Alice au Pays des Merveilles

Alice au Pays des Merveilles
2010
Tim Burton

Recherche introuvable ? Eh bien oui, persuadé d’avoir écrit cette critique depuis longtemps, je me suis rendu compte que non, mon site étant sorti après mon visionnage du film. Soit, il m’avait semblé avoir bien apprécié le film, alors comblons d’emblée cette lacune. Nous étions en 2010, le monde accueillait alors avec un engouement sans pareil la 3D démocratisée avec Avatar, Johnny Depp ressortait tout juste de la première trilogie Pirates des Caraïbes qui avait fait de lui la plus grande star de la planète, et l’idée de voir la grand Tim Burton réadapter l’univers psychédélique Lewis Carroll semblait d’un naturel absolu. Tous les ingrédients du succès étaient donc réunis, et avec plus d’un milliard au box-office et quelques prix artistiques glanés aux Oscars, on peut dire que la réussite fut totale. Mais en réalité, le film a surtout jouit de très belles circonstances.

À la fois réadaptation et suite de l’histoire qu’on connaissait du film d’animation de Disney, le film mettra Alice (Mia Wasikowska), devenue adulte, face à ses anciennes chimères fantasmagoriques. Devant faire face aux obligations maritales propres à la bourgeoisie de l’époque victorienne, elle va prendre la fuite en suivant un étrange lapin lapin blanc portant un gilet et une montre à gousset, tombant ainsi dans son terrier. Elle va alors se retrouver dans le Pays des Merveilles, vague souvenir de son enfance, où le peuple est à la recherche d’une certaine Alice qui pourrait tuer le Jabberwocky, délivrance qui mettra fin au règne de la vile Reine de Cœur (Helena Bonham Carter). Est-elle vraiment la Alice capable d’un tel exploit ?

Je me demande vraiment après coup ce qui a pu autant m’enthousiasmer à l’époque… Bien sûr, nombre de choses ont changé depuis la sortie du film : la 3D est devenue encombrante et la star du film, anciennement synonyme de succès éclatant, enchaîne désormais les bides à force de faire inlassablement les mêmes rôles d’excentriques usants. Mais de toute façon, déjà à l’époque ces problèmes pouvaient se sentir, notamment en ce qui concerne le Chapelier fou, intéressant par bien des aspect, notamment niveau design (exception faite de ses fausses dents du bonheur au noircissement bien trop visible), mais qui est profondément creux, à l’humour fade et à la gigandélire désarmante. Un problème qui touche en réalité tous les personnages, soit parce que leur modélisation est douteuse (pour un film de 200 M$ de budget le résultat est quand même par moments très indigne), ou parce que l’acteur derrière paraît vide, notamment le valet, à la démarche saccadée, ou la Reine Blanche (Anne Hathaway), à l’utilité encore inconnue. Heureusement, les décors sont plutôt très beaux, d’autant plus grâce à la réalisation, classique mais classe, très film d’aventure. Mais en dehors de ça, l’histoire n’a pas un impact terrible, recyclant l’éternelle prophétie avec son élue qui vient sauver son monde. La folie de l’histoire est très mal maîtrisée, le vocabulaire n’ayant pas la même plussoyance que « fleurpageons les rhododendrons », et l’humour tombant souvent à plat. Le spectacle est à peu près assuré, mais rien ne convainc vraiment, la force de l’univers et des décors devant faire face à certaines erreurs de modélisation ou de design, l’intérêt de personnage au vide créatif, de même que l’histoire, à l’écho imperceptible et aux mécanismes désuets. Un film qui avait toutes les cartes en main pour entrer dans la légende, mais qui déçoit par son absence de profondeur et ses choix douteux. La suite prévu pour l’été 2016 n’a rien de très excitant, mais tout reste possible si un effort est consenti au niveau créatif.

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Le Flemmard du 7° art : Taxi

Après plus d’un moins d’absence, faute aux critiques qui m’ont obligé à réfléchir à une sorte de réponse possible, j’ai enfin trouvé la solution : le troll. Donc forcément, après avoir passé en revu des monuments du cinéma, c’est au tour de Taxi :
https://www.youtube.com/watch?v=EWbSbJptzDQ

Sinon pour ceux qui ont du mal avec le second degré ou qui n’ont pas compris la vidéo, petit rappel des faits avec les critiques des quatre films de la saga : Taxi, 2, 3 et 4.

