X Files – Régénération

X Files – Régénération
2008
Chris Carter

Venant actuellement de finir de voir les neuf premières saisons des X Files (mais il n’y aura pas de critique de la série, ayant mit plus de deux ans pour y arriver), il me fallait repasser par ce second film pour enfin m’attaquer à la toute nouvelle dixième saison, arrivant treize ans après la dernière. Douloureux souvenir que ces retrouvailles cinq ans après la fin de la série, n’arrivant que trop peu à rallumer la flamme, la faute à des ambitions bien trop frileuses. Pourtant, contrairement au premier film qui venait s’intercaler entre les saisons 5 et 6, le pic de popularité de la série, c’est le showrunner lui-même qui a assuré la réalisation du film.

De nombreuses années ont passé depuis le procès de Fox Mulder (David Duchovny), évincé du FBI et dès lors tapis dans l’ombre, protégé par celle qui est désormais sa compagne, Dana Scully (Gillian Anderson). Néanmoins, il semblerait que de l’eau ait coulé sous les ponts et qu’un pardon mutuel fut accordé : ayant perdu l’un des leurs et n’ayant pour seule piste qu’un médium, ex prêtre pédophile, l’agent du FBI Whitney (Amanda Peet) va faire appel au duo de légende des affaires non-classées, seule solution restante pour elle.

Pas de doutes, le film est bien une déception sur pratiquement tous les points : l’histoire n’a rien de non-classée, le duo n’est pas vraiment reformé dans la mesure où Scully ne s’implique pas tellement, trop occupée avec un enfant malade (mais d’un autre côté c’est logique, déjà en neuvième saison son implication était surtout d’ordre médical, ayant raccroché avec la partie FBI de son métier de doctoresse), et on ne retrouve presque personne. Tout juste aura t-on droit à l’agent Skinner sur la fin, mais Monica Reyes et l’agent Doggett, qui avaient donné un souffle nouveau en saisons 8 et 9 en nous rappelant les prémices de la série sans le côté cheap, ne sont malheureusement pas de la partie. Si on retrouve un peu l’ambiance et le style qu’on aimait tant, la mythologie n’est qu’évoquée, le paranormal quasi absent, et l’histoire développée est vraiment pauvre (même Callum Keith Rennie n’arrive pas à y faire quoi que ce soit). Le résultat aurait été plutôt sympa pour une entrée en matière comme un double épisode introductif d’une nouvelle saison, mais pour du cinéma on en attendait beaucoup plus. Pas étonnant que les recettes furent dégueulasses (68 M$, quand le premier en récoltait 189 M$), mais paraît-il que le film a ensuite très bien marché en DVD, permettant de planifier un troisième film pour une date hautement symbolique : le 21 décembre 2012. Toujours officiellement sur les rails après des années de report, le film dépendra du succès de la série dont une onzième saison est en cours de négociations après les audiences encourageantes du mini retour.

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En cas de malheur

En cas de malheur
1958
Claude Autant-Lara

Plus de trois millions d’entrées pour cette adaptation d’un roman à succès de Georges Simenon, normal vu ses têtes d’affiches loin d’en être à leurs débuts, même Brigitte Bardot qui à 24 ans fêtait déjà son vingtième long-métrage, c’est dire à quel point l’engouement autour de son corps de rêve avait prit de l’ampleur, car de toute évidence ce n’est ni son talent d’actrice ni la profondeur de ses rôles qui l’ont aidé à bâtir sa carrière.

Petite greluche qui gagnait sa vie en faisant le tapin, Yvette (Brigitte Bardot) va un jour avoir l’idée de braquer une bijouterie avec une amie pour mener la grande vie, mais les choses vont mal tourner : une vieille dame sera blessée, et son amie va être arrêtée par la police. Pour se sortir de là, Yvette va faire appel à André Gobillot (Jean Gabin), brillant avocat dont elle avait entendu parler. Pour le remercier, elle va entamer une relation avec lui, mais difficile pour autant de renoncer à tous ses autres prétendants.

Pour un film de pratiquement deux heures (la version restaurée comptant dix minutes additionnelles), il est dommage de voir que la quasi intégralité des éléments scénaristiques du film ait été utilisés au bout de vingt minutes. En vingt minutes, le braquage et le procès sont déjà pliés, de même que le jeu de séduction est déjà fini et la base de la tumultueuse relation posée. Le reste ne sera que coucherie, tromperie, engueulades et réconciliations avec un Gabin qui prouve une fois de plus qu’il campe les bonhommes avec un aplomb remarquable, une Bardot femme-objet débile et fatigante, et une espèce de crevure communiste d’amant qui nous les brise menu. Quelques pistes intéressantes, mais bien trop rapidement traitées, nous laissant dans un état de flottement passif et mollasson.

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Le Plaisir

Le Plaisir
1952
Max Ophüls

Récemment ressorti en version restaurée, le film a semble t-il fait pas mal de bruit à son époque, inspirant les plus grands et ayant carrément été nominé aux Oscars pour ses costumes et sa direction artistique. Des faits qui laissent aujourd’hui bien perplexe…

Adaptation de trois nouvelles de Maupassant (Le Masque, La Maison Tellier et Le Modèle), le film est plutôt décousu et les trois histoires s’enchaînent sans autre fil conducteur que le plaisir, qu’il soit charnel ou spirituel. Et encore, ce plaisir n’est jamais très joyeux. Dans la première histoire, il s’agit d’un vieil homme qui n’accepte pas la fatalité de l’âge et tente de faire comme si de rien n’était. Dans la seconde, une patronne de maison close et ses filles essayent de renouer avec Dieu, tandis que dans la troisième un artiste voit sa relation fusionnelle avec son modèle peu à peu se délabrer jusqu’à l’écœurement.

