une originalité et d’une profondeur extrêmement rares en France. On voit là un Paris futuriste non sans rappeler les cités dangereuses de l’excellent Dredd où l’urbanisme rime avec insalubrité et surpopulation, la ville est poussiéreuse et l’atmosphère révolutionnaire se fait pesante. Le film revendique des influences telles que Les Fils de l’homme, et effectivement on retrouve ce genre d’ambiance angoissante et sale, ce qui marche plutôt bien et est raccord avec le climat de tension dépeint. Découvrir ce futur sous l’angle d’une personne non-impliquée est aussi très intéressant puisque visiblement certains arrivent à accepter la situation et même en profiter. Mieux encore, le film possède une histoire véritablement prenante avec une évolution psychologique des personnages certes prévisible mais non moins bien amenée, et même la réalisation arrive à nous embarquer en faisant écho à des pattes visuelles d’antan comme Blade Runner. Le film est très court et condense parfaitement son propos, nous faisant d’autant plus regretter les quelques imperfections. Si visuellement le manque de budget ne se ressent pas trop, on le paye au niveau des acteurs, pour la plupart assez mauvais. Il est vrai que le thème en rebutera certains (enfin surtout certaines), mais il est important de soutenir ce genre d’initiatives chez nous tant ça fait du bien de voir enfin un style différent, surtout quand l’œuvre en question est aussi aboutie.

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