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Cendrillon

Cendrillon
2015
Kenneth Branagh

La seconde guerre mondiale avait faillit mettre à terre l’immense compagnie Disney, mais en 1950 un film leur permit de sortir la tête de l’eau : Cendrillon. Colossal succès planétaire avec notamment plus de treize millions d’entrées en France, le film s’offre aujourd’hui une adaptation live après moult films reprenant à leur compte la célèbre histoire de Perrault. Entre Alice au Pays des Merveilles, Oz et encore l’an dernier Maléfique, les vieux contes de la firme aux grandes oreilles ont encore la côte, et ce n’est pas cette version du grand Kenneth Branagh qui viendra contredire ce fait : doté d’un plus faible budget que ses prédécesseurs (95 M$ contre 180 à 215 M$ pour les autres), le film devrait récolter pas moins de 600 M$, faisant déjà de lui un sérieux candidat au poste de film le plus rentable de l’année. Un large succès conforté par d’excellentes critiques, pulvérisant ses consœurs avec un très bon 7,7 sur IMDb et un surprenant 84% de satisfaction sur le très exigeant site rottentomatoes. Sans aller jusqu’à participer au tonnerre d’applaudissements qui a retenti dans la salle au moment de l’apparition du mythique « The End », il faut effectivement reconnaître que cette adaptation fait parfaitement son travail.

Petite originalité du film, il nous fait commencer son histoire lors de l’enfance de Ella (Lily James), alors qu’elle s’éveille au monde dans les bras aimants de sa mère (Hayley Atwell), décédée très jeune, et de son père, mort quant à lui une décennie plus tard lors de l’un de ses voyages, la laissant seule avec sa méchante belle-mère (Cate Blanchett) et ses deux stupides demis-sœurs par alliance. Suite à la disparition de son père, elle va devenir Cendrillon (surnom mélange de cendres et de souillon), l’esclavage domestique de sa nouvelle famille. Mais un jour son prince (Richard Madden) viendra.

Si vous en avez marre des contes de fée ultras classiques, ou que vous n’avez pas aimé la version animée d’il y a 65 ans, il est peu probable que ce film vous plaise. Et pour cause : il en reprend presque chaque élément, de l’histoire aux personnages, y compris le chat Lucifer et les souris, Gus-gus en tête. Toutes les plus grandes scènes sont reprises quasi tel quel, de la séquence avec la Marraine (Helena Bonham Carter) à l’essayage de la pantoufle de verre (encore en cristal donc, et non en vair) avec Ella enfermée au grenier, en passant par la confection de la robe par les souris et le bal. Donc mise à part le prologue original – et peut-être aussi le complot avec Stellan Skarsgard – nous racontant un peu d’où vient la naïveté et la bonté extrême de Ella, faisant évacuer d’emblée les enfants les plus sensibles de la salle (au passage ça fait bizarre d’être le seul majeur n’accompagnant pas d’enfants, avec un taux de 90% de « mère avec sa fille »), on ne fait que revoir sous un jour nouveau une histoire mainte fois contée. Mais seulement voilà, transposer une histoire aussi infantile et magique dans le réel, c’était déjà un sacré pari en soi. Un pari remporté haut la main grâce à une seule personne, révélée par l’excellente série Downton Abbey, Lily James. D’une beauté à couper le souffle, elle est aussi d’un naturel saisissant, rendant évident un dialogue avec des animaux improbables, et sa joie de vivre quasi inébranlable nous contamine et il devient impossible de décrocher son regard de son sourire ravageur. Un rôle de surexcitée débordant d’ardeur non sans rappeler celui qu’elle tient dans la série britannique, et elle le tient avec une justesse et une classe qui forcent le respect.