Trois histoires pas très passionnantes, surtout la seconde (bien qu’elle y cache un certain Jean Gabin et une certaine Danielle Darrieux), étirée sur une heure alors que les deux autres ne durent qu’un quart d’heure. Il semblerait qu’en dehors de l’idée du masque sous lequel se cache un vieil homme, la première nouvelle adaptée soit totalement vide, de même que la dernière n’est qu’au fond une banale querelle sentimentale. La seconde, plus contemplative, a elle été beaucoup plus soignée, mais l’intérêt n’y est pas. On retiendra le bon narrateur, le plan de nuit dans le seconde partie ou encore le dernier passage sur la plage, mais c’est à peu près tout, le reste étant aisément oubliable.

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Downton Abbey

Downton Abbey
2010 – 2015
Julian Fellowes

Le 25 décembre dernier au Royaume Uni, et quelques semaines plus tard chez nous, le phénomène Downton Abbey nous disait adieu après six merveilleuses saisons. Lancée sur ITV1 le 26 septembre 2010 en Grande Bretagne, la série fut immédiatement acclamée, saluant une histoire originale, une intrigue finement ciselée, mais aussi et surtout des personnages très travaillés, intéressants et formidablement interprétés. Le succès n’a que peu vacillé, le public était fidèle, et au cours de sa carrière la série a enchaîné les prestigieuses nominations et récompenses. Avec une moyenne de 11 millions de téléspectateurs à domicile et plus encore aux Etats-Unis, le phénomène était mondial et aurait pu perdurer bien des années encore, mais le créateur a souhaité conclure son intrigue avant que la lassitude ne nous gagne, et c’est tout à son honneur.

Seule saison non constituée de huit épisodes d’une cinquantaine de minutes conclu par un neuvième spécial Noël d’une heure et demi, la toute première n’en contient que sept tournant aux alentours de 55 minutes. On y suit la vie d’une multitude de personnages évoluant dans le domaine de Downton Abbey, se situant dans la campagne anglaise, allant des maîtres des lieux aux domestiques, le tout dans la belle époque du début du XX° siècle, plus précisément en 1912 alors que la catastrophe du Titanic est dans toutes les pensées. Gérant du domaine, Robert Crawley (Hugh Bonneville), le comte de Grantham, en est d’ailleurs très inquiet car ses terres sont la propriété de son héritier, et n’ayant eu que trois filles avec sa femme Cora (Elizabeth McGovern) – Mary (Michelle Dockery), Edith (Laura Carmichael) et Sybil (Jessica Brown Findlay), ne pouvant hériter – il attendait beaucoup de la future union de sa fille Mary, mais son fiancé étant mort lors de la fameuse traversée, tout repose désormais sur un cousin éloignée appelé Matthew (Dan Stevens), avocat de pacotille dont il ne sait rien. Le plus simple serait de marier Mary avec Matthew, mais cette dernière ne le trouve pas assez bien pour elle, préférant vagabonder avec le beau commanditaire turc Pamouk (Theo James), une erreur qui pourrait bien lui coûter cher. Pendant ce temps là, la cohabitation est difficile entre Violet Crawley (Maggie Smith), mère de Robert, et Isabelle Crawley (Penelope Wilton), la mère de Matthew, cette dernière s’immisçant dans les affaires de la communauté, gérées depuis des décennies par Violet sans la moindre concurrence ou opposition.

Côté personnel, l’envers du décors est très fourni, avec beaucoup de personnes et tout autant de personnalités fortes et d’histoires intéressantes. À sa tête, on retrouve le majordome Charlie Carson (Jim Carter), dont le passé trouble de clown va resurgir, et Elsie Hughes (Phyllis Logan), la gouvernante. Dans cette première saison le reste du personnel sera notamment composé de John Bates (Brendan Coyle), valet de chambre de Lord Grantham, ex compagnon d’arme de son maître blessé à la guerre dont la jambe boiteuse lui vaudra bien des moqueries. Personnage clé, certains autres domestiques tenteront par tous les moyens de l’évincer, de le discréditer, alors même que son passé tourmenté semble ne jamais vouloir le quitter. Seule aide et réconfort qu’il trouvera, la femme de chambre des trois filles Crawley, Anna Smith (Joanne Froggatt), va tomber amoureuse de lui, mais la situation ne leur permettra pas pour le moment de se retrouver. On retrouvera aussi Sarah O’Brien (Siobhan Finneran), femme de chambre de Lady Grantham (Cora), grande comploteuse machiavélique qui sévit avec son ami Thomas Barrow (Rob James-Collier), un valet de pied aux goûts peu communs, et même illégaux pour l’époque. Petite protégée de Lady Sybil qui souhaite la voir réussir dans ses projets, Gwen (Rose Leslie) est pour sa part une femme de chambre, aspirant à devenir secrétaire. Dans les cuisines, on retrouve Beryl Patmore (Lesley Nicol), la cuisinière en chef, qui va par la suite se découvrir un sévère problème de cataracte, secondée par Daisy Robinson (Sophie McShera), la petite peste de service, maladroitement courtisée par le grand dadais William Mason (Thomas Howes), second valet de pied. Plus secondaire dans cette première saison, on suivra aussi Joseph Molesley (Kevin Doyle), majordome au service de Matthew et sa mère, installés dans un petit cottage près du domaine. Autre personnage qui gagnera en importance au cours des saisons, voir épisodes, Tom Branson (Allen Leech) est quant à lui le chauffeur de la famille, militant irlandais engagé, pas insensible au charme de la jeune benjamine Sybil.

Il y a donc une distribution très importante, mais avec des épisodes frôlant chacun l’heure, voir la dépassant pour le premier et le dernier épisode de la saison, on a suffisamment de temps pour s’attarder sur le cas de tous, et le moins que l’on puisse dire c’est qu’il y a de quoi faire. Avec autant de personnes quasiment toutes intéressantes, qu’elles soient bonnes ou mauvaises, on se fascine, on se passionne. Leur écriture est formidable, très approfondie, les dialogues font mouche et l’ambiance et la culture de l’époque nous transportent. La reconstitution marche à la perfection, les images, la réalisation et les décors sont superbes, la musique enivrante, les acteurs époustouflants (bien qu’on notera une petite incohérence niveau casting dans la mesure où Mary et Edith ont les yeux marrons, chose impossible puisque leurs parents ont les yeux bleus). Une immersion totale dans un univers d’une richesse inouïe.

