Top Gun Maverick


Top Gun Maverick
2022
Joseph Kosinski

Projet mainte fois annoncé, dès 2010, mais entre des incompatibilités d’agendas, la mort du réalisateur du premier Top Gun, il aura fallu attendre 2019 pour que le projet aboutisse. Prévu en salle en juillet 2020, il fut par trois fois repoussé pour cause de covid, et mon dieu qu’ils ont bien fait ! Les analystes avaient tôt fait d’annoncer une catastrophe industrielle pour cette suite 36 ans après aux près de 170 M$ de budget et pratiquement 300 M$ frais marketing compris. Ces derniers ne le voyaient pas plus haut que 40 M$ sur son premier weekend aux Etats-Unis, et au grand maximum 300-350 M$ dans le monde, soit environs 150 M$ de pertes. Mais il faut croire que la communication fut efficace, car dès son lancement, ce fut un carton massif : 205 M$ sur le seul sol américain en première semaine, 400 M$ dans le monde, et la suite fut plus folle encore. Un bouche à oreille phénoménal, une place dans le top 5 de tous les temps aux Etats-Unis avec 718 M$, près de 7 millions d’entrées en France, soit le plus gros succès de tous les temps pour Tom Cruise, et quasiment 1,5 milliard dans le monde sans même la Chine, qui renait d’ailleurs puissamment de ces cendres en redevenant instantanément de très loin le premier pays consommateur de cinéma au monde avec près de 300 millions d’entrées enregistrées la semaine dernière (un milliard de dollars récoltés en une poignée de jour rien que pour le podium des sorties de la semaine). Non, clairement, le cinéma n’est pas mort.

Que faire quand même l’élite des pilotes de l’armée américaine, les recrues de Top Gun, se retrouvent face à une mission impossible ? Conscients que la jeunesse n’est pas encore au niveau, l’amiral Rear (Ed Harris) et le directeur du centre (Jon Hamm) vont respecter les ordres de Iceman (Val Kilmer) et faire appel à la légende, Maverick (Tom Cruise). L’objectif ? Coordonner plusieurs appareils à très très basse altitude, à haute vitesse, en zone ennemie dangereuse, le tout dans un timing très serrer pour des frappes chirurgicales pour neutraliser une base d’enrichissement d’uranium à risque d’armes nucléaires. Pire encore, ladite base se trouve dans le creux d’une montagne, nécessitant donc deux décrochages intenables et une fonte en piqué. Leur seule chance de s’en sortir sera cet entraînement, tout reposera sur Maverick.

On peut tout d’abord se rassurer sur l’écriture, car cette fois pas de simple visite guidée de la formation, il y a un vrai objectif, un enjeu de taille, et des risques allant bien au delà de simples exercices ou d’une faible confrontation à armes égales. De fait, si pendant les deux premiers tiers le film est simplement du Top Gun en mieux, avec une réalisation plus propre, de l’Imax, des acteurs plus investis et expérimentés (on notera un très bon Miles Teller prenant le flambeau de Goose), rythme plus soutenu – seul bémol, une romance avec Jennifer Connelly moins développée – l’intérêt est accru de part l’attente de cette mission finale. Jusqu’alors le film est très bon, mais rien de transcendant qui justifierait pareil engouement, et certains clin d’œil sont un peu trop tapageurs. Mais vient alors la mission. Toute la pression converge, l’angoisse resurgie. Les images sont folles car tout est réel, les décors, les appareil, tout. A une époque où l’overdose de fonds verts est absolue, voir un tel investissement matériel est admirable, et ça permet d’y être, d’y croire vraiment. Lancé à une vitesse folle dans un avion si puissant mais si fragile où le moindre impact ou choc peut être fatal. On en prend plein les yeux, et la dernière demi-heure est juste dingue. Du très très grand spectacle, mais à l’ancienne, en dur, et avec la qualité d’image et la précision dans le mouvement de la technologie moderne. Et c’est un peu le discours du film face à la menace de la disparition de pilotes au profit de drones : les machines ont des limites fixées, pas l’homme, bien plus enclin à se mettre en danger. Un art de faire qu’on ne peut que louer, et qui mérite effectivement des conditions sonores optimales et le plus grand écran possible.