L’autre gros point fort du film vient de son visuel, convaincant à plus d’un titre. Les costumes et les décors ont fait l’objet d’un soin tout particulier, renforçant la magie ambiante, mais c’est surtout la réalisation qui fait mouche. Les mouvements de caméra sont amples, gracieux, souvent aériens, dosés avec une précision remarquable, notamment lors de la rencontre, alors que les chevaux continuent de tournoyer sur place, décrivant la fougue de la passion qui était en train de se déclarer, ensuite stabilisée avant de risquer de perdre le spectateur dans un tumulte trop fatiguant. Le choix des couleurs est lui aussi très pertinent, nous inondant de lumière et de couleurs exacerbées en fonction du moral de l’héroïne, nous berçant ainsi d’une vive chaleur lors de son début d’enfance euphorique. Le résultat à l’écran est tout simplement magnifique, faisant vivre le conte de la plus belle des manières. Alors oui, les contes de fées parlent plus aux enfants, et celui-ci semble avoir trop de fois été rabâché, mais qu’importe l’effet de surprise, la fraîcheur vient d’ailleurs, et jamais l’histoire n’avait revêtit si belle parure. Pour le soin artistique remarquable dont le film a fait preuve, et pour son héroïne si renversante, on ne peut qu’encourager une telle prouesse, redonnant sa magie à une histoire tombée en désuétude.

Sinon au passage, par rapport au court-métrage sur La Reine des neiges projeté en amont du film, c’est une honte absolue. Les bras m’en sont tombés : je ne m’attendais pas spécialement à quelque chose de très recherché, mais à ce point ? Du fan service très bas de gamme, multipliant les clin d’œil au film original, mais sans la moindre inspiration et avec des chansons au découpage aussi désastreux que les paroles, confondantes de bêtise. Une fête bidon qui n’avait pas lieu d’être, et il y a même de quoi craindre sérieusement pour la suite des aventures si l’arrivisme est aussi évident.

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I Origins

I Origins
2014
Mike Cahill (II)

Second film du réalisateur de Another Earth, cette nouvelle incursion dans l’univers de la science-fiction se voulait elle aussi très ambitieuse, mais la prudence était de mise. En effet, malgré son principe fort, quelques images étourdissantes et une révélation en la personne de Brit Marling, qui tient ici le rôle de la collègue scientifique, la déception fut grande lors de son premier long-métrage tant le manque de budget empêcha toute tentative d’approfondissement. Alors bien sûr, la bande-annonce de ce film me donna envie d’applaudir à m’en faire saigner les mains, mais est-ce réellement le chef d’œuvre potentiel ? Cette fois-ci, oui.

Le corps humain est fascinant, et nombre de ses caractéristiques sont uniques à chaque individus. Le docteur Ian Gray (Michael Pitt) est passionné par l’une d’entre elles : l’œil. Chaque iris est unique, une œuvre d’art qui l’envoûte et sans laquelle il n’aurait pu retrouver Sofi (Astrid Berges-Frisbey), belle inconnue qui a fait battre son cœur le temps d’une soirée et dont il n’avait qu’une photo de ses yeux comme souvenir. Des yeux qui vont lui offrir l’amour, mais qui pourraient aussi être l’origine de la plus grande découverte spirituelle de l’histoire.

Il n’y a encore pas si longtemps, religion et science étaient liées, et nombre de produits culturels mettent en avant des races extraterrestres supérieures qui ont eux aussi fusionné les deux. Véritable bras d’honneur à la religion juive qui part du principe qu’une personne ne reçoit son âme qu’après une semaine d’existence, et non une dizaine de mois avant, le film est une ode à l’hindouisme et toutes les religions bouddhistes, prônant la réincarnation de la plus belle des manières vues à ce jour. L’œil est le reflet de l’âme, et après ce film on ne peut qu’en être convaincu, du moins du point de vu artistique. Si le film met un peu de temps à démarrer, chaque acte est magistral : le premier avec l’histoire d’amour est magique, le second avec le bébé est une claque monumentale malgré l’évidence de la conclusion, et le troisième, jouant allègrement sur la frustration, nous subjugue avec la référence phobique. Une dernière partie d’autant plus forte que le cadre et les enjeux, sans compter le caractère émotionnel, nous transporte bien au delà du reste. Une histoire incroyable, d’une puissance hors du commun, magnifiquement mise en scène, et dont l’interprétation des acteurs rend incontournable. Une expérience cinématographique bluffante, qu’on aurait peut-être aimé prolonger, mais le résultat est déjà colossal.

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Bon rétablissement !

