Parkland

Parkland
2013
Peter Landesman

On le sait tous, le 22 novembre 1963 John Fidgerald Kennedy s’est fait assassiné lors de sa tournée de réélection, le tout dans des circonstances étranges. Roulant dans une voiture décapotable dans une avenue pleine d’immeubles non sécurisés, on lui avait presque dessiné une cible sur le front tellement son élimination était facile. Si l’enquête de l’époque n’a pas eu besoin d’aboutir tant un certain Lee Harvey Oswald était le coupable idéal, les rumeurs sur l’implication de la CIA allaient bon train et à l’heure actuelle aucune certitude n’est possible tant les arguments des deux partis sont solides. On pensait qu’il n’y avait plus rien à apprendre de ce chapitre de l’histoire, à moins d’avoir accès à des informations confidentielles, mais il semblerait que le président ne soit pas mort sur le coup dans sa voiture, mais seulement un peu plus tard à l’hôpital. Une révélation d’envergure pour un film qui ferait enfin la lumière sur certains points ? Pas du tout. Le président n’a jamais reprit conscience et il ne s’est rien passé de spécial, le film montrant simplement la réaction des uns et des autres suite à la mort de leur président bien aimé.

Des films, livres ou séries sur le sujet, il y en a eu un paquet, et cette histoire là n’a tout simplement aucun intérêt. Voir des gens pleurnicher suite à l’incident, c’est juste du voyeurisme malaisant, d’autant que le film le fait sans aucune subtilité. Le jeu des acteurs n’est même pas spécialement bon malgré l’avalanche de talents impliqués : on y retrouve Zac Efron, Marcia Gay Harden, Paul Giamatti, Billy Bob Thornton, Jackie Earle Haley, Tom Welling, Colin Hanks et David Harbour. Si le film évoque bien les différentes théories, la prise de partie est totale, positionnant Lee Harvey et sa mère, principaux défenseurs de la conspiration, comme des fous. Un travail de surface pénible qui ne rend pas hommage ni aux investigations de la CIA ni aux freelances qui se sont attaqués à la question. Au lieu de ça, le film nous fait perdre un temps considérable avec des choses inutiles comme l’enregistrement vidéo, ne montrant absolument rien et nous bassinant de par le côté « insoutenable » de son contenu. Pauvres natures… Pire, le film a des allures de téléfilm au rabais entre ses mouvements brutaux et ses zooms immondes, « au plus proche des personnages ». Même si on ne connaissait rien à l’affaire, le film aborde le thème de façon trop superficielle, l’angle choisi n’apporte rien et n’est même pas conservé de bout en bout, on s’éparpille de partout, les enjeux sont creux et les émotions ne passent pas. Sans être un navet complet, le film peine simplement à justifier son existence.

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Power Rangers

Power Rangers
2017
Dean Israelite

Immédiatement propulsée série numéro une au monde lors de sa sortie en 1993, les Power Rangers furent un carton phénoménal à la télévision, écoulant par là-même une pléthore de jouets que les enfants s’arrachaient, alliant toutes les choses les plus classes au monde : les supers-héros en armure, les robots et les monstres géants. Depuis la série continue sans interruption et va accueillir sa 25° saison, bien que depuis la saison 7 le casting change tous les ans, mais son succès n’est plus aussi retentissant qu’avant et il était temps de relancer la machine.

N’ayant que peu de souvenirs de la série, la mythologie ne m’est guère familière, mais l’histoire des Power Rangers serait ici née d’un ordre galactique ancestral, préservant la paix dans la galaxie, ayant prit fin il y a 65 millions d’années durant un affrontement contre la terrible Rita Repulsa (Elizabeth Banks). En sommeil depuis tout ce temps, elle va comme par hasard être repêchée et réactivée par un chalutier qui passait par là, et ce à l’exact moment où le pouvoir des rangers va être arbitrairement attribué à cinq jeunes cons (incluant Dacre Montgomery, le BG de la seconde saison de Stranger Things, et Naomi Scott, future Jasmine de la version live d’Aladdin) dont l’un a fait sauter la mine où reposaient les gemmes des anciens Power Rangers. Reprenant les choses là où elle les avaient laissés, Rita va à nouveau chercher à mettre la main sur le cristal de la Terre, ce qui tuerait toute vie sur la planète mais qui lui accorderait une puissance infinie.

