The Dressmaker

The Dressmaker
2015
Jocelyn Moorhouse

Énorme succès en Australie où le film a battu le record de nominations aux Oscars locaux, en plus d’y avoir dépassé les 14 M$ sur le seul territoire, ce film a pourtant eu du mal à trouver sa place dans le reste du monde. Encore frais sur le marché du cinéma, Amazone a semble t-il peiné à exporter son film puisqu’en dehors du pays des kangourous le film n’a rapporté que 9 M$ et n’est  par exemple même pas sorti en France. C’est avec près de deux ans de retard que Netflix vient de rendre le film disponible chez nous, Amazone tardant il est vrai à mettre en place son service de vidéo à la demande.

Après 25 ans d’absence, Myrtle Dunnage (Kate Winslet) va revenir dans son village natal australien du milieu du XX° siècle, n’arrivant toujours pas à refermer ce chapitre de sa vie après tant d’années. Alors qu’elle n’était encore qu’une enfant, elle aurait apparemment tué un de ses camarades, et pour calmer le jeu le shérif du village (Hugo Weaving) fut chargé de l’en éloigner, la bannissant en Europe. Considérée comme le mouton noir local, son retour va raviver la noirceur des habitants, mais elle va ramener dans son sac un petit tour pour les amadouer : durant son exil, elle a apprit l’art de la couture.

À mi-chemin entre le drame social et un western sous tension, le film nous immerge dans une ville quasi fantôme où les secrets et les rancœurs ont conduit ses habitants à se terrer dans leur coin. Gigantesque coup de pied dans la fourmilière, l’arrivée de Myrtle est donc jouissive puisque sa posture de femme forte et indépendante à la pointe de la mode dénote complètement avec le cadre austère de ce trou paumé d’Australie et l’époque (1950). On suit donc avec attention les réactions de chacun, les tentatives de riposte et les changements qui vont immédiatement se faire ressentir. Le film est un poil long mais l’histoire est pleine de rebondissements palpitants, les pistes de réflexion sont nombreuses et les acteurs sont excellents. Le vrai problème vient du casting malgré les performances irréprochables. Si les enfants devenus grands sont censés avoir aux alentours de 35 ans et que les acteurs de ladite génération n’ont que maximum huit ans d’écart avec cet age, quand tous tournent plutôt en dessous des 30 à l’image de Liam Hemsworth et Sarah Snook et que seule l’héroïne les dépasse, atteignant même la barre des 40, la différence devient flagrante et nous sort complètement du film. Reste qu’une femme accomplie de la haute société en avance sur son temps qui revient dans son bled natal pour faire face à ses fantômes du passé est un concept assez fort et le film joui d’une photographie magnifique, de décors intéressants et de costumes splendides.

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Star Wars – Les Derniers Jedi

Star Wars – Les Derniers Jedi
2017
Rian Johnson

Il n’y a rien de plus chiant qu’un fan hardcore à qui on ne peut rien dire et avec qui il ne faut rien toucher. Nombreux furent ceux à avoir pesté contre Le Réveil de la force sous prétexte qu’il reprenait trait pour trait le cheminement narratif de l’épisode IV, se concentrant sur les similitudes plus que sur les différences. Et pourtant, quoi de plus naturel que de reprendre les bases d’une saga mythique pour lui rendre hommage ? D’autant que ça n’était pas un simple artifice puisque le but était de montrer que l’histoire est amenée à se répéter et que toute âme tourmentée est susceptible de basculer du côté obscur, surtout quand le sujet est tabou et le problème éludé. Si bien sûr le premier épisode de cette nouvelle trilogie n’était pas dénué de défauts, les bases s’annonçaient prometteuses et les nouveaux arrivants étaient pour la plupart très charismatiques. Les attentes étaient naturellement monstrueuses pour cette suite au troisième plus succès de tous les temps et (premier hors inflation sur le marché américain) et encore une fois les fans pestent plus que jamais alors même que le film innove bien plus que son prédécesseur.