Bon rétablissement !
2014
Jean Becker

Après la série H, la France réessaye de nous faire rire en milieu hospitalier dans un huis clos sur un pauvre homme qui s’y retrouve coincé. Ne se rappelant plus ce qu’il faisait en pleine nuit en robe de chambre dans les rues de Paris, Pierre (Gérard Lanvin) va se réveiller à l’hôpital, une jambe et le bassin dans le plâtre, sans compter son trauma crânien. Il va devoir faire face à l’incompétence du personnel hospitalier, l’absence de confort, le sans-gêne de certains patients, sans compter le caractère désagréable de certaines visites. Un enfer dont il ne peut, à son grand regret, sortir.

Sorte de film à sketch, on suit le calvaire d’un homme quelque peu bousculé dans ses principes, devant affronter ses à priori et ses hantises. Une situation catastrophique où on prend un malin plaisir à le voir souffrir, à voir les intervenants se foutre royalement de lui, pour au final nous attendrir un peu en voyant que l’ignorance mutuelle va évoluer en sympathie à force de s’ouvrir aux autres. On assiste à un défilé de célébrités à son chevet, tels Jean-Pierre Darroussin, Fred Testot, Claudia Tagbo, le chanteur Daniel Guichard, et plus surprenant encore, d’autant qu’ayant un rôle important, la journaliste Anne-Sophie Lapix. Le principe marche plutôt bien, surtout grâce à l’immense charisme de Gérard Lanvin, faisant à lui seul presque tout le film, nous régalant de ses répliques sanglantes et de son grand cynisme ravageur. À l’image de la petite piquette qu’ils se sifflent à un moment, le film est sans prétentions, et on passe un bon moment.

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Les Choristes

Les Choristes
2004
Christophe Barratier

L’esprit encore embrumé et encombré par les chansons de la comédie musicale Annie, il fallait trouver une alternative capable de s’encrer aussi profondément, alors voici donc le film de chorale le plus connu en France, ayant réussi à rassembler 8,4 millions de spectateurs en France et près de 15 millions dans le monde. Un large succès publique conforté par de bons retours critiques, amenant le film aux César, où il fut récompensé pour ses musiques, et même aux Oscars, concourant pour le prix du meilleur film étranger. Un sort pas si surprenant compte tenu de sa grande inspiration de La Cage aux Rossignols, immense classique qui avait fait plus de cinq millions d’entrées, mais ça n’en reste pas moins impressionnant.

1949. Musicien raté, professeur chômeur, Clément Mathieu (Gérard Jugnot) va accepter un poste alimentaire de pion dans une école de correction des plus difficiles : Le fond de l’étang. Lieu lugubre, il abrite en son sein des rejetons, des orphelins à la réputation désastreuse ne laissant guère de choix quant à la sévérité en vigueur. Action, réaction. Perturbation, punition. Le corps enseignant (François Berléand, Kad Merad) est terrifié, les gamins (Jean-Baptiste Maunier, Thomas Blumental) désabusés. Mais pour Clément Mathieu, cette situation n’a pas vocation à être figée, et il entrevoit une possibilité d’ouverture de dialogue : il compte les rassembler autour d’une chorale.

Plus de dix ans se sont écoulés depuis la sortie du film, souvent résumé à ses chants, entraînants et magnifiques, d’autant plus avec à la tête des enfants une révélation qui n’a malheureusement pas eu la carrière qu’il méritait. Une BO plus si appréciée avec le temps, la faute à une surexposition exténuante, mais le film a tellement plus à offrir. Outre son casting surprenant à bien des égares entre un Gérard Jugnot d’un rare charisme, des collègues parfaits dans leurs rôles et des enfants stupéfiants, notamment le terrifiant Mondain (j’en avais fait des cauchemars à l’époque), le film est artistiquement bluffant. La réalisation est réellement superbe, retranscrivant à la perfection l’ambiance de l’époque, et tout dans l’image nous subjugue, des décors à la lumière. La force de la musique et des acteurs font le reste, transformant une belle histoire dramatique en fable incroyable qui vous tire les larmes, ou presque. Un point vient un peu gâcher ce tableau idyllique : le choix de narration. Toute la partie située en 1949 est géniale, mais elle débute et se termine par une vision de deux des personnages bien des années après, et on aurait envie de hurler. Déjà, transformer des enfants en vieillards est d’un désespoir absolu, montrant la brièveté de la vie, mais quand en plus Morhange, celui qui fut à la tête de chorale, peine à se rappeler le nom du bon samaritain qui l’a remit sur le droit chemin et à qui il doit tout, c’est juste moche, débile et inutile. Un faux pas qui coûte cher et fait mal au spectateur, d’autant que la scène du bus aurait fait une bien meilleure fin, promesse d’un bel avenir que cette narration amenuise. Dommage, mais le film reste malgré tout excellent, et voir un film français qui a autant d’allure et nous fait autant rêver, c’est suffisamment rare pour être souligné.