Ah quand même ! Dès la première scène on regrette amèrement la théorie sur la destruction des dinosaures dans Transformers 4, bien plus crédible et intéressante que dans cette version où des extraterrestres se font la guerre et décident de pulvériser la planète pour la sauver. Paye ta logique ! On enchaîne ensuite sur le gag le plus fin du monde sur le fameux coup de traire une vache qui n’en est pas une, créant immédiatement une belle empathie pour le futur leader des Power Rangers. Les autres personnages ont eux aussi droit à une belle introduction entre le black attardé, la bombasse connasse et l’asiate rigolo. Ah oui, c’est vrai, il y a l’autre fille aussi, celle qu’on ne sait pas ce qu’elle fait là ni pourquoi elle reste avec eux puisqu’elle mettra presque une heure à ouvrir la bouche. Pour continuer sur de l’écriture de qualité, on notera le plagiat très discret de Chronicle, la présence indispensable et salvatrice de Bryan Cranston, qui livre une prestation murale poignante, sans compter l’enchaînement imparable des événements et la puissance des dialogues. À noter une méchante au charisme peu commun et des effets spéciaux pittoresques, balayant cette notion surfaite qu’est le réalisme. La firme avait de grands projets de saga, prévoyant à l’origine six films supplémentaires, mais inexplicablement le film n’a pas rencontré le succès escompté. Quand on sait qu’un film comme Pacific Rim avait engrangé 150 M$ en Chine, Japon et Corée alors que pendant ce temps celui-ci, visant un public similaire et ayant des intérêts financiers très importants aussi, ne dépassait même pas les 8 M$ sur ces trois territoires réunis, on comprend l’ampleur de la claque. Dommage, ça partait si bien…

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HHhH

HHhH
2017
Cédric Jimenez

Voilà typiquement le genre de film que j’esquive d’habitude. Parler de la Seconde Guerre Mondiale est toujours extrêmement compliqué dans la mesure où on ne doit ni ne peut avoir d’opinion sur le sujet. Aucun parti prit original possible, laissant une marge de manœuvre tout simplement inexistante. De temps à autre des films osent tenter une nouvelle approche comme Il est de retour, mais de mémoire c’est le seul exemple de film sur le sujet qui ne se contentait pas de réciter les livres d’histoire. Cette fois la promesse de raconter une histoire sous le point de vue SS semblait aguicheur, mais ça n’était qu’un subterfuge mensonger.

Contrairement à ce qu’on pourrait penser, sur les quatre H du titre, il n’y a pas de Heil Hilter. Il s’agit en réalité de « Himmlers Hirn heißt Heydrich », ce qui veut dire « Le cerveau d’Himmler s’appelle Heydrich ». Le film retrace donc l’ascension de Heydrich (Jason Clarke), ex soldat de l’armée allemande qui entra dans les services de renseignement de la Gestapo au début des années 30, gravissant petit à petit les échelons jusqu’à diriger le service et devenir le bras droit d’Hitler. Un sympathisant convaincu qui va devenir un moteur principal de son idéologie.

Le début du film est très bon, nous montrant un homme comme tant d’autres, qui par amour pour sa femme (Rosamund Pike) va s’engager dans la politique, s’y découvrant une vraie passion. On nous explique et on nous montre tout l’engouement qui a permis l’accession au pouvoir d’Hitler, de comment il a à lui seul sauvé le pays de la ruine et redonné toute sa splendeur à l’Allemagne, car tout monstre est un génie qui n’a pas su refréner sa folie. Bien sûr, il n’était pas question de rendre un futur responsable de génocide sympathique, et très vite les boucheries vont commencer, enchaînant les actes barbares pour montrer le mal lattant. Et puis patatras, changement d’axe et de personnages principaux avant la fin de la première moitié, nous laissant pour la majorité de l’histoire en compagnie de deux parachutistes (Jack O’Connell et Jack Reynor) pour un énième film de résistants, annihilant l’originalité première dans une avalanche de clichés entre les amours de guerre (avec Mia Wasikowska) et les actes héroïques où les allemands passent pour de vrais demeurés. Une seconde partie pénible, supportable uniquement en raison du casting prestigieux, comprenant étonnamment deux français, Céline Sallette et Gilles Lellouche. Si le début recelait un vrai potentiel, le résultat n’est pas là et tout le reste est à jeter. Un film qui ne fait ni honneur à l’histoire ni au cinéma.