Saison 1 :  

La première saison se terminait tragiquement : à cause de l’avidité de Mary peu encline à épouser Matthew s’il n’était pas l’héritier, ce dernier l’a rejeté à la mort de l’enfant de Cora, possible ombre sur son avenir qui disparaissait. De même, alors qu’il croyait en avoir fini avec elle, Bates a dû quitter Downton à cause de son épouse Verra, qui souhaitait l’avoir à nouveau à ses côtés, plongeant Anna dans une détresse infinie. Les choses n’avaient pas bien tourné pour Edith non plus, la frustration de Mary s’étant abattu sur elle, qui fit fuir son seul prétendant. Pour couronner le tout, la dernière saison s’achevait par une terrible annonce, celle de l’éclatement de la première Guerre Mondiale. Nous voici reprenant les choses deux ans plus tard, en 1916.

Si d’apparence les choses n’ont pas bougé à Downton, la guerre est sur toutes les lèvres entre ceux qui s’inquiètent de leurs proches au front, et ceux qui craignent ou espèrent leur appel dans l’armée. Mobilisé dès le début de la guerre, Matthew sera ensuite rejoint par les deux valets de pied, le volontaire William et aussi Thomas, qui malgré sa mobilisation spontanée dans le corps médical n’échappera pas aux tranchées. Alors qu’un air de changement plane dans l’air, et poussé par une initiative de Isabelle Crawley, la calme demeure de Lord Grantham va elle aussi participer à l’effort de guerre en se transformant en centre de convalescence, l’occasion pour Thomas de revenir en tant que responsable du centre de par ses galons de médecin de guerre, lui permettant une reconversion après une blessure prétexte à quitter son mouroir de champ de bataille. Une chance que n’auront pas eu Matthew et William, rentrant respectivement avec une colonne vertébrale brisée, le privant de ses jambes et de descendance, et des poumons perforés pour le second, le condamnant à une lente agonie à l’issue fatidique.

On suivra en parallèle de cette guerre moult histoires, comme les éternels problèmes de Bates avec sa femme, qui cherchera par tous les moyens de pourrir sa vie, l’amour tragique de la nouvelle femme de chambre Ethel (Amy Nuttall), le traumatisé de guerre remplaçant de Bates, Henry Lang (Cal MacAninch), les tourments de Daisy par rapport aux fausses promesses faites à William, l’aventure passagère de Lord Grantham avec une servante, la romance furtive entre Edith et un paysan local, celle naissante entre sa sœur Sybil et le chauffeur Branson, le remplacement de Mary par la jeune ingénue Lavinia Swire (Zoe Boyle) dans le cœur de Matthew, ou encore le compromis marital entre Mary et le magnat de la presse Richard Carlisle (Iain Glen). Une saison des plus riches qui coure sur quatre ans, très imprégnée par le drame, puisqu’en plus de la guerre cette sombre période de l’histoire connaîtra la peste espagnole. Une richesse somme toute logique de par les deux épisodes supplémentaire que contient la saison, portant le total à neuf, ce qui sera par la suite la norme.

Le niveau de la seconde saison reste excellent, multipliant les intrigues, renforçant ses personnages clés et offrant un traitement de la guerre très cru et ambitieux, n’hésitant à y mettre les moyens pour rendre l’expérience crédible. En revanche, les intrigues développées ne sont pas les plus intéressantes de la série, certaines prennent trop de place, et nombre d’entre elles sont oubliables. Pour preuve, le valet de Lord Grantham des premiers épisodes, Henry Long, m’était complètement sorti de l’esprit. Même si intéressantes, les romances de Matthew et Mary sont un peu une perte de temps tant leur amour est palpable et qu’on sent qu’ils sont fait pour finir ensemble. Mais plus encore, c’est vraiment l’histoire de Bates qui gène le plus. Elle prend une place folle, il réagit très mal aux situations, et l’histoire sonne comme une redondance de celle de la saison passée, bien que la fin nous offre quelques passages mémorables, d’un cynisme hilarant. D’autres en revanches sont trop vite expédiées, à l’image du soldat aveugle dont s’occupait Thomas dans son premier camp hospitalier. Mais bon, rien d’alarmant et les bases de nouvelles intrigues palpitantes sont posées.

Saison 2 :  

La saison 2 s’achevait dans une avalanche de « rebondissements ». Attendus depuis longtemps, les éléments déclencheurs de quatre intrigues principales s’étaient donné le mot dans le tout dernier épisode et tout premier « spécial Noël ». En effet, après moult tumultes, Matthew et Mary s’étaient enfin retrouvés, avec à la clé une demande en mariage, mise en application dès le premier épisode. De même, s’avouant enfin son amour pour lui après sept ans, Sybil va partir en Irlande avec Tom, au grand dam de sa famille. Autre romance de longue date, en fin de saison 2 Edith renouait avec son seul vrai prétendant (le fermier n’ayant pas vraiment compté puisqu’elle n’a jamais cherché à le revoir) : sir Anthony Strallan (Robert Bathurst). Une courte histoire (épisode 3) qui se stoppera devant l’hôtel de l’église puisque à force de se liguer contre lui, son infirmité et son âge avancé, il va s’avérer incapable d’infliger un avenir d’infirmière désabusé poussant un vieux croulant dans son fauteuil à Edith, même si c’était son choix. Autre histoire qui traînait depuis longtemps et qui a connu un bouleversement en préambule de cette saison, celle de Bates et de son ex-femme. Presque aussi conne qu’imaginative, cette dernière va réussir à le ferme condamner à mort pour son meurtre, s’étant suicidée puis l’ayant maquillé en meurtre, tout en disposant les pièces de telle sorte que tout accuse Bates. Son procès où la pendaison sera prononcée comme verdict est d’ailleurs très drôle dans son genre avec des témoignages censés l’aider, mais qui en réalité, de par la maladresse de ceux à la barre, vont l’enfoncer de manière spectaculaire. Mais plus de peur que de mal puisque sa peine sera commise en perpétuité et Anna se battra toute la saison durant pour faire valoir son innocence et le faire libérer, ce qu’elle parviendra à faire.