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La Prochaine fois je viserai le cœur

La Prochaine fois je viserai le cœur
2014
Cédric Anger

Durant l’hiver 78, un tueur en série sévissait dans l’Oise, tuant au hasard des rencontres les jeunes femmes faisant du stop. Un tueur énigmatique, se ratant souvent de par son incapacité à regarder ses victimes au moment de tirer (d’où le titre, citation d’une des lettres laissées par le tueur à l’époque, menaçant de réellement viser la prochaine fois), laissant derrière lui nombre de témoins qui ont immanquablement conduit à son arrestation à la stupéfaction générale (surtout sa compagne, incarnée par l’étoile montante Ana Girardot), s’avérant être un gendarme local : Alain Lamare, rebaptisé ici Franck (Guillaume Canet). Le film, raconté du point de vu du meurtrier, s’intéresse donc à la psychologie du personnage, nous proposant une plongée au cœur de sa folie et de la traque à laquelle il participait lui-même.

Des films policiers sur des tueurs en série, la France en produit plus que de raison, mais celui vaut pour une fois le détour. Qu’il soit vu par les yeux du méchant n’est pas une révolution en soi, et l’histoire n’est au fond pas folichonne (on a déjà vu tueur en série plus intriguant ou terrifiant). Ce qui fait la véritable force du film, c’est Guillaume Canet, totalement à contre-emploi, mais y réalisant une performance troublante. Physiquement semblable à d’habitude, il est pourtant métamorphosé et souvent méconnaissable tant son travail de mimiques et d’expressions faciales est poussé à l’extrême, montrant la noirceur qui l’habite d’un simple regard. On ne sait pas vraiment au fond pourquoi Alain Lamare a fait tout ça, et le film n’apporte aucune réponse, mais on sent rien qu’en voyant son personnage sa haine viscérale qui le pousse à faire tout ça, même si ça le dégoûte et qu’il se dégoûte lui-même de faire des choses aussi horribles. Il se déteste, a le monde en horreur, et ne rêve que de le voir brûler avec lui au milieu du brasier. Pas forcément un dangereux psychopathe, peut-être plus un dépressif poussé jusqu’à ses limites, voulant communiquer sa vision désabusée de la vie. Maîtrisé à la perfection, le film livre ainsi un portrait captivant d’un personnage encore jamais vu, ou du moins pas avec une telle interprétation remarquable, et il est dommage de ne pas voir plus de soutien quand le cinéma arrive à se réinventer.

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Annie

Annie
2015
Will Gluck

Célèbre bande-dessinée des années 20, la petite orpheline Annie est ensuite devenu un phénomène mondial avec la célèbre comédie-musicale de Broadway de 1977, adaptée ensuite au cinéma cinq ans plus tard avec un succès retentissant. Des chansons mythiques que ce remake ambitionnait de remettre au goût du jour à la sauce pop, pour un résultat globalement massacré par les critiques et qui doit son salut commercial à une belle période de Noël aux Etats-Unis. Pourtant, il n’y a vraiment pas de quoi avoir honte.

L’histoire de ce remake se situe 80 ans plus tard mais le contexte reste le même. Abandonnée par ses parents, Annie (Quvenzhané Wallis) fut recueillie par la vilaine Hannigan (Cameron Diaz), plus intéressée par les avantages sociaux que lui rapporte la garde qu’aux enfants, sale vermine rampante. Une pauvre orpheline dont la route va croiser celle de Will Stacks (Jamie Foxx), riche patron d’une société de téléphonie mobile et candidat à la mairie, qui la sauvera involontairement. Un fait qui le propulsera des les sondages, donnant l’idée à son conseillé en communication de prendre sous son aile la petite fille défavorisée, source inopinée de popularité. Un arrangement malhonnête mais dont Annie compte bien tirer avantage.