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Top Gun


Top Gun
1986
Tony Scott

Alors que la suite a tout cassé 36 ans après plus tard dans des propensions ahurissantes, pour pouvoir aborder le phénomène Maverick, il fallait bien se replonger dans ce film d’action culte des années 80. Bien qu’il ne s’agisse pas du premier rôle principal de Tom Cruise, ce film a assurément propulsé sa carrière : avec « seulement » 15 M$ de budget – ce qui était déjà pas mal – le film avait récolté 357 M$, soit environs 860 M$ actuels en prenant en compte l’inflation.

Pete Mitchell, dit Maverick (Tom Cruise) a toujours eu un rêve dans sa vie : suivre les traces de son père et devenir pilote d’avion de chasse dans l’élite de l’armée américaine, Top Gun. Après une manœuvre remarquée en mission, avec son navigateur et meilleur ami Goose, ils intégreront cette prestigieuse école de formation Top Gun.

En vrai, il n’y a vraiment pas grand chose à dire du film. Le scénario est très limité, on alterne entre phases de séduction avec la formatrice (Kelly McGillis), des missions d’entraînement en avion, et des boutades sous la douche avec Iceman (Val Kilmer). Oui, l’amourette est mignonne, l’humour un peu lourdingue marche à peu près, et les scènes d’aviation ont très bien vieillies car réalisées en vol avec de vrais appareils. On a la scène de chant dans le bar, la partie sur la plage, des séquences iconisées depuis, mais si les séquences d’action étaient grandioses pour l’époque, ça n’est pas autant le cas aujourd’hui, et le reste est léger. Tout le film ne sera qu’une longue formation avec quelques péripéties, mais il n’y a pas de réelle intrigue globale, outre celle de suivre une école de formation. On parle un peu de la guerre au Vietnam, il y aura une confrontation à ce niveau-là, mais rien d’envergure, pas d’enjeux autre que montrer tout du long que Maverick est le meilleur. S’il n’y avait pas Tom Cruise, je ne suis pas sûr qu’on parlerait encore de ce film aujourd’hui, mais je reste curieux de voir ce que la suite va donner et si son colossal succès est de près ou de loin justifié.

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Là où chantent les écrevisses


Là où chantent les écrevisses
2022
Olivia Newman

Passé complètement inaperçu en France avec son titre loufoque, certes hérité du roman de Delia Owens dont le titre original est une fidèle traduction (Were the Crawdads sing), il s’agit pourtant d’un des plus grands succès de cinéma indépendant de l’année avec 140 M$ dans le monde, dont un gigantesque 90 M$ rien qu’aux Etats-Unis. Un succès dû à un maintient phénoménal, et effectivement, on ne peut que s’incliner.

On suivra l’histoire de Kya (Daisy Edgar-Jones), jeune femme de 25 ans accusée de meurtre, quand son seul crime est d’être différente. Née dans une famille très modeste dans des marais, de par son père alcoolique et violent, sa mère, ses sœurs et son frère partirent les uns après les autres. Trop jeune et terrifiée, elle restera seule avec son père, jusqu’à ce qu’il disparaisse à son tour. Une petite fille, grandissant seule dans la nature, devant se débrouiller elle-même pour survivre.

J’avoue que le début m’a moi-même terrifié, et je n’étais pas sûr d’avoir envie de voir ce genre de film. Un meurtre / accident ? Puis on découvre une pauvre jeune fille à la vie terrible, douloureusement marquée par un passé solitaire et difficile. Quand vient des prémices amoureux, ni une ni deux, traumatisé par les Jane Eyre et autres adaptations de J. Austen dont l’écrasante majorité sont d’une tristesse sans nom aux fins à se couper les veines, j’imagine l’accident bête, la querelle, un élément perturbateur, et pour finir un couple séparé à jamais. Qu’importe les avis des autres, pour ma part une histoire qui se fini mal pour les protagonistes, dont la conclusion est un échec irrémédiable, c’est un récit dénué d’intérêt. Le cinéma, la littérature, tout doit avoir du sens, un but. Le nihilisme m’ennuie au plus haut point. Mais je digresse, car rassurons-nous, cette épée de Damoclès ne s’abattra pas sur nous cette fois.