Pour cette nouvelle saison, outre le bonheur de Mary et Matthew et la déception d’Edith, l’histoire va beaucoup tourner autour de Sybil et Tom puisque la pauvre va mourir en donnant naissance à sa fille (épisode 5), qui sera baptisée comme elle en sa mémoire. Un crève cœur tant son personnage était attachant, et son histoire avec Tom donnait du piquant à l’histoire, d’autant plus dommage que des trois sœurs, elle était de loin la plus sous-exploitée. En plus de ça, la saison commençait de façon très morose avec une crise des chemins de fer ruinant le domaine, qui y avait investi toute son épargne, et à peine le problème se résolvait que ce drame d’ampleur inédite venait tout détruire. Néanmoins, cela amenait aussi une nouvelle intrigue aussi intéressante qu’éphémère : le duo Tom / Matthew à la tête du comité de gestion du domaine. Parce que oui, à Downton Abbey il n’y a pas pire nouvelle qu’une naissance (on avait déjà eu Esther et la suite n’en démordra pas à l’exception de deux couples en saison 6) : juste après la naissance du fils de Mary, à la fin cette troisième saison, Matthew, figure emblématique et personnage préféré de nombreux fans, va mourir d’un accident de voiture. Faute de goût, mort inutile et dommageable, série foutue en l’air, il faudra attendre la suite des événements pour le savoir, mais malgré une qualité toujours aussi impressionnante, certains choix de la saison passent très mal.

Mais il n’y a pas que dans les étages que l’histoire s’écrit, et les coulisses seront encore très animées dans ses années 1920-1921. En effet, une fois les coupes budgétaires réglées, du personnel sera recruté : William étant mort et Thomas remplaçant Bates auprès du comte, deux nouveau valets de pied vont faire leur apparition, Alfred (Matt Milne), neveu d’O’Brien, et Jimmy (Ed Speleers, héros d’Eragon), mais aussi une nouvelle aide de cuisine, Ivry (Cara Theobold), puis plus tard une femme de chambre, Edna (MyAnna Buring). Tous au cœur d’une romance à sens unique, après l’avoir vu flirter avec la femme de chambre de la mère de Cora, Daisy va tomber amoureuse d’Alfred, qui va va jeter son dévolu sur Ivy, elle-même éprise de Jimmy. Lui n’est attiré par personne, mais en revanche Thomas ne sera pas insensible à son charme, et poussé par une O’Brien aigrie jouant sur tous les fronts pour faire éclater le scandale de sa nature et le faire renvoyer, il va se lancer dans le jeu dangereux de la séduction. Elle aussi amoureuse de la mauvaise personne, Edna va développer des sentiments pour Tom, l’ex chauffeur passé chez les nobles, qui après une année de deuil se demande encore si sa place est vraiment en haut sans la mère de sa fille. À noter l’arrivée en toute fin de deux personnages primordiaux pour les saisons suivantes : Lady Rose MacClare (Lily James), petite cousine de Lord Grantham qui viendra poursuivre son éducation à Downton, et Michael Gregson (Charles Edwards), éditeur d’un journal, qui en plus d’avoir engagé Edith comme chroniqueuse aimerait faire d’elle sa maîtresse, ne pouvant lui offrir plus de par son mariage avec une femme désormais placée en asile et dont il ne peut divorcer. Une nouvelle saison des plus riches, qui arrive à multiplier les histoires sans jamais se répéter, trouvant dans la valse des personnages la diversité nécessaire au renouvellement de l’originalité. Point de Titanic, de guerre ou de peste, et juste avec son ambiance et la force de ses personnages la série perdure brillamment. Mais pour combien de temps encore ? En sacrifiant le meilleur d’entre eux, la série s’est peut-être tirée une balle dans le pied…

Saison 3 :  

Perdre une des filles Crawley était dur, aussi secondaire fut-elle, mais pouvait-on se remettre de la perte de Matthew, personnage primordial et adulé ? Si le spectateur n’a pas peur de porter le deuil, il n’en est pas de même pour les protagonistes, qui retrouvent leur quotidien normal au bout de deux épisodes seulement, et dès l’épisode suivant le premier candidat à la succession de Matthew dans le cœur de Mary va se déclarer : Anthony Foyle, alias Lord Gillingham (Tom Cullen). S’en suivront le retour Evelyn Napier à la charge, mais qui ne sera en réalité jamais dans la course, dans l’ombre du troisième candidat et rival de poids pour Gillingham, Charles Blake (Julian Ovenden). Un triangle amoureux qui n’évoluera que peu au cours de la saison, laissé en suspend pour la suivante. Une histoire qui occupe une large place dans ce segment 1922-1923, mais bien évidemment d’autres prennent place en parallèle. De nature volage, Rose n’aura pas de réelle histoire en dehors d’un scandaleux flirt avec un musicien africain, plaisir coupable visant à choquer et faire évoluer les meurs. Edith était partie sur les chapeaux de roue avec Gregson, son amant magnat de la presse, prêt à tout pour obtenir le divorce et lui offrir une vie respectable, mais respectant la tradition du drame de la naissance, la grossesse d’Edith ira de pair avec la disparition de Gregson, présumé mort. Cachant sa grossesse en se terrant en Suisse le temps d’accoucher, elle confiera finalement son enfant à un fermier du domaine de Downton, évitant à la fois le scandale et la séparation. Tom Branson subira lui aussi quelques affres sentimentaux, à nouveau harcelé dans un premier temps par la femme de chambre Edna, ensuite par une institutrice de Downton, Sarah Bunting (Daisy Lewis). Deux séismes venant lui rappeler qu’il ne fait pas parti de ce monde, et on sent qu’il peut craquer à n’importe quel moment. Même Isabelle, après avoir éconduit le docteur Clarkson, va être courtisée par Lord Merton (Douglas Reith), parrain de Mary.