L’histoire était très bonne en théorie : une petite fille attendrissant le cœur aigri d’un patron acharné de travail, passant de la pauvreté et du rejet au luxe et à l’amour. Les mouchoirs étaient prêts, mais ne seront malheureusement pas utilisés. Que tout soit téléphoné est une chose, mais le vrai problème vient de l’humour, plus que douteux, ne pouvant s’empêcher de s’immiscer dans les quelques passages qui auraient pu nous attendrir. Enfin bon, quand on a Rose Byrne au casting, co-responsable des pires étrons de l’histoire de la comédie, il fallait s’y attendre. Mais tout de même, la course-poursuite finale atteint un si haut degré de bêtise et d’incohérence, sans compter les interventions catastrophiques de la nullissime Cameron Diaz, que l’indigestion est consommée. Heureusement, un point vient sauver le tableau : les musiques (sauf pour la VF, absolument insupportable tant en terme de raccord, de paroles ou d’interprétation). La mise à jour est assez largement réussie, les thèmes entraînants, les acteurs convaincants, notamment la jeune Quvenzhané Wallis qui confirme son statut de prodige, et on pourrait carrément parler de tube pour certaines chansons comme « Hard Knock Life », à écouter encore une fois en VO, comme de toute façon la totalité des comédies musicales, car même la localisation saluée de La Reine des neiges ne tenait pas la comparaison face à l’originale. Un film écrit avec les pieds, à l’histoire fade et à l’humour gras, dégoulinant de bons sentiments et mièvre au dernier degré, mais l’héroïne est tellement parfaite, l’ambiance si réjouissante et les musiques si entraînantes qu’on lui pardonne volontiers.

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Divergente 2 : l’insurrection

Divergente 2 : l’insurrection
2015
Robert Schwentke

Un choc, une véritable claque. Alors que les adaptations de roman de jeunesse se multiplient et se ressemblent, avec bien souvent une piètre qualité à la clef, l’un d’eux a fait sensation l’an dernier : Divergente. L’engouement ne fut pas aussi colossal qu’un Hunger Games, mais les quelques 289 M$ mondiaux récoltés permirent de donner le feux vert aux suites, dont voici la première.

Se déroulant dans un monde utopique post-apocalyptique, on y trouvait une organisation excitante sous forme de factions (cinq : les fraternels, sincères, érudits, audacieux et altruistes), permettant à chacun de trouver sa place dans la société, avec tout de même un certain libre arbitre (donc encore plus pertinent que l’excellent The Giver, même si ce dernier compensait avec une force de poésie extraordinaire et une approche totalement différente – en fait j’aurait même tendance à le trouver meilleur compte tenu de cette suite). Mais ce fameux libre arbitre que le gouvernement espérait illusoire commençait à devenir problématique avec l’apparition de divergents, au point de vouloir lancer une campagne d’extermination contre eux, de même que les Altruistes au passage, contraires aux valeurs défendues par les érudits, en quête de pouvoir.

On reprend donc l’histoire après la tentative de coup d’état de Jeanine Matthews (Kate Winslet), déjouée par Trice (Shailene Woodley) et Quatre (Theo James), devenus des fugitifs traqués par les érudits, désormais en situation de loi martiale et s’étant octroyé les pleins pouvoirs. Un climat de tension donc, rendant le rassemblant des fugitifs, des sans-factions et des sympathisants plus difficile, l’objectif étant de lever une armée pour renverser les érudits. Ces derniers, sentant la fin de leur civilisation proche, essayent d’ouvrir un artefact protocolaire prévu à cet effet, mais il nécessite la collaboration d’un divergent capable d’atteindre la perfection dans chacune des factions.