Reprenant beaucoup de Forrest Gump, le film nous narre l’histoire d’une personne différente, à la vie pas toujours reluisante mais avec ses bons moments. Rejetée par certains, d’autres entreront dans sa vie, voyant au delà de la sauvageonne pour découvrir une amoureuse de la nature, intelligente et passionnée. L’actrice est formidablement bien choisie, incarnant parfaitement à la fois l’animal du marais et cette douce femme s’éveillant à la vie, rustre, atypique, mais incroyablement charmante. On s’attache, on s’inquiète de ce qu’il pourrait advenir d’elle, de son mode de vie. Une odyssée douce et amer, possédant la richesse d’une vie peu commune, nous faisant voyager aussi bien spirituellement qu’émotionnellement. La réalisation est magnifique, l’écriture soignée, réussissant à nous surprendre jusqu’à la toute fin. Si je devais avoir un reproche, hormis le procès où l’on aurait aimé un traitement plus approfondi, serait un certain choix sur une partie de la fin. Sans trop en dévoiler, on aurait aimé quelques fruits à rajouter au tableau pour un plus grand sentiment d’accomplissement. Un beau film sur l’art de vivre, et si la recette du bonheur dépend de chacun, tant qu’on trouve la réponse à notre présence ici bas, c’est la seule chose qui compte.

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Novembre


Novembre
2022
Cédric Jimenez

Si le Covid a eu tôt fait de s’accaparer l’attention, de même que la guerre en Ukraine, qui pourrait basculer d’un instant à l’autre en Guerre Mondiale, on en oublierait presque le terrorisme. Malgré des films comme My Name is Khan, montrant que non, l’islam n’est pas un problème et que les musulmans sont logiquement des personnes pacifiques, l’amalgame a tôt fait de ressortir, et pour beaucoup la peur est profondément ancrée. D’ailleurs non, la situation n’est pas moins tendue ou dangereuse : on a eu en 2022 le meurtre revendiqué islamiste d’Yvan Colonna, et en octobre 2020 un professeur avait été décapité en France pour citation d’une caricature de Charlie Hebdo – certes offensante pour les musulmans –  dans le cadre d’un cours sur la liberté d’expression, visiblement passible de mort dans notre pays. Guerre civile ? Guerre religieuse ? Guerre mondiale à grand coup de bombes atomiques comme le supplient les Etats-Unis et ses vassaux ? Une chose est sûre, notre monde est mourant, et la fin est imminente.

Point pour beaucoup culminant de la guerre religieuse qui fait rage depuis des décennies, le film revient sur les terribles attentats du 13 novembre 2015, qui avec seulement une poignée d’individus, ont fait 137 morts, un demi millier de blessés, des milliers de vies brisées. Cette nuit là, le copain musulman pratiquant de ma collègue de travail de l’époque, ne buvant pas d’alcool comme de nombreuses autres personnes dans un bar, prit une balle par ses propres frères religieux, et mon ami Hugo, alors que la musique n’est pas clairement identifiée comme haram, fut abattu pour avoir assisté à un concert. Le monde brûle, et avant même de songer au deuil, le peuple réclame des réponses. Le film nous place ainsi au sein de l’antiterrorisme, qui traquera cinq jours durant les tireurs et leurs complices.

Après son brutal et saisissant Bac Nord, Cédric Jimenez revient à la charge avec un thème qui semble lui tenir à cœur : l’incompétence ahurissante du gouvernement, et une absence affolante de moyens pour réellement lutter contre la menace. Oui, on laissé faire Charlie Hebdo. Oui, la fusillade du Bataclan aurait pu et aurait dû être évitée. Tous les djihadistes impliqués étaient non seulement bien connus des forces de police, mais avaient au moins séjourné une fois en prison, avaient le fameux label « fiché S », avaient brisé leur conditionnelle, et on savait certains en possession d’une quantité importante d’armes à feu. MAIS BORDEL VOUS FOUTEZ QUOI !!!??? A quel moment peut-on non seulement relâcher de tels individus, les laisser en liberté sans surveillance, mais surtout comment peut-on ne pas saisir immédiatement leur stock d’armes et les refoutre fissa au trou ? Alors oui, c’est pour attraper du plus gros gibier, ouin ouin ouin. Mais ta gueule enculé ! Qu’on arrête de chercher le fameux gros gibier, tous interchangeables et remplaçables, qu’on stoppe net tout délinquant présentant un réel danger, qu’on donne un vrai budget pour gérer tout ça, et qu’on arrête de les relâcher avec une tape sur l’épaule ! Des imams ont félicité le meurtre de l’enseignant, des centaines de gens sur les réseaux sociaux ont apporté leur soutien à un tel geste ! Et que fait-on ? Rien. Pitoyable France…