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First Kill

First Kill
2017
Steven C. Miller

Dans la famille « je cachetonne à blinde, s’il-vous-plait j’ai très faim », je voudrais deux spécialistes du direct-to-DVD, Bruce Willis et Hayden Christensen. Ce second campe ici un père qui s’inquiète pour son fils, régulièrement victimisé par une brute de son collège. Pour le pousser un peu à devenir un homme qui ne se laisse pas faire, il va l’emmener un beau jour à la chasse, loin de se douter de ce qui allait lui tomber dessus (et je ne parle pas de la pluie). Au détour d’un sentier de la forêt où ils étaient partis, ils vont tomber sur deux hommes en pleine altercation, l’un tenant l’autre en joug puis va lui tirer à bout portant, avant de tirer dans leur direction (bah oui, quand y’a un gosse, forcément qu’il va être con au point de faire du bruit en pareille situation). Obligé de se défendre, le père abattra l’assaillant, constatant après coup qu’il s’agissait d’un policier. Comme une connerie en cache dix autres, il va décider de ramener chez lui le second sur lequel le policier avait tiré, histoire de le soigner, sans savoir qu’au réveil il allait kidnapper son fils pour que le père l’aide dans une affaire de flic ripoux. Voilà voilà.

Un magot dérobé, des policiers corrompus et un homme lambda là par hasard pour que le spectateur s’identifie. Un pitch qui semble relater un film déjà vu une centaine de fois, et c’est effectivement le cas tant rien ne permet au film de s’extirper de la masse, enchaînant les pseudos rebondissements qu’on connaît d’avance et nous livrant une œuvre paresseuse qui se contente de copier tel quel des codes préhistoriques. Pour tenter de camoufler le manque de moyens et d’ambition, le film essaye de caler le maximum d’action et de s’attarder le moins possible, mais difficile de rester concentré quand on atteint des sommets d’absurdités de facilités scénaristiques comme lors d’une course poursuite où comme par hasard deux véhicules avec les clés sur le contact se trouvent sur le chemin. Une série B miséreuse où sont venus cachetonner deux grands noms du cinéma, visiblement plus intéressés par l’argent que par l’art.

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Un Profil Pour Deux

Un Profil Pour Deux
2017
Stéphane Robelin

Ah la la, la France et le social. C’est culturel : notre pays a un problème avec les vieux, et eux ont un problème avec la technologie. Notre monde passe de plus en plus par les échanges virtuels, coupant davantage les personnes âgées qui pour la plupart n’ont pas su évoluer avec l’informatique. Mais si on leur apprenait à s’en servir, que feraient-ils avec ?

Aspirant écrivain à qui personne ne laisse sa chance, ne trouvant jamais le temps d’écrire entre les corvées et les petits boulots qu’on lui assigne, Alex (Yaniss Lespert) va se retrouver obligé de donner des cours particuliers à son grand-beau-père, Pierre (Pierre Richard). Se morfondant dans la solitude depuis la mort de sa femme, ce dernier va reprendre gout à la vie grâce à un site de rencontre, lui donnant l’occasion de se sociabiliser à nouveau et de rêver à d’ardentes passions. Seulement voilà, sur son profil il se fait passer pour Alex, loin de savoir qu’il sort avec sa petite fille et qu’il le pousse par là même à l’adultère.

L’idée de base est à la fois amusante et originale en nous montrant un papy se mettant aux sites de rencontres, mais avec pour singularité de se faire passer pour son professeur d’informatique, tout en lui prêtant des qualités propres à l’ex de sa petite-fille parti en Chine. Une situation très délicates, reposant sur des mensonges et des non-dit, aboutissant à moult quiproquos, certes faciles et qu’on voit venir de loin, mais c’est très drôle et le sens du timing est excellent. Le grand-père est très attachant et de ce micmac va naître une belle romance, mais difficile de pleinement s’extasier quand le personnage principal est à ce point mou et dénué de charisme. Reste une comédie sympathique avec un brin d’originalité.

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Geostorm

Geostorm
2017
Dean Devlin

Un rumeur faisait état d’un scénariste sur les films de Roland Emmerich, même si de toute évidence il ne s’agissait que d’un stagiaire plaisantin qui n’y connaissait rien. Eh bien cette personne mystérieuse sort de l’ombre cette fois en réalisant son propre film, toujours en respectant le style « film catastrophe » de son maître. Après tout pourquoi pas, Le Jour d’après et 2012 étaient de gros divertissements décérébrés mais jouissifs, et cette fois encore le budget est monstrueux : 120 M$. Malheureusement, le spectaculaire est un art bien difficile transposer.