Comme toujours, il n’y a pas qu’en haut que la vie suit son cours, et chez les domestiques les choses seront aussi très mouvementées. Alors qu’on croyait que l’affaire du savon allait éclater après deux saisons de repentance, O’Brien est finalement partie dans l’entre saison, sans crier gare, remplacée dans un premier temps par Edna, puis par Phyllis Baxter (Raquel Cassidy), semble t-il complice de Barrow par obligation, ce dernier ayant de toute évidence de quoi la faire chanter. Intégrant le personnel de Downton après une longue errance, Molesley tentera de la protéger, mais cette histoire restera en suspend, comme presque toutes d’ailleurs. Ivy va semble t-il partir, mais on en sait pas tellement plus ; Alfred, après avoir décroché une place de cuisinier au Ritz, a fait mine de se rapprocher de Daisy, mais on en saura pas plus ; le frère de Cora (Paul Giamatti) vient peut-être d’entamer une relation avec une Lady britannique, mais rien n’est gravé dans le marbre. Autre intrigue et pas des moindres, débutant au troisième épisode, celle du viol d’Anna par le valet de Lord Gillingham. Ne pouvant rien dire sous peine de voir son mari pendu pour meurtre, allant à coup sûr se venger, un climat de tension intense va s’installer, jusqu’à l’un des moments les plus drôle de la série, à égalité avec le procès de Bates où les témoignages involontairement assassins l’ont conduit à l’enfermement, celui où John Bates va comprendre que c’est le valet qui a souillé sa femme, lui lançant un regard évoquant une rage sans commune mesure, qui se traduira évidemment par la mort du valet. On a rarement vu autant de violence dans un seul regard, et on jubile sournoisement à l’idée du massacre qui va suivre.

Ainsi dont la vie continue après la mort, et l’inspiration des scénaristes n’a pas de limites tant cette saison est toujours aussi riche. Les personnages vont et viennent, on s’attache (Rose possède une joie de vivre communicative, et les prétendants de Mary sont charismatiques), on se détache (Jimmy et Ivy sont quasiment absents de la saison, ne sont au cœur de pas grand chose, et leurs départ respectifs – en fin de saison et début de suivante – nous affecte ainsi beaucoup moins) et on s’interroge (après la crainte de cancer en saison 2, Carson et madame Hughes semblent à nouveau se rapprocher à la toute fin). On peut donc se remettre de tout, même de la mort de son personnage préféré. Beaucoup de bonnes choses se dévoilent, restent en suspend, nous mettent l’eau à la bouche, mais il y a tout de même quelques séquelles, un vide palpable, surtout dans les premiers épisodes où la reprise se fait dans la douleur.

Saison 4 :

Après quatre saisons palpitantes, sans vraiment défaillir la cinquième montre des premiers signes de faiblesse. Elle nous avait fait languir à hésiter entre ses deux prétendants, Mary va finalement porter son choix sur Lord Gillingham, Blake n’ayant en réalité jamais semblé être dans la course. Comportement inqualifiable pour l’époque, voulant être sûre de ne pas se tromper, elle va passer une semaine dans la même chambre d’hôtel que lui, sorte de baptême pré-nuptial, pour finalement se raviser. Les performances n’ont visiblement pas été à la hauteur… Sinon, comme prévu vu leurs importances respectives en chute libre, Alfred, Jimmy et Ivy vont quitter le navire, bien que pour la dernière c’était déjà le cas dans le dernier épisode de la précédente saison, devenant cuisinière pour le frère de Lady Grantham. Lui aussi porté sur la cuisine, Alfred va réussir un concours d’entrée pour le Ritz où il y deviendra un chef apprécié, tandis que Jimmy retrouvera son ancienne patronne, toujours entichée de lui. Autres intrigues laissées en suspend : le bébé caché et le meurtre du violeur. Veuve officieuse et mère d’un bâtard, Edith va cacher son pêché dans une ferme de Downton, des paysans ayant accepté de s’en occuper dans le secret. De son côté, la justice va ré-ouvrir le dossier « Green », feu le valet de pied de Gillingham qui avait violé Anna, portant tour à tour ses accusations sur le couple qui aurait très bien pu se venger, mais contre toutes attentes il n’en est rien. On se retrouve donc à nouveau dans des déboires judiciaires pour les Bates alors qu’ils sont innocents.

Côté nouvelles intrigues, la liste est longue comme toujours, mais un brin moins inspirée. Les choses vont devenir sérieuses entre Isabelle Crawley et Lord Merton, mais ses fils n’acceptant pas leur future belle-mère, leur idylle sera étouffée dans l’œuf. En parlant d’idylle d’un autre âge, la comtesse douairière va retrouver son vieux prétendant russe, mais il n’en ressortira finalement rien. C’est dans les coulisses de sa maison que les choses vont bien plus bouger avec l’arrivée de Spratt (Jeremy Swift), le majordome aperçu une poignée de seconde la saison précédente, et Denker (Sue Johnston), la nouvelle femme de chambre de madame. Duo à la cohabitation très amusante, ils vont sans cesse se confronter, se lancer des piques et tenter d’évincer l’autre. Mais certains duos marcheront mieux, à l’image du flirt entre Branson et Sarah Bunting, l’institutrice du village, mais qui n’a fait que le rabaisser à son statut de chauffeur en le poussant contre sa nouvelle famille. Petite fofolle de la famille dont l’optimisme ne semble pas avoir de limites, Rose trouvera son grand amour au sein de la saison : Atticus Aldridge (Matt Barber), prouvant son grand cœur en passant outre ses origines juives. Eux s’étaient trouvé depuis longtemps sans jamais oser se l’avouer, le majordome Carson et madame Hughes vont enfin franchir le pas à la toute fin avec une demande en mariage en prime. C’est beau l’amour.

