The Legend of Zelda : Breath of the Wild
2017
Nintendo Switch
Porte étendard de la console à sa sortie, bien qu’étant aussi sorti sur WiiU comme Zelda Twilight Princess à son époque sortait sur deux générations de consoles pour porter la suivante, The Legend of Zelda : Breath of the Wild a assurément marqué un tournant dans l’histoire du fameux guerrier hylien protégeant son royaume contre diverses menaces, la plupart du temps Ganon ou Ganondorf. Alors que le monde a les yeux rivés vers sa suite, une première dans cet univers (Majora’s Mask n’étant pas vraiment la suite d’Ocarina of Time, mais plus une réalité alternative), il étant temps de me remettre sérieusement à ce jeu, commencé il y a trois ans, mais lâché en cours de route faute de temps, puis d’envie. On sait tous qu’il est difficile de se remettre à un jeu après une pause. Mérite t-il d’être à ce point porté aux nus ? A t-il à ce point révolutionné la saga ? Tachons de faire une analyse le plus objective possible, en reprenant indépendamment chaque point du titre.
Graphismes : 14/20
On entend dire de partout que la Switch n’a aucune puissance. C’est faux. Elle a une puissance proche de la PS4 de base (dite « FAT »), c’est-à-dire que si un jeu tourne en 1080p sur PS4, il tournera sans souci en 720p sur Switch. Que ce soit dit. Et en prenant en compte les jeux précédente génération sur WiiU, il faut bien avouer qu’en termes de modélisation pure, le jeu est presque moins beau que la version HD de Twilight Princess. C’est bien évidemment la faute au choix du jeu en lui-même, le fléau des quinze dernières années, « l’open world ». Avoir une map à ce point ouverte a un coût, et ne permet de fait pas mieux, Nintendo a vraiment proposé ce qu’ils pouvaient faire de mieux. Le choix initial empêche donc tout éclat technique, autre que celui de permettre une exploration d’un territoire si grand. Mais de fait, à aucun moment on ne peut qualifier le jeu de « beau ». Quelques idées de design sont très bonnes, dans le style ruines anciennes, post-apo rétro, et globalement la direction artistique est à saluer. Pourquoi une note si « basse » alors ? Le concept même du jeu empêche de briller, et au delà de ça, le jeu possède les boss les moins mémorables de la saga depuis Zelda II en 1987, et la mise en scène manque de grandiose. Quelques gros monstres croiseront notre route, mais rien d’incroyable. Pas de boss caché ou secondaire, seulement quatre donjons et boss redondants et trop semblables, notamment les sanctuaires dont certains sont copié-collé, là où chaque Zelda se renouvelait de façon stupéfiante à chaque mythique donjon. Aucun plan ou endroit de l’entièreté de la carte ne m’a ébloui. Une amer déception tant sur les points historiques de la saga la fainéantise est de mise.
Jouabilité : 13/20
Les défauts inhérent de la saga sont de retour. Plus les interactions sont nombreuses, plus les problèmes potentiels s’accumulent, et le titre en regorge. Très généreux sur les possibilités, le jeu en devient vite confus entre les sorts qu’on peine à lancer, la paravoile (système de voile permettant de planer) qui est une tannée par moments, l’arc impossible à manier au stick et qui peut partir en vrille avec le gyroscope selon si la caméra n’en fait qu’aux siennes, l’escalade qui vous fera perdre un temps fou avec toujours cette peur de manquer d’endurance. Tout lister serait interminable, et entre la caméra, la précision des sauts, les techniques d’épées pas toujours évidentes à sortir, la saga est une habituée de ce genre de problèmes, mais là l’effet est décuplé avec toujours plus de possibilités et de touches à confondre, de combinaisons pas naturelles à sortir. Le summum est le cheval, heureusement peu présent et optionnel pendant l’aventure, mais obligatoire à la toute fin, un enfer sur Terre. Mais s’il y a bien une chose atroce introduite ici, c’est tout ce qui entoure le crafting et l’obsolescence. La quantité de rubis demandés pour tout et n’importe quoi est aberrant, difficile d’en récupérer tant vendre des objets est à double tranchant, ne sachant jamais qu’est-ce qui sera nécessaire pour améliorer vos armures. En résulte un inventaire illisible avec des centaines d’objets, tout le temps plein à craquer sans savoir qu’est-ce qui sert à quoi. De même, les épées, arcs et boucliers sont périssables, comprenez qu’une épée cassera tous les dix coups, un bouclier éclatera au bout de 3-4 attaques encaissées, et un arc implosera au bout d’une douzaine de flèches lancées. On passe donc sa vie à se rééquiper, à changer d’équipement toutes les minutes. Une lourdeur infinie, démystifiant tout le côté sacré et épique de l’équipement durement arraché dans des donjons incroyables. L’essentiel de la saga est là, mais tous les ajouts sont néfastes et on s’estomaquera d’à quel point 11 ans avant Twilight Princess faisait tellement mieux, et même Ocarina of Time en 1998 était plus maniable sur la direction des chevaux, c’est dire !