Qu’est-ce qui a fait de Divergente une si belle pépite ? Si déjà le casting était formidable avec de belles surprises (on retrouve d’ailleurs Jai Courtney, Ansel ElgortRay StevensonMiles Teller, Zoë Kravitz et Maggie Q, avec en prime l’arrivée de Naomi Watts), les deux principales qualités du film furent l’originalité de son histoire, avec une initiation absolument géniale, et la force de sa réalisation, enchaînant les panoramiques à couper le souffle et les jeux de lumières magnifiques. Ces deux derniers points sont malheureusement absents de cette suite, l’initiation étant terminée et le réalisateur du premier film ayant laissé sa place à un incapable dont la dernière bouse en date est l’hideux R.I.P.D. (bon, il a aussi fait l’excellent Hors du temps, mais ça ne fut clairement pas la réalisation qui fut responsable de son succès). Côté histoire, on aura à la place une chasse à l’homme qui fait bien pâle figure face au pénultième Harry Potter, et dont l’aspect « révolte » fait presque autant pitié que le troisième Hunger Games, avec beaucoup de blabla et très peu d’action. Rien d’aussi intense que la capture de drapeau et rien d’aussi immersif que la tyrolienne du le premier film. Quant à la réalisation, elle est passe-partout, et aucun plan ne convaincra vraiment, d’autant que, est-il nécessaire de le préciser, la 3D est encore une fois d’une inutilité absolue. Seule la seconde moitié du film nous réveille un peu, mais aucune des révélations de cette suite ne surprendra, et au final tout ce qui est dit ne sert à rien, ne faisant que nous remettre sur la vraie voie : l’ailleurs. Tout reste encore possible et le potentiel de la saga est entier, mais cette première suite s’est tout simplement trompée d’histoire, rallongeant simplement la fin du dernier en compliquant la mise à mort du système. Une première moitié inutile, une seconde poussive, pour au final mettre en image ce qu’on savait déjà. Une bien cruelle déception…

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Serena

Serena
2014
Susanne Bier

Vendu comme une épopée magnifique digne de la grande époque des Westerns, le film se voulait aussi comme les secondes retrouvailles du couple tant apprécié de Happiness Therapy, film au succès incontestable. Du solide donc, et pourtant le film n’a même pas atteint les cent mille entrées en France, eu des moyennes par copies dégueulasses dans tous les pays où il est déjà sorti, et il lui reste encore neuf jour avant sa sortie limitée aux Etats-Unis, qui n’atteindra surement jamais le seuil de l’exploitation nationale. Ambition mal placée, campagne désastreuse ou simple caprice de distributeur ?

Prenant place en plein dans la crise de 1929, le film raconte les difficultés qui pèsent sur les épaules de George Pemperton (Bradley Cooper), exploitant forestier de Caroline du Nord, devant lutter contre les problèmes économiques, la défaillance de son associé, et aussi la menace de cessation d’activité émise par le shérif (Toby Jones), soucieux de l’écologie malmenée par ce genre d’exploitation. Pour faire face, il pourra néanmoins compter sur le soutien indéfectible de sa femme, Serena (Jennifer Lawrence), prête à tout pour réussir et garantir le bonheur de son foyer.

Il est parfois bon de savoir prendre son temps. Mettant beaucoup l’accent sur les paysages sauvages de l’Amérique profonde, le film nous montre des plans magnifiques, sublimés par des jeux de lumières très travaillés, donnant un caractère fort aux décors. Cela permet de donner vie à l’histoire, au cadre enchanteur et paisible, bien que rapidement rattrapée par les événements tragiques qui s’y déroulent, reprenant une trame à la Moby Dick, où les deux héros sont chacun obsédés par une chose, lui l’argent / le Brésil et elle la seconde famille de son mari, parallèle d’autant plus flagrant avec le mystérieux pumas faisant écho à la baleine qui symbolise la peur de l’inconnu quand les choses nous échappent. Mais pour autant le film ne fait pas preuve d’une lassitude rebutante, l’histoire ne connaissant pas vraiment de temps mort. Une ambiance passionnante et formidablement retranscrite, mais le virage prit dans le dernier tiers déçoit fortement. Énigmatique et charismatique personnage, Galloway (Rhys Ifans) va participer au naufrage final, partant beaucoup trop loin dans une direction peu agréable, au point de n’avoir plus aucun sens. Un dernier virage qui gâche le tableau, perdant peu à peu la subtilité initiale. Un travail artistique remarquable et un casting efficace, mais l’histoire est vraiment trop mal négociée pour réellement convaincre.

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