Bien qu’en vérité tout le monde s’en fout, le réchauffement climatique est censé être un grand sujet d’inquiétude, et pour lutter contre ses effets négatifs le scientifique Jake Lawson (Gerard Butler) a mis au point en 2019 une technologie satellite capable de réguler les climats des différentes zones du globe. Malheureusement, quelques années plus tard, la machine de contrôle climatique va se mettre à enchaîner des bugs aux répercutions dévastatrices, et si le problème n’est pas très vite résolu le monde risque d’être prit au cœur d’une Geostorm (tempête d’échelle mondiale).

Même à l’annonce du projet il n’y avait pas grand chose à attendre, si ce n’est un divertissement pas bien intelligent mais vaguement spectaculaire. Hélas, le film fera effectivement montre d’une paresse d’écriture importante, mais bien plus qu’escompté, et l’aspect visuel est très loin des standings actuels, surtout en matière de mise en scène. Si le principe de contrôle météorologique peut éventuellement être tolérer – encore qu’à l’image de l’option d’auto-destruction les explications soient de l’ordre du « oui mais si » – il est bien moins évident de pardonner une narration si prévisible et des personnages à ce point stéréotypés et insipides. Il est vrai que le caractère affligeant des dialogues n’aide pas, mais on pouvait espérer mieux de la part de Jim Sturgess, Abbie Cornish, Ed Harris ou Andy Garcia, mais ils sont visiblement tous là pour cachetonner. Côté visuel le bilan n’est pas exceptionnel non plus, affichant des séquences de destructions mal filmées, trop courtes et scénaristiquement débiles (on est presque sur une parodie du Jour d’après avec la course contre le froid). Seuls les plans spatiaux sont sympathiques, mais on a déjà vu tellement mieux en la matière. Pour l’équilibrage, la formule si réussie de Roland Emmerich n’est pas du tout reconduite, nous assommant de 90% de blabla ennuyeux pour seulement 10% de pseudo spectacle, très loin des musts du genre. Sans aller jusqu’à dire que ce fut un calvaire, on ne peut clairement pas qualifier ce sous-produit de bon divertissement et en aucune façon le recommander.

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Epouse-moi mon pote

Epouse-moi mon pote
2017
Tarek Boudali

Décidément, plus rien n’arrête le duo de potes Tarek Boudali et Philippe Lacheau ! Après avoir cartonné avec Babysitting 1 & 2 et Alibi.com, les voilà dépassant pour la quatrième fois d’affilée les deux millions d’entrées en France, un plébiscite dont strictement personne d’autre ne peut s’en venter. Il est vrai que leur style est terriblement efficace, dépoussiérant notre vieux cinéma en proposant un humour frais, décomplexé et sans tabou. N’ayant peur de rien, ils s’attaquent cette fois à la migration et à l’homosexualité.

Marocain immigré en France pour y suivre des études d’architecture, Yassine (Tarek Boudali) a commit la bourde de sa vie : boire la veille de son concours. Trop bourré, il va rater son rendez-vous, échouer dans ses études, perdre l’amour de sa vie (Nadège Dabrowski, alias la Youtubeuse Andy) et son droit de séjourner en France. Enchaînant les boulots au noir pour survivre, il va décrocher un vrai travail (offert par David Marsais), mais nécessitant d’avoir des papiers en règle. Pour se faire, aux pieds du mur, il va demander à son meilleur ami (Philippe Lacheau) de l’épouser.

Eh bien oui, toutes les combines sont bonnes pour échapper à l’expulsions, alors pourquoi pas un mariage blanc entre potes ? Il est vrai que l’écrasante majorité des immigrés sont homophobes de par la culture dans laquelle ils sont nés, donc c’est d’autant plus « novateur ». Dans la pratique, c’est aussi un bon moyen pour ouvrir le champ lexical comique, pouvant ainsi piocher dans les vannes sur les gay et les étrangers, chose dont le film ne va pas se priver. Aussi efficace que généreux, le film enchaîne ainsi les gags plus ou moins faciles avec une finesse très variables, la plupart du temps au niveau du gros burlesque qui tache. On rit de bon cœur mais ça n’est jamais très sérieux, à l’image de la scène du pont, et parfois le film dépasse carrément les limites du bon gout comme avec la belle mère dans la maison de campagne. D’ailleurs, et c’est là le point le moins convaincant du film, tout ce qui entoure le flicage est lourdingue, pour ne pas dire grossier. Avec un film comme ça on pouvait s’en douter, mais le film pousse le délire très loin. De la bonne grosse comédie potache qu’il ne faut pas regarder de trop près, mais pour peu qu’on soit ouvert d’esprit et que sa suspension d’incrédulité soit totale, on passera un bon moment.