Reproduisant toujours un peu le modèle de la première trilogie, cette fois ce n’est donc pas l’Empire qui contre-attaque mais donc son successeur, le Premier Ordre. Suite à la destruction de son Etoile de la mort 2.0, le leader suprême Snoke a donc envoyé ses deux vassaux, le général Hux (Domhnall Gleeson) et Kylo Ren (Adam Driver), pour détruire une bonne fois pour toute la résistance, menée par Leia Organa (Carrie Fisher) (et comptant dans ses rangs Poe (Oscar Isaac), Finn (John Boyega) et Amilyn (Laura Dern)). De son côté, Rey (Daisy Ridley) est partie quémander de l’aide auprès de Luke Skywalker (Mark Hamill), terré sur île déserte d’une planète isolée suite à l’échec de la formation de son apprenti Jedi, Kylo.

Le film reprend donc directement là où s’arrêtait l’histoire, enchaînant presque à vitesse réelle puisque cette suite se déroule sur seulement deux-trois jours. Structurée autour d’une immense course-poursuite entre la flotte du Premier Ordre et celle de la Résistance, la narration s’axe surtout sur les histoires parallèles de ceux qui tentent d’influer sur l’aboutissement de cette course. Il y en a plus exactement trois, hormis les « méchants » : l’initiation de Rey aux arts Jedi, se heurtant à un Luke totalement désabusé ; Poe qui tente pallier à l’inefficacité de la direction ; ou encore Finn et Rose (une nouvelle très intéressante) qui vont essayer de recruter un pirate informatique  (Benicio Del Toro). Ces derniers vont d’ailleurs nous offrir un haut lieu créatif puisque la planète visitée consiste en un immense terrain de jeux pour les personnes les plus riches de la galaxie, concentrant ainsi tous les pires abus et dérives de l’univers, l’occasion de croiser l’une des deux nouvelles espèces animales très réussies. On retrouve enfin un peu du plaisir de la découverte, de l’aventure. On aura même droit à une planète légèrement originale avec celle dont le sel de surface recouvre des minéraux rouges, l’occasion de découvrir des entrailles magnifiques. Mais ce qu’il y a de plus intéressant dans toutes ces petites histoire c’est leurs développements. Loin de se reposer autant sur ses lauriers que son prédécesseur, le réalisateur ose enfin nous surprendre, jouant sur nos attentes pour mieux partir dans une direction inattendue. L’important n’est plus d’atteindre ses objectifs mais de tout faire pour y arriver, arrêtant enfin de nous servir sur un plateau des victoires faciles et prévisibles. Plus encore, le film est aussi une histoire indépendante qui se suffit à elle-même, dépassant son statut de simple épisode de transition pour nous offrir une histoire complète possédant une vraie fin. Mieux encore, l’humour prend une toute autre dimension en nous offrant de vrais bons moments drôles et fins comme les deux trolls avec la force et la brindille et le coup de l’interphone. Point de gratuité ou de racolage, le comique se fondant de surcroît parfaitement dans le paysage. Toujours aussi plaisant visuellement , le film est donc bien plus abouti d’un point vu scénaristique et artistique, s’imposant tout simplement comme le meilleur épisode de la saga. Eh oui.

Disponible aussi en vidéo complémentaire : https://www.youtube.com/watch?v=2nDaa5HQu60&t=25s

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Christmas Inheritance

Christmas Inheritance
2017
Ernie Barbarash

Histoire d’avoir sans doute le catalogue le plus complet possible et imaginable, Netflix vient d’y ajouter dans la semaine ce petit film de Noël bien dans l’esprit des fêtes, même si en réalité il n’est pas le premier du genre à être disponible sur la plateforme de vidéo à la demande. Comme la vie elle-même semble de moins en moins magique en fonction des générations et de son propre age, le cinéma a pour vocation de pallier à ce manque et nous plonger dans une fête qu’on ne voit plus que comme une dérive capitaliste. Reste à déterminer si le film peut prétendre à plus que du divertissement de saison où s’il a vocation à en devenir un emblème.