Bon, tâchons d’en revenir un minimum au film. S’il était évidemment impensable de reconstituer les attentats, le film aurait pu s’allouer plus de temps, ne faisant que 1h40, pour permettre un peu plus de mise en contexte, avec notamment les attentats de Charlie Hebdo et de l’Hyper Cacher, quitte à accélérer sur l’enquête, qui traîne un peu par moments. De même, si le côté course contre la montre pour obtenir des réponses et calmer les esprit donne un très bon rythme au film, ne pas montrer le drame humain, l’angoisse ambiante, est presque une faute de goût tant la gravité de la situation était historique et méritait un hommage plus émotionnel. L’histoire nous tiraille aussi sans cesse entre la force de travail, le dévouement des personnes impliquées, et une incompétence criminelle montrant à quel point notre nation est fragile à un point ridicule. Une tension de chaque instant, un casting plutôt bon (Jean Dujardin, Anaïs Demoustier, Jérémie Renier, Cédric Kahn, Sami Outalbali et Sandrine Kiberlain), un sujet important, mais le traitement manque d’émotion, et en termes d’efficacité pure, Bac Nord était plus abouti. Un très bon travail, mais pas forcément à la hauteur de cette sombre période.

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Super-héros malgré lui


Super-héros malgré lui
2022
Philippe Lacheau

La bande à fifi, de retour. Pratiquement deux millions d’entrées au compteur quand un peu plus d’un an avant, amputée par six mois de cinémas fermés au bout de dix jours d’exploitation, 30 jours max (qu’il faudra que je rattrape un jour) faisait près de 1,4 millions d’entrées. Le genre de succès qui rassure après une période difficile, montrant qu’au delà des blockbusters américains, le cinéma français peut aussi rassembler.

Pitch aussi débile que le film dans son ensemble, mais plus c’est con plus c’est bon parfois, le film part du postulat que Cédric (Philippe Lacheau), suite à un accident de voiture, va se retrouver amnésique. Acteur ayant enfin décroché un rôle d’envergure dans un film de super-héros français, Badman, il avait quitté précipitamment le tournage pour se rendre aux chevets de son père (Jean-Hugues Anglade), au volant de la voiture de tournage, et dans le costume de son personnage. A son réveil, amnésique, il sera persuadé d’être un justicier de l’ombre.

On ne va pas se mentir, outre l’amnésie bien pratique, tout le scénario dans son ensemble est d’une bêtise sans nom. Le coup de l’aigle, les « comme par hasard » ou le coup des médicaments, rien ne va, rien n’a de sens. Et pourtant, le film m’a convaincu d’emblée. Les blagues sur la mère et le pote devenu beau-père, le générique et la musique plagiant Marvel, allant même jusqu’à réutiliser la musique redevenue culte avec l’introduction des Gardiens de la Galaxie, le prêtre déçu de ne pas avoir eu la taille enfant pour la poupée gonflable, même le running gag sur les mico pénis avec le passage avec les asiatiques. Tout l’humour du film est un concentré d’humour noir, absurde, racoleur. Mais mon dieu que ça fonctionne ! J’ai rarement autant ri devant une comédie. Elodie Fontan est un peu en retrait, mais Alice Dufour est charmante, Julien Arruti est impayable et Tarek Boudali est génial avec le couple qu’il forme avec Valeria Cavalli. Débile, mais drôle, et pas juste un ou deux sourires, mais de francs rires tout du long. Un scénario presque raté, mais c’est drôle et on passe un très bon moment.

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Mort sur le Nil


Mort sur le Nil
2022
Kenneth Branagh

Après le très bon succès critique et commercial du Crime de l’Orient-Express, récoltant plus de 351 M$ pour un budget de 55 M$, Kenneth Branagh nous revient avec une seconde adaptation d’Agatha Christie, teasé dès la fin du précédent opus, et qui devait initialement sortir fin 2020. Covid oblige, le film a été par deux fois reporté, sortant finalement en février, mois souvent très creux, trainant derrière lui pas moins de deux scandales : un premier, assez léger et un peu oublié depuis, celui de Letitia Wright pas très covid-friendly, mais surtout celui entourant Armie Hammer. L’acteur a ni plus ni moins qu’était visé par des accusations de viol, violences, séquestration et cannibalisme. Suite à cela, son agence l’a lâché, des projets furent annulés, des reshoots furent fait sur certains autres pour l’effacer, et aujourd’hui il travaillerait dans un hôtel. L’avoir en tête d’affiche n’était donc pas très vendeur…

Au détour d’une promenade en Egypte, Hercule Poirot (Kenneth Branagh) va tomber sur son bon ami Bouc, et ce dernier va assister au mariage de la grande héritière Linnet (Gal Gadot) et son bel amant Simon (Armie Hammer). Ces derniers se sentent d’ailleurs menacés par la présence de Jacqueline (Emma Mackey), l’ex fiancée de Simon, n’ayant pas bien digéré d’avoir été plaquée au profit de sa meilleure amie fortunée. Il vont alors fuir avec leurs convives (incluant Rose Leslie, Annette Bening et Russell Brand) sur un bateau, mais cela suffira-t-il ?