Une saison riche et belle de plus, mais pour la première fois certains passages semblent longs, d’autres répétitifs. Les nouvelles tourmentes du couple Anna / John sont un éternel recommencement, et les problèmes maternels d’Edith soûlent rapidement. Le fermier étant dans la confidence mais pas sa femme, cette dernière verra d’un mauvais œil le trop grand attachement d’Edith à cet enfant qui lui est « étranger », une situation vite agaçante tant elle pourrait être réglée d’un claquement de doigt. L’indécision de Mary pèsera aussi, rendant le triangle amoureux de la saison passée vide de sens. Enfin, ayons une pensée émue pour Isis, disparue durant l’automne 1924 après 12 ans d’amour inconditionnel.

Saison 5 :

Pour la toute dernière saison, pas vraiment de nouvelle intrigues, juste la clôture de celles entamées. Trois romances primordiales avaient prit place lors du dernier épisode de la cinquième saison, et elles seront au cœur des dernières intrigues. Tout d’abord les fiançailles de Carson et madame Hughes, qui mettront trois épisodes à se concrétiser, la faute à un manque de communication autour des véritables implications du mariage. En parallèle de ça, Mary se fera courtiser par un pilote de course, Henry Talbot (Matthew Goode), un aspirant parfait mais qu’elle rejettera sans cesse par couardise et vanité, avant de finalement craquer et se marier. De son côté, et contre toutes attentes ou bon sens, Edith sera elle même convoitée par Herbert Pelham (Harry Hadden-Paton), le gestionnaire du domaine où les Crawley avaient passé leur dernier été. Une histoire d’amour ponctuée de moult rebondissements, de par l’existence de Marigold et sa vraie nature ou la mort du Marquis d’Hexham dont l’héritier sera Herbert, faisant de lui un riche et influant marquis. Révélations, cachotteries, sabotage de Mary : rien ne viendra heureusement s’interposer définitivement, et l’happy ending est le leitmotiv de la saison. Pour preuve, la règle absolu de « une naissance = un des deux parents mort » sera évitée pour Rose, baignant encore dans son bonheur un an plus tard, et Anna et Bates semblent aussi y avoir échappé.

Dans le même ordre d’idée, le père de feu William semble en bonne voie pour finir avec madame Patmore, Dasy avec Andy (Michael Fox), tout en s’ouvrant tout deux une nouvelle voie professionnelle, Molesley se dessine de son côté une carrière de professeur, tandis que madame Baxter pourrait devenir sa compagne. Point de relation heureuse pour Thomas Barrow par contre, cela aurait été étonnant vu le contexte de l’époque, mais les choses vont tout de même beaucoup s’améliorer pour lui, puisqu’après avoir sombré dans le désespoir et s’être vu obligé de quitter Downton, l’âge rattrapant Carson, il finira co-majordome avec lui. Anna et Bates vont quant à eux enfin avoir l’enfant qu’ils attendaient, et leurs ennuis judiciaires vont définitivement être entérinés. Même Tom, l’ancien chauffeur et veuf de Sybil, va avoir le droit au bonheur, puisqu’en plus de s’être fait un précieux ami en la personne de Henry Talbot, il est sous-entendu qu’une romance est naît entre lui et la directrice de publication du journal d’Edith. Plus encore, car il n’y a pas d’âge pour aimer, Isabelle va enfin céder et épouser Lord Merton, ou tout du moins il en est question. Bref, malgré quelques drames évités de justesse, tout fini pour le mieux dans le meilleur des mondes. Le travail est donc fait, on peut se satisfaire de cette fin, mais il n’empêche qu’en terme de prise de risque ou d’inventivité, cette saison est probablement la moins intéressante.

Saison 6 : 

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Nous trois ou rien

Nous trois ou rien
2015
Kheiron

Élu meilleur film de l’année par les spectateurs d’allociné et ayant jouit d’un bouche-à-oreille si phénoménal que sa première semaine d’exploitation compta pour seulement le quart de ses entrées (alors que la moyenne se situe aux alentours de 45%), le film fut tout juste nominé pour le prix du meilleur premier film aux Césars, prouvant définitivement l’inutilité totale de cette ennuyeuse cérémonie. Dans un paysage cinématographique qui a vite fait de paraître redondant, voilà probablement l’œuvre la plus aboutie et personnelle de l’année.

Principalement connu pour ses participations dans la série Bref sur Canal, l’humoriste Kheiron s’attaque ici à une histoire loin d’être drôle : celle de ses parents, incarnant au passage son propre père, Hibat. Ce dernier a grandi en Iran dans une famille de 12 enfants, dans un pays meurtri par la dictature du Shah d’Iran (Alexandre Astier), qu’il voulait combattre en devenant avocat, mais ses actions vont le conduire en prison où il croupira de nombreuses années. De son engagement politique dans son pays natal jusqu’à sa fuite en France avec sa compagne (Leïla Bekhti), le film revient sur une vie entière dévouée à rendre ce monde meilleur.

Réussir à adoucir une histoire aussi brutale, rendre émouvante une histoire aussi triste, c’est un véritable tour de force. Pour éviter de nous perdre dans la surenchère de drame ou la dureté de la réalité, le film arrive avec une justesse étonnante à nous offrir des instants de répit, des petites piques humoristiques pour se rendre la vie supportable. Et en fait c’est ça le vrai sujet du film : l’espoir. L’espoir de rendre son pays meilleur, l’espoir d’être meilleur pour son prochain, l’espoir d’être utile et de contribuer. Tout simplement brillant dans sa narration et dans son écriture, le film repose surtout sur des personnages extrêmement attachants, et presque chacune des performances est notable, que ce soit le couple, exceptionnel, Gérard Darmon, Zabou Breitman, Michel VuillermozKyan Khojandi ou Jonathan Cohen. Le plus surprenant de tous est peut-être l’interprète du frère du personnage principal, Khereddine Ennasri, un joyeux simplet qui participe beaucoup à la légèreté protectrice du film. L’histoire nous fascine, les acteurs nous émeuvent, le film nous bouleverse. Kheiron adapte l’histoire de ses parents avec force et émotion, donnant à cette première œuvre un impact digne des plus grands maîtres.