Fille d’un riche président de société de donation de jouets, Ellen (Eliza Taylor) est vouée à devenir à son tour présidente du groupe, mais elle est encore loin d’avoir la stature ou la mentalité pour prendre la relève. Faisant une fois de plus la une des magazines people suite à une de ces frasques alcoolisées, la sanction va tomber : son père va l’envoyer là où tout a commencé pour respecter une ancienne tradition de correspondance avec le co-fondateur du groupe. Loin du faste et de l’agitation de New-York, elle va devoir apprendre les choses simples de la vie à Snow Fall, la ville natale de ses parents. Privée de son argent et devant s’y rendre incognito, elle va devoir se mêler aux habitants (comprenant Jake Lacy et surtout Andie MacDowell, bougre !) et montrer sa fibre morale.

Richesse est mère de paresse et cupidité engendre vanité. C’est bien connu, les gens riches tournent snob et il est de bon ton de les remettre à leur place, surtout quand ils se fourvoient et ont eux-même conscience que ce qu’ils appellent « profiter de la vie » est très loin du bonheur. Alors forcément, cette fête traditionnelle qu’est Noël est le moment idéal pour se recentrer et faire le point sur sa vie, d’autant plus quand on se confronte à un monde aux intérêts et ambitions totalement opposés. D’un certain point de vue on nous narre encore et toujours l’histoire de Scroodge, mais la différence est qu’ici la personne avait encore moins conscience de ce qu’elle était de par son milieu qui la préservait de la solitude. C’est bien fait, les acteurs sont bons, le doublage français excellent et malgré l’absence d’originalité ça reste une fable attachante et inspirante.

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Man Down

Man Down
2017
Dito Montiel

Vu le parcours absolument sans faute de l’acteur principal du film, contrairement à ce que certains dénués de toute objectivité diraient (affirmer que le quatrième opus d’Indiana Jones est le pire de la saga est une aberration tant chaque volet a une histoire invraisemblable), chacune de ses apparitions sur grand écran suscite la curiosité et l’impatience. Cette fois, on s’attaque à du post-apo.

Ancien soldat de l’armée américaine, Gabriel Drummer (Shia LaBeouf) est l’un des derniers survivants de la Terre, dévastée pour des raisons inconnues (pandémie, guerre ?). Il sillonne les rues d’un monde en ruine avec son meilleur ami et compagnon d’arme, Devin (Jai Courtney), qui l’aide à retrouver sa femme (Kate Mara) et son fils.

Le film se structure en trois parties qui avancent de concert entre l’enrôlement de Gabriel et Devin, le fameux incident à l’origine de tout que tente de comprendre Gary Oldman, et le futur post-apocalyptique dans lequel Gabriel tente de retrouver ses proches. Si la formation initiale manque d’originalité et que l’interrogatoire tarde à dévoiler quoique ce soit, la narration nous happe directement tant le futur dépeint intrigue. On veut savoir ce qu’il s’est passé et comment ça s’est passé. Le film arrive à garder son mystère entier jusqu’à la conclusion grâce à des subterfuges et des non-dits de taille, biaisant la réalité grâce au point de vue apporté. Le spectateur est prit au piège d’un logique implacable et le retournement n’en est que plus beau, sans non plus pouvoir prétendre se hisser au rang des meilleurs twist-ending. En revanche, mieux vaut en savoir le moins possible sur le film avant de le voir, la promo et la plupart des articles se torchant littéralement avec le respect en parlant ouvertement de la fin. Pas de prestation dingue ni d’idées révolutionnaires mais un concept fort avec une narration brillante.

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Loue-moi !