Durée de vie : 08/20
Mes critères ont évolué avec les années. Avant, plus un jeu était long, plus c’était bon. Aujourd’hui, chaque heure jouée doit compter, servir à quelque chose. Les missions annexes, si elles n’ont pas d’enjeux propre ou d’intérêt ludique prononcé, c’est de la perte pure et dure qu’on laissera aux acharnés. Si un jeu est long, il doit le justifier et garder un rythme de qualité tout du long. De fait, un jeu parfait serait un jeu qu’on peut boucler en 15h si on le connait bien, 20-25 sinon ou si on peut / veut prendre son temps, et 40 heures pour du 100%. Pour le prélude, les quatre prodiges et le château final, le jeu pourrait effectivement se boucler en une vingtaines d’heures, mais il faudrait un niveau de jeu phénoménal. Pour espérer s’en sortir, mieux vaut avoir fait au moins une cinquantaine de sanctuaires, et avoir au minimum de l’équipement niveau 3 sous peine de perdre dix cœurs à chaque attaque (5 cœurs avec de l’équipement lvl4). Et pour peu qu’on galère un peu sur certains sanctuaires vraiment contre-intuitifs, impossible d’envisager sérieusement de se rendre au boss final avant 60-70 heures. C’est beaucoup trop, surtout qu’en les phases de scénario n’occupera que 3-4 heures de ce total, une aberration absolue. Pour peu qu’on se lance dans un défi absurde de tout finir à 100%, même avec la soluce à côté, impossible de boucler le tout en moins de 150 heures en étant un joueur normal, ce qui est un non sens incroyable tant cela veut dire se priver de tout autre expérience ludique pendant des mois. Trop de choses à faire, la plupart sans intérêt, et un énorme problème de rythme.
Bande son : 10/20
Certes loin d’égaler le niveau des meilleurs Final Fantasy, la saga Zelda a toujours su avoir des envolées épiques avec des musiques iconiques, surtout Ocarina of Time dont l’histoire était elle-même axée sur un instrument de musique. Ici on a bien quelques musiques jouant sur l’étrange, mais rien d’impactant, et les autres musiques qu’on entendra que trop rarement seront des reprises des thèmes habituels portés depuis les premiers jeux. Pour renforcer le côté « aventure et livré à soi-même », le jeu prend le parti-pris de ne pas mettre de musique sur la carte, donc 99% du jeu ne sera ponctué que par les bruits de l’environnement et les bruitages du jeu. Chacun est libre d’aimer, mais de fait la musique est quasi absente du jeu, et l’expérience sera constamment saccadée avec les aller-retours dans l’inventaire. Un point bien décevant.
Scénario : 04/20
Qui dit aventure ne dit pas forcément un scénario très développé, misant plus sur la richesse de l’univers. Ici Link se réveille après un sommeil de 100 ans pour aucune raison. Les prodiges ont perdu face à Ganon il y a 100 ans, mais Zelda réussissait jusqu’alors à le bloquer dans son château. Ne croyant visiblement pas en Link, au lieu de l’envoyer affronter Ganon il y a 100 ans, elle a préféré donner 100 ans de répit au monde, attendant le dernier souffle de magie en elle avant de laisser Link tenter sa chance. Un monde qui semble ne pas être tellement au courant de tout ça, vivant assez paisiblement malgré la menace qui rôde. L’enjeu final ne semble donc pas être un enjeu pour qui que ce soit, outre calmer les odes (animaux mécaniques géants), et mise à part quelques flashbacks racontant l’histoire d’il y a cent ans, le scénario est d’un vide sans commune mesure. Certes, les Zelda se sont battis sur des récits de princesse à sauver classiques à outrance et des menaces stéréotypées, mais on avait bien plus d’interactions avec les gens, chaque donjon avait des enjeux locaux dans un grand tout bien plus lié et prenant. On revenait souvent aux mêmes villages, notre aventure avait un impact plus immédiat sur ce qui l’entoure. Et que dire de la fin ? Une seule scène de quelques secondes, toujours aussi vide. Aucun sentiment d’accomplissement.
Note Globale : 11/20
N’allons pas jusque là, ce Zelda n’est pas un mauvais jeu, mais c’est assurément un très mauvais Zelda, et peut-être le pire de tous. Le sentiment d’aventure est grand, la carte colossale, et on pourrait s’y perdre 200 heures tellement il y a à faire. Pour beaucoup, cela a visiblement suffit, gens de peu de goût. Comment se satisfaire d’un jeu si répétitif ? Si vide ? Si contre-intuitif ? La moitié des sanctuaires est infaisable sans solution, que ce soit pour les réussir, pour les trouver ou pour les activer. Quant aux noix de Korugu, n’y pensez même pas, même avec la solution, le jeu n’en vaut pas la chandelle. L’histoire du jeu est de loin la plus effacée et la plus vide depuis des décennies, allant jusqu’à copier une grande partie du boss de fin de Twilight Princess sans en avoir le quart de la classe et de l’efficacité. Le système de jeu est brouillon, souvent chaotique, le système d’inventaire est une tannée. La plupart du temps agréable à jouer, les énormes soucis de précision ou d’ergonomie feront rager, quand ce n’est pas cet éternel sentiment qu’il ne se passe rien et que le scénario est d’un vide abyssal. La suite semble corriger quelques défauts, mais la formule restant la même, je passerais mon tour…