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Girls Only

Girls Only
2015
Lynn Shelton

Sorti en période pré-estivale face à une première vague de blockbusters imparable, le film est, comme partout ailleurs, passé complètement inaperçu, comme l’intégralité des films de sa réalisatrice, ce qui ne l’empêche pas de faire signer certaines des plus grandes stars d’Hollywood. Ici, on avait deux morceaux de choix qui se donnaient pour la première fois la réplique, le tout dans une ambiance comédie-romantique qui avait l’air sympa.

S’engager, s’orienter : voilà deux choix difficiles à faire, et lorsque que son petit ami va la demander an mariage, Megan (Keira Knightley) va tout envoyer balader, se retrouvant par le hasard des choses dans une fête de lycéens avec Annika (Chloë Grace Moretz), une jeune avec laquelle elle va se lier d’amitié. Ne sachant où aller, elle va taper l’incruste chez le père (Sam Rockwell) de sa nouvelle amie, l’occasion de faire un point sur sa vie.

Etant donné que le film est arrivé relativement tard en France, l’âge de l’actrice d’Annika m’induisait en erreur car je pensais que le film allait se passer dans un campus universitaire, thème que j’affectionne tout particulièrement et qui s’avère souvent propice aux bonnes comédies. Donc en fait, au lieu de se reprendre en main et repartir à la fac, elle va retomber en enfance dans les méandres de la bêtise pré-graduation. Une régression qui ne fait pas avancer les choses et nous plonge dans un univers pas super intéressant. De même,  l’héroïne n’envoie pas réellement tout valser et pendant longtemps elle ne prendra que des décisions sans conséquences. Les enjeux s’en retrouvent amoindris, la romance bancale, et même côté humour le film peine à convaincre, évitant tout de même le piège de la vulgarité américaine classique. Pas un mauvais film, mais il y avait mieux à faire tant l’écriture est faible.

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Hitman : Agent 47

Hitman : Agent 47
2015
Aleksander Bach

En 2007 sortait une première version d’Hitman, film d’action terriblement efficace et qui a connu un joli succès (100 M$) compte tenu de la popularité toute relative de la saga vidéo-ludique dont il est l’adaptation. On parlait alors d’une suite, mais les fans du support d’origine s’étaient déplacés en masse pour descendre le film, très loin d’être une adaptation fidèle selon eux. Entre temps le studio responsable de la licence de jeux-vidéos a changé, souhaitant du coup rebooter la franchise cinéma pour offrir aux fans ce qu’ils voulaient, mais du coup c’est le reste du monde qu’il s’est mit à dos.

Origin story, le film se concentre sur ce qui a fait de l’agent 47 (Rupert Friend) un si grand assassin : le docteur Litvenko (Ciarán Hinds), spécialiste en amélioration génétique. Sur ses traces depuis de nombreuses années, sa fille (Hannah Ware) pourrait bien avoir retrouvé sa piste, faisant d’elle une cible de choix pour l’organisation où travaille l’agent 47, souhaitant mettre la main sur le savoir du docteur. Pour le contrer, le syndicat va envoyer l’agent John Smith (Zachary Quinto).

Les fans des jeux vont être « aux anges » dans la mesure où la charte est respectée à la lettre. On retrouve une bonne partie de l’univers et des personnages de la mythologie, et l’infiltration revient au cœur de l’histoire, utilisant à de nombreuses reprises le coup du déguisement, marque de fabrique du personnage. En dehors de ça, on a deux trois visuels sympas, quelques séquences d’action musclée, de la voiture de luxe massacrée et des panoramas de villes. Malheureusement, cela ne fait pas tout, et on se fait plutôt chier : l’histoire est ennuyeuse, clichée, les combats classiques, les acteurs mauvais, certains effets spéciaux (notamment les hélicoptères) font cheap et le film tente de se la jouer grand film d’espionnage mais n’en a pas les moyens. La bimbo aguiche et son sauveur laissait espérer un certain niveau de qualité, mais très vite le vide abyssal du film nous saute aux yeux et on attend plus que la libération du générique.

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Five

Five
2016
Igor Gotesman

Vu hier en avant première, voici ce qui pourrait être le prochain gros carton des comédies françaises. Tout premier film pour son réalisateur, il a été tourné pour tout juste 4 M€, et compte tenu de son acteur vedette, de la campagne de marketing efficace et des très bons échos de la salle, pas de doute que le succès sera au rendez-vous, débloquant ainsi une suite déjà programmée et qu’on imagine sans trop de difficultés.

Comme le titre et l’affiche indiquent, le film porte sur un groupe de cinq amis : Samuel (Pierre Niney), Tim (François Civil), Vadim (Igor Gotesman), Julie (Margot Bancilhon) et Nestor (Idrissa Hanrot). Alors qu’ils venaient enfin de réaliser leur rêve de vivre tous ensemble dans un bel appart parisien, la machine à cash de Samuel va tomber en panne. Vivant royalement sur le dos de son richissime père, il aspire à devenir acteur, mais celui-ci ne l’entend pas de cette oreille et veut le voir réussir en médecine, ce qu’il s’efforce à faire croire. Mais un jour la supercherie de ses fausses études médicales va éclater, l’obligeant à basculer dans le milieu des dealers pour assurer son train de vie.