Loue-moi !
2017
Coline Assous, Virginie Schwartz

Dans une société qui est plus dans le paraître que dans l’être, il est parfois plus facile de prétendre avoir que de posséder. Vous vous rendez à un dîné mondain mais ne pas y être accompagné vous fait vous sentir jugé ? À trente ans toujours célibataire et vous ne l’assumez pas lors d’une invitation à un mariage ? Victime d’un de vos propres mensonges, vous vous retrouvez à devoir présenter une personne imaginaire à l’une de vos connaissances ? Pas de soucis, Léa (Déborah François) et Bertille (Alison Wheeler) sont là pour ça. Elles ont toutes deux monté une affaire de location où le produit en question n’est nul autre qu’elles-mêmes. Bien sûr, il n’est pas question de prostitution ou d’escort-girl, elles sont en quelque sorte des actrices qui peuvent prétendre être qui vous voulez. Une affaire encore balbutiante qui ne permet pas de regarder de trop près les clients, et c’est comme ça que sans le savoir Léa va se retrouver à devoir jouer les petites-amies d’un gay qui ne s’assume pas et qui n’est autre que le frère de son amour de jeunesse qu’elle n’a jamais oublié. Une situation on ne peut plus compliquée…

On le savait avant même de s’engager dans le film, mais il n’y a effectivement aucune surprise : derrière le concept faussement original – se faire passer pour quelqu’un d’autre c’est encore plus vieux que le cinéma – se cache une comédie-romantique ultra banale où tout est incroyablement prévisible. Comme on pouvait se l’imaginer, Léa va à nouveau craquer pour son ancien amour mais à cause de son travail patati patata, puis oh mon dieu tu sais tout, enfin presque, mon dieu il a tout découvert, horreur, et finalement tout va bien. C’en est gênant. Heureusement, pour aider à faire passer la pilule, le film peut compter sur un humour relativement efficace et des acteurs charismatiques, avec à la clé deux surprises : un Gad Elmaleh bien gratuit en prof de yoga et surtout un Kev Adams barbu et psychopathe à contre-emploi total, nous faisant nous dire qu’il peut potentiellement être parfois un acteur plutôt correct. Rien de transcendant ou de nouveau à l’horizon, mais c’est un divertissement assez honnête.

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La Fille de Brest

La Fille de Brest
2016
Emmanuelle Bercot

Dans la vie il y a des métiers biens moisis, pas forcément en terme de travail ou de rémunération mais en terme d’impact social et d’image que cela renvoie. Etant donné que les grands groupes pharmaceutiques ont un monopole total en matière de distribution et fixation des prix, mais aussi et surtout avec régulièrement des scandales de produits hautement dangereux délivrés sans véritable contrôle, dire que l’on est huissier ou trafiquant de drogue est plus valorisant que dire que l’on travaille à l’élaboration des médicaments de Sanofi par exemple. Derrière ce titre breton complètement osef se cache en réalité une affaire qui fut beaucoup médiatisée ces dernières années : le Mediator.

Mit sur le marché en 1976 par l’agence Servier, le Mediator fut prescrit à plus de trois cent mille personnes, d’abord pour lutter contre le diabète puis dans un second temps pour pallier à l’absence de satiété chez certaines personnes en situation d’obésité morbide. Bien que cela faisait dix ans que certaines personnes avaient soulevé des questions à propos du médicament, en 2007 une pneumologue de Brest, Irène Frachon (Sidse Babett Knudsen), s’est rendue compte d’une déformation d’une valve du cœur chez une patiente sous traitement du Mediator. Avec l’aide d’un collègue (Benoît Magimel) chercheur dans le domaine, elle va tenter de prouver l’implication du médicament dans les problèmes cardiaques de certains patients.

Oh mon dieu, « le scandale du Mediator » ! Sachant que le médicament était beaucoup prescrit à des personnes en situation d’obésité extrême, avec probablement une espérance de vie ridicule et forcément déjà des problèmes cardiaques à la base, on s’attendait forcément à une hécatombe. Plusieurs centaines de milliers de personnes en l’espace de trois décennies, on pouvait s’attendre à un chiffre qui en impose, mais impossible de dissimuler un rire tonitruant face à une vérité aussi risible : 500 morts. Mais quel médicament miracle ! C’est prodigieux un score aussi faible vu le public visé, et la vraie question du livre sur lequel se base le film (Mediator, combien de morts ?) devrait être « combien de vies sauvées ? ». Plus encore, en terme de coupe-faim et de médicament contre le diabète, y avait-il un vrai médicament palliatif ? Sans quoi d’autres questions nous viendraient suite au retrait du médicament : le retrait du Mediator, combien de morts ?