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Comment j’ai rencontré mon père

Comment j’ai rencontré mon père
2017
Maxime Motte

Quand un couple blanc adopte un enfant noir, le suspense ne dure pas longtemps. Cela marcherait avec n’importe quelle ethnie très marquée d’ailleurs, mais dans les esprits bobo gauchistes parisiens, quand on adopte c’est forcément un noir, à qui on a au passage vraisemblablement sauvé la vie puisque son pays d’origine, quel qu’il soit, était forcément un de ces pays du tiers monde insalubre où tout le monde meurt de faim et vit au milieu de ses excréments. Si si, demandez à n’importe quel résident d’hôtel particulier dans le 16°, c’est sûr ! Enfin bref, on suit donc la cohabitation difficile entre Ava (Isabelle Carré), avocate qui ramène seule l’argent à la maison et qui ne supporte plus son incapable de mari, Eliott (François-Xavier Demaison), qui de son côté se contente d’observer impassible l’échec de son commerce et le rejet de son enfant adoptif, obnubilé par son potentiel père biologique. Une situation tendue qui va exploser le jour où leur faux fils va se mettre dans la tête qu’un clandestin débarqué sur la plage n’est nulle autre que son vrai père.

Dès le début le film ne va pas. Comment pourrait-on à un seul instant s’attacher à une famille dont le couple est inexistant et dont l’amour paternel est vide dans les deux sens. Certes, l’enfant ne peut pas très longtemps croire en la légitimité conceptrice de ses hébergeurs, mais il y a une différence énorme entre cacher et renier ! On sent qu’à aucun moment le couple n’a cherché à s’imposer comme de vrais parents, laissant l’éducation de leur réfugié en roue libre. Le principe même de cette recherche identitaire est donc totalement justifié, mais les personnages n’ont aucun affecte entre eux, et par empathie ils n’en développent pas non plus avec le public. Ne reste que le grand-père, seul être censé et amusant de ce portrait de famille dégueulasse, baignant dans une espèce de sentimentalisme vide et bien-pensant, tentant vainement de faire dans du social gauchiasse en se moquant pourtant de la détresse des migrants. Que eux souffrent est secondaire, l’important c’est qu’on voit bien que nos habitants du Nord ont le cœur gros et qu’ils font de bonnes actions. On dirait des bénévoles qui exhibent leur CV, dénaturant la noblesse de leur geste par une démonstration de supériorité déplacée. Le film, en plus de ne pas être drôle ou intéressant en quoi que ce soit, en devient indigne, honteux, malaisant. Le bide fut écrasant lors de sa sortie et c’est tant mieux.

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Backtrack

Backtrack
2016
Michael Petroni

Dans la mort il y a trois types d’apparitions : les hallucinations, les âmes tourmentées revanchardes et les esprits protecteurs accompagnateurs. La question est ici de savoir à quel type d’entre elles le héros a affaire. Psychiatre ayant perdu sa fille depuis un an, Peter Bower (Adrien Brody) pensait que son processus de deuil était en bonne voie, consultant pour ce faire lui-même un psychiatre (Sam Neill), mais une étrange patiente va lui faire prendre conscience d’un soucis bien plus profond et d’une connexion inquiétante entre chacun de ses patients. Il va alors retourner dans sa ville natale pour remonter à la source du problème et rouvrir les plaies du passé.

Le principe du film est excellent. Dès le début, on créé un suspense autour de la mort de la fille, dont le père a détourné le regard à cause d’une vitrine dont il ne se rappelle plus. Quel souvenir peu être si important qu’il perde sa fille des yeux ? Quelle est cette mystérieuse fille qui ne cesse de se volatiliser de son cabinet ? Quel est le sens caché de ses visites ? Si le mystère principal reste entier jusqu’à la toute fin (15 minutes avant le générique quoi), le film ne nous laisse en revanche jamais mariner trop longtemps, désamorçant généralement les questions assez vite, sans pour autant donner toutes les cartes, mais ça on ne le comprend que plus tard. On aurait tendance à croire que cela empêche le film de surprendre s’il révèle tout très vite dès qu’une question arrive, mais comme chaque réponse soulève d’autres questions et que les réponses sont partielles, la structure reste très efficace. Le film n’est ni révolutionnaire dans sa forme ni dans son histoire, mais il s’agit d’un puzzle finement pensé, prenant et qui nous tient en haleine jusqu’au bout. Une bonne surprise pour un film privé de sortie en salles qui mériterait plus d’attention.