Un budget s’envolant à 90 M$ du fait des décors, mais des recettes s’effondrant à tout juste 130 M$ (soit 50 M$ de rentrées réelles, pour un budget post marketing de près de 150 M$, soit une perte sèche de 100 M$ à peu près). Un cuisant échec que j’avais eu tôt fait de reprocher à la conjoncture, au scandale. Mais il faut voir la réalité en face, malgré un casting toujours aussi impressionnant sur le papier, un personnage mythique, des décors magnifiques et une histoire pleine de rebondissements, le résultat est clairement en deçà de la première enquête. Les deux acteurs polémiques sont probablement ceux qui jouent le plus mal, et même Poirot semble moins investi, en petite forme. Son enquête avait du potentiel, mais il fait trop d’erreurs en chemin, paresse, et si la conclusion est convaincante, l’histoire est clairement moins bonne. N’étant pas un grand connaisseur des livres d’Agatha Christie, je ne saurais dire si l’écart d’intérêt est le même comparativement, mais j’ai l’impression que commencer par Le Crime de l’Orient-Express était une erreur s’il s’agit à ce point de l’œuvre phare de l’autrice et que tout le reste est au mieux sympathique en comparaison, mais jamais au niveau. Etonnamment malgré le naufrage financier, il semblerait qu’un troisième volet sorte en septembre 2023, actuellement en cours de tournage, et cela répondra probablement à cette question.

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Glass Onion : une histoire à couteaux tirés


Glass Onion : une histoire à couteaux tirés
2022
Rian Johnson

Qui dit film d’enquête dit généralement film policier, mais rarement détective. Hérité des Agatha Christie et autres Hercules Poirot, le principe du mystère à résoudre est assez rare de nos jours, et c’est pourtant là une belle occasion de briller avec un scénario retord et intelligent, laissant planer le doute jusqu’à la révélation qui vous retourne le cerveau et vous fait dire qu’il ne pouvait en être autrement. Succès surprise de 2019, A couteaux tirés avait su séduire le public, tapant dans l’œil de Netflix, qui craqua complètement en proposant de racheter la franchise pour 400 M$, soit plus que les recettes totales du premier (312 M$). Le concept est assez classique et pour ma part le premier film était assez foutraque, donc la hype d’en faire une saga me laissait perplexe.

Quand la fiction devient réalité, ou presque. Excentrique milliardaire et inventeur de renom, Miles Bron (Edward Norton) va convier ses amis (incluant Kathryn Hahn, Kate Hudson, Dave Bautista et Jessica Henwick) pour un week-end dans on île paradisiaque. Le thème ? Sa mort, fictive bien sûr, et sur laquelle il faudra enquêter. Étonnamment convié également, Benoit Blanc (Daniel Craig), le détective mondialement connu, sera aussi de la partie.

Autant le premier m’avait moyennement convaincu à cause de sous-intrigues inutiles, fausses pistes vides et personnages bouche-trou, tout en palliant quelques défauts par une fin efficace, c’est ici exactement le contraire. Le début fonctionne très bien en construisant son mystère, posant ses pions de ça et là, puis une fois un nouvel axe de lecture révélé, la construction s’explique de belle manière. Le scénario est assez grisant et maîtrisé pendant les trois premiers quarts, puis c’est le drame. Sans parler de révolution ou de chef d’œuvre, l’enquête dans son ensemble est solide, le casting très bon (on passera néanmoins sur quelques caméos trop importants en terme de notoriété pour ne pas les justifier), le décor hightech caliente dépaysant. J’y croyais fort. Puis l’air de rien, tout part en vrille, on envoie valdinguer la logique et la formidable construction établie. Du grand n’importe quoi fatiguant, laissant de fait un goût de sabordage à la toute fin. Le potentiel est là, le film a quelques fulgurances et on est pas passé loin d’une franche réussite, mais il faudra se contenter d’une belle enquête bien ficelée, mais mal négociée dans son dernier virage.