Pour replacer un peu les choses dans leur contexte, les accidents domestiques représentent 20 000 morts par ans, soit près de 600 000 morts sur la même durée qu’il a fallut au Mediator pour « tuer » quelques 500 patients qui ne partaient déjà pas gagnants. Et même si on élague un peu sur la vague notion d’accident domestique, il y a eu – toujours sur le même laps de temps – plus de trente mille personnes mortes noyées dans leur bain, soit soixante fois plus ! Alors quand un film entier est basé sur un pseudo scandale absolument ridicule et qu’on en fait des caisses, difficile de partager l’engouement pour la justice de la pseudo héroïne. D’ailleurs, sa nominations aux Césars fut une sacrée blague tant la pauvre actrice danoise est médiocre dans ce rôle de mégère psychopathe et narcissique, battant tous les records en matière de sur-jeu et cabotinage. Diantre que ça fait peine à voir… Bref, une histoire qui veut se donner des airs de drame national alors c’est un non-événement absolu, et le personnage principal est totalement insupportable de par l’interprétation catastrophique qui nous est imposée. À l’image des patients gravement atteints par la maladie incapables de bouger, on contemple le film telle une baleine échouée qui gesticule péniblement dans un dernier souffle d’agonie.

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Sacré Père Noël

Sacré Père Noël
1998
Arlene Sanford

En avance sur son temps, Disney livrait un an avant American Pie un teen-movie pur jus dans le genre bon gros délire comique avec une belle romance et de la quête de soi en toile de fond, avec cette fois un style road-trip et pour thème Noël. Échec en salles, le film n’avait amorti que le tiers de son budget à sa sortie aux Etats-Unis, mais fort d’une solide réputation le film a connu une seconde vie depuis et il est vrai que ça se regarde pas mal.

Depuis la mort de sa mère, ne souhaitant pas voir sa belle mère et prétextant d’étudier pour ses partiels, Jake (Jonathan Taylor Thomas) avait réussi à esquiver le Noël en famille plusieurs fois grâce à la fac, mais pas cette année. Face au refus de sa petite amie Allie (Jessica Biel) de le suivre en vacances, souhaitant préserver la tradition familiale, mais surtout de par la promesse de son père de lui donner sa voiture de collection s’il daigne passer les fêtes avec eux, Jake va à contrecœur décider de retourner chez lui pour le réveillon, mais ses escroqueries au bahut vont se retourner contre lui : mécontents d’une prestation, des clients vont le jeter dans le désert californien près du campus, bloqué dans un costume de Père Noël littéralement collé. Seul, sans papiers et sans argent, il va devoir trouver le moyen de traverser tout le pays pour rejoindre sa famille près de New-York. Pour parvenir à ses fins, il va devoir ruser de tout son art.

Le héros du film est très intéressant. Déjà prendre des acteurs de 17 et 16 ans pour jouer des étudiants nous rapproche déjà beaucoup plus de la réalité et ça fait un bien fou par rapport aux abus habituels, mais en prendre un qui compense sa taille par du charisme et de l’éloquence pour le personnage principal, tout en l’affichant avec un sacré morceau, ça montre d’emblée l’envie de Disney de prouver que n’importe qui peut briller, et c’est très fort. Maladroit et naïf, il est aussi roublard et très intelligent, jouant des mots pour parvenir à ses fins, tout en ayant un grand cœur qui fait de son voyage une source d’épanouissement. Traversant tant bien que mal le pays, sa route croisera de nombreuses vies, apportant chacune un enseignement sur la vie et sur soi-même. Un concept pas très original ni spécialement finement développé, mais c’est à la fois beau et divertissant. Partir ce n’est pas fuir, c’est simplement chercher ses réponses ailleurs. Si le film le fait avec candeur, cachant à peine ses facilités, cela n’enlève en rien sa sincérité.