Le film commence assez mal entre un affichage de générique bancal et un effet narratif bien trop classique : celui qui consiste à montrer un passage proche de la fin et d’expliquer comment on en est arrivé là. Mais finalement nos doutes seront bien vite balayés, même si au fond l’histoire est très classique et pas spécialement intéressante. De même, en dehors de Samuel et Tim, les autres personnages ne sont pas spécialement importants, mais le film arrive à imposer un style d’humour frais, dynamique et efficace, et nombre de répliques font mouche. On a bien sûr pu en voir de très bonnes dans les extraits, mais le meilleur restait à venir, et au fond ce qui fait vraiment la force du film c’est Pierre Niney, décidément brillant dans tous les registres, et ici il s’en donne à cœur joie dans la démonstration de son talent, et son énergie fait plaisir à voir. On s’amuse énormément, l’humour est fin et percutant et pas un seul temps mort : je valide.

Critique aussi disponible au format vidéo, avec cette fois un contenu différent :
https://www.youtube.com/watch?v=xTa-8zLLWWI

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Le Dernier tournant

Le Dernier tournant
1939
Pierre Chenal

Et voilà ce qu’il se passe quand on devient trop curieux. On redécouvre un grand acteur oublié, on se demande de quoi d’autre fut faite sa filmographie, puis on prend le premier film qui passe sur le journal télé où son nom est mentionné. Et là, clairement, en plus du film, mieux valait oublier sa présence…

On croise un vagabond sans le sous, on croit faire une bonne action, et puis finalement il vous la met à l’envers. Gérant d’une station service-hôtel-restaurant, Nick Marino (Michel Simon) avait accueilli un certain Frank, type aussi désagréable que malpoli, mais qui avait le mérite de travailler pour lui la nuit, lui permettant de se reposer auprès de sa femme. Seulement voilà, il va mettre le grappin sur la patronne et monter un plan pour le tuer.

Un type débarque, se tape la femme et prévoit de tuer le mari. Ensuite ? On rame pendant demi-heure, un léger sursaut, puis on replonge dans l’ennui. Une scène de bagarre, une lionne dans une auto : voilà tout ce qu’on aura pour patienter jusqu’à la fin, grotesque. Les deux amants, pas vraiment amoureux, n’ont aucun charisme, leurs personnages ne valent rien, les acteurs non plus, et l’histoire pas tellement plus. Il y avait donc vite fait un pochard gueulard, aussi bruyant qu’assommant, mais le pauvre est presque pire que les autres. Il y avait peut-être quelque chose à faire avec le principe du couple qui manigance de tuer le patron, mais ce point est bancal. Un film qui devrait rester dans l’oubli.

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Room

Room
2016
Lenny Abrahamson

Petit film sorti dans une poignée de salles aux Etats-Unis, sans sortie mondiale programmée, il a créé un séisme en décrochant une flopée de nominations dans les plus grands festivals, incluant une nomination en tant que meilleur film de l’année aux Oscars. Avec actuellement un peu moins de 32 M$ au box-office mondial, le succès n’est pas non plus à la hauteur, mais c’est déjà inespéré tant personne ne l’attendait aussi haut entre le jeune débutant et sa mère, connue des seuls vrais cinéphiles.

Un pseudo mystère est entretenu autour de l’histoire, mais en réalité n’importe qui, qui a ne serait-ce qu’entendu parler du film ou vu la bande-annonce, sait de quoi il en retourne. On suit donc le quotidien terrible de Joy (Brie Larson) et de son fils Jack (Jacob Tremblay), enfermés depuis de très nombreuses années dans une remise à outils fortifiée. Sous couvert d’une porte blindée dont seul lui connait le code, un certain Nick les retient captifs, ayant kidnappé Joy alors qu’elle n’avait que 17 ans. Jack n’a jamais connu le monde extérieur, ayant grandit dans cette même pièce, et il a aujourd’hui cinq ans.

De loin le film le plus confidentiel parmi les challengers au prix suprême, le film a beaucoup fait parler de lui malgré tout, et un constat revenait souvent : la seconde moitié n’est pas aussi intéressante que la première. Il y a du vrai, mais je ne dirais pas ça comme ça. Le film aborde successivement deux thèmes, celui de la séquestration qui mène à la folie, puis la tentative de retrouver une vie normale une fois dehors, et les deux parties ont beaucoup de choses intéressantes à dire ou à montrer. Dans la fameuse pièce, deux visions s’opposent : celle de l’enfant, encore dans son monde imaginaire joyeux, loin de se douter du monde qui l’entoure et de l’horreur de sa situation, n’ayant jamais connu rien d’autre et ayant apprit à y trouver son bonheur, et la vision de la mère, prisonnière d’un pervers qui la viole régulièrement depuis de très longues années et qui essaye de ne pas sombrer dans la folie pour son fils. La tension dans la pièce est immense, mais intelligemment atténuée par la joie vivre de l’enfant.

La transition vers la deuxième partie sera ensuite un des plus grands moments de l’histoire du septième art, d’une intensité ahurissante, aux enjeux dantesques, nous coupant le souffle et nous époustouflant par l’intelligence de la mise en scène et des dialogues. Comme quoi, un détail qui vous parait anodin peut être l’élément primordial qui fera la différence. La suite se maintient ensuite à un très haut niveau, trouvant dans le choix de réalisation, à base de focales instables, un formidable écho de la découverte déstabilisante du monde qu’éprouve Jack, formidablement interprété par un jeune des plus prometteurs. Mais si vous cherchez la performance la plus marquante du film, il faut se tourner du côté de la sublime Brie Larson, bouleversante dans son rôle de mère en proie au désespoir mais qui tente de garder la face pour le rayon de soleil de sa vie qui justifie tous les sacrifices possibles. Rarement quelqu’un n’aura autant mérité son Oscar. Un film exceptionnel donc, qui aborde des thèmes terribles avec une émotion d’une rare intensité, et s’il est vrai que la seconde moitié n’a pas le même impact, il n’en reste pas moins magnifiquement émouvant.

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