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Zero Dark Thirty

Zero Dark Thirty
2013
Kathryn Bigelow

Dans le genre gamelle au box-office, les films de guerre s’imposent. Tournage en studio impossibles, gros moyens techniques obligatoires et intérêt du public très faible, surtout en dehors des Etats-Unis. Rare sont ceux à avoir su tirer leur épingle du jeu comme ce film là, bien que son succès soit exclusivement dû à d’excellents résultats aux USA (sur les 133 M$ récoltés, plus de 95 M$ proviennent du sol nord américain). Il faut dire qu’un film sur la traque de l’ennemi numéro un de leur pays, ça avait de quoi attirer, surtout que les critiques étaient excellentes et que le film fut porté par sa pléthore de nominations, notamment aux Oscars (bien que seul le montage sonore y fut primé). Alors pourquoi ne le voir que maintenant ? La crainte de ne pas supporter la prise de partie – les US centre du monde et sauveur de l’humanité – durant 2h30.

Une théorie voudrait que le 11 septembre 2001 deux avions se soient crashés sur les tours jumelles du World Trad Center et que l’attentat fut commandité par un certain Ben Laden. Le film raconte la traque fantasmée et fictive de cet homme de l’ombre en faisant graviter la grande histoire autour d’un personnage créé pour le film : Maya (Jessica Chastain), agent des forces spéciales des Etats-Unis.

La démarche même du film est très étrange. Il ne se veut pas être un documentaire ou même une mise en scène de la réalité mais bien une fiction pure, librement inspirée. Une solution de facilité pour ne pas avoir à répondre d’accusations en diffamation et compagnie. Il faut dire, et c’est probablement là son point le plus positif, que le film n’épargne pas la gouvernement américain, parlant explicitement des opérations d’armement secret dans la base 51, de techniques de torture ou d’écoute illicites mises en application pour lutter contre le terrorisme, sans compter la finesse légendaire de l’armée. Shoot first, then think (tire d’abord, pense après) : on aura droit à des meurtres sans sommation, même sur des femmes désarmées. Pire, les soldats sont montrés comme des abrutis capables de crasher un hélicoptère dans des conditions optimales. Le portrait dressé des sauveurs n’est donc pas tout blanc et c’est une très bonne nouvelle, faisant même un tacle aux armes de destruction massive, mais c’est trop peu de pommade pour une plaie bien trop grande.

À la rigueur suivre durant 150 minutes une traque extrêmement redondante où on remonte le fil à grand coup d’informations obtenues sous la torture, pourquoi pas, mais encore faut-il que ça soit intéressant ou enrichissant. Or question méthodes, elles sont particulièrement douteuses : soit on attend laborieusement, soit la morale est bafouée dans des propensions dantesques. La torture, à la rigueur oui quand des vies sont directement en jeu et qu’on veut faire payer un responsable direct, mais sur un potentiel sous-fifre lambda ça n’a pas de sens. Même la dernière prise d’assaut peine à convaincre tant l’amateurisme n’a d’égal que la barbarie. Si en terme de réalisation et de montage il n’y a rien à reprocher au film, le rythme est en revanche atroce – certes, ça symbolise la difficulté de la traque, mais quand même – et l’écriture décevante. Point d’excentricité d’espionnage, c’est plat, et les personnages sont des clichés monstrueux, l’héroïne en tête avec son statut de femme forte qui s’exprime, balance des punch line et grandes leçons de vie à tout le monde alors qu’en fait c’est juste une malade de travail qui se positionne elle-même comme marginale. Pire, malgré le prestige complètement dingue du casting (on compte dans les rangs, excusez du peu, Jason Clarke, Joel Edgerton, Mark Strong, Edgar Ramirez, Frank Grillo, James Gandolfini, Chris Pratt et même le français Reda Kateb) les performances sont clairement décevantes, voir outrancières comme pour l’actrice principale dont le Golden Globes pour le rôle est une vaste plaisanterie. Ainsi, malgré des arguments qui paraissaient solides et des craintes finalement non avérées, le film rate le coche entre ses faussetés historiques, sa gestion poussive du temps et ses ambitions trop affichées qui en font une œuvre bâtarde et arrogante.

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