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Jungle

Jungle
2017
Greg McLean

L’homme face à la nature. Bien loin de la survie en territoire hostile, l’homme contemporain se contente de travailler et d’acheter sa nourriture, sa vie ne dépendant plus de la chasse dans un milieu où il n’est qu’un maillon de la chaîne alimentaire, lui-même la proie d’autres prédateurs. Voici donc un retour à l’état sauvage.

Tiré d’une histoire vraie, le film narre l’aventure de Yossi (Daniel Radcliffe), jeune israélien parti découvrir le monde pour une année sabbatique. En quête d’aventure avec deux compagnons de route croisés au gré de son voyage, il va se laisser happer par le récit d’un explorateur leur proposant de découvrir des lieux d’Amazonie inconnus à la biodiversité hors du commun ainsi qu’un village aborigène ne figurant sur aucune carte. Un périple qui s’annonçait mémorable, mais au bout de quelques jours une blessure au pied d’un de ses camarades, Marcus, va couper court à l’excursion : Yossi et son ami Kevin vont continuer en affrontant les rapides sur une barque improvisée tandis que Marcus et le guide vont couper à travers la jungle pour gagner quelques jours et le soigner au plus vite. Seulement face à des courants trop violents et des rochers trop nombreux, le radeau va céder et Yossi et Kevin vont se retrouver séparés, seuls dans une jungle hostile et dangereuse.

Notion très largement perdue bien que profondément ancrée dans nos gènes, la survie n’est que rarement testée par la vie, nous poussant à nous demander occasionnellement ce qu’on serait ou non capable de faire face à l’adversité. Comment trouver de l’eau, de la nourriture, se protéger des intempéries et autres nuisances climatiques comme la température ? Comment peut-on dormir dans un contexte de danger perpétuel ? Quand on suit une rivière la question de l’eau n’est pas un problème dans le cas présent, mais quid du reste ? Autrefois nous étions des super-prédateurs, mais cet instant de tueur est-il toujours lattant ? La mise en pratique est toujours passionnante à regarder et étudier, que ce soit en solitaire ou à plusieurs sur l’océan (L’Odyssée de Pi, Kon-Tiki, Invincible, Au Cœur de l’océan ou All is lost) ou lors d’une traversée terrestre de multiples paysages, allant de l’hiver polaire au désert de Chine comme dans Les Chemins de la liberté. Plus qu’une leçon de courage, c’est avant tout une leçon de vie sur la force de l’esprit sur le corps et la capacité de se surpasser. C’est fort, Daniel Radcliffe est impeccable et le contexte environnemental est original, ne voyant pas d’autres exemples en forêt tropicale. Sans aller jusqu’au degré d’impact d’un Into the wild, le film est un digne représentant du genre qui mériterait d’être une source d’inspiration pour tous.

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De toutes mes forces

De toutes mes forces
2017
Chad Chenouga

D’années en années le constat est de plus en plus amer : c’était mieux avant. Les conditions de travail sont de plus en plus déplorables, les diplômes demandés sont de plus en plus disproportionnés, le chômage bat des records et les offres d’emploi ne font plus rêver personne. Avant même d’entrer dans la vie active la société a déjà écœuré les jeunes, peu enclin à avancer droit dans le mur. À force de gérer le pays n’importe comment et de croire que la croissance est infinie, on a créé ce qu’on appelle la « génération sacrifiée », soit les enfants nés dans les trente dernières années et dont l’avenir est ou s’annonce sombre.

Dans ce climat dépressif et oppressant, le film nous conte la détresse de Nassim (Khaled Alouach), lycéen en première qui va du jour au lendemain tout perdre. Souffrant d’un cancer depuis quelques temps, sa mère va succomber à une erreur de médication et il va se retrouver placé dans un foyer pour jeunes (géré par Yolande Moreau). Incapable d’assumer sa nouvelle vie entouré par les migrants et autres orphelins indésirables, il va continuer de mener une vie normale et cacher sa situation à ses camarades de classe, se terrant dans son mensonge.