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Downton Abbey II : Une nouvelle ère


Downton Abbey II : Une nouvelle ère
2022
Simon Curtis

Mythique série sur la noblesse britannique du début du XX° siècle, Downton Abbey restera à jamais l’une des meilleures séries de tous les temps grâce à une qualité d’écriture sans pareil, des personnages si attachants, et des histoires pour la plupart passionnantes. Le rythme un peu trop trépidant et les rebondissements un peu trop systémiques, l’attrait baissait néanmoins au fil des saisons. La conclusion de la série était dans l’ensemble satisfaisante, mais un film, sobrement appelé Downton Abbey, prolongea l’aventure en 2019 d’une très belle manière, arrivant à retrouver l’efficacité des grandes heures de la série en offrant une histoire captivante, mêlée de sous-intrigues très réussies, voir exceptionnelle comme celle de Barrow. Un bijou d’écriture, d’humour et d’émotion. Les fans furent en extase, et à la surprise générale, le film fut un immense succès avec des recettes dix fois supérieures au budget, frôlant les 200 M$ dans le monde. C’est donc ainsi qu’en toutes logiques une suite fut immédiatement mise en chantier.

Ce second film racontera en parallèle deux péripéties. Tout d’abord un mystérieux conte de Montmirail serait décédé, léguant à la comtesse douairière (Maggie Smith) une somptueuse villa dans le Sud de la France, s’attirant de fait les foudres de sa veuve (Nathalie Baye), mais son fils (Jonathan Zaccaï), souhaitant respecter la mémoire de son père, va inviter monsieur Crawley (Hugh Bonneville) et sa femme (Elizabeth McGovern) pour effectuer le transfert de propriété. De son côté, désormais gérante du domaine, Mary (Michelle Dockery) va accepter que Downton devienne le lieu de tournage d’un film pour renflouer les caisses, toujours précaires dans un monde en constante évolution.

A l’exception du mari de Mary, vagabondant apparemment à ses courses automobiles (lui qui avait promis de ne plus y toucher, ayant frôlé la mort, ayant perdu son meilleur ami de la sorte, et Mary avait été une première fois veuve de la faute à l’automobile), tout le reste du casting est bien présent. Tom (Allen Leech) profite de la vie avec sa femme, Edith (Laura Carmichael) se lasse de sa vie de duchesse aux côtés de son mari (Harry Hadden-Paton) et veut reprendre les rennes de son journal, Isabelle (Penelope Wilton), Lord Merton (Douglas Reith) et Maud (Imelda Staunton), cousine de Robert, sont toujours là, Elsie Hughes (Phyllis Logan) est toujours intendante et Carson (Jim Carter) assiste toujours la gestion de Downton, semble t-il pas vraiment atteint par la maladie finalement, Bates (Brendan Coyle) et Anna (Joanne Froggatt) sont là (aucune intrigue les concernant), Daisy (Sophie McShera) et Andy (Michael Fox) sont mariés et vivent dans la ferme du père de feu son premier mari, qu’elle essaye toujours de caser avec madame Patmore (Lesley Nicol), et Baxter (Raquel Cassidy) attend toujours que Molesley (Kevin Doyle) daigne lui faire la cours. Thomas Barrow (Rob James-Collier) de son côté n’aura finalement pas le droit au bonheur avec le valet du précédent film, ce dernier fuyant ce qu’il est en se mariant. On suivra aussi Bauer (Hugh Dancy), le réalisateur du film muet se tournant à Downton, tombant – comme pratiquement tout homme ayant posé le pied au domaine – sous le charme de Mary. Le film se focalisera aussi beaucoup sur les deux acteurs phares du film : Guy (Dominic West) et Dalgleish (Laura Haddock), eux aussi des reliquats du passé d’un cinéma muet basculant dans un monde du parlé où les dialogues ne sont plus mimés, mais vécus. Oh oui, cela en fait du monde à suivre, et autant dire que plus que jamais, le film ne s’adresse qu’aux fans de la série.

N’ayant pas eu la chance de le voir à sa sortie, j’avais espéré que son échec (des recettes divisées par deux pour un budget trois fois plus important) été dû à une mauvaise conjoncture, coincé entre une pléthore de blockbusters monopolisant l’attention. Mais si on a grand plaisir à retrouver tous nos personnages adorés, ce nouveau film n’a ni l’envergure ni la force du précédent long-métrage. La série a toujours été une lutte pour préserver un style de vie, de valeurs, dans un monde toujours plus exubérant et dangereux. Si l’intrigue concernant le film muet se tournant à Downton est très juste, regorgeant de bonnes idées, de moments forts et touchants, toute la partie en France est pour sa part vide, ne servant à rien ou presque. Oui, cela permet d’alterner les décors, de proposer quelque chose de visuellement nouveau, de dispatcher le casting pour éviter l’asphyxie, mais l’impact est inexistant, et on aurait aimé un chant du signe avec plus de panache. Comme très souvent face à l’évolution du monde, la neurasthénie est palpable, mais jusqu’alors la saga nous en avait préservé, donc c’est là aussi une certaine déception. Le premier film avait été tellement exceptionnel sur tous les points que l’égaler aurait été prodigieux, donc les attentes étaient pratiquement inatteignables. L’incursion hollywoodienne est grandiose, dommage que le reste ne soit pas du même niveau.

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Ticket To Paradise


Ticket To Paradise
2022
Ol Parker

Non, nous ne sommes pas encore sorti du Covid. Si quelques films cartonnent de temps à autre, il n’y a guère que les très gros blockbusters qui fonctionnent vraiment. Si les drames et les films d’animation sont ceux qui ont le plus souffert, du fait qu’une population de plus en plus âgée se soit mit aux services de streaming et home cinéma et que l’inflation fait que se faire un resto et un ciné parents et enfants est un luxe de plus en plus rare, les comédies ont un peu moins souffert, mais les flamboyants succès se comptent sur les doigts d’une main. Seul film du genre à avoir approché la sacro-sainte barre des fois trois (un studio ne recevant que 50% à domicile et 25-33% en dehors, il faut que grosso modo le ratio recettes / budget soit de trois pour que la seule sortie ciné génère des bénéfices), il est aussi la seule comédie romantique à avoir dépassé la barre des 100 M$ dans le monde (172) depuis trois ans, c’est dire à quel point le genre disparaît et n’attire plus les foules.

Toutes les histoires ne se terminent pas forcément bien. Ce fut le cas pour David (George Clooney) et Georgia (Julia Roberts), mariés il y a 25 ans, mais qui n’ont pas su préserver la flamme de leur couple. De leur union naquis Lily (Kaitlyn Dever), fraîchement diplômée d’une école d’avocat, qui fêta la fin de ses études en allant passer l’été à Bali dans les Philippines. Seulement pas de retour à la fin de l’été : ayant rencontré un beau jeune homme sur place, elle veut laisser tomber son brillant avenir pour simplement vivre son idylle et se marier. Pour ses parents, ce n’est que folie, et alors qu’ils ne peuvent plus se supporter, ils vont décider de faire fi de leur aversion pour remettre leur fille sur le droit chemin, ou chemin du droit, c’est selon.

L’âge d’or de la comédie romantique fut les années 90 et début 2000 où le genre représentait environ 7% des entrées, voir plus de 11% en 1999. Ce genre de film était classique, trop même. Depuis 2012, le public s’est peu à peu lassé, ou alors c’est l’offre qui a perdu en qualité. Toujours est-il que si le total de films sortis a plafonné vers les 700, le nombre de comédies-romantiques est passé d’une moyenne de 30 à 15, puis tout juste 28 en trois ans, pour une moyenne désormais d’à peine 1% des recettes. Et effectivement, ce film est aussi symptomatique d’un genre qui peine à se renouveler malgré à la fois le cadre enchanteur des îles, mais on a déjà notamment Amour et amnésie en décors similaire, et le duo d’affiche, toujours aussi bon. Un bel emballage pour un film cousu de fils blancs, qu’on semble déjà avoir vu avant même de le voir. Tout est attendu, prévisible, et c’est le piège indépassable. Ne pas faire la fin attendue serait une trahison, tous les films qui s’y sont essayé s’y sont cassé les dents, ou n’étaient pas des comédies, mais de l’autre côté être trop prévisible est lassant. Et quand bien même, le film part avec un postulat sali : même s’ils se remettent ensemble, ils ont déjà divorcé, le lien sacré fut brisé, rendant la fin heureuse incertaine et faisant de toutes les années passées un immense gâchis. Oui, le film est drôle, les paysages magnifiques, le duo quinquagénaire attendrissant, mais pas l’ombre d’une idée originale, et on a vu tellement mieux dans le genre.

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Les Animaux Fantastiques : les Secrets de Dumbledore

Les Animaux Fantastiques : les Secrets de Dumbledore
2022
David Yates

Films pour enfants pour les deux premiers, saga d’ados pour les opus 3 à 5, la franchise Harry Potter a su évoluer avec son public, devenant plus sombre, plus mature, plus grandiose, aboutissant sur des chef d’œuvre pour les opus 6 à 8, de loin mes préférés. Mise à part le 3, moins populaire, presque tous ont dépassé la barre des 900 M$ au box-office pour un total de 7,7 milliards, sans compter les ventes physiques (plus de 2 milliards rien qu’aux Etats-Unis) et surtout les produits dérivés. Une des plus grosse franchise de l’histoire que seul le MCU bat à l’heure actuelle, c’est dire à quel point il était absolument hors de question pour la Warner de laisser dormir une telle machine à billets. C’est ainsi que le studio laissa carte blanche à l’autrice J.K. Rowling pour inventer une nouvelle franchise basé sur cet univers.

Après un premier opus très prometteur, Les Animaux Fantastiques trébucha dès sa deuxième itération. Apprécié des fans, le premier récolta plus de 800 M$, un score honorable, mais la suite, Les Crimes de Grindelwald, peina à convaincre. Mettant certes en scène un méchant charismatique (mon avis sur ce second volet s’est d’ailleurs adouci, de par la comparaison avec ce troisième opus), le film souffrait d’un rythme trop mou, d’un manque voir d’une absence d’enjeux, de sous-intrigues éreintantes et inutiles, de fan service vide et d’une écriture globalement mauvaise. Avec en plus les déboires de son antagoniste principal, aucune étoile n’était alignée. La chute fut violente, terminant sa course à 648 M$, à la limite de la rentabilité. Entre une sortie repoussée par deux fois pour deux ans de retard, l’antagoniste remplacé de façon injuste avec un procès lui donnant raison à peu près au moment de la sortie, des rumeurs de reshoot pour offrir une fin à la saga et arrêter les frais dès ce troisième film alors que cinq étaient initialement prévus, tout laissait présager un désastre. Et avec une chute encore plus spectaculaire pour tout juste 404 M$ dans le monde, ça n’a pas loupé, et c’est amplement mérité.

L’histoire tient sur un timbre post : Grindelwald (Mads Mikkelsen) veut se faire élire président du monde des sorciers, comptant sur Croyance (Ezra Miller) et Queenie (Alison Sudol) pour l’aider, tandis que Albus Dumbledore (Jude Law) va faire appel à Norbert Dragonneau (Eddie Redmayne), son frère et Jacob (Dan Fogler) pour essayer de l’en empêcher.

Tous les problèmes du second, en pire. Ce troisième volet, certes avec un casting prestigieux et de belles images bien mises en scène, s’éparpille encore plus pour encore moins d’impact dans la grande histoire. On va partout, il y a une pléthore de protagonistes pour bien nous perdre comme il faut, et la subtilité se fait encore plus la malle. Pour ceux qui en doutaient encore, Grindelwald est ni plus ni moins que le pendant sorcier de Hitler. Tout dans les décors, la posture, la façon de procéder et l’objectif final faussement dissimulé, tout fait écho à l’histoire du chancelier allemand. C’est d’un grossier et d’un grotesque… Plus encore, le film s’appelle « Les Secrets de Dumbledore », alors même que tous les « secrets » étaient déjà bien connus et peu passionnants. Oh mon dieu, il aime les hommes ! Il faudrait que le film soit sorti il y a au minimum 50 ans pour que cela soit un tant soit peu pertinent. Tout est long, l’histoire de Croyance est usante, Tina (Katherine Waterston) fait à peine un caméo, alors même que sa romance avec Norbert était le fil conducteur des deux premiers longs-métrages. Et bien sûr, toute cette histoire ne va nulle part, rien n’a d’impact, pire que pour le précédent. La fin potentielle de la saga avec ce film n’était qu’un mensonge destiné à faire venir une dernière fois le public en salle, car en vérité aucune intrigue n’est de près de loin achevée. Face à l’échec commercial et la politique de liquidation à la limite de la mise en faillite de la Warner, on ne s’étonnera pas que dans la boucherie actuelle, la saga est définitivement enterrée. Si les prémices étaient bons, on sentait que ça n’allait nulle part, donc je ne m’attristerais pas de cette mort prématurée.

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