Dans la vie plus on fixe de règles et moins on a envie de s’y plier. Le milieu scolaire est l’un des plus structurés et réglementés qui soit, celui du foyer social aussi, alors quand on se retrouve confronté aux deux avec en plus une double vie à gérer, il y a de quoi exploser. Entre une analyse très pertinente de notre société, une vision très éclairée de quelqu’un qui a probablement vécu ce genre d’histoire mais surtout un casting d’une rare justesse, le film est porté par une véracité qui transpire la sincérité. Les personnages ont une authenticité indéniable, leurs histoires personnelles nous touchent et le protagoniste principal a un vrai charisme qui permet de le suivre même quand son comportement déçoit. Mais qui peut se vanter d’avoir toujours prit les bonnes décisions ? Bon là on est pas loin du petit con tête-à-claque, mais vu le contexte on est plus enclin à pardonner. Un film coup de poing sur la jeunesse qui vaut le détour pour sa pertinence à sa justesse.

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La Colle

La Colle
2017
Alexandre Castagnetti

On se plaint du manque de diversité dans le paysage cinématographique français, mais quand exceptionnellement une petite pépite à peu près originale s’y glisse le public s’en détourne, la faute à une presse absolument dégueulasse. Alors oui, le film est un mélange de The Breakfast Club et d’Un Jour sans fin et il fait bien plus que s’en inspirer, mais voir un film de chez nous apporter de jolis messages avec une histoire de boucle temporelle, ça reste assez dingue. Et pitié, ne venez pas me parler de cette infâme bouse de Camille Redouble, gardons un peu de dignité face aux plagiats complètement ratés quand une inspiration soutenue peut trouver sa propre identité.

Mal dans se peau, victime notoire et boulet complet, Benjamin partait déjà perdant en étant un des seuls blancs dans un lycée de banlieue, ayant pour seul ami un fils d’ambassadeur encore plus paumé que lui. Suite à un malentendu complètement mérité quand on est à ce point débile, Benjamin va se retrouver en colle un samedi, entouré des pires cassos sous la surveillance du pire pion possible. Seule lumière dans ce tableau, la belle Leila sur laquelle il fantasme est aussi présente, lui qui faisait justement le vœux d’être avec elle la vieille. Son souhait va justement se réaliser : à chaque fois qu’elle s’éloignera physiquement de lui, le temps remontera en boucle au début de la colle.

Le principe du film est ultra simple et peut être assimilé à n’importe quel film de boucle temporelle, que ce soit Edge of Tomorrow ou un autre : on revit un événement en boucle jusqu’à ce qu’on trouve la solution au plus grand problème de sa vie. Improviser au jour le jour n’est pas évident, et avoir la chance de pouvoir anticiper, analyser et apporter la réponse la plus aboutie possible est le rêve de tout le monde. Et quand on n’est pas un génie plein aux as, le don de prescience est l’alternative toute trouvée. Encore faut-il en faire un bon développement derrière, et même si on n’échappe pas à quelques gags faciles et de gros clichés, le film a trouvé un excellent axe et le pousse admirablement. Les personnages sont très bien écrits, les dialogues ont un vrai impact, le montage est précis et l’achèvement ultime est une brillante leçon d’écriture inspirante. Au fond l’histoire est un peu banale mais le contexte rend l’expérience géniale. Reste un dernier défaut de taille, hormis l’abus monstrueux sur l’age (des acteurs de 25-30 ans pour jouer des lycéens) : l’art du dernier plan (le meilleur exemple qui me vienne en tête sont les deux Sherlock Holmes, des références du genre). Savoir trouver avec justesse le climax précédent le générique de fin n’est pas toujours évident, mais conclure le film sur le dernier plan sur la BD aurait été autrement plus fort que de prolonger inutilement l’intrigue avec la dernière séquence. De bonnes idées, une vraie personnalité pour un divertissement vraiment pas mal, et il n’en aurait pas fallut beaucoup plus pour en faire un